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23/03/2005 | LUXEMBOURG | N°17623b

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 mars 2005, 17623b


Tribunal administratif N° 17623b du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 février 2004 Audience publique du 23 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision implicite du directeur de l’administration des Contributions directes en matière de remise d’impôts

JUGEMENT

Revu la requête, inscrite sous le numéro 17623 du rôle, déposée en date du 19 février 2004 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision implicite du directeur de l’adm

inistration des Contributions directes refusant de faire droit à ses demandes de remise gracieuse ...

Tribunal administratif N° 17623b du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 février 2004 Audience publique du 23 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision implicite du directeur de l’administration des Contributions directes en matière de remise d’impôts

JUGEMENT

Revu la requête, inscrite sous le numéro 17623 du rôle, déposée en date du 19 février 2004 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision implicite du directeur de l’administration des Contributions directes refusant de faire droit à ses demandes de remise gracieuse relatives à l’impôt sur le revenu des années 1994 à 2001 ;

Vu le jugement du 10 novembre 2004 (n° du rôle 17623) ordonnant la réouverture des débats et invitant chaque partie à déposer un mémoire complémentaire, pièces à l’appui, dont le dossier fiscal non encore déposé, sur la question de l’existence subsistante de réclamations ou recours à l’encontre des bulletins de l’impôt sur le revenu des années 1994 à 2001 ;

Vu le jugement du 17 janvier 2005 (n° du rôle 17623a) ordonnant la réouverture des débats et invitant Monsieur … à préciser pour chaque année d’imposition concernée son dernier état des conclusions synthétisées concernant le montant de la remise gracieuse sollicitée avec à son appui les revenus imposés afférents, explicités, pièces à l’appui, concernant la question du lien causal avec les tempêtes de l’hiver 1989/1990, pièces référencées à l’appui ;

Vu l’ordonnance du premier vice-président du 14 février 2005 portant prorogation des délais légaux pour déposer un mémoire complémentaire ;

Vu le mémoire complémentaire déposé par Monsieur … au greffe du tribunal administratif le 28 février 2005 ;

Vu les pièces supplémentaires versées en cause ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, Monsieur … ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 9 et 16 mars 2005.

Par jugement du 17 janvier 2005, le tribunal a retenu d’un côté qu’il n’existait plus de réclamations pendantes pour les années 1994 à 2001 et que d’un autre côté la non application du § 13 de la loi générale des impôts, désignée communément par « Abgabenordnung (AO) » était de nature à constituer dans le chef de Monsieur … un cas de rigueur objective.

Il a encore été retenu qu’il ressortissait des dossiers administratifs versés que le bureau d’imposition avait refusé d’appliquer la mesure exceptionnelle étant donné que les coupes et ventes de bois des années 1994 et suivantes n’apparaissaient pas comme étant en relation causale directe avec les tempêtes des années 1989/1990. Il a été souligné que l’existence d’un lien causal entre les coupes et les ventes de bois concernés et les tempêtes des années 1989/1990 constituait cependant la condition essentielle à l’application de ladite mesure exceptionnelle libellée comme suit : « Les produits bruts des coupes dues aux dégâts causés par les tempêtes de l’hiver 1989/1990 sont censés être égaux au total de la valeur comptable du bois abattu, des frais de coupe et des frais annexes ainsi que des frais ultérieurs de culture et de replantation. L’application de cette mesure gracieuse, qui est sujette à demande, englobe les subsides pour le reboisement et exclut toute déduction ultérieure pour frais de replantation sur la surface en question, ceci indépendamment de l’exercice en question… ».

Il a été enfin retenu que le tribunal n’était cependant pas documenté à suffisance afin de pouvoir vérifier l’existence de ce lien causal, conditionnant directement le bien-fondé des demandes en remise gracieuse au regard de la rigueur objective admise en son principe, de sorte que le tribunal a ordonné une réouverture des débats, afin de permettre aux parties d’y prendre utilement position et a invité Monsieur … à préciser pour chaque année d’imposition concernée son dernier état des conclusions synthétisées concernant le montant de la remise gracieuse sollicitée avec à son appui les revenus imposés afférents, explicités, pièces à l’appui, concernant la question du lien causal avec les tempêtes de l’hiver 1989/1990, pièces référencées à l’appui.

En application de l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, selon lequel la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable, le tribunal a demandé des précisions supplémentaires sur deux points :

- l’existence d’un lien causal entre les coupes et ventes de bois des années 1994 à 2001 et les tempêtes des années 1989/1990 - le montant des impôts pour lesquels la remise était sollicitée pour les années 1994 à 2001.

En ce qui concerne la question du lien causal, Monsieur … donne de nouveau à considérer que pour les années 1992 et 1993 il a obtenu, sans autre problème signalé, l’application de la dite mesure exceptionnelle.

Il ajoute que dès à présent même pour les années 2002 et 2003, il aurait obtenu l’application de cette mesure, de sorte qu’il ne comprendrait pas pourquoi le bureau lui refuserait la prise en compte des années 1994 à 2001.

Le délégué du Gouvernement pour sa part estime que Monsieur … n’aurait pas fourni les précisions supplémentaires demandées par le tribunal, le dossier volumineux par lui versé au tribunal après le jugement du 17 janvier 2005 répondant aux exigences d’une réclamation telle que basée sur le § 228 AO, mais non aux conditions relatives au contexte actuel tracé par le tribunal, à savoir celui de la remise d’impôt du § 131 AO.

Il est constant que le litige actuel se place dans le cadre du § 131 AO, selon lequel le directeur accordera une remise d’impôt ou une restitution dans la mesure où la perception d’un impôt, dont la légalité n’est pas contestée, entraînerait une rigueur incompatible avec l’équité, soit objectivement selon la matière, soit subjectivement dans la personne du contribuable.

En ce qui concerne l’existence d’un lien causal entre les coupes et ventes de bois et les tempêtes des années 1989/1990 Il ressort des pièces versées en cause que des ventes de bois ont été déclarées seulement pour les années 1994, 1995 et 1996, tandis que pour les 5 années subséquentes, à savoir 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001, aucune vente de bois n’a été déclarée.

Après examen des pièces versées par Monsieur … et question afférente lui posée au cours des plaidoiries, il appert que le demandeur se réfère pour établir l’existence d’un lien causal entre les coupes et ventes de bois des années 1994 à 1996 et les tempêtes des années 1989/1990 à un contrat de vente de bois conclu le 18 janvier 1992 entre lui-même et un dénommé Monsieur … au titre duquel « l’acheteur achète au lieu … l’entièreté des bois de coupe tant de hêtres et de chênes… dans le cadre de cette vente, l’acheteur s’engage à accepter tous les bois, sauf les fins de branches trop minces et à en dégager le terrain pour le 30 septembre 1992. Si ce délai ne peut être respecté, l’acheteur en avertira le sylviculteur-

vendeur, sans quoi le présent contrat peut être considéré comme échu ».

Or, la simple référence à un contrat de vente de bois conclu en 1992 et devant prendre fin en septembre 1992, pour le surplus se rapportant à un seul lieu, à savoir celui du … , ne saurait suffire pour établir l’existence d’un lien causal entre les ventes de bois déclarées pour les années 1994 à 1996 et les tempêtes de l’hiver 1989/1990. En ce qui concerne l’affirmation du demandeur en ce que le bureau d’imposition aurait appliqué pour les années 2002 à 2003 ladite mesure exceptionnelle, force est de constater qu’il s’agit d’une simple affirmation non autrement étayée par une pièce quelconque, de sorte que le tribunal ne saurait en tirer une quelconque conclusion par analogie pour les années précédentes.

A cela s’ajoute que ni cette pièce ni les explications fournies par le demandeur ne sont de nature à énerver les constatations faites le 29 septembre 1998 lors du rapport du réviseur sur la vérification de l’exploitation forestière de la communauté … et … , ayant existé à l’époque. En effet le réviseur a relevé que : « M. … déclare la quasi-totalité de ses recettes forestières réalisées pendant les années 1992 à 1996 comme revenu exonéré, comme étant en rapport avec les tempêtes de l’hiver 1989/90. Or en comparant les dégâts pour lesquels M. … a introduit des demandes en vue de subventions et les volumes des coupes vendues par la suite, il s’avère qu’à partir de l’exercice 1994, ces coupes dépassent de loin le volume du chablis déclaré et pour lesquels M … a touché des indemnités de l’Etat (voir tableau en annexe)1 et ensuite « Quant aux revenus exonérés dont question dans la circulaire LIR NS no 78/12, les coupes et ventes opérées jusqu’en 1993 inclusivement sont à considérer comme 1 Rapport de l’administration des Contributions directes du 29 septembre 1998, p. 3 2 mesure exceptionnelle étant en relation avec les tempêtes des mois de janvier à mars 1990. Les coupes et ventes des années 1994 et suivantes ont été dictées d’avantage par un but de lucre que par une nécessité absolue d’abattage pour cause de chablis »3et encore « Quant aux recettes provenant surtout de l’exploitation forestière d’… , lieu …, M. … est d’avis que toutes les recettes et coupes concernées sont en relation avec les tempêtes de l’hiver 1990. Le réviseur, tout en reconnaissant le bien-fondé d’une exonération par voie gracieuse d’une partie des recettes, ne voit pas l’opportunité d’exonérer les recettes réalisées après l’exercice 1993, puisqu’elles dépassent manifestement le cadre des dégâts déclarés auprès de l’administration des Eaux et Forêts, reconnus et indemnisés par cette administration. En cours de discussion M. … est invité à produire un certificat de l’administration des Eaux et Forêts attestant l’ampleur précise des dégâts subis sur toute l’étendue de sa propriété continue à …. A défaut de cette preuve tangible, le réviseur est d’avis que les ventes de bois des années 1994 à 1996 ne justifient pas l’application des mesures de la circulaire LIR/NS no 78/1 »4.

Le même fonctionnaire remarque encore dans un avis dressé en date du 25 août 1999 que « la photo aérienne prise le 30 mai 1991 au-dessus du lieu … montre qu’une grande partie de la forêt n’a pas souffert des tempêtes de 1990 » et ensuite « un hêtre abattu ne peut rester que quelque temps dans la forêt. Le bois du hêtre se dégrade très vite au bout de deux à trois ans. Pour cette raison les hêtres que M. … a vendus entre 1994 et 1996 ne sont à mon avis pas le résultat ou la suite directe des tempêtes de 1990 »5.

De tout ce qui précède, il résulte que le demandeur n’a, en l’état, pas établi à suffisance l’existence d’un lien causal entre les ventes de bois déclarées pour les années 1994 à 1996 et les tempêtes des années 1989/1990.

En ce qui concerne les montants de la remise d’impôts demandée Le tribunal constate, toujours au vu des pièces versées en cause, que le demandeur reste en défaut de préciser pour les années concernées le montant de la remise d’impôts à chaque fois sollicitée.

Etant donné que Monsieur … est resté en défaut d’éclaircir à suffisance le tribunal sur les deux points par lui soulevés à travers son jugement du 17 janvier 2005, le tribunal n’a ni pu retenir l’existence d’un lien causal entre les ventes déclarées pour les années 1994 à 1996 et les tempêtes des années 1989/1990, ni pu dégager les montants de la remise d’impôt sollicitée, de sorte que le recours introduit est à déclarer non fondé en l’état.

Etant donné que conformément aux dispositions combinées du § 131 AO et de l’article 8, paragraphe 3, point 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours principal en réformation, le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est irrecevable.

Par ces motifs, 3 Rapport de l’administration des Contributions directes du 29 septembre 1998, p. 5 4 Rapport de l’administration des Contributions directes du 29 septembre 1998, p. 6 5 Avis de l’administration des Contributions directes, Service de Révision du 25 août 1999, p. 2 le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

vidant le jugement du 17 janvier 2005 ;

au fond, déclare le recours en réformation non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 mars 2005 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17623b
Date de la décision : 23/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-23;17623b ?

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