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24/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18640

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 mars 2005, 18640


Numéro 18640 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 septembre 2004 Audience publique du 24 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de l’Environnement en matière de protection de l’environnement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18640 du rôle, déposée le 9 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Gerry OSCH, avocat à la Cour, inscrit

au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, retraité, demeurant...

Numéro 18640 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 septembre 2004 Audience publique du 24 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de l’Environnement en matière de protection de l’environnement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18640 du rôle, déposée le 9 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Gerry OSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, retraité, demeurant à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Environnement du 29 septembre 2003 en ce qu’elle porte rejet de sa demande d’autorisation pour l’aménagement d’un étang, ainsi que de la décision confirmative du même ministre du 14 juillet 2004, prise sur recours gracieux;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 décembre 2004;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 janvier 2005 par Maître Gerry OSCH pour compte de Monsieur …;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Cathy ARENDT, en remplacement de Maître Gerry OSCH, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 février 2005;

Vu le courrier de Maître Gerry OSCH déposé au greffe du tribunal administratif le 4 mars 2005.

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Soutenant que les eaux en provenance d’un drainage aménagé par le propriétaire des terrains voisins s’étaient écoulées depuis une dizaine d’années sur son propre terrain, en l’occurrence les parcelles n° … sises dans la commune de Weiler-la-Tour, section B de Hassel, au lieu-dit « … », qu’au fil des années ces eaux ont rendu ces parcelles très humides, de manière à rendre toute exploitation agricole impossible, et qu’un fossé s’était creusé à travers ce terrain sous l’influence des eaux, Monsieur …, préqualifié, soumit le 28 avril 2003 au ministre de l’Environnement, ci-après désigné par le « ministre », une demande d’autorisation pour l’aménagement d’un étang sur les parcelles prémentionnées et pour la plantation d’arbres fruitiers et de haies d’alignement.

Suite à un avis du préposé-forestier localement compétent de l’administration des Eaux et Forêts du 11 juillet 2003, le ministre prit le 29 septembre 2003 à l’égard de cette demande une décision libellée comme suit :

« En réponse à votre requête du 28 avril 2003 par laquelle vous sollicitez l’autorisation de procéder à l’aménagement d’un étang et à la plantation d’arbres fruitiers et de haies d’alignement sur un fonds sis à Hassel, inscrit au cadastre de la commune de Weiler-la-Tour, section B de Hassel, sous les numéros 612/994, 612/993 et 600/990, j’ai le regret de vous informer qu’en vertu de la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, je ne suis pas disposé à vous accorder l’autorisation pour l’aménagement d’un étang.

En effet, en raison de la structure sablonneuse du site sur lequel l’aménagement est prévu, l’étanchéité du fond de l’étang ne pourra être garantie que par la mise en place de matières synthétiques.

Les drains souterrains déjà aménagés devront être enlevés dans un délai de trois mois et remplacés par un drainage à ciel ouvert suivant la situation antérieure du terrain.

L’écoulement des eaux de surface dans le drainage à ciel ouvert doit être garanti.

En ce qui concerne la plantation d’arbres fruitiers et de haies d’alignement, une autorisation en vertu de la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles n’est pas requise ».

Par courrier de son mandataire du 20 octobre 2003, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision ministérielle en ce qu’elle lui a refusé l’autorisation pour l’aménagement de l’étang.

Le ministre confirma sa décision initiale de rejet par décision confirmative du 14 juillet 2004 dans les termes suivants :

« Me référant à votre recours gracieux du 20 octobre 2003 par lequel vous intervenez en faveur de votre mandant Monsieur … concernant l’aménagement d’un étang sur un fonds sis à Hassel, je suis au regret de vous informer qu’après réexamen de votre dossier, je maintiens ma décision négative antérieure, aucun élément nouveau ne plaidant en faveur d’une décision autre que celle prise en date du 20.10.2003.

La présente décision est susceptible d’un recours en réformation devant le tribunal administratif, recours qui doit être intenté dans les trois mois de la notification par requête signée d’un avocat ».

Par requête déposée le 9 septembre 2004, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation de ces deux décisions ministérielles des 29 septembre 2003 et 14 juillet 2004.

Etant donné que l’article 58 de la loi du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles instaure un recours au fond en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit.

A l’audience des plaidoiries, le tribunal a soulevé la question de la recevabilité du recours au vu du délai écoulé entre l’introduction du recours gracieux du 20 octobre 2003 et la prise de la décision confirmative de refus du 14 juillet 2004. En effet, au vœu de l’article 13 (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, « si un délai de plus de trois mois s’est écoulé depuis la présentation du recours gracieux sans qu’une nouvelle décision ne soit intervenue, le délai du recours contentieux commence à courir à partir de l’expiration du troisième mois ». Or, en présence du recours gracieux de Monsieur … du 20 octobre 2003, le délai du recours contentieux a recommencé à courir, par application de l’article 13 (3) précité, le 20 janvier 2004 pour expirer le 20 avril 2004, tandis que la décision confirmative ministérielle date seulement du 14 juillet 2004.

Pour conclure au caractère non tardif de son recours, Monsieur … fait valoir qu’une décision confirmative prise après l’écoulement du délai de recours ouvrirait un nouveau délai de recours si elle est fondée du moins partiellement sur des éléments nouveaux ou si l’administration a procédé au réexamen du dossier. Or, dans la mesure où le ministre a indiqué dans sa décision confirmative du 14 juillet 2004 qu’il maintient sa décision négative « après réexamen de votre dossier », cette décision aurait partant ouvert un nouveau délai de recours. Il se réfère encore au fait que le ministre a assorti sa décision du 14 juillet 2004 d’une instruction sur les voies de recours et à l’exigence d’une notification de la décision finale, outre au mandataire désigné, également à la partie elle-même, exigence à laquelle il n’aurait pas été satisfait en l’espèce.

Il est constant en cause que la première décision par laquelle le ministre a rejeté partiellement la requête soumise par le demandeur contient une indication complète des voies de recours. Il est encore constant que par courrier du 20 octobre 2003, le mandataire du demandeur a introduit un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle précitée et que ce recours gracieux a été introduit dans le délai contentieux de trois mois qui a couru à partir de la notification de la décision attaquée.

En vertu de l’article 13 (3) de la loi prévisée du 21 juin 1999, « si un délai de plus de trois mois s’est écoulé depuis la présentation du recours gracieux sans qu’une nouvelle décision ne soit intervenue, le délai du recours contentieux commence à courir à partir de l’expiration du troisième mois (…) ».

En l’espèce, il ressort non seulement des pièces et éléments du dossier mais également des renseignements fournis par les parties à l’instance, que le ministre de la Justice n’a pas pris de nouvelle décision dans le délai de trois mois qui a couru à partir de l’introduction du recours gracieux du 20 octobre 2003. Partant, il en découle que trois mois à partir de l’introduction du recours gracieux précité, le ministre est censé avoir pris une décision implicite de rejet du recours gracieux. Conformément à la disposition légale précitée, le délai de trois mois dans lequel un recours peut être introduit court à partir de l’expiration du délai de trois mois précité.

Il est encore constant en cause que, d’une part, le demandeur n’a pas introduit un recours contentieux contre la décision ministérielle précitée du 29 septembre 2003 dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision en question et que, d’autre part, il n’a pas agi dans le délai de trois mois à compter de l’expiration du délai de trois mois à compter de l’introduction du recours gracieux du 20 octobre 2003 contre ladite décision du 29 septembre 2003. Partant, son recours contentieux introduit en date du 9 septembre 2004, dans la mesure où il est dirigé contre la décision ministérielle du 29 septembre 2003, est irrecevable, étant donné qu’il est tardif.

Le demandeur a encore introduit un recours contre la décision ministérielle du 14 juillet 2004, par laquelle le ministre a confirmé sa décision antérieure de refus du 29 septembre 2003.

Or, le délai du recours contentieux ne peut en principe être interrompu qu’une seule fois à la suite de l’introduction, dans le délai légal, d’un recours gracieux, à moins que l’autorité compétente ne consente à rouvrir l’instruction et à réexaminer la cause, à condition qu’elle se trouve en présence d’éléments nouveaux, c’est-à-dire de faits s’étant produits à la suite de la première décision et qui sont de nature à modifier la situation personnelle du demandeur (trib. adm. 24 février 2000, n° 11672, confirmé par Cour adm. 30 mai 2000, n° 11900C, Pas. adm. 2004, v° Procédure contentieuse, n° 110).

En l’espèce, le recours contentieux a été interrompu par l’introduction du recours gracieux du 20 octobre 2003 contre la décision ministérielle du 29 septembre 2003.

La décision ministérielle précitée du 14 juillet 2004 retient qu’elle est intervenue après réexamen du dossier, mais à défaut d’élément nouveau plaidant en faveur d’une décision différente. Il se dégage encore du libellé du recours gracieux du 20 octobre 2003 que le mandataire du demandeur s’est certes employé à préciser les faits à la base de la demande en cause, à contester certains des motifs de refus et à justifier la pose de drains souterrains pour conclure à une entrevue avec un représentant du ministère de l’Environnement ou à une visite sur les lieux, mais qu’il n’a soumis en cause aucun élément de fait pertinent nouveau qui serait susceptible d’influer sur la décision à prendre. Il s’ensuit que la décision ministérielle du 14 juillet 2004 doit être qualifiée de purement confirmative et qu’elle n’était pas de nature à ouvrir un nouveau délai de recours. Le recours encourt partant également l’irrecevabilité en ce qu’il est dirigé contre la décision ministérielle du 14 juillet 2004.

Cette conclusion n’est pas affectée par le fait que le ministre a indiqué dans sa décision du 14 juillet 2004 qu’une voie de recours serait ouverte à son encontre, étant donné qu’à défaut d’existence d’une voie de recours légalement prévue, la simple indication erronée de voies de recours dans une décision administrative ne saurait créer un droit et rouvrir le cas échéant les délais de recours impérativement fixés par la loi (trib. adm. 3 avril 1997, n° 9753, Pas. adm. 2004, v° Procédure contentieuse, n° 134).

Cette conclusion n’est pas non plus énervée par l’argument du demandeur relatif à l’obligation de notification de la décision ministérielle du 14 juillet 2004 à sa propre personne au-delà d’une notification à son mandataire constitué et fondé implicitement sur l’article 10 alinéa 2 du règlement grand-ducal prévisé du 8 juin 1979, étant donné que la question de savoir si une voie et partant un délai de recours existent à l’encontre d’une certaine décision est préalable à celle de savoir si le délai de recours a commencé à courir ou non.

Il résulte des considérations qui précèdent que le recours sous analyse est irrecevable.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, déclare le recours irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, M. SPIELMANN, juge, et lu à l’audience publique du 24 mars 2005 par le vice-président en présence de M.

LEGILLE, greffier.

LEGILLE CAMPILL 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18640
Date de la décision : 24/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-24;18640 ?

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