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14/04/2005 | LUXEMBOURG | N°18496

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 avril 2005, 18496


Tribunal administratif N° 18496 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 août 2004 Audience publique du 14 avril 2005

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Recours formé par l’administration communale de la Ville de Luxembourg contre une décision de la Commission spéciale des pensions en matière de fonctionnaires communaux en présence de Monsieur …, …

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18496 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 août 2004 par Maître Louis BERNS, avocat à

la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale d...

Tribunal administratif N° 18496 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 août 2004 Audience publique du 14 avril 2005

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Recours formé par l’administration communale de la Ville de Luxembourg contre une décision de la Commission spéciale des pensions en matière de fonctionnaires communaux en présence de Monsieur …, …

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18496 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 août 2004 par Maître Louis BERNS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, tendant à la réformation d’une décision du 3 mai 2004 prise par la Commission spéciale des pensions instituée par l’article 54 bis de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, ayant constaté que Monsieur …, agent municipal au service de la Ville de Luxembourg, demeurant à L-… « est pour cause d’invalidité hors d’état de continuer son service, mais le déclare propre à occuper un autre emploi auprès de son administration » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Patrick KURDYBAN, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, les deux demeurant à Esch-sur-Alzette, des 11 et 12 août 2004, portant signification dudit recours à la Commission spéciale des pensions, ainsi qu’à Monsieur …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 novembre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2005 par Maître Louis BERNS en nom et pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nancy CARIER, en remplacement de Maître Louis BERNS, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Se plaignant de ce que l’agent municipal … était malade pendant 123 jours ouvrables au cours d’une période de 12 mois consécutifs, l’administration communale de la Ville de Luxembourg saisit, par lettre du 22 janvier 2003, la commission spéciale des pensions instituée par l’article 54 bis de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, ci-après dénommée la « commission spéciale », en vue de se prononcer sur la capacité de Monsieur … à continuer son service.

Suite au dépôt d’un rapport médical des docteurs A. B. et F. R. du 2 octobre 2003, la commission spéciale, par décision du 17 octobre 2003, décida « qu’il y a lieu à réexamen de l’affaire après une période de 4 mois ».

A la suite du dépôt d’un nouveau rapport médical des docteurs A. B. et F. R. du 24 mars 2004, et après avoir entendu Monsieur … ainsi que le représentant de la Ville de Luxembourg en leurs explications, la commission spéciale rendit en date du 3 mai 2004 une décision de la teneur suivante :

« Vu la demande du 22 janvier 2003 par laquelle le collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Luxembourg, en application de l’article 49.3., intervient auprès de la Commission spéciale des pensions en vue de la constatation de l’incapacité au travail de … préqualifié ;

Vu la décision de la commission spéciale du 17 octobre 2003 disant qu’il y a lieu de revoir l’intéressé après une période de quatre mois ;

Vu le rapport du 24 mars 2004 des médecins commis, les docteurs A. B. et F. R., sur l’état de santé de l’intéressé ;

Attendu que les parties furent régulièrement convoquées ;

Attendu que la Ville de Luxembourg était représentée à l’audience du 26 avril 2004 par J. S., inspecteur principal 1er en rang ;

Après avoir entendu en ses explications ….. ;

Considérant qu’il résulte du rapport des médecins commis que l’intéressé ne peut plus exercer ses fonctions actuelles ni les reprendre dans la suite, qu’il est par contre apte à faire un travail administratif pur, où la station debout prolongée et la marche doivent être évitées ;

PAR CES MOTIFS LA COMMISSION SPECIALE DES PENSIONS, … et le représentant de la Ville de Luxembourg entendus en leurs explications, DIT que … préqualifié est pour cause d’invalidité hors d’état de continuer son service, mais le déclare propre à occuper un autre emploi auprès de son administration. » Par requête déposée le 3 août 2004, l’administration communale de la Ville de Luxembourg a introduit un recours en réformation contre la décision du 3 mai 2004 de la commission spéciale.

Le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond en la présente matière, par application de l’article 41 de la loi modifiée du 24 décembre 1985, précitée.

La requête, introduite par ailleurs dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, l’administration communale de la Ville de Luxembourg expose que Monsieur … a été engagé par la Ville de Luxembourg à partir du 1er février 1999 en qualité d’ouvrier-nettoyeur de rue, qu’il a été muté avec effet au 1er octobre 1999 au service de la circulation-parking et qu’il a été nommé définitivement dans la fonction d’agent municipal par délibération du conseil communal du 9 juillet 2001 avec effet au 1er juillet 2001. Suite à des problèmes de marche à partir du mois d’avril 2000 et un état dépressif dû au décès de son épouse, les absences de Monsieur … se seraient accumulées de sorte à perturber gravement l’organisation du service-parking, ce qui a incité l’administration communale de la Ville de Luxembourg à proposer fin 2002 à Monsieur … une ronde « calme », proposition que ce dernier aurait cependant refusée. Une note interne des responsables du service de la circulation de la Ville de Luxembourg du 29 janvier 2003 ferait ressortir que Monsieur … souhaiterait obtenir un poste dans une réception, mais les responsables auraient proposé de le maintenir dans sa fonction actuelle avec cependant « le moins de contact possible avec le public ». La demanderesse insiste finalement encore sur le fait qu’elle aurait, en vue de soutenir la réintégration de Monsieur …, transmis le dossier à un cabinet externe de psychologues de travail, mais que Monsieur … n’arriverait pas à retrouver son équilibre psychique, de sorte qu’elle aurait dû se résigner, au vu des absences prolongées, à saisir la commission spéciale sur base de l’article 49.3 de la loi modifiée du 24 décembre 1985, précitée, en vue de la constatation de l’incapacité au travail de Monsieur ….

Le délégué du gouvernement, en se référant à la teneur de la décision de la commission spéciale entreprise, fait sienne la motivation de cette décision se basant notamment sur des conclusions résultant du rapport d’expertise médical des docteurs A. B. et F.R. du 24 mars 2004. Le représentant étatique relève notamment que Monsieur … souffre d’une infirmité du genoux droit l’empêchant d’exécuter ses fonctions d’agent municipal, mais comme l’incapacité professionnelle ne concernerait toutefois que son activité comme agent municipal, la commission spéciale aurait estimé à bon droit que la mise à la retraite de Monsieur … ne s’impose pas, mais qu’il y aurait lieu de l’affecter à un autre emploi. Pour le surplus, le délégué du gouvernement déclare ne pas s’opposer à l’institution d’une expertise médicale.

Dans son mémoire en réplique, l’administration communale de la Ville de Luxembourg relève que seul un emploi purement administratif pourrait être attribué à Monsieur …, au vu des problèmes de déplacement constatés, mais que Monsieur … se trouverait pour le surplus dans un état dépressif majeur qui entraînerait des « troubles de l’humeur, anxiété et angoisses majeures, tendance au retrait social et l’irritabilité ». Or, comme des postes administratifs ne seraient pas compatibles avec l’état d’esprit de Monsieur …, au motif qu’il serait nécessairement en contact avec le public, il n’existerait pas d’emploi administratif auprès de la Ville de Luxembourg, outre les problèmes de classement et de rétrogradation respectivement de rémunération que pareil reclassement engendrerait.

Il est constant en cause, pour ressortir du dernier rapport médical du 24 mars 2004 des docteurs A. B. et F. R., que Monsieur …, suite à un accident de roulage en 1998, ne peut plus exercer le métier d’agent municipal en raison d’une arthrose due à une démarche vicieuse causée par la prothèse de hanche gauche mise en place en 1998. Pour le surplus, Monsieur … souffre d’une dépression majeure stable traitée par le docteur M. G. chez lequel il est en traitement depuis plusieurs années.

Il ressort encore du rapport d’intervention psychosociale réalisé à la demande de la Ville de Luxembourg par la société E. et F. S.A. en date du 5 mars 2004 que « sur le temps de consultation l’état psychique et émotionnel de M. … s’est nettement amélioré et que M. … entreprend de réels efforts afin de surmonter la phase personnelle difficile de sa vie ». Le même rapport retient que le seul projet de Monsieur … reste orienté vers une réaffectation vers d’autres fonctions professionnelles au sein de l’administration communale de la Ville de Luxembourg et que « forcer Monsieur … à reprendre ses fonctions d’agent de la circulation sans alternatives ou variations comporte des risques d’un ordre affectif et comportemental extrêmement difficiles à prévoir ou à assumer ».

Partant, en considération des prédits rapports, c’est à juste titre que la commission spéciale a décidé que Monsieur … est « apte à faire un travail administratif pur où la station debout prolongée et la marche doivent être évitées », pour en conclure que ce dernier est hors d’état de continuer son service pour cause d’invalidité, mais en mesure d’occuper un autre emploi auprès de la Ville de Luxembourg.

Dans ce contexte, c’est à tort que l’administration communale de la Ville de Luxembourg estime pouvoir déduire de l’état dépressif de Monsieur … une impossibilité de le réaffecter au sein de son administration, étant donné qu’il n’est non seulement pas établi à suffisance de droit que l’intéressé est incapable d’occuper un poste le mettant en contact avec le public, mais encore qu’il est peu plausible que ladite administration communale, qui est d’une taille certaine, ne dispose d’aucun poste administratif dispensant l’agent concerné d’un contact régulier avec le public.

Le tribunal arrive dès lors à la conclusion que c’est à tort que l’administration communale de la Ville de Luxembourg, en l’état actuel du dossier, estime que Monsieur … n’est plus capable d’exercer une fonction quelconque au sein de ladite administration, de sorte que la demande de réformation de la décision de la commission spéciale est à déclarer non fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 14 avril 2005, par le vice président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18496
Date de la décision : 14/04/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-04-14;18496 ?

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