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09/05/2005 | LUXEMBOURG | N°18871

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 mai 2005, 18871


Tribunal administratif N° 18871 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 novembre 2004 Audience publique du 9 mai 2005 Recours formé par Madame … et Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de refoulement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18871 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif 18 novembre 2004 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le… , de nationalité espagn

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Tribunal administratif N° 18871 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 novembre 2004 Audience publique du 9 mai 2005 Recours formé par Madame … et Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de refoulement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18871 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif 18 novembre 2004 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le… , de nationalité espagnole, ayant demeuré à L-… , et Monsieur …, né le… , de nationalité capverdienne, ayant été détenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à l’annulation d’une décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à une décision de rétention administrative du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise à l’encontre de Monsieur … le 16 novembre 2004 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 8 février 2005 ;

Vu les pièces versées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 2 mai 2005, en présence de Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES, qui s’est référée au mémoire écrit de la partie publique.

Par décision du 16 novembre 2004, le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration ordonna le placement de Monsieur …, de nationalité cap-verdienne, au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d'un mois.

Par requête déposée le 18 novembre 2004, inscrite sous le numéro 18870 du rôle, Madame … et Monsieur … ont introduit une requête en sursis à exécution par rapport à la décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à la décision de rétention administrative visée ci-avant prise à l’encontre de Monsieur … le 16 novembre 2004.

Par une ordonnance du 22 novembre 2004, le président du tribunal administratif a ordonné la radiation du rôle numéro 18870 tout en ayant acté la déclaration du délégué du Gouvernement qu’un éloignement du territoire de Monsieur … ne sera pas effectué tant que le tribunal administratif ne se sera pas prononcé au fond sur le mérite du recours introduit sous le numéro 18871 du rôle.

Par requête déposée 18 novembre 2004, inscrite sous le numéro 18871 du rôle, Madame Madame … et Monsieur … ont déposé une requête en annulation contre la décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion sous-jacente à la décision de rétention prise par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise le 16 novembre 2004.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de leur recours les demandeurs concluent à la nullité de la décision ministérielle litigieuse pour violation des dispositions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ils se prévalent à cet égard de l’existence d’une vie familiale et privée au sens dudit article qui aurait existé déjà de manière effective et de façon ininterrompue au moins depuis le mois d’octobre 2002. Ils ajoutent que l’exécution de la décision litigieuse entraînerait inévitablement une rupture difficilement supportable, alors que la quasi totalité des membres de leurs familles respectives résideraient au Grand-Duché de Luxembourg et seraient détenteurs de cartes d’identité étrangères luxembourgeoises.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du Gouvernement donne à considérer que les certificats de résidence versés au dossier font ressortir que les deux requérants habitent à des adresses différentes et que c’était à l’adresse ainsi indiquée, distincte de celle de Madame …, que la police a pu trouver le passeport capverdien de Monsieur …. Il relève pour le surplus que les intentions de mariage mises en avant par les demandeurs n’ont pas été suivies d’effet étant donné que le mariage projeté n’aurait toujours pas été célébré, alors même que le Gouvernement a donné la possibilité aux intéressés de le faire.

Il s’interroge par voie de conséquence sur le caractère réel de la vie familiale alléguée.

L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose :

« 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2) Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

S’il est de principe, en droit international, que les Etats ont le pouvoir souverain de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers, il n’en reste pas moins que les Etats qui ont ratifié la Convention européenne des droits de l’homme ont accepté de limiter le libre exercice de cette prérogative dans la mesure des dispositions de la Convention.

Il y a dès lors lieu d’examiner en l’espèce si la vie privée et familiale dont font état les demandeurs pour conclure dans leur chef à l’existence d’un droit à la protection d’une vie familiale par le biais des dispositions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, rentre effectivement dans les prévisions de ladite disposition de droit international qui est, le cas échéant, de nature à tenir en échec la législation nationale.

La garantie du respect de la vie privée et familiale comporte des limites en ce qu’elle ne s’applique notamment qu’à une vie familiale effective, c’est-à-dire caractérisée par des relations réelles et suffisamment étroites parmi ses membres, et existante, voire préexistante à l’entrée sur le territoire national.

En l’espèce, au-delà de la simple affirmation des demandeurs relativement à une prétendue intention de se marier, les éléments du dossier ne permettent pas de dégager l’existence effective d’une vie privée et familiale entre Madame … et Monsieur ….

Il s’y ajoute que le constat du délégué du Gouvernement concernant l’absence de réalisation du mariage projeté et l’absence de résidence commune ne se trouve énervé, ni par écrit, aucun mémoire en réplique n’ayant été fourni en cause, ni oralement en termes de plaidoiries les demandeurs n’ayant pas été représentés à l’audience publique du 2 mai 2005.

Dans ces conditions, il y a lieu de retenir que Madame … et Monsieur … n’ont pas établi à suffisance l’existence d’une vie familiale et effective dans leur chef, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’examiner plus en avant le moyen basé sur une violation alléguée de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Les demandeurs concluent en outre à une violation de l’article 12 de la Convention européenne des droits de l’homme en ce que la décision litigieuse porterait atteinte au caractère fondamental de leur liberté de se marier.

Au vu des développements qui précèdent et plus particulièrement des affirmations non-contestées en cause du délégué du Gouvernement suivant lesquels aucun empêchement au mariage par l’effet de la décision litigieuse n’existait, ledit moyen laisse encore d’être fondé.

Les demandeurs concluent finalement à une violation du droit communautaire en faisant valoir que la décision litigieuse opérerait une restriction à la liberté de circulation de Madame ….

Etant donné qu’aucune restriction à la liberté de circulation de Madame … n’a été utilement établie, voire alléguée en cause, le moyen est à écarter pour manquer en fait.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 9 mai 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge Mme Thomé, juge, en présence de M. Rassel, greffier assumé.

Rassel Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18871
Date de la décision : 09/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-05-09;18871 ?

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