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02/05/2005 | LUXEMBOURG | N°18450

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 mai 2005, 18450


Numéro 18450 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 juillet 2004 Audience publique du 2 mai 2005 Recours formé par les époux …, … contre un bulletin d’impôt émis par le bureau d'imposition Esch-

sur-Alzette en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18450 du rôle, déposée le 23 juillet 2004 au greffe du tribunal administratif par Monsieur … et son épouse

, Madame …, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation d’un bulletin de l’impôt sur le reve...

Numéro 18450 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 juillet 2004 Audience publique du 2 mai 2005 Recours formé par les époux …, … contre un bulletin d’impôt émis par le bureau d'imposition Esch-

sur-Alzette en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18450 du rôle, déposée le 23 juillet 2004 au greffe du tribunal administratif par Monsieur … et son épouse, Madame …, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation d’un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 1998 émis le 30 septembre 1999 par le bureau d'imposition Esch-sur-Alzette;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 décembre 2004;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 décembre 2004 par les époux …;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin entrepris;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que les époux … et … en leurs explications et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en sa plaidoirie à l’audience publique du 23 février 2005.

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Dans leur déclaration de l’impôt sur le revenu pour l’année 1998, les époux … et …, préqualifiés, s’étant mariés le 5 septembre 1997 à Esch-sur-Alzette, firent état d’une perte de location de biens provenant en partie d’un amortissement de 108.000 LUF et d’intérêts débiteurs de 194.792 LUF, soit d’un total de 302.792 LUF en relation avec un appartement sis à Luxembourg, 5, rue des Primevères, appartenant à Monsieur ….

A travers le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 1998 émis à l’égard des époux … le 30 septembre 1999, le bureau d'imposition Esch-sur-Alzette, de la section personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes, refusa d’admettre cette perte en déduction du total des revenus nets.

Par courrier du 18 octobre 1999, les époux … ont introduit devant le directeur de l’administration des Contributions directes une réclamation à l’encontre de ce bulletin d’impôt du 30 septembre 1999.

Cette réclamation étant restée sans réponse de la part dudit directeur, les époux … ont introduit, par requête déposée le 23 juillet 2004, un recours contentieux à l’encontre dudit bulletin d’impôt du 30 septembre 1999 sans préciser s’ils sollicitent la réformation ou l’annulation dudit bulletin.

Lorsque la requête introductive d'instance omet d'indiquer si le recours tend à la réformation ou à l'annulation de la décision critiquée, il y a lieu d'admettre que le demandeur a entendu introduire le recours admis par la loi (trib. adm. 18 janvier 1999, n° 10760, Pas.

adm. 2004, v° Impôts, n° 398).

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8 (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre un bulletin de l’impôt sur le revenu en l’absence d’une décision du directeur de l’administration des Contributions direct ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre ce même bulletin. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours devant être considéré comme tendant à la réformation du bulletin d’impôt du 30 septembre 1999. Ce même recours est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de leur recours, les demandeurs exposent la situation de fait comme se présentant comme suit : Monsieur … aurait acheté le 9 septembre 1994 aux époux K. un appartement situé à Luxembourg, 5, rue des Primevères, qu’il aurait ensuite utilisé comme son domicile. Suite à son mariage avec Madame … le 5 septembre 1997, il aurait quitté son appartement pour aller vivre avec son épouse dans l’appartement de cette dernière à Esch-

sur-Alzette, 3, rue des Tuileries. Monsieur … aurait revendu son appartement à Luxembourg aux époux K. le 18 mai 1999. Les demandeurs signalent que le refus de déduction des frais d’obtention en relation avec l’appartement de Monsieur … à Luxembourg leur opposé par le bureau d'imposition serait fondé sur la supposition, fondée notamment sur une note d’un fonctionnaire du bureau d'imposition relative à un entretien téléphonique de sa part avec Madame K. en septembre 1999, que cet appartement serait resté complètement meublé jusqu’à un mois avant sa revente aux époux K.. Les demandeurs contestent cependant la réalité de cette prémisse et affirment que l’appartement de Monsieur … serait resté inoccupé du 5 septembre 1997 au 18 mai 1999 et que les derniers meubles auraient été enlevés au mois de mars 1998, à l’exception d’une armoire vide. Ils se prévalent encore d’une attestation écrite de Madame K. d’après laquelle elle ne se rappellerait plus les questions lui posées par le fonctionnaire du bureau d'imposition en septembre 1999 et n’aurait plus visité l’appartement en cause au moment de le racheter en mai 1999, de sorte qu’elle n’aurait en aucun cas pu constater sur place que l’appartement était encore meublé au moment de cette vente. Les demandeurs en déduisent que l’appartement situé à Luxembourg aurait donc été à disposition pour la vente ou la location, éventuellement aussi comme appartement meublé, durant toute l’année 1998, de manière que ce serait à tort que le bureau d'imposition a refusé la déduction des frais d’obtention en relation avec cet appartement. A titre subsidiaire et au cas où le tribunal estimerait que les frais pour un appartement meublé mais non habité ne seraient pas déductibles, ils sollicitent la déduction des frais encourus à partir du mois de mars 1998.

Le délégué du gouvernement estime que ce serait à bon droit que le bureau d'imposition a estimé que tant que l’appartement était meublé et restait à la disposition de Monsieur …, il devait être considéré comme une résidence secondaire n’autorisant qu’une déduction limitée de frais d’obtention. Il relève que la date à laquelle les meubles auraient été déménagés ferait l’objet de témoignages discordants que le tribunal devrait apprécier, sauf s’il considérait que l’occupation n’aurait pas cessé tant qu’il restait une armoire fût-elle vide.

Au vœu de l’article 98 (1) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR », est considéré comme revenu de location de biens notamment « la valeur locative de l’habitation occupée par le propriétaire, y compris celle des dépendances ». L’article 98 (2) LIR habilite un règlement grand-ducal à « instituer un ou plusieurs régimes forfaitaires pour la détermination de la valeur locative d’habitations occupées par les propriétaires ». Le règlement grand-ducal modifié du 12 juillet 1968 concernant la fixation de la valeur locative de l’habitation occupée en vertu du droit de propriété ou occupée à titre gratuit ou en vertu d’un droit de jouissance viager ou légal, pris sur base de l’article 98 (2) LIR, dispose dans son article 4 (2) que « la valeur locative ainsi déterminée ne peut être réduite qu’à concurrence des intérêts passifs déductibles comme frais d’obtention » et ce conformément aux plafonds déterminées par l’article 4a du même règlement.

Il découle de ces dispositions légales et réglementaires que le régime forfaitaire de détermination de la valeur locative, et partant l’interdiction de la déduction de frais d’obtention autres qu’un certain plafond d’intérêts débiteurs, ne trouve application que dans l’hypothèse où l’habitation en cause est à considérer comme étant « occupée par le propriétaire ». Cette condition se trouve vérifiée au cas où l’habitation est « effectivement utilisée par le propriétaire ou se trouve du moins continuellement à sa disposition » (projet de loi concernant l’impôt sur le revenu, doc. parl. 5714, commentaire des articles, p. 191).

Or, en l’espèce, il résulte des éléments soumis par les demandeurs que, si une partie des meubles de Monsieur … ont été enlevés de l’appartement litigieux en septembre 1997, une autre partie est restée sur place jusqu’au mois de mars 1998. Dès lors, cet appartement doit a priori être considéré comme étant resté continuellement à la disposition de Monsieur … jusqu’au mois de mars 1998. S’il est vrai que les demandeurs font valoir qu’ils auraient envisagé entre septembre 1997 et mars 1998 de donner l’appartement en location, le cas échéant en état partiellement meublé, élément qui serait de nature à infirmer une disponibilité de l’appartement pour son propriétaire, ils ne soumettent cependant aucun élément de fait qui concrétiserait la réalité d’une telle intention de location, de manière que la conclusion que l’appartement litigieux est resté à la disposition de Monsieur … jusqu’au mois de mars 1998 n’a pas été utilement ébranlée par les demandeurs.

Etant donné que les demandeurs ont vécu ensemble à Esch-sur-Alzette dans l’appartement appartenant à Madame …, l’appartement litigieux à Luxembourg constituait dans le chef de Monsieur … une résidence secondaire, définie comme une résidence que le propriétaire n'utilise pas de façon prépondérante (trib. adm. 6 mai 1998, n° 10239, confirmé par Cour adm. 15 décembre 1998, n° 10768C, Pas. adm. 2004, v° Impôts, n° 133), pour laquelle l’article 4 (5) du règlement grand-ducal prévisé du 12 juillet 1968 interdit, outre la déduction d’autres frais d’obtention, également la déduction d’intérêts débiteurs y relatifs.

En ce qui concerne la période subséquente, même abstraction faite de la contradiction apparente entre les déclarations orales de Madame K. recueillies par le fonctionnaire compétent du bureau d'imposition et l’attestation de Madame K. versée en cause par les demandeurs en ce qui concerne l’état partiellement meublé ou non de l’appartement litigieux jusqu’en 1999, force est de constater qu’il résulte des éléments en cause, et notamment des déclarations des demandeurs à l’audience, que ces derniers ont essentiellement proposé aux anciens propriétaires de l’appartement en cause, les époux K., de le racheter et attendu leur accord, une mise en location n’ayant plus été envisagée que subsidiairement et sans entreprendre des démarches concrètes en ce sens. S’y ajoute que cette proposition de rachat a été finalement acceptée par les époux K. et concrétisée par la vente du 18 mai 1999.

Dans ces conditions, les frais d’obtention échus à partir du mois d’avril 1998 ne sauraient plus être considérés comme étant essentiellement en relation causale avec un éventuel revenu futur de location de biens, mais plutôt avec une éventuelle plus-value de cession au sens de l’article 99ter LIR. Or, dans la mesure où l’appartement litigieux à Luxembourg doit être considéré comme ayant constitué la résidence principale de Monsieur … au sens de l’article 102bis LIR, la plus-value dégagée par sa cession ne constitue pas un revenu imposable d’après l’article 99ter (6) LIR, entraînant que l’article 105 (4) LIR interdit une déduction de frais d’obtention en relation causale avec une telle plus-value, même abstraction faite de l’interdiction instaurée par l’article 102 (11) LIR de compenser une perte se dégageant de l’application de l’article 99ter avec des revenus positifs d’autres catégories.

Il découle de l’ensemble de ces développements que c’est à bon droit que le bureau d'imposition a refusé la déduction des frais d’obtention d’un total de 302.792 LUF en relation avec l’appartement en cause situé à Luxembourg, 5, rue des Primevères, appartenant à Monsieur … et que le recours sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondé.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, Mme GILLARDIN, juge, et lu à l’audience publique du 2 mai 2005 par le vice-président en présence de M.

LEGILLE, greffier.

s. LEGILLE s. CAMPILL 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18450
Date de la décision : 02/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-05-02;18450 ?

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