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17/03/2005 | LUXEMBOURG | N°19186

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 mars 2005, 19186


Tribunal administratif N° 19186 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 janvier 2005 Audience publique du 17 mars 2005

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Requête en relevé de forclusion introduite par Monsieur …, … en présence du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19186 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 janvier 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxemb

ourg, au nom de M. …, né le … à Istog (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro) de nationalité serbo-monténé...

Tribunal administratif N° 19186 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 janvier 2005 Audience publique du 17 mars 2005

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Requête en relevé de forclusion introduite par Monsieur …, … en présence du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19186 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 janvier 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Istog (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro) de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 8 septembre 2004, lui notifiée le 20 septembre 2004, portant refus du statut de réfugié, telle que confirmée par décision dudit ministre du 8 novembre 2004 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 février 2005 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 février 2005 au nom et pour compte du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Radu DUTA, en remplacement de Maître Gilles PLOTTKE, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Jacqueline JACQUES en leurs plaidoiries respectives.

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Le 18 janvier 2005, M. … a fait déposer une requête tendant au relevé de la déchéance résultant de l'expiration du délai d'un mois imparti pour l'introduction d'un recours contentieux à l’encontre d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 8 septembre 2004 déclarant non fondée la demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 introduite par le demandeur, telle que cette décision a été confirmée, sur recours gracieux introduit par le demandeur le 19 octobre 2004, par décision ministérielle du 8 novembre 2004.

A l'appui de sa demande, M. … fait exposer que son premier mandataire aurait introduit un recours gracieux en date du 19 octobre 2004, soit en dehors du délai de recours légal d’un mois, malgré le fait que ce dernier aurait déjà reçu mandat au courant du mois de juillet 2004. Comme pour le surplus, lui-même ne maîtriserait pas la langue française, il n’aurait pas compris le contenu de la décision ministérielle négative qui a été prise à son encontre, de sorte qu’il aurait été dans l’impossibilité d’agir en justice dans le délai légalement imparti.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de la demande en relevé de déchéance pour manquer de fondement. Il signale plus particulièrement que le demandeur n’aurait pas été mis dans l’impossibilité d’agir par son mandataire initial, étant donné que la décision de refus initiale aurait été réceptionnée par le demandeur le 20 septembre 2004 et que le recours gracieux du 19 octobre 2004 aurait été formé dans le délai légal. Par contre, la décision ministérielle du 8 novembre 2004, envoyée par recommandé le lendemain, n’aurait pas été réclamée par le demandeur, et qu’eu égard au fait que la poste garde les envois recommandés pendant un mois au maximum, l’on pourrait partir du principe que les voies de recours auraient expiré au plus tard le 9 janvier 2005, d’autant plus qu’il ne ressortirait pas du dossier en quoi Monsieur … se serait trouvé dans l’impossibilité d’agir après le 8 novembre 2004.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur relève que la décision confirmative du 8 novembre 2004 indiquerait comme date de notification de la décision initiale le 17 septembre 2004, de sorte qu’il aurait été introduit en erreur quant à la date d’expiration du délai de recours gracieux. Pour le surplus, la décision confirmative du 8 novembre 2004 ne comporterait aucune indication « en matière de voies de recours » et que partant le délai du recours contentieux n’aurait pas commencé à courir. Finalement, le demandeur estime encore qu’à la date de reprise du mandat par son mandataire actuel en date du 14 janvier 2005 « tout recours administratif semblait néanmoins manifestement hors délais ».

La requête en relevé de déchéance, n’étant pas autrement contestée sous ce rapport, est recevable pour avoir été présentée suivant les formes et délai prévus par la loi.

La loi modifiée du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d'un délai imparti pour agir en justice dispose en son article 1er que « si une personne n'a pas agi en justice dans le délai imparti, elle peut, en toutes matières, être relevée de la forclusion résultant de l'expiration du délai si, sans qu'il y ait eu faute de sa part, elle n'a pas eu, en temps utile, connaissance de l'acte qui a fait courir le délai ou si elle s'est trouvée dans l'impossibilité d'agir ».

Il convient de relever en premier lieu que la décision initiale du 8 septembre 2004 fut confirmée par décision ministérielle du 8 novembre 2004, notifiée par deux envois recommandés du lendemain, tant à Monsieur … qu’à son mandataire. Partant, à l’heure actuelle, le délai pour introduire un recours contentieux a largement expiré, le demandeur expliquant cependant son inaction par le fait qu’il a cru que le recours gracieux avait déjà été introduit hors délai.

Or, force est de constater que le recours gracieux du 19 octobre 2004 a été intenté dans le délai légal d’un mois, étant donné que la décision de refus initiale a été adressée également au mandataire de Monsieur … en date du 20 septembre 2004, ainsi que cela ressort d’ailleurs du texte même du recours gracieux introduit par ce dernier, le tout en conformité avec l’article 10 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes.

Il s’ensuit que le demandeur n’avait non seulement connaissance de l’existence de la décision de refus initiale, mais que son mandataire avait encore intenté le recours gracieux dans le délai légal, de sorte que, sous ce regard, le demandeur ne rentre pas dans les prévisions d’un relevé de déchéance prévu par la loi.

Pour le surplus, même à admettre que le recours gracieux avait été introduit en dehors du délai légal, il convient encore de rappeler que dans l’hypothèse où un mandataire a été chargé par une personne en vue de l’introduction d’un recours dans une matière dans laquelle le droit de postulation d’un professionnel est la règle, comme celle sous rubrique réservant aux avocats à la Cour le monopole des recours à intenter au fond contre des décisions administratives individuelles, l’impossibilité d’agir n’est en principe pas donnée, lorsque le mandat pour agir a été conféré en temps utile au professionnel par le justiciable concerné, sauf hypothèse exceptionnelle d’éléments irrésistibles vérifiés dans le chef dudit mandataire (cf.

trib. adm. 2 octobre 2000, n° 12175 du rôle, Pas adm. 2004, V° Procédure contentieuse, n° 147 et autres références y citées).

Ce constat vaut également pour la période d’inaction suite à la notification de la décision confirmative, étant donné que le demandeur reste en défaut d’indiquer les raisons pour lesquelles il n’a pas chargé en temps utile un autre mandataire suite à la réception de la décision confirmative et il ne saurait non plus invoquer à l’heure actuelle une mauvaise analyse faite par ses mandataires quant à l’introduction du recours gracieux dans le délai légal.

Le demandeur se prévaut encore dans ce contexte du fait qu’il ne comprend pas le français, de sorte qu’il n’aurait pas compris le contenu de la décision ministérielle.

Il convient de relever de prime abord qu’on ne saurait reprocher au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir libellé la décision adressée au demandeur en français, étant donné que le français constitue une des trois langues administratives prévues par l’article 3 de la loi modifiée du 24 février 1984 sur le régime des langues, d’autant plus que Monsieur … fut assisté par un avocat.

Comme il n’existe par ailleurs pas de disposition législative ou réglementaire qui oblige l’administration à rédiger ses décisions dans une langue autre que celles prévues par la loi précitée du 24 février 1984 et comme il n’existe plus particulièrement aucune disposition l’obligeant à la rédiger ou à la faire traduire dans la langue maternelle du destinataire de l’acte en question, il appartenait au demandeur, au cas où il estimait ne pas être en mesure de comprendre le sens exact de l’acte qui lui a été notifié, de faire les diligences nécessaires dans un délai utile pour être en mesure de comprendre non seulement le sens mais également la portée exacts de ladite décision.

Finalement, l’affirmation du demandeur consistant à soutenir que le délai du recours contentieux n’a pas commencé à courir suite à la décision confirmative du 8 novembre 2004, n’est pas pertinente à l’appui d’une demande en relevé de déchéance, étant donné que dans pareil cas de figure le demandeur ne serait précisément pas forclos à agir.

La requête en relevé de forclusion n'est par voie de conséquence pas fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit la demande en relevé de forclusion en la forme ;

au fond, la dit non justifiée et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 17 mars 2005, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19186
Date de la décision : 17/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-17;19186 ?

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