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11/05/2005 | LUXEMBOURG | N°18971

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 mai 2005, 18971


Numéro 18971 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 décembre 2004 Audience publique du 11 mai 2005 Recours formé par la société à responsabilité limitée … SARL, Luxembourg contre des bulletins d’impôt émis par le bureau d'imposition sociétés 4 en matière de bulletins d’impôt sur le revenu des collectivités

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18971 du rôle, déposée le 10 décembre 200

4 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit a...

Numéro 18971 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 décembre 2004 Audience publique du 11 mai 2005 Recours formé par la société à responsabilité limitée … SARL, Luxembourg contre des bulletins d’impôt émis par le bureau d'imposition sociétés 4 en matière de bulletins d’impôt sur le revenu des collectivités

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18971 du rôle, déposée le 10 décembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … SARL, ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 56983, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à la réformation  des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités pour les années 1999, 2000, 2001 et 2002  des bulletins de l’impôt commercial communal pour les années 1999, 2000, 2001 et 2002  des bulletins d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 2000, 1er janvier 2001et 1er janvier 2002 tous émis le 23 janvier 2004 par le bureau d'imposition sociétés 4 de l’administration des Contributions directes;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Jean-Pierre WINANDY en ses plaidoiries à l’audience publique du 4 mai 2005.

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Par courrier du 5 décembre 2000, le bureau d’imposition Sociétés 4 informa la société à responsabilité limitée … SARL de ce qui suit :

« Suite à l’examen de votre situation fiscale à la base des données à disposition du bureau d’imposition Sociétés 4, j’ai l’honneur de vous faire part des observations suivantes :

Aux termes du § 4 de l’article 2 de la Convention fiscale franco-luxembourgeoise du 17 août 1959, le domicile fiscal des personnes morales est situé dans le pays où se trouve le centre effectif de direction.

Or, il me semble que le centre effectif de direction de votre entreprise est situé en France. Il s’agit en effet du lieu où les affaires sont dirigées et contrôlées et en particulier l’endroit où se trouvent les bureaux du personnel dirigeant.

Le siège officiel de la s.à.r.l. … qui est situé à L- … , auprès de la s.à.r.l. … est à considérer plutôt comme une simple adresse de domiciliation. Le matériel repris au tableau d’amortissement ne se trouve pas à l’adresse du siège.

Par conséquent, je vous informe que les données sont transmises à l’Administration Fiscale Française par le biais de la Direction de l’administration des Contributions directes du Luxembourg, service des Relations Internationales, en vue d’une imposition de la société par les autorités françaises ».

La Fiduciaire des P.M.E., avisant en nom et pour compte de la société … SARL, prit position par rapport à la prédite lettre par courrier du 17 janvier 2001 au contenu suivant :

« (…) Nous estimons que les autorités fiscales françaises ne sont pas concernées par … SARL. Le centre effectif de direction ne se trouve pas en France, mais bien au Luxembourg. Bien que le gérant soit résidant hongrois, les affaires sont dirigées et contrôlées à partir du Luxembourg, le gérant se déplaçant régulièrement au Grand-Duché de Luxembourg au siège de la société, pour y effectuer les tâches de direction. Les assemblées générales sont tenues au siège de la société.

Le matériel de bureaux au tableau d’amortissement ne se trouve pas à l’adresse du siège. Dans la mesure où il s’agit de machines industrielles louées à Royal Croissant en Hongrie, vous conviendrez avec nous que ce matériel ne peut pas se trouver physiquement au Luxembourg. Les sociétés de location de biens mobiliers ne possèdent pas ces biens à leur siège, mais chez leurs clients. Nous n’avons pas demandé d’aide fiscale pour investissement pour ces immobilisations.

Nous vous avons fait parvenir, par notre lettre du 17 novembre 2000, copie des factures d’honoraires de M….. Même s’il souhaite que ses prestations soient payées en francs français sur un compte en France, M. …est résident hongrois.

Nous tenons également à vous signaler que c’est à partir de l’exercice 2000 que … SARL réalise des bénéfices.

Pour les raisons précitées, nous estimons que le dossier ne doit pas être transféré aux autorités fiscales françaises ».

En réponse à ce courrier de la fiduciaire des P.M.E., le directeur de l’administration des Contributions directes prit position par une lettre datée du 20 juillet 2001, libellée comme suit :

« (…) Dans votre lettre vous nous demandez de ne pas transmettre à l’administration fiscale française des informations relatives au domicile fiscale de la société … SARL au sens du § 4 de l’article 2 de la Convention contre les doubles impositions conclue entre le Luxembourg et la France. Or, les recherches effectuées par le bureau d’imposition Sociétés 4 ont montré que le centre effectif de direction de la société précitée ne se trouve pas au Luxembourg. Qui plus est, vous n’avez apporté aucun élément nouveau qui puisse justifier la non-transmission des renseignements.

Cependant, tout en donnant à la société … SARL la possibilité de nous fournir des informations supplémentaires, mais en mettant le bureau d’imposition en mesure de prendre sa décision en toute connaissance de cause, j’envisage de substituer à la transmission spontanée de renseignements une demande de renseignements en la matière basée sur le règlement grand-ducal du 15 mars 1979 concernant l’assistance internationale en matière d’impôts directs, ainsi que sur l’article 22 de la Convention fiscale franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958.

Les informations reçues de l’administration fiscale française pourraient nous permettre de procéder soit à un établissement correct de l’impôt, soit à une radiation du dossier. » En date du 23 janvier 2004, le bureau d’imposition société 4 émit à l’égard de la société … SARL les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour les années 1999 à 2002, ainsi que d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 2000, 1er janvier 2001 et 1er janvier 2002 suivant lesquels la société … SARL fut qualifiée de société non résidente et comme telle non assujettie à l’impôt luxembourgeois.

Sa réclamation du 9 mars 2004 à l’encontre de ces bulletins étant restée sans réponse de la part du directeur de l’administration des Contributions directes, la société … SARL a fait introduire, par requête déposée le 10 décembre 2004, un recours contentieux tendant à la réformation des bulletins susvisés de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour les années 1999 à 2002, ainsi que d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 2000, 1er janvier 2001 et 1er janvier 2002.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8 (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et d’établissement de la valeur unitaire en l’absence d’une décision du directeur de l’administration des Contributions direct ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre ces mêmes bulletins. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en réformation.

Quant à la recevabilité du recours dirigé contre les bulletins d’établissement de la valeur unitaire Le paragraphe 232 (1) AO dispose: « Einen Steuerbescheid kann der Steuerpflichtige nur deshalb anfechten, weil er sich durch die Höhe der festgesetzten Steuer oder dadurch beschwert fühlt, dass die Steuerpflicht bejaht worden ist ».

Le recours en réformation encourt l’irrecevabilité dans la mesure où il est dirigé contre les bulletins d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 2000, 1er janvier 2001 et 1er janvier 2002 du 23 janvier 2004, étant donné que ces bulletins ont pour seul objectif la détermination d’une base d’imposition, à savoir la valeur unitaire, sans inclure une décision quant à l’imposabilité de cette base d’imposition dans le chef du contribuable visé et sans fixer une cote d’impôt y relative.

Quant à la recevabilité du recours dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal Le paragraphe 232 (1) AO, précité, prévoit deux cas d’ouverture du droit de réclamer contre un bulletin d’impôt :

1) une contestation de la cote d’impôt fixée, 2) une contestation du principe de l’assujettissement à l’impôt.

En l’espèce, il est constant que les bulletins d’impôt déférés ont retenu le principe de non-assujettissement de la société … SARL à l’impôt luxembourgeois, en vertu des dispositions de l’article 2 paragraphe 4 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise, et ont partant fixé les cotes d’impôt respectives à 0 franc.

La société … SARL n’a donc en principe pas d’intérêt pour contester les bulletins d’impôt soumis au tribunal ramenant à chaque fois la cote d’impôt à zéro et portant négation de son assujettissement à l’impôt sur le revenu des collectivités et à l’impôt commercial communal pour les années 1999 à 2002.

Cependant une décision de non-assujettissement peut causer grief lorsque les éléments retenus comme bases de la décision s’imposent à d’autres administrations, aussi bien celles situées sur le territoire national que celles situées à l’étranger ou sont prises en compte par ces dernières, de manière à affecter la situation fiscale globale du contribuable.

(cf. Trib. adm. 9 mars 1998, n° du rôle 10117, Pas. adm. 2004, V° Impôts, sous X. Procédure administrative, nos 355 et 356, p. 446).

La société … SARL, bien qu’invoquant la jurisprudence précitée, reste en défaut de soumettre au tribunal le moindre élément lui permettant d’apprécier dans quelle mesure la décision de non-assujettissement à l’impôt luxembourgeois s’imposerait à d’autres administrations au Luxembourg ou à l’étranger, voire, serait le cas échéant susceptible de lui causer grief.

Il s’ensuit, qu’en l’état actuel des éléments fournis au dossier, le recours introduit à l’encontre des bulletins précités est irrecevable à défaut d’intérêt établi dans le chef de la société … SARL.

Bien que la partie publique, à laquelle le recours fut notifié par la voie du greffe en date du 10 décembre 2004 n’a pas comparu dans le délai légal, le tribunal est amené à statuer à l’égard de toutes les parties suivant une décision juridictionnelle ayant les effets d’un jugement contradictoire conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

PAR CES MOTIFS, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, déclare le recours irrecevable, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 mai 2005 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, en présence de M.Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18971
Date de la décision : 11/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-05-11;18971 ?

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