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08/06/2005 | LUXEMBOURG | N°18882

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juin 2005, 18882


Tribunal administratif N° 18882 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 novembre 2004 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formé par la société … s.à r.l., … contre une décision du bourgmestre de la Ville d’Echternach en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18882 du rôle et déposée le 19 novembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société … s.à r.l., établie et ayant son siège

social à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de refus datée...

Tribunal administratif N° 18882 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 novembre 2004 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formé par la société … s.à r.l., … contre une décision du bourgmestre de la Ville d’Echternach en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18882 du rôle et déposée le 19 novembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de refus datée du 5 novembre 2004 du bourgmestre de la Ville d’Echternach de faire droit à sa demande concernant le raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Georges WEBER, en remplacement de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant tous les deux à Diekirch, du 22 novembre 2004 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville d’Echternach ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif en date du 6 décembre 2004 par Maître Roy REDING, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville d’Echternach ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 février 2005 par Maître Roy REDING pour compte de l’administration communale de la Ville d’Echternach et signifié le 18 février 2005 à la société … s.à r.l., par exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître James JUNKER et Maître Pierre BRASSEUR, en remplacement de Maître Roy REDING, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 avril 2005.

Vu les pièces complémentaires versées en cause par les parties ;

Vu le courrier de Maître James JUNKER adressé en date du 4 mai 2005 au tribunal administratif ;

Entendu Maître James JUNKER et Maître Pierre BRASSEUR, en remplacement de Maître Roy REDING, en leurs explications complémentaires à l’audience publique du 11 mai 2005 ;

Vu l’avis du tribunal administratif du 13 mai 2005 prononçant la rupture du délibéré afin de permettre aux parties de prendre position par rapport à la question de la légalité de la décision déférée de refus, compte tenu de certaines dispositions du règlement général sur les bâtisses de la Ville d’Echternach ;

Vu le mémoire additionnel déposé au greffe du tribunal administratif en date du 31 mai 2005 par Maître James JUNKER au nom de la demanderesse, notifié le même jour au mandataire de l’administration communale de la Ville d’Echternach ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître James JUNKER et Maître Pierre BRASSEUR, en remplacement de Maître Roy REDING, en leurs plaidoiries complémentaires à l’audience publique du 1er juin 2005.

________________________________________________________________________

La société … s.à r.l., ci-après dénommée « la société … », déposa en date du 18 août 2003, par l’intermédiaire du bureau d’ingénieur … s.a. auprès du bourgmestre de la Ville d’Echternach une demande tendant à voir raccorder le site de la société … à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach.

Par courrier recommandé du 11 novembre 2003, le mandataire de la Ville d’Echternach adressa au bureau d’ingénieur … s.a. une décision de refus rejetant l’autorisation sollicitée.

La société … fit introduire par requête du 10 février 2004 contre cette décision de refus datée du 11 novembre 2003 un recours tendant principalement à sa réformation et subsidiairement à son annulation, recours qui se solda par un jugement du tribunal administratif du 21 juin 2004 (n° 17567 du rôle) annulant la décision déférée.

Le bourgmestre de la Ville d’Echternach, ci-après « le bourgmestre », adressa en date du 5 novembre 2004 au mandataire de la société … une nouvelle décision de refus libellée comme suit :

« En réponse à votre courrier m'adressé en nom et pour compte de votre mandante, la société … ayant son siège à L - 9283 Diekirch, je suis au regret de vous informer que je n'accorde pas l'autorisation sollicitée tendant à obtenir le permission d'établir un raccordement aux réseaux publiques de l'eau potable et de la canalisation.

Le terrain de votre mandante se trouve en zone extérieure au périmètre d'agglomération suivant le PAG de la Ville d'Echternach.

L'article 10.2 du règlement général sur les bâtisses du 13 janvier 1967 stipule que dans cette zone « sont interdites toutes les constructions à l'exception de celles qui sont destinées à l'exploitation agricole. » Partant toutes les constructions qui s'y trouvent ont été érigées de façon illégale et sans autorisation.

Le présent refus est susceptible d'un recours en annulation devant le Tribunal Administratif de et à Luxembourg. Ce recours doit être intenté par ministère d'avocat dans les trois mois de la notification de la présente au moyen d'une requête à déposer au secrétariat du Tribunal Administratif ».

C’est contre cette décision de refus du 5 novembre que la société … a fait introduire par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 novembre 2004 un recours tendant à sa réformation, sinon à son annulation.

A l’appui de son recours, la demanderesse fait plaider que le refus lui aurait été opposé à tort, les constructions présentes sur le site et destinées à être raccordées à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach étant légales, car érigées et exploitées antérieurement à l’adoption par la Ville d’Echternach de son règlement sur les bâtisses, à savoir avant 1967.

Elle souligne par ailleurs disposer de diverses autorisations lui délivrées par les autorités gouvernementales, à savoir une permission de cours d’eau délivrée par le ministre de l’Agriculture, une autorisation du ministre de la Justice d’exploiter un dépôt d’explosifs, une seconde autorisation du même ministre relative à des réservoirs souterrains de gazoil et à deux pompes, une autre autorisation du même ministre portant sur l’exploitation d’un réservoir à bitume, d’une pompe et d’un mélangeur et enfin une autorisation, toujours du ministre de la Justice, autorisant une installation de concassage, une bande transporteuse, une installation de criblage, un compresseur et dix moteurs électriques, de sorte que les installations présentes sur son site ne sauraient être considérées comme illégales.

Elle en conclut que la décision critiquée manquerait en fait et en droit et devrait par conséquent être réformée, le tribunal administratif étant invité à accorder l’autorisation sollicitée, sinon et à titre subsidiaire être annulée.

La partie défenderesse résiste à cette demande en soulevant in limine litis l’irrecevabilité du recours, au motif que la même demande aurait été introduite à plusieurs reprises et que le raccordement sollicité aurait été refusé à plusieurs reprises.

Elle insiste à ce sujet sur le fait que la société … aurait déjà introduit en date du 15 mai 1992 une demande tendant à obtenir une conduite d’eau, demande rejetée par décision du 1er octobre 1992, ainsi qu’une seconde demande à une date non précisée, demande également rejetée par décision datée du 28 juillet 2000.

Elle en conclut que la décision déférée serait une décision purement confirmative de deux décisions antérieures non susceptible de recours.

Quant au fond, l’administration communale de la Ville d’Echternach, ci-après « l’administration communale », fait plaider que le site … serait situé en « zone verte » aux termes du plan d’aménagement général (« PAG ») de la Ville d’Echternach, zone qui prohiberait l’installation de toute activité industrielle ou commerciale, de sorte qu’un administré ne saurait prétendre à obtenir le raccordement aux réseaux publics d’eau potable et de canalisation d’immeubles non autorisables sur base du prédit PAG.

L’administration communale en déduit que si elle peut et doit refuser le raccordement d’un immeuble projeté non encore autorisé, elle « peut et doit a fortiori refuser un tel raccordement pour des bâtisses construites illégalement » et se prévaut à ce sujet d’un arrêt de la Cour administrative du 8 juillet 2003 (n° 16041C du rôle) qui aurait constaté l’illégalité des installations de la société ….

Quant à la recevabilité :

Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière d’urbanisme, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit par ailleurs à titre principal.

Le recours en annulation, introduit en ordre subsidiaire, est pour sa part recevable en la pure forme.

En ce qui concerne la recevabilité du recours en annulation ratione temporis, l’article 13 alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives dispose que, « sauf dans les cas où les lois ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance ».

Si en l’espèce, le recours en annulation tel que dirigé contre la décision de refus du 5 novembre 2004 a été déposé a priori en temps utile au greffe du tribunal administratif, la partie défenderesse soulève cependant son irrecevabilité pour avoir été dirigé contre une décision purement confirmative prise sur base d’un recours gracieux lui-même dirigé contre une décision de refus confirmative d’un premier refus daté de 1992.

Or, une nouvelle décision prise sur base d’une demande réitérée, en dehors du délai de recours contre une décision antérieure n’est pas distincte de cette dernière et n’ouvre ainsi pas de nouveau délai de recours, dès lors que la nouvelle décision confirme purement et simplement la décision antérieure, à moins que la décision confirmative est basée au moins partiellement sur des éléments nouveaux à l’égard desquels l’administration prend position (trib. adm. 18 juin 1997, Pas. adm. 2004, V° Procédure contentieuse, n° 113, p. 575) ou encore si l’administration procède au réexamen du dossier notamment moyennant des mesures d’instruction supplémentaires (cf. trib. adm. 7 mai 1997, Pas. adm. 2004, V° Procédure contentieuse, n° 114, p. 575 et autres références y citées) ou enfin si la décision est intervenue à la suite d’une demande faisant état de circonstances nouvelles.

Force est cependant de constater au vu des pièces versées en cause que si la société … a certes poursuivi à intervalles réguliers un échange de correspondance avec l’administration communale au sujet du raccordement de ses installations aux infrastructures publiques, tous les courriers adressés à l’administration communale n’avaient pas le même objet que la dernière demande en date, à savoir celle du 18 août 2003, rencontrée par la décision de refus du 5 novembre 2004 actuellement déférée au tribunal.

En effet, le courrier du 15 mai 1992 cité par la défenderesse n’a pas pour objet de demander le raccordement litigieux, mais se limite à s’enquérir auprès de l’administration communale des conditions à remplir pour obtenir une conduite d’eau, de sorte que ce courrier est à considérer comme demande d’informations et non comme demande en autorisation.

Si par la suite la société … a adressé en date du 1er février 1999 une demande expresse tendant à se voir accorder le raccordement à la canalisation ainsi qu’au réseau d’eau potable, demande rencontrée par le refus de l’administration communale du 28 juillet 2000, il y a lieu de retenir que si cette première demande du 1er février 1999 a le même objet que celle subséquente du 18 août 2003, cette dernière repose néanmoins sur de nouveaux éléments, à savoir sur les autorisations entre-temps délivrées à la société … dans le cadre de la législation sur les établissements classés et dans celui de la législation relative à la protection de l’environnement et des ressources naturelles, ainsi que sur le prédit arrêt de la Cour administrative du 8 juillet 2003 (n° 16041C du rôle) ayant confirmé ces mêmes autorisations étatiques.

Il s’ensuit que la décision de refus du 5 novembre 2004 actuellement déférée au tribunal, rejetant la dernière demande en date, à savoir celle du 18 août 2003, n’est pas à considérer comme décision de refus purement confirmative, cette décision ayant, pour arriver certes à un résultat identique à celui de la décision de refus antérieure, dû implicitement, mais nécessairement écarter de nouveaux éléments.

Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité est écarter, de sorte que le recours en annulation, déposé dans le délai de la loi, est recevable.

Avant de pouvoir procéder à l’examen du bien-fondé du recours, le tribunal est encore appelé à examiner le moyen soulevé oralement à l’audience publique du 1er juin 2005 par le mandataire de l’administration communale tendant à voir écarter le mémoire additionnel déposé par la société … en date du 31 mai 2005 pour avoir été déposé tardivement.

S’il est vrai que le tribunal dans son avis adressé aux parties en date du 13 mai 2005 les avait invitées à prendre position sur différentes questions sous forme de mémoire additionnel à déposer au plus tard le 30 mai 2005 au greffe du tribunal administratif, il échet néanmoins de constater que le délai y indiqué ne l’est pas sous peine de forclusion, tout comme la partie défenderesse est restée en défaut de faire état d’une quelconque atteinte à ses droits par le dépassement d’un seul jour du délai en question.

Il s’ensuit que le moyen relatif à la tardiveté du mémoire additionnel déposé par la société … est à rejeter.

Quant au fond :

Force est de constater que la décision litigieuse, concernant le raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable du site de la demanderesse, est motivée par la double affirmation que, d’une part, la zone accueillant le site de la société … interdirait « toutes les constructions à l'exception de celles qui sont destinées à l'exploitation agricole », et, d’autre part, que les installations de la société demanderesse, destinées à bénéficier des raccordements sollicités, s’y trouveraient « érigées de façon illégale et sans autorisation ».

La partie défenderesse a réitéré cette motivation dans son mémoire en réponse, en soulignant que tant les installations existantes que les raccordements souhaités seraient contraires au PAG et en se référant au prédit arrêt de la Cour administrative du 8 juillet 2003.

S’il est vrai que dans cet arrêt la Cour administrative, saisie de la question de la légalité d’autorisations délivrées à la société … dans le cadre de la législation sur les établissements classés et dans celui de la législation relative à la protection de l’environnement et des ressources naturelles, a retenu que les installations existantes sur le site … n’ont pas de caractère légal, la Cour a cependant induit cette constatation du fait qu’il ne ressortait pas du dossier lui soumis que lesdits immeubles aient été construits sous le couvert d’un permis de construire.

Or, il ressort des pièces actuellement soumises au tribunal par la société …, et en particulier d’un plan daté du 19 février 1960, non versé antérieurement, que le seul immeuble destiné à bénéficier des raccordements sollicités, à savoir un bâtiment administratif, existait déjà à l’époque de la confection de ce plan, c’est-à-dire avant 1967.

Il ne résulte par ailleurs pas des pièces versées en cause par l’administration communale que ce site en particulier, et le territoire de la Ville d’Echternach en entier aient à cette époque déjà été couverts par un plan d’aménagement général soumettant toute construction à l’obtention préalable d’une autorisation de construire. Au contraire, il ressort des documents versés en cause par l’administration communale que le premier règlement sur les bâtisses, respectivement plan d’aménagement général de la Ville d’Echternach, a fait l’objet d’un premier vote en date du 13 janvier 1967, c’est-à-dire postérieurement à l’érection du bâtiment administratif précité.

Il s’ensuit qu’en l’état du dossier tel que soumis actuellement au tribunal les constructions présentes sur le site et destinées à être raccordées à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach à travers la demande du 18 août 2003 doivent être considérées comme légales, pour avoir été érigées et exploitées antérieurement à l’adoption par la Ville d’Echternach de son règlement sur les bâtisses, à savoir avant 1967.

Le tribunal tient à ce sujet à relever que l’article 15-1 du règlement sur les bâtisses de la Ville d’Echternach (« Rb »), intitulé « Constructions existantes », entérine d’ailleurs expressément la légalité, sous certaines conditions, des constructions existantes au moment de l’entrée en vigueur de ce même règlement sur les bâtisses :

« Les constructions existantes qui ne sont pas conformes aux dispositions du présent programme, peuvent être conservées et entretenues sous réserve de l'application des réglementations spéciales visant la conservation des immeubles telles que : la réglementation concernant les immeubles frappés de la servitude d'alignement, celle des immeubles menaçant ruine ou des immeubles insalubres.

Ces constructions ne peuvent être reconstruites, surélevées, agrandies ou transformées sans se soumettre aux nouvelles règles.

Lorsque les constructions édifiées antérieurement à la mise en vigueur du présent règlement, sont de nature à nuire à la salubrité des constructions nouvelles à établir sur les fonds voisins, la délivrance de l'autorisation de bâtir concernant ces constructions nouvelles peut être subordonnée à des modifications spéciales.» Il s’ensuit que contrairement à ce qui est retenu dans la décision de refus déférée, les constructions existantes sur le site … et érigées avant 1967 sont non seulement légales, mais peuvent encore être actuellement conservées et entretenues, voire agrandies ou transformées.

Il en résulte par ailleurs que ces constructions existantes conservent leur régularité en dépit du classement actuel de la zone ( « …qui ne sont pas conformes aux dispositions du présent programme… »), de sorte qu’en ce qui concerne le statut des constructions existantes, l’actuel classement de la zone les accueillant en « zone extérieure au périmètre » réservée à l’exploitation agricole est indifférent.

En ce qui concerne le motif de refus tiré du fait que les travaux de raccordement seraient contraires à l’affectation de la zone telle qu’actuellement définie par le PAG, force est de constater que le terrain devant accueillir les travaux en question est situé dans la « zone extérieure au périmètre d’agglomération » régie par l’article 10-2 Rb, aux termes duquel « dans cette zone sont interdites toutes les constructions à l’exception de celles qui sont destinées à l’exploitation agricole (…) ».

Il convient dès lors d’analyser si la réalisation des travaux projetés, à savoir le raccordement du site de la société … à la canalisation et au réseau d’eau potable, sont effectivement prohibés à cet endroit, ou, au contraire, peuvent bénéficier d’une autorisation.

La question des autorisations est régie dans le règlement sur les bâtisses de la Ville d’Echternach par l’article 13-2 (« Obligation de l’autorisation de bâtir ») libellé comme suit :

« Quiconque désire entreprendre une construction à usage d’habitation ou autre, doit au préalable être en possession d’une autorisation de bâtir.

Cette obligation incombe tant aux Services publics et concessionnaires de Services publics de l’Etat et des Communes qu’aux personnes privées.

La même autorisation est exigée pour les clôtures, les murs de clôture, enduits de façade, les modifications extérieures apportées aux constructions existantes, les reprises de gros-oeuvre, les surélévations, les travaux de démolition de bâtiments et de murs existants, ainsi que pour les travaux entraînant une modification de la distribution des bâtiments sur des points visés par les règlements sanitaires et le programme d'aménagement. (…) ».

Il résulte de cette disposition qu’une autorisation de bâtir est requise « pour les travaux entraînant une modification de la distribution des bâtiments sur des points visés par les règlements sanitaires ( … ) », travaux comprenant tous travaux de raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable publics (voir trib. adm. 21 juin 2004, n° 17567, www.ja.etat.lu).

Il résulte cependant également de cette disposition que le législateur communal a entendu opérer une distinction entre deux situations différentes, la première, régie par l’alinéa 1er de l’article 13-2 précité, concernant les «constructions », à usage d’habitation ou autre, et la seconde, relative à divers travaux, régie par l’alinéa 3 du même article.

Il s’ensuit que la notion de « construction » au sens du règlement sur les bâtisses sous analyse concerne des bâtiments, mais ne couvre pas l’exécution de travaux, et notamment ceux « entraînant une modification de la distribution des bâtiments sur des points visés par les règlements sanitaires ».

Cette analyse est corroborée par le libellé explicite de l’article 7.4. du projet de plan d’aménagement général de la Ville d’Echternach actuellement soumis à la procédure légale d’approbation, et versé aux débats par l’administration communale, aux termes duquel « sont considérées comme constructions dans le cadre du présent règlement sur les bâtisses toute construction publique ou privée servant à abriter des hommes, des animaux ou des choses ainsi que toutes les parties des immeubles se situant tant au-

dessus qu'en dessous du niveau de l'axe de la voie desservante (…) ».

Par conséquent, la modification demandée par la société …, consistant en une adaptation du système sanitaire existant, nécessitant le raccordement de son site au réseau public d’égouts et d’eau potable, si elle est sujette à l’obligation d’obtenir préalablement une autorisation de bâtir, ne constitue en revanche pas une construction au sens du règlement sur les bâtisses en général et au sens du prédit article 10-2 Rb en particulier, de sorte que l’affection de la « zone extérieure au périmètre d’agglomération », qui interdit toute construction non destinée à l’exploitation agricole, ne saurait lui être opposée.

C’est partant à tort que le bourgmestre a refusé sur base de l’article 10-2 Rb à la société … l’autorisation de procéder au raccordement de son site aux infrastructures publiques d’égout et d’eau potable, de sorte que la décision de refus déférée du 5 novembre 2004 encourt l’annulation.

La demanderesse réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 € sur base de l’article 240 du Nouveau Code de procédure civile.

Outre le fait que la base légale d’une telle demande se situerait dans l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, force est de constater que les conditions légales ne sont pas remplies en l’espèce, de sorte qu’il y a lieu de rejeter cette demande.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié;

partant annule la décision déférée et renvoie l’affaire devant le bourgmestre de la Ville d’Echternach en prosécution de cause ;

rejette la demande en obtention d’une indemnité de procédure formulée par la société … ;

condamne l’administration communale de la Ville d’Echternach aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 juin 2005 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 10


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18882
Date de la décision : 08/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-08;18882 ?

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