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08/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19422

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juin 2005, 19422


Tribunal administratif N° 19422 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 mars 2005 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19422 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo/Etat de Serbie et de Mo

nténégro), de nationalité monténégrine, demeurant actuellement à L- … , tendant principalem...

Tribunal administratif N° 19422 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 mars 2005 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19422 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo/Etat de Serbie et de Monténégro), de nationalité monténégrine, demeurant actuellement à L- … , tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 décembre 2004 déclarant non fondée sa demande en obtention du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 21 février 2005, suite à un recours gracieux du 4 février 2005 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 avril 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 30 mai 2005, Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES s’étant ralliée aux écrits de la partie publique, Maître Valérie DEMEURE n’ayant été pour sa part ni présente ni représentée.

Monsieur … introduisit en date du 6 septembre 2004 une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Monsieur … fut entendu en outre en date 29 novembre 2004 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … par décision du 27 décembre 2004, lui expédiée le 28 décembre 2004, de ce que sa demande est refusée comme non fondée au sens de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire pour ne correspondre à aucun critère de fond défini par la Convention de Genève. Le ministre a en effet constaté que Monsieur … a indiqué lui-

même ne pas avoir subi de persécutions et que des raisons économiques ne sauraient fonder une demande en obtention du statut de réfugié politique car elles ne rentrent pas dans le cadre d’un motif de persécution prévu par la Convention de Genève. Il a ajouté que le fait d’avoir des problèmes avec des personnes qui lui auraient prêté de l’argent ne saurait être retenu dans le cadre de la demande d’asile, étant donné que ces personnes ne sauraient être considérées comme agents de persécution au sens de la prédite Convention.

Par courrier de son avocat daté du 4 février 2005, Monsieur … sollicita le réexamen de sa demande en obtention du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951.

Par une décision datant du 21 février 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a confirmé sa décision initiale du 27 décembre 2004.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 2005, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 27 décembre 2004, ainsi que de celle confirmative du 21 février 2005.

A l’appui de son recours, il expose avoir demandé une première fois l’asile en Allemagne au cours de l’année 1995, que pour pouvoir travailler, il se serait « vieilli d’une année », qu’il serait retourné en 2001 dans son pays « pensant que la situation économique s’était améliorée », et qu’en réalisant que tel n’était pas le cas et « son impossibilité de rembourser ses dettes, il a décidé de tenter sa chance au Grand-Duché de Luxembourg, persuadé qu’il pourrait y travailler ». Il précise qu’il ne cache pas ses motifs économiques à la base de sa demande et il sollicite « l’asile humanitaire ou économique ».

Il reproche au ministre de s’être livré à une erreur manifeste d’appréciation des faits en ce qu’il n’aurait pas pris position par rapport à sa demande visant à se voir accorder un titre de séjour à caractère humanitaire. Il fait valoir à cet égard qu’il se dégagerait de ses déclarations lors de son audition que c’était en vue d’obtenir un travail qu’il est venu au Luxembourg et que partant sa démarche aurait été manifestement étrangère au cadre légal de la Convention de Genève applicable en matière d’asile politique. Dans la mesure où il appartiendrait à l’autorité administrative de déterminer le droit applicable à une requête lui adressée et de statuer en conséquence, il estime qu’en l’espèce cette démarche aurait dû, dans tous les cas, s’accomplir en dehors du cadre légal de la Convention de Genève.

Le délégué du Gouvernement fait valoir à cet égard que Monsieur … a demandé à son arrivée l’enregistrement d’une demande d’asile et non d’une demande d’autorisation de séjour, de sorte qu’on ne saurait reprocher au ministre d’avoir appliqué les seules dispositions légales applicables en matière d’asile. Il estime pour le surplus qu’il aurait incombé au demandeur de faire la démarche de renoncer à sa demande d’asile afin de solliciter en bonne et due forme une autorisation de séjour à titre humanitaire si tel avait été l’objet réel de sa demande.

Au vu de ces divergences quant aux prétentions effectives de Monsieur …, il y a lieu d’analyser, en premier lieu, la démarche de celui-ci auprès des autorités administratives luxembourgeoises.

Il se dégage des pièces versées au dossier que tant au moment de son arrivée au Luxembourg que par la suite, avec l’assistance d’un avocat, Monsieur … a qualifié ses intentions comme tendant à l’octroi du statut de réfugié. En effet, dans le cadre de son recours gracieux, loin de renoncer à sa demande d’asile, il a qualifié explicitement sa demande comme tendant à « l’obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève » sans souffler mot d’une éventuelle demande en obtention d’une autorisation de séjour pour des raisons humanitaires ou l’octroi d’un statut de tolérance, de sorte que le ministre n’était tenu, ni lors de la prise de sa décision initiale, ni lors de la prise de sa décision confirmative sur recours gracieux, de qualifier cette demande au-delà de la qualification expressément revendiquée et confirmée par le demandeur.

En effet, le simple fait d’avoir invoqué lors de son audition uniquement des raisons économiques et humanitaires comme motif à la base de sa demande d’asile, ne saurait suffire pour faire admettre, au-delà de la qualification expressément revendiquée par le demandeur, que celui-ci a en fait voulu introduire une demande en obtention d’un titre de séjour pour raisons humanitaires. A ce titre il y a lieu de distinguer, en effet entre l’objet de la demande et les motifs invoqués.

Dès lors le moyen soulevé par le mandataire du demandeur tendant à voir qualifier sa demande ab initio comme ayant tendu à l’octroi d’une autorisation de séjour est à rejeter.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, une demande en réformation a pu valablement être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises. Le recours en réformation ayant été introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le recours subsidiaire en annulation est partant irrecevable.

Quant au recours contentieux sous examen, le tribunal constate que le demandeur soutient à titre principal que les problèmes par lui invoqués sont d’ordre économique et que sa démarche auprès des autorités luxembourgeoises est étrangère au cadre légal de la Convention de Genève applicable en matière d’asile politique.

Le tribunal ne peut dès lors que constater que les conclusions exposées à titre principal par le demandeur sont en parfaite concordance avec la motivation retenue à la base des décisions litigieuses, de sorte que le recours en réformation sous examen laisse d’être fondé, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner les autres moyens invoqués à son appui.

La procédure devant les juridictions administratives étant essentiellement écrite, le tribunal est appelé à statuer contradictoirement en l’espèce, encore que le demandeur n’était pas représenté à l’audience publique à laquelle l’affaire fut plaidée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable, condamne le demandeur aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 juin 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, M. Sünnen, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 8.6.2005 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19422
Date de la décision : 08/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-08;19422 ?

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