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08/06/2005 | LUXEMBOURG | N°18679,19195

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juin 2005, 18679,19195


Tribunal administratif Nos 18679 et 19195 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 30 septembre 2004 et 19 janvier 2005 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formés par les époux … et …, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Feulen en présence de Madame XXX, … en matière de permis de construire

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 18679 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 septembre 2004 par Maître Patrick GOERGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre

des avocats à Luxembourg, au nom des époux …, …, et …, …, demeurant ensemble à L- …, ten...

Tribunal administratif Nos 18679 et 19195 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 30 septembre 2004 et 19 janvier 2005 Audience publique du 8 juin 2005 Recours formés par les époux … et …, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Feulen en présence de Madame XXX, … en matière de permis de construire

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 18679 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 septembre 2004 par Maître Patrick GOERGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux …, …, et …, …, demeurant ensemble à L- …, tendant à l’annulation du permis de construire délivré en date du 26 mai 2004 par le bourgmestre de la commune de Feulen à Madame XXX, demeurant à L-…, portant sur la construction d’un poulailler sur un terrain sis à … , sous condition notamment de la démolition préalable d’un hangar existant sur les lieux ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch, du 6 octobre 2004 portant signification de ce recours à l’administration communale de Feulen, ainsi qu’à Madame XXX ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 décembre 2004 par Maître Jean-Marie ERPELDING, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de l’administration communale de Feulen ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse à Maître Patrick GOERGEN ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 janvier 2005 par Maître Patrick GOERGEN au nom des époux … et … ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Jean-Marie ERPELDING, ainsi qu’à Maître Lucien WEILER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, mandataire de Madame XXX ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 janvier 2005 par Maître Lucien WEILER au nom de Madame XXX ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 24 janvier 2005 portant notification de ce mémoire en réponse à Maîtres Patrick GOERGEN et Jean-Marie ERPELDING ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 février 2005 par Maître Jean-Marie ERPELDING au nom de l’administration communale de Feulen ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en duplique à Maîtres Patrick GOERGEN et Lucien WEILER ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision déférée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Patrick GOERGEN, Jean-

Louis UNSEN, en remplacement de Maître Jean-Marie ERPELDING, et Daniel BAULISCH, en remplacement de Maître Lucien WEILER, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 février 2005 ;

Vu l’avis de rupture du délibéré du 28 février 2005 ;

Vu le mémoire déposé en date du 7 avril 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie ERPELDING au nom de l’administration communale de Feulen ;

Vu les actes d’avocat à avocat du 6 avril 2005 portant notification de ce mémoire à Maître Patrick GOERGEN et Lucien WEILER ;

Vu le mémoire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 4 mai 2005 par Maître Patrick GOERGEN au nom des demandeurs ;

Vu les actes d’avocat à avocat du 4 mai 2005 portant notification de ce mémoire à Maîtres Jean-Marie ERPELDING et Lucien WEILER ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 19195 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 janvier 2005, par Maître Patrick GOERGEN, au nom des époux … et …, préqualifiés, tendant à l’annulation de la décision implicite de rejet de l’administration communale de … compte tenu du silence gardé par la commune durant plus de trois mois suite au recours gracieux par eux introduit le 20 juillet 2004 à l’encontre de l’autorisation de construire précitée du 26 mai 2004 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Georges WEBER en remplacement de l’huissier de justice Alex MERTZIG, les deux demeurant à Diekirch, du 28 janvier 2005 portant signification de ce recours à l’administration communale de Feulen, ainsi qu’à Madame XXX ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 avril 2005 par Maître Jean-Marie ERPELDING au nom de l’administration communale de Feulen ;

Vu les actes d’avocat à avocat du 6 avril 2005 portant notification de ce mémoire en réponse à Maîtres Patrick GOERGEN et Lucien WEILER ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 4 mai 2005 par Maître Patrick GOERGEN au nom des époux … et … ;

Vu les actes d’avocat à avocat du 4 mai 2005 portant notification de ce mémoire en réplique à Maîtres Jean-Marie ERPELDING et Lucien WEILER ;

I. + II.

Vu les pièces versées au dossier et notamment l’autorisation de construire déférée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Patrick GOERGEN, Jean-

Louis UNSEN, en remplacement de Maître Jean-Marie ERPELDING et Paolo DA SILVA, en remplacement de Maître Lucien WEILER, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er juin 2005.

Considérant que par autorisation de construire référencée sous le numéro 17/2004 du 26 mai 2004, le bourgmestre de la commune de Feulen a accordé à Madame XXX l’autorisation pour la construction d’un poulailler sur un terrain sis à … , inscrit au cadastre de la commune de Feulen, section … sous le numéro …., sous les conditions particulières y plus amplement émargées dont celle de démolir le vieux hangar existant, érigé sans autorisation, avant la construction du poulailler et de construire le poulailler en respectant notamment les reculs définis au plan de situation joint à ladite autorisation ;

Que par courrier du 29 juin 2004 les époux … et …, voisins directs du terrain devant accueillir le poulailler en question, se sont adressés à l’administration communale de Feulen afin d’obtenir copie de l’autorisation précitée du 26 mai 2004 tout en s’étonnant de ne pas avoir été avertis préalablement à la prise de décision conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables ;

Qu’une copie de l’autorisation de bâtir en question a été délivrée au mandataire des époux …-… par courrier du 1er juillet 2004, entré en son étude le 5 juillet suivant ;

Que par courrier du 20 juillet 2004 ledit mandataire s’est adressé, derechef, au bourgmestre et aux échevins de la commune de Feulen en sollicitant le retrait de l’autorisation de construire précitée du 26 mai 2004, au motif que le plan de situation joint ne correspondrait pas à la situation in situ, tout en se référant pour le surplus à la motivation résultant de ses réclamations antérieures ;

Considérant que par requête déposée en date du 30 septembre 2004, inscrite sous le numéro 18679 du rôle, les époux … et … ont fait introduire un recours en annulation dirigé contre l’autorisation de bâtir précitée du 26 mai 2004 ;

Considérant que par requête déposée en date du 19 janvier 2005, les mêmes époux … et … ont fait introduire un recours en annulation, inscrit sous le numéro 19195 du rôle, dirigé contre la décision de refus implicite se dégageant du silence gardé par la commune durant plus de trois mois suite au recours gracieux par eux introduit en date du 20 juillet 2004 à l’encontre de l’autorisation de bâtir précitée du 26 mai 2004 ;

Considérant qu’il est patent que les deux décisions déférées sont connexes quant à leur objet en ce qu’elles portent l’une sur l’autorisation de bâtir déférée et l’autre sur le refus implicite se rapportant au recours gracieux introduit y relativement, de sorte que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, il convient de joindre les deux rôles pour les toiser par un seul et même jugement ;

Considérant que la commune de Feulen, rejointe par Madame XXX, de conclure à l’irrecevabilité du recours inscrit sous le numéro 18679 du rôle pour raison de tardiveté étant donné que les demandeurs auraient déjà pris utilement connaissance de l’autorisation déférée dès le 10 juin 2004, sinon vers la mi-juin 2004 ;

Que d’un côté l’existence même de l’autorisation en question résulterait d’un courrier du mandataire de Madame XXX adressé au mandataire des demandeurs en date du 10 juin 2004 ;

Que d’un autre côté il résulterait d’une attestation de témoignage versée, émanant de la secrétaire communale de Feulen que celle-ci avait non seulement expliqué vers la mi-juin 2004, par téléphone, les clauses et conditions essentielles de l’autorisation querellée aux demandeurs actuels, mais qu’également la semaine après, la demanderesse … se serait présentée à l’administration communale où elle aurait pu consulter le dossier intégral et où à nouveau tous les éléments essentiels de l’autorisation lui auraient été explicités par la secrétaire communale ;

Que la commune de conclure que pour le cas où cette attestation ne serait pas admise il y aurait lieu d’entendre l’attestante en tant que témoin concernant les faits de prise de connaissance par les demandeurs de la décision déférée à partir de la mi-juin 2004 ;

Que tandis que les demandeurs estiment que leur courrier du 20 juillet 2004 serait à considérer comme recours gracieux interrompant les délais, la commune, rejointe par Madame XXX, d’estimer qu’à défaut de moyens produits à l’appui dudit courrier, ce dernier ne saurait être qualifié de recours gracieux ;

Considérant que le recours gracieux se définit à la base comme un recours administratif, non contentieux et non formellement prévu par un texte, porté devant l’autorité même qui a pris la décision ;

Qu’en tant que tel, le recours gracieux n’est soumis à aucune condition de capacité ni d’intérêt et le requérant peut invoquer tous moyens de droit, de fait, d’équité ou d’opportunité, pour exercer le recours contre tout acte émanant d’une autorité publique, exception faite des actes juridictionnels (Auby et Drago, Traité de contentieux administratif, T. 1er, 1962, n° 24, p. 28) (cf. trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17971 du rôle, www.ja.etat.lu) ;

Considérant que la seule condition à laquelle est soumise le recours gracieux est l’existence d’un litige entre l’administration et l’administré, étant donné que les requêtes adressées à l’administration en dehors de toute contestation n’entrent pas dans cette notion : qu’il n’y a pas de recours gracieux si le requérant ne conteste pas la validité ou l’opportunité d’un acte administratif, lorsque notamment il demande à l’administration, en l’absence d’un acte antérieur, de prendre position sur ses prétentions (op. cit. n° 22, p.

27).

Qu’ainsi, les pouvoirs de l’autorité saisie peuvent varier selon les recours et aboutir tantôt à l’abrogation de l’acte critiqué, à sa révocation ou à son retrait, ou encore à son annulation ou réformation (op. cit. n° 25, p. 29) ;

Considérant que force est au tribunal de retenir à la lecture du courrier précité du 20 juillet 2004 que celui-ci tend essentiellement au retrait de l’autorisation de construire délivrée tout en renvoyant pour le surplus, quant à sa motivation, à des réclamations antérieures de la part des époux …-… en relation avec l’existence d’un poulailler sur place ;

Qu’il s’ensuit que ledit courrier du 20 juillet 2004 est à qualifier de recours gracieux dirigé contre l’autorisation de bâtir délivrée par le bourgmestre de la commune de Feulen ;

Que dès lors l’exception de tardiveté invoquée est à écarter, le recours gracieux du 20 juillet 2004 ayant été valablement introduit dans le délai de recours contentieux de trois mois, le permis de construire critiqué datant du 26 mai 2004 ;

Que dès lors il n’y a point besoin de pousser plus loin l’analyse du point de départ du recours contentieux en question, ni a fortiori de statuer sur le mérite de l’attestation testimoniale versée et de l’offre de preuve par témoignage formulée ;

Considérant que par ailleurs il résulte de la combinaison des dispositions de l’article 4 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et 13 (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédures devant les juridictions administratives, que ce n’est que lorsqu’un délai de trois mois s’est écoulé sans qu’il ne soit intervenue aucune décision, suite à l’introduction d’un recours gracieux, qu’une partie intéressée peut considérer son recours comme rejeté et se pourvoir devant le tribunal administratif contre une décision de refus implicite en découlant ;

Qu’à la date d’introduction du premier recours contentieux, le 30 septembre 2004, ni le délai précité de trois mois ne s’était écoulé, ni une décision explicite afférente du bourgmestre intervenue, de sorte que le recours gracieux n’était pas encore vidé ;

Considérant que si dès lors le recours contentieux sous analyse déposé le 30 septembre 2004 l’a été parallèlement avec le recours gracieux introduit le 20 juillet 2004, non encore vidé à cette date, cette circonstance n’est cependant pas de nature à conditionner directement la recevabilité du recours contentieux dont le dépôt n’a pas été rendu prématuré de ce fait (trib. adm., 7 mai 2001, n° 12071, confirmé par arrêt du 4 décembre 2001, n° 13592C, Pas. adm. 2004, V° Procédure contentieuse, n° 231, p. 599, trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17971 du rôle, précité) ;

Que le second recours n’est pas critiqué quant à sa recevabilité ratione temporis ;

Considérant que la commune, partie défenderesse, rejointe par Madame XXX, tierce intéressée, quant au premier recours en date, soulève encore l’irrecevabilité des deux recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs ;

Qu’elles exposent que la simple proximité de situation ne constituerait qu’un indice pour établir l’intérêt à agir et qu’en l’espèce un simple poulailler de taille réduite tel celui litigieux, abritant un nombre limité de poules et d’oies ne comporterait aucun inconvénient pour les voisins, même directs dans l’hypothèse vérifiée de l’espèce où il se serait agi de régulariser une situation antérieure pré-existante illégale ;

Considérant qu’il est constant que le terrain des demandeurs est contigu à celui devant recueillir le poulailler sous autorisation déférée et que les demandeurs ont une vue directe sur le terrain et le poulailler en question ;

Que dès lors, compte tenu des circonstances de l’espèce, eu égard aux éléments de proximité se dégageant du dossier concernant la situation des lieux en pleine localité de …, il convient de retenir que les demandeurs disposent d’un intérêt suffisant à agir pour voir contrôler la légalité des décisions par eux déférées, notamment au regard des exigences de la procédure administrative non contentieuse par eux mises en avant concernant plus particulièrement l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, étant entendu que l’intérêt à agir ne dépend pas du sérieux des moyens invoqués à l’appui du recours, dont l’analyse ne sera faite que dans le cadre de l’examen au fond (trib. adm.

25 octobre 2001, n° 12415 du rôle, Pas. adm., V° Procédure contentieuse, n° 2, page 551 et autres décisions y citées) ;

Considérant que les recours ayant pour le surplus été introduits suivant les formes prévues par la loi, ils sont recevables ;

Considérant qu’au fond les demandeurs invoquent comme seul moyen à l’appui de leur recours inscrit sous le numéro 18679 du rôle, une violation de la disposition de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, en ce que l’autorité de décision ne les aurait pas mis en mesure de faire valoir leurs moyens en tant que tiers intéressés avant la prise de la décision déférée – l’autorisation de bâtir du 26 mai 2004 – étant donné que s’ils avaient pu faire utilement valoir leur point de vue et présenter leurs observations préalablement à la prise de décision par le bourgmestre, ils auraient pu faire valoir des éléments concrets qui auraient été de nature à conduire l’administration communale de Feulen à prendre une décision différente de celle actuellement attaquée ;

Que les demandeurs d’indiquer qu’ils auraient pu produire les documents montrant que le plan de situation annexé à la demande de construire et faisant partie intégrante de la décision attaquée, ne répondrait pas à la situation concrète sur le terrain ;

Qu’ils énoncent à ce sujet qu’il serait de jurisprudence qu’il incombe à l’autorité chargée de délivrer un permis de construire de contrôler la conformité d’un projet aux règles du code civil concernant les distances à respecter entre les constructions ;

Qu’à travers le mémoire en réplique déposé dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 18679 du rôle, les demandeurs de solliciter un jugement séparé sur le problème de la recevabilité du premier recours, déclarant se réserver le droit de prendre position ultérieurement quant au fond, sur le vu notamment des moyens y relatifs à soulever par la partie défenderesse ;

Considérant que d’après son avis de rupture du délibéré du 28 février 2005, le tribunal d’indiquer que pour l’instruction au fond du recours inscrit sous le numéro 18679 du rôle, les parties étaient appelées à observer les mêmes délais que ceux se dégageant des dispositions légales applicables concernant le recours inscrit sous le numéro 19195 du rôle, afin de permettre une instruction parallèle de nature à voir toiser les deux recours ensemble dans les meilleurs délais ;

Considérant qu’à l’appui de leur recours inscrit sous le numéro 19195 du rôle, les demandeurs de reprendre à l’identique leur argumentaire déployé à l’appui de leur premier recours intenté, tout en faisant valoir que la décision implicite de refus par eux ainsi déférée serait à annuler tout d’abord pour absence de motivation, le tribunal ayant été mis dans l’impossibilité d’exercer son contrôle sur l’existence et la légalité des motifs à la base du refus implicite déféré ;

Que dans son mémoire en réponse du 7 avril 2005, la commune d’énoncer que pour autant que de besoin, elle demande acte que les éléments et moyens développés dans son dit mémoire constituent la motivation de la décision querellée ;

Qu’à ce titre elle fait valoir que l’autorisation accordée ne fait que régulariser une situation antérieure préexistante illégale en autorisant la construction d’un poulailler en bonne et due forme, de sorte qu’en fait la situation des requérants se trouverait améliorée par rapport à celle ayant existé auparavant ;

Que la commune de formuler une offre de preuve par témoin suivant laquelle « les époux …-… étaient parfaitement au courant que l’administration communale de Feulen s’apprêtait à délivrer une autorisation de construire et ont formulé oralement à de multiples reprises leur prise de position à ce sujet » ;

Que les demandeurs de répliquer que l’offre de preuve ne serait ni pertinente, ni concluante du fait d’être imprécise quant aux moyens à travers lesquels la prise d’une décision imminente aurait été portée à la connaissance des demandeurs ;

Que les demandeurs de reprendre à travers ledit mémoire en réplique leur argumentaire antérieur quant à la violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, tout en précisant que les fausses mesures contenues d’après eux dans le plan de situation annexé à l’autorisation de construire déférée entraînerait que l’indication de la zone constructible du poulailler, tel qu’y figurant, ne répondrait pas – en ce qui concerne les marges et reculs latéraux – à la situation concrète sur les lieux ;

Que par ailleurs le plan ne serait pas contresigné par Madame XXX ;

Qu’en ordre subsidiaire ils sollicitent l’institution d’une mesure d’expertise avec la mission de déterminer si le plan de situation en question contient des fausses mesures quant à la délimitation du terrain et si l’indication de la zone constructible du poulailler, telle qu’elle a été faite par les services communaux, répond – en ce qui concerne les marges et reculs latéraux – à la situation concrète sur les lieux ;

Qu’en dernier ordre de subsidiarité, les demandeurs sollicitent l’institution d’une visite des lieux ;

Considérant que la décision implicite de refus déférée à travers le recours inscrit sous le numéro 19195 du rôle est à placer par rapport au recours gracieux introduit à l’encontre de l’autorisation de construire déférée à travers le recours inscrit sous le numéro 18679, de sorte que bien que n’étant par essence point motivé, le refus implicite en question épouse néanmoins, à travers le silence observé par l’autorité compétente, les éléments énoncés à l’appui de la décision explicite à sa base, de sorte que les deux décisions en tirent les mêmes éléments de motivation restés identiques, face à des doléances de tiers intéressés restées constantes ;

Qu’il n’y a dès lors pas lieu à annulation de plano de la décision implicite de refus déférée pour non indication des motifs ;

Considérant que l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité dispose que « Lorsqu’une décision administrative est susceptible d’affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l’autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens.

Dans la mesure du possible, l’autorité administrative doit rendre publique l’ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision.

Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations.

La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations » ;

Considérant que les demandeurs s’étant vu vérifier leur intérêt à agir devant le tribunal, ils sont à qualifier de personnes intéressées ayant dû avoir la possibilité de faire connaître leurs observations conformément à l’alinéa 3 de l’article 5 prérelaté (trib. adm.

4 mai 1998, n° 10457 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 75, page 538) ;

Considérant que les demandeurs mettent en avant que la commune ne leur aurait pas donné la possibilité de faire connaître leurs observations par rapport à l’autorisation de construire actuellement déférée ;

Considérant qu’il résulte des pièces versées en cause que les demandeurs ont eu un échange de correspondance nourri avec l’administration communale de Feulen concernant le poulailler illégalement érigé par Madame XXX et que dans ce contexte ils en ont demandé l’enlèvement, sans que toutefois l’échange de courrier documenté avant la prise de la décision du 26 mai 2004 ne porte sur une éventuelle autorisation de construire à accorder par le bourgmestre de nature à régulariser la situation ;

Considérant que la commune n’établit pas en l’occurrence avoir concrètement conféré aux demandeurs la possibilité de faire connaître leurs observations par rapport à l’autorisation délivrée le 26 mai 2004, avant que celle-ci ne fût posée ;

Considérant que l’offre de preuve formulée par la commune dans son mémoire en réponse du 7 avril 2005 n’est point pertinente lorsqu’elle tend à établir que les époux …-

… étaient parfaitement au courant que l’administration communale de Feulen s’apprêtait à délivrer une autorisation de construire, étant donné qu’elle ne tend pas à établir que ce seraient les autorités communales qui, conformément à l’article 5 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979, auraient informé les demandeurs actuels de l’ouverture d’une procédure devant aboutir à la décision déférée du 26 mai 2004 ;

Que cette offre de preuve est partant à écarter ;

Considérant qu’il reste que les demandeurs n’ont pas été mis, en l’état des éléments établis du dossier, en mesure de faire valoir utilement leurs observations quant aux points précis d’une autorisation de régularisation à délivrer, telle celle déférée du 26 mai 2004 ;

Considérant qu’en présence d’une disposition visant la participation de l’administré à la prise d’une décision administrative, telle celle découlant de la l’alinéa 3 de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, le défaut d’avoir rendu publique l’ouverture de la procédure afférente, de sorte à ne pas permettre aux co-tiers intéressés de formuler les observations précisément quant à une autorisation de régularisation à délivrer, tout en constituant une formalité substantielle, ne saurait être sanctionné que dans mesure où son non-respect a été invoqué utilement dans le délai contentieux pour l’administré qui affirme ne pas avoir pu de ce chef faire valoir ses observations et que ces dernières contiennent, outre les moyens de légalité invoqués, des éléments concrets de participation à décision à prendre, qui, eussent-ils pu être proposés en temps utile, auraient été de nature à conduire l’autorité compétente à prendre une décision différente en tenant compte de ces propositions, dans les limites d’appréciation laissées au cas précis à l’auteur de la décision (cf. trib. 22 janvier 2003, n° 14868 du rôle, confirmé par Cour adm. 17 juin 2003, nos 16056C et 16077C du rôle, Pas. adm. 2003, V° Procédure administrative non-contentieuse, n° 81, page 540) ;

Considérant qu’outre le moyen de légalité invoqué, tiré de la violation de l’article 5 sous analyse, les demandeurs ont proposé comme seuls éléments le fait que le plan annexé à la décision déférée ne serait pas conforme à la situation sur les lieux et que plus particulièrement les reculs latéraux y émargés ne seraient point exacts et que la signature de la demanderesse sur l’autorisation n’y figurerait pas ;

Considérant que d’après les éléments intrinsèques du plan en question, celui-ci portant le cachet de la commune de …, l’autorité de décision a fait siennes les indications y émargées, quel qu’en ait été l’auteur, de sorte que sous cet aspect ledit plan n’est pas sujet à critique quant à sa forme ;

Considérant qu’il est patent que tout au long de la procédure les demandeurs ont omis de préciser autrement l’inexactitude du plan en question et plus particulièrement les éléments concrets sur lesquels ils se basent pour appuyer leur affirmation ;

Que de même sur la question spéciale du tribunal à la barre, le représentant des demandeurs n’a pas pu concrétiser les propos de ses mandants au-delà de la critique énoncée tout au long de la procédure suivant laquelle le plan en question contiendrait de fausses mesures ;

Considérant qu’il est patent que les demandeurs ne développent aucun argument de légalité en ce que plus particulièrement ils n’indiquent pas quels seraient les reculs latéraux non-respectés, compte tenu des exigences de la réglementation communale d’urbanisme existante du fait de la situation qui serait différente, selon eux, sur le terrain par rapport aux indications fournies dans le plan annexé à la décision déférée du 26 mai 2004 ;

Considérant que le plan en question est précis en ce sens qu’il prévoit un recul latéral du côté du voisin gauche, de trois mètres, ainsi qu’un recul latéral du côté …-… de huit mètres ;

Considérant qu’aucun élément du dossier ne permet de déceler que les deux reculs respectifs de trois et de huit mètres ne sauraient être observés sur place alors que la parcelle existante, d’après l’ensemble des plans versés, permet manifestement et ostensiblement d’observer les reculs en question ;

Considérant qu’un troisième recul est prévu de façon distincte par le plan en question, à savoir par rapport à la chaussée existante, la rue de la Montagne ;

Considérant que du fait que le côté latéral du poulailler, côté rue, n’est pas parallèle à l’alignement de la rue de la Montagne, le recul y prévu n’est pas le même en tous points ;

Que d’après le plan annexé à la décision déférée, ce recul est de six mètres au milieu du côté latéral du poulailler, donnant sur la rue de la Montagne, pour diminuer vers la droite et augmenter vers la gauche, vues à partir de ladite rue ;

Que pour autant aucune imprécision ne résulte du plan qui contient toutes les données pour déterminer exactement le côté latéral du poulailler, côté rue ;

Considérant que si les demandeurs voulaient insinuer que la fausseté des mesures par eux dénoncée devait signifier que la zone constructible ainsi désignée sur le plan telle que se dégageant de la détermination des trois reculs précités, ne serait pas exactement celle dessinée sur le plan, cette affirmation ne saurait porter à conséquence en ce sens que la zone constructible rectangulaire en question a été indiquée de façon entrecoupée à ses limites, donc adaptable quant à sa surface non autrement précisée ni en mètres carrés, ni à partir des longueur et largeur du rectangle émargé, et que les données constantes et fixes en cause sont les trois reculs précisément déterminés à travers le plan même ;

Que dès lors la détermination de la zone constructible pour le poulailler à délimiter sur le terrain était parfaitement opérationnelle à travers le plan en question, aucune incompatibilité avec la réglementation communale d’urbanisme n’ayant été mise en avant par les demandeurs, de sorte qu’une éventuelle inobservation des reculs en question devra se résoudre en termes d’exécution de l’autorisation de construire, question échappant comme telle au contrôle de légalité effectué actuellement par le tribunal ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que, telles que formulées, les critiques avancées par les demandeurs relativement aux mesures indiquées sur le plan ne sauraient être analysées en éléments de participation concrets ayant pu changer le cours des choses, eussent-ils été proposés – tels quels – auparavant, alors que le tribunal n’est même pas mis en mesure de vérifier d’une quelconque façon tangible quelles sont les mesures qui seraient fausses et à plus forte raison quelle serait leur implication par rapport à la réglementation communale d’urbanisme, aucun argument y relativement n’ayant été invoqué ;

Que force est dès lors au tribunal de retenir que les éléments avancés par les demandeurs ne constituent pas des éléments de participation concrets au sens de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, devant entraîner l’annulation de la décision déférée, tout comme par ailleurs ces éléments ne constituent point un moyen de légalité invoqué, faute de lien de correspondance établi par les demandeurs entre les mesures inexactes non autrement étayées invoquées et la réglementation communale d’urbanisme existante ;

Considérant que les demandeurs sollicitent en ordre subsidiaire l’institution d’une expertise et à titre plus subsidiaire encore celle d’une visite des lieux ;

Considérant qu’il est constant qu’il incombe à celui qui affirme un fait d’en rapporter la preuve ;

Que les demandeur se bornent en l’espèce à invoquer tout au cours de la procédure l’inexactitude du plan annexé à l’autorisation de construire déférée en ce que les mesures émargées ne correspondraient pas aux réalités sur le terrain ;

Qu’il vient d’être dégagé que les demandeurs restent en défaut de préciser tant soit peu leur propos au-delà de l’inexactitude ainsi simplement affirmée ;

Considérant que si l’expertise judiciaire est une mesure d’instruction destinée à fournir, en vue de la solution d’un litige, des renseignements d’ordre technique que le juge ne peut pas se procurer lui-même et qui ne peuvent s’obtenir qu’avec le concours d’un spécialiste dans une science, dans un art ou dans un métier, la visite des lieux constitue, quant à elle, une mesure d’instruction ordonnée par le juge afin de lui permettre de se procurer lui-même une appréciation de certains éléments de fait in situ ;

Considérant que l’expertise judiciaire et la visite des lieux ont en commun qu’elles ne sauraient être instituées pour parer à une carence de la partie demanderesse dans l’agencement de la preuve qu’il lui incombe de rapporter ;

Considérant que devant le défaut des parties demanderesses de préciser leur propos et en présence de nombre de plans complémentaires, dont les plans cadastraux versés, ensemble les photographies produites couvrant exhaustivement la parcelle litigieuse, tous librement discutés à l’audience, de nature à permettre au tribunal de délimiter utilement le débat actuel, ni une expertise judiciaire, ni une visite des lieux ne sont à instituer ;

Qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que le moyen laisse d’être fondé ;

Considérant que les demandeurs n’ayant point invoqué d’autres moyens de légalité, les deux recours laissent d’être fondés ;

Considérant que les demandeurs sollicitent encore pour chacun des deux recours introduits l’allocation d’une indemnité de procédure de l’ordre de 1.500,- € sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, tout en invoquant l’article 240 du nouveau code de procédure civil non opérant en l’espèce ;

Considérant qu’eu égard à l’issue du litige, les deux demandes en allocation d’une indemnité de procédure sont à écarter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

joint les deux recours inscrits sous les numéros du rôle respectifs 18679 et 19195 ;

déclare les recours en annulation recevables ;

au fond les déclare non justifiés ;

partant en déboute ;

écarte les demandes en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 juin 2005 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 13


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18679,19195
Date de la décision : 08/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-08;18679.19195 ?

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