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23/03/2005 | LUXEMBOURG | N°16966a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 mars 2005, 16966a


Tribunal administratif N° 16966a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 septembre 2003 Audience publique du 23 mars 2005 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre une décision du ministre de l’Environnement en matière d’établissements classés

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16966 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 septembre 2003 par Maître Jean-Louis SCHILTZ, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A., établie et ayan

t son siège social à L-…, tendant à la réformation d’un arrêté du ministre de l’Environnemen...

Tribunal administratif N° 16966a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 septembre 2003 Audience publique du 23 mars 2005 Recours formé par la société anonyme … S.A., … contre une décision du ministre de l’Environnement en matière d’établissements classés

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16966 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 septembre 2003 par Maître Jean-Louis SCHILTZ, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation d’un arrêté du ministre de l’Environnement référencé sous les numéros 1/00/0189 et 1/99/3021 datant du 4 août 2003, portant autorisation dans son chef d’exploiter et de procéder à l’extension d’une usine de fabrication de vernis à ongle, de solutions colorantes et de préparations pharmaceutiques sous le respect des conditions d’exploitation y plus amplement énoncées ;

Vu le jugement du tribunal administratif rendu en date du 31 mars 2004 dans cette affaire ;

Vu l’arrêt de la Cour administrative inscrit sous les numéros 18027C et 18043C du rôle rendu en date du 27 janvier 2005 sur requêtes d’appel respectivement déposées par la société anonyme … S.A. et l’Etat contre le jugement prévisé du 31 mars 2004 ;

Vu le mémoire complémentaire déposé en date du 8 mars 2005 par le délégué du Gouvernement pour compte de l’Etat ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Anne FERRY, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A. ;

Revu les pièces versées en cause et plus particulièrement la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire ainsi que Maître Anne FERRY et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 mars 2005.

La société anonyme … S.A., exploitant depuis 1985 dans la zone industrielle … une usine de fabrication de vernis à ongle, déposa en date du 11 août 1999 une demande d’autorisation auprès du ministre de l’Environnement pour l’extension de ses locaux administratifs. Cette demande fut complétée en date du 10 octobre 1999. Elle s’adressa au même ministre en date du 16 mai 2000 pour solliciter l’autorisation d’exploiter son usine et de procéder à son extension, cette deuxième demande ayant été complétée en date du 11 mai 2001.

Par arrêté référencé sous les numéros 1/00/0189 et 1/99/3021 du 4 août 2003, le ministre de l’Environnement accorda à la société anonyme … S.A. l’autorisation sollicitée sous réserve d’une série de conditions d’exploitation plus amplement énoncées dans le corps même dudit arrêté ministériel.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 septembre 2003, la société anonyme … S.A. a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation dudit arrêté ministériel du 4 août 2003, en faisant valoir que l’autorisation visée serait lacunaire et fixerait des conditions d’exploitation entachées de nullité, exorbitantes, illégales et non fondées aussi bien en fait qu’en droit.

Par jugement du 31 mars 2004, le tribunal administratif a reçu ledit recours en réformation en la forme et au fond l’a dit partiellement justifié en retenant ce qui suit :

« par voie de réformation dit o que parmi les éléments autorisés sont à énoncer expressément 10 cuves de stockage de 500 litres et 2 cuves de stockage de 1000 litres, soit un total de 7000 litres dans le hall A et un broyeur à billes de 20 litres dans le hall B ;

o que l’arrêté ministériel déféré est contraire à la loi pour autant qu’il impose à la société demanderesse des valeurs limites qui sont plus contraignantes que celles prévues par le règlement grand-ducal du 4 juin 2001 ;

o que les conditions libellées sub 9 à la page 11 et sub 17 à la page 35 de l’arrêté ministériel litigieux sont à omettre ;

déclare le recours non fondé dans la limite des moyens énoncés sub d), g), h), i) et j) ;

pour le surplus réserve la solution au fond ;

quant aux moyens énoncés sub c), e) et f) ci-avant, ordonne à la partie défenderesse de compléter le dossier par les considérations et, le cas échéant, les documents retenus à leur base, au vu desquels elle a pris la décision litigieuse dans ses volets plus amplement énoncés sous les points en question (…) » Sur requêtes d’appel déposées respectivement pour compte de la société anonyme … S.A. le 6 mai 2004 et pour l’Etat le 11 mai 2004 à l’encontre dudit jugement, la Cour administrative, par arrêt du 27 janvier 2005 référencé sous les numéros 18027C et 18043C, a déclaré les requêtes d’appel non fondées et a confirmé le jugement entrepris du 31 mars 2004 dans toute sa teneur.

L’instruction plus en avant de l’affaire pendante devant le tribunal administratif et y inscrite sous le numéro 16966 du rôle, telle que retenue à travers le dispositif du jugement du 31 mars 2004, ayant été suspendue pendant la procédure d’appel entre-

temps toisée par l’arrêt prévisé de la Cour d’appel du 27 janvier 2005, il y a lieu de reprendre l’instance et de procéder à l’examen des prises de position complémentaires versées au dossier à la suite dudit arrêt d’appel.

Concernant le moyen énoncé sub c) dans le jugement du 31 mars 2004 relatif à la condition d’exploitation III.16, le délégué du Gouvernement a complété la motivation à la base de la décision litigieuse en faisant valoir que le procédé de production (transvasement manuel de certaines substances) serait à la source d’émissions diffuses et qu’afin de pouvoir quantifier les émissions totales (diffuses et résiduaires) de l’établissement et de pouvoir contrôler ainsi le respect des limites d’émission, il serait indispensable que ces émissions passent par des ouvrages d’évacuation par le biais desquels on peut mesurer les débits d’air et faire analyser la composition des effluents. Il donne à considérer dans ce contexte que la limitation efficace des émissions diffuses ne serait possible que par le maintien d’une sous-pression dans l’atelier.

Quant au moyen énoncé sub e) dans le jugement du 31 mars 2004 relatif à la condition d’exploitation III.23, le représentant étatique, après reconsidération, propose d’abroger cette condition.

Concernant finalement le moyen énoncé sub f) dans le jugement du 31 mars 2004, relatif à la condition d’exploitation III.48, le délégué du Gouvernement fait valoir qu’elle serait le fruit d’une recherche littéraire sur l’efficacité des filtres à charbon actif dans la réduction des émissions de COV. Il indique, à titre d’exemple, les références de certaines publications qui comporteraient des informations relevantes afférentes.

Dans son mémoire complémentaire, la société … S.A. fait valoir que contrairement au tribunal, la Cour administrative, loin d’avaliser la possibilité accordée à l’Etat de compléter la motivation à la base de la décision litigieuse en cours d’instance contentieuse, a retenu que le ministre « était obligé, conformément à l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, d’indiquer de manière sommaire pour chacune desdites conditions, les raisons en droit ou en fait qui l’ont motivé à rendre plus strictes les contraintes à imposer au bénéficiaire de l’autorisation par rapport à celles envisagées par celui-ci, notamment en détaillant les raisons qui l’ont amené à retenir l’incompatibilité des conditions d’aménagement et d’exploitation ainsi envisagées par rapport aux exigences se dégageant de la législation existante en matière de protection de l’environnement ». Elle en déduit qu’en l’absence de tous motifs indiqués dans l’arrêté entrepris, il y aurait lieu de déclarer nulles, sinon illégales, sinon non fondées, voire mal fondées les dispositions sub 16 et 17 (page 12 de l’arrêté, point c) du jugement), sub 22 et 23 (page 13 de l’arrêt, point e) du jugement) et enfin sub 45, 46, 47 et 48 (page 16 de l’arrêt, point f) du jugement).

Eu égard aux conclusions étatiques relativement au moyen énoncé sub e) dans le jugement du 31 mars 2004 relatif à la condition d’exploitation III.23, il y a lieu, par voie de réformation, de retenir que l’exigence de l’installation d’une station de contrôle centrale devant de permettre de surveiller en permanence le système d’alimentation et de transformation d’énergie inscrite à la page 13, sous les points 22 et 23 de l’arrêté ministériel litigieux, est à omettre.

A travers son jugement du 31 mars 2004, le tribunal a réservé la solution au fond quant aux moyens énoncés sub c), e) et f) dudit jugement, de sorte qu’il reste investi au jour des présentes de sa plénitude de juridiction y relativement, pour toiser le fond ainsi réservé au regard notamment des enseignements jurisprudentiels plus récents à sa disposition.

Il importe de relever dans ce contexte que la Cour administrative a retenu dans son arrêt du 27 janvier 2005 que l’obligation d’indiquer les motifs se trouvant à la base de la décision, conformément à l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, s’impose en l’espèce étant donné que « la décision d’autorisation contient des conditions d’aménagement et d’exploitation telles qu’elles ont pour conséquence de dénaturer le projet tel que soumis au ministre par la demande en autorisation, en obligeant ainsi l’exploitant à réaliser un projet à des conditions financières ou techniques dépassant manifestement celles envisagées dans la demande ».

En effet, en toisant le reproche adressé par l’Etat aux premiers juges de lui avoir ordonné de compléter le dossier quant aux moyens énoncés sous lesdits points c), e) et f) du jugement entrepris au motif que la solution retenue comporterait « de par la nature des choses », une atteinte, du moins indirecte, à « l’égalité des armes du demandeur », la Cour a précisé à ce sujet que « la décision prise par le ministre de l’Environnement en date du 4 août 2003 porte substantiellement atteinte au projet tel qu’initialement envisagé par la société. Ainsi, dans la mesure où la décision du ministre de l’Environnement n’autorise pas le projet tel que lui soumis par la société anonyme …, mais impose des conditions d’aménagement et d’exploitation divergeant de manière importante de celles envisagées par la société, le ministre était obligé, conformément à l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, d’indiquer de manière sommaire, pour chacune desdites conditions, les raisons, en droit ou en fait, qui l’ont motivé à rendre plus strictes les contraintes à imposer au bénéficiaire de l’autorisation par rapport à celles envisagées par celui-ci, notamment en détaillant les raisons qui l’ont amené à retenir l’incompatibilité des conditions d’aménagement et d’exploitation ainsi envisagées par rapport aux exigences se dégageant de la législation existante en matière de protection de l’environnement ».

La Cour ayant relevé avec insistance et à d’itératives reprises que le ministre de l’Environnement n’a pas respecté l’article 6, alinéa 2 prévisé et que son comportement qui « révèle les difficultés qu’il éprouve afin de dévoiler les motifs qui l’ont amené à imposer certaines conditions plus contraignantes que celles initialement envisagées par le demandeur est manifestement contraire au souci de transparence qui est non seulement dans l’intérêt d’une bonne instruction des dossiers administratifs avant leur soumission aux juridictions administratives, mais qui constitue également l’un des objectifs se trouvant à la base du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 », le tribunal, en conformité avec l’arrêt ainsi rendu, est amené à faire droit purement et simplement aux conclusions initiales de la partie demanderesse, réitérées à travers son mémoire complémentaire du 18 mars 2005, basées sur un défaut de motivation suffisante de la décision litigieuse, entrevue à partir des conditions d’exploitation litigieuses, devant entraîner leur annulation.

En effet, eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, la décision litigieuse, entrevue à partir des conditions prescrites aux points 16 et 17 à la page 12 de l’arrêté ministériel litigieux concernant l’obligation de mettre en place une installation permettant le maintien en sous-pression atmosphérique des ateliers, halls, etc., ainsi que des conditions énoncées sub 45, 46, 47 et 48 à la page 16 de l’arrêté ministériel litigieux concernant les rejets de polluants de la fabrication, laisse de rencontrer les exigences légales de motivation et viole partant tant la lettre que l’esprit de l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, de sorte à devoir encourir, dans le cadre du recours en réformation, l’annulation partielle, concernant les conditions ainsi critiquées.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, vidant le jugement rendu en date du 31 mars 2004 inscrit sous le numéro 16966 du rôle ;

dit par voie de réformation que l’exigence de l’installation d’une station de contrôle centrale devant de permettre de surveiller en permanence le système d’alimentation et de transformation d’énergie inscrite à la page 13, sous les points 22 et 23 de l’arrêté ministériel litigieux, est à omettre ;

annule, dans le cadre du recours en réformation :

o les conditions prescrites à la page 12 aux points 16 et 17 de l’arrêté ministériel litigieux concernant l’obligation de mettre en place une installation permettant le maintien en sous-pression atmosphérique des ateliers, halls, etc., o les conditions énoncées à la page 16 sub 45, 46, 47 et 48 de l’arrêté ministériel litigieux concernant les rejets de polluants de la fabrication ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 mars 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 16966a
Date de la décision : 23/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-23;16966a ?

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