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16/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18953

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 mars 2005, 18953


Tribunal administratif N° 18953 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 décembre 2004 Audience publique du 16 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18953 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 décembre 2004 par Maître Jean-Louis UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, né le … (Nigeria), de nationalitÃ

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Tribunal administratif N° 18953 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 décembre 2004 Audience publique du 16 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18953 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 décembre 2004 par Maître Jean-Louis UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, né le … (Nigeria), de nationalité nigériane, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 6 octobre 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 janvier 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 7 mars 2005 en présence de Maître Olivier LANG, en remplacement de Maître Jean-Louis UNSEN, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES en ses plaidoiries.

Monsieur … introduisit en date du 3 mai 2004 une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu en date du même jour par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Grand-

Duché de Luxembourg.

Il fut entendu le 5 octobre 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Monsieur … par décision du 6 octobre 2004, lui envoyée par courrier recommandé le 11 octobre 2004, de ce que sa demande a été refusée comme non fondée au motif qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays, de sorte qu’une crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un groupe social ne serait pas établie.

Le 26 octobre 2004, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 15 novembre 2004.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 décembre 2004, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation, sinon en annulation à l’encontre de la décision ministérielle du 6 octobre 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que la décision litigieuse violerait la loi étant donné que le ministre n’aurait pas apprécié à sa juste valeur sa situation spécifique et subjective ainsi que la situation objective de son pays d’origine qui serait telle qu’elle laisserait supposer une crainte légitime de persécution pour l’un des motifs visés par la Convention de Genève. Il fait valoir que l’Etat de Plateau State dans lequel il aurait eu l’habitude de se rendre afin de rendre visite à son père, serait marqué par de violentes et émeutes et des luttes acharnées entre personnes de confession musulmane et chrétienne.

Redoutant lui-même de devenir victime des prédits actes de barbarie et craignant pour sa vie, il aurait pris la décision de quitter son pays, étant donné qu’il ne se serait plus senti en sécurité. Il ajoute que s’il était certes vrai qu’il n’aurait jamais eu de problèmes auparavant avec les gens de confession musulmane, il n’en demeurerait pas moins qu’il aurait été menacé à un moment donné.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de retenir que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Le tribunal ne saurait pas non plus partager l’analyse du demandeur en ce que le ministre n’aurait pas apprécié à sa juste valeur sa situation spécifique et la situation objective régnant dans son pays. En effet, c’est à bon droit que le ministre a retenu que la demande d’asile du demandeur est basée sur des considérations d’ordre matériel et personnel, étant donné qu’il a répondu à la question : « What do you expect from Luxembourg’s authorities ? » : « I just want to work and go to school » en plus à la question « Nothing else ? » il répond: « Nothing. Just go to school and work ». Ensuite à la question : « Have you been personnally persecuted », il répond : « No », à la question : « Wich problems did you have in Nigeria? » il répond : « I don’t have a problem » et enfin à la question: « Have you been hunted or beaten by Moslems? », il répond : « I’ve never been beaten by Moslems before. But I’ve seen them burning cars, killing people and burning houses. I’ve run for my life ». C’est également à bon droit que le ministre a retenu que la crise religieuse entre musulmans et chrétiens invoquée par le demandeur justifierait tout au plus un sentiment d’insécurité général ne rentrant pas non plus dans le cadre de la Convention de Genève.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, déclare le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 mars 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18953
Date de la décision : 16/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-16;18953 ?

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