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14/04/2005 | LUXEMBOURG | N°19499

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 avril 2005, 19499


Tribunal administratif N° 19499 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 14 avril 2005

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Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19499 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à

Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Kline e Eperme (Kosovo/ Etat de Serbie-et-Monténégro), de nati...

Tribunal administratif N° 19499 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 14 avril 2005

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Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19499 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Kline e Eperme (Kosovo/ Etat de Serbie-et-Monténégro), de nationalité serbo-

monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 10 novembre 2004, par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, telle que cette décision a été confirmée par le même ministre le 21 février 2005, suite à un recours gracieux du demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 mars 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Valérie DEMEURE et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Monsieur … introduisit le 24 septembre 2004 une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur … fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut entendu le 27 octobre 2004 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’informa, par lettre du 10 novembre 2004, que sa demande avait été déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, au motif qu’il ne ferait valoir que de simples problèmes de voisinage, mais non pas de crainte raisonnable de persécution pour une des raisons prévues par la Convention de Genève.

Suite à un recours gracieux formulé par lettre de son mandataire du 31 janvier 2005 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision initiale le 21 février 2005.

Par requête déposée le 18 mars 2005, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation des décisions ministérielles précitées des 10 novembre 2004 et 21 février 2005.

Le délégué du gouvernement conclut en premier lieu à l’irrecevabilité du recours en réformation au motif que la loi prévoirait expressément et exclusivement un recours en annulation en matière de demandes d’asile refusées comme étant manifestement infondées.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (trib. adm. 28 mai 1997, Pas. adm. 2004, V° Recours en réformation, n° 4, et autres références y citées).

L’article 10 de la loi précitée du 3 avril 1996 prévoit expressément qu’en matière de demande d’asile déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de ladite loi, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives.

Il s’ensuit que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation dirigé contre les décisions critiquées.

A l’appui de son recours, le demandeur reproche au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir retenu à tort qu’il n’aurait pas invoqué de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif à la base de sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, alors que tel aurait été le cas, dans la mesure où il serait issu d’une famille où le « mariage inter-ethnique est admis », ce qui lui causerait des problèmes. Pour le surplus, suite à une dispute entre un de ses frères et un voisin, ce dernier aurait tiré sur lui avec un fusil de chasse, de sorte qu’il se serait résigné à quitter son pays d’origine pour chercher refuge à l’étranger.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisse d’être fondé.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

Une demande d’asile basée exclusivement sur des motifs d’ordre personnel et familial ou sur un sentiment général d’insécurité sans faire état d’un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève est à considérer comme manifestement infondée (trib. adm. 19 juin 1997, n° 10008 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Etrangers, n° 107 et autres références y citées ; trib. adm. 22 septembre 1999, n° 11508 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Etrangers, n° 105 et autres références y citées).

En l’espèce, au regard des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande d’asile, tels qu’ils se dégagent du rapport d’audition susvisé du 27 octobre 2004 et de la requête introductive d’instance, force est de constater qu’il n’a manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles suffisamment précises de nature à établir dans son chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance. - En effet, il appert du compte rendu de son audition, que le demandeur a exclusivement exprimé avoir connu des problèmes d’ordre privé en raison d’une dispute d’un de ses frères avec un voisin qui par la suite aurait tiré sur lui avec un fusil de chasse. Pour le surplus, le demandeur a ajouté un sentiment général d’insécurité au regard de la situation générale régnant dans son pays d’origine. – En ce qui concerne ce dernier point, il convient de relever que le demandeur est un Albanais du Kosovo, c’est-à-dire qu’il fait partie de la population majoritaire du Kosovo et qu’il n’a pas apporté le moindre élément concret et plausible de persécution au sens de la Convention de Genève ou précisé en quoi sa situation particulière ait été telle qu’il pouvait avec raison craindre qu’il risquerait de faire l’objet de persécutions au sens de ladite Convention.

Il s’ensuit que la demande d’asile de Monsieur … ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, de sorte que c’est à bon droit que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’a rejetée comme étant manifestement infondée et que le recours sous analyse est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître de la demande en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 14 avril 2005, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19499
Date de la décision : 14/04/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-04-14;19499 ?

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