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11/05/2005 | LUXEMBOURG | N°19118

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 mai 2005, 19118


Tribunal administratif N° 19118 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 janvier 2005 Audience publique du 11 mai 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19118 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 janvier 2005 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né en … (Afghanistan)

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Tribunal administratif N° 19118 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 janvier 2005 Audience publique du 11 mai 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19118 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 janvier 2005 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né en … (Afghanistan), de nationalité afghane, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 11 octobre 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 8 décembre 2004 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 mars 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRÜCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 avril 2005.

Monsieur … introduisit en date du 18 février 2004 par l’intermédiaire de son avocat auprès du service compétent du ministre de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu le 28 juin 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … par décision du 11 octobre 2004, lui envoyée par courrier recommandé le 26 octobre 2004, de ce que sa demande a été refusée comme non fondée au motif qu’il n’alléguerait aucune crainte justifiée de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays.

Le 29 novembre 2004, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 8 décembre 2004.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 7 janvier 2005, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation à l’encontre des deux décisions ministérielles de refus citées ci-avant.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que son départ de son pays d’origine aurait été motivé par le fait qu’il risquerait de subir des persécutions par les membres du parti VAHDAT au motif qu’il aurait été forcé à l’âge de 10 ans ensemble son père de transporter des armes pour les Talibans dans le cadre de leur conflit contre les membres du parti VAHDAT. Il relève que dans ce contexte de travail forcé imposé par les Talibans à lui-même et à son père, son père aurait été tué par les membres du parti VAHDAT, de sorte qu’il aurait décidé de déserter les rangs des talibans. Il continue qu’au moment de la chute des Talibans, il aurait été arrêté par les membres du parti VAHDAT, lesquels lui auraient imposé les pires traitements inhumains et auraient exercé concomitamment des menaces à l’égard des membres de sa famille. Il précise que le parti VAHDAT aurait repris totalement le pouvoir dans sa région d’origine après la chute des Talibans et qu’il craindrait actuellement d’être persécuté par lesdits membres. Le demandeur fait ensuite valoir que la décision ministérielle devrait être réformée pour violation de la loi, sinon pour erreur manifeste d’appréciation des faits. En ce qui concerne le motif de refus invoqué qu’il aurait pu rester en Iran où il avait trouvé du travail il fait valoir que cette motivation serait à rejeter au motif qu’après la chute des Talibans il aurait été refoulé par les autorités iraniennes dans son pays d’origine. Il estime qu’en raison des menaces émanant des membres du parti VAHDAT, un des composants effectifs de l’Etat afghan il ne bénéficierait pas de la protection des autorités de son pays d’origine pour l’une des cinq causes visées à l’article 1er de la Convention de Genève.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de retenir que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Force est de constater que Monsieur … a quitté l’Afghanistan lorsqu’il avait treize ans, c’est-à-dire trois ans avant de venir au Luxembourg. Même à admettre que le demandeur ait été poursuivi par les membres du VAHDAT au moment où il a quitté l’Afghanistan, force est de constater que le demandeur reste en défaut de soumettre au tribunal un élément concret permettant de retenir qu’il serait encore à l’heure actuelle poursuivi par ces mêmes membres en cas de retour dans son pays. En effet à la question « Votre sœur vous a dit de partir, mais avez-vous des exemples de gens qui ont eu des problèmes avec les membres du VAHDAT ? » il répond : « Quand je suis retourné en Afghanistan, je ne suis pas allé tout le temps chez ma sœur. Je ne l’ai vu qu’un jour, car c’était trop risqué pour elle : Elle m’a juste dit que les gens du VAHDAT me cherchaient et que je devais quitter le pays. Je suis resté à Nimrouz pendant ces quinze jours, c’est la frontière avec l’Iran ». A cela s’ajoute que les craintes dont il fait état sont des craintes essentiellement hypothétiques dans la mesure où Monsieur … déclare lui-même qu’il n’avait que dix ans quand il a été enrôlé par les Talibans, qu’il n’a fait partie qu’un jour de l’armée des Talibans et qu’il n’a jamais pris les armes contre les membres du VAHDAT se limitant à leur apporter des munitions et du ravitaillement, de sorte que cette participation à l’armée des Talibans ne le place pas, vis-à-vis du mouvement VAHDAT, dans une position particulièrement exposée.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une crainte actuelle de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Partant le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 mai 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19118
Date de la décision : 11/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-05-11;19118 ?

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