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09/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18164

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 mars 2005, 18164


Numéro 18164 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 juin 2004 Audience publique du 9 mars 2005 Recours formé par la société anonyme E., Luxembourg contre des bulletins d’impôt émis par le bureau d'imposition sociétés 2 en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18164 du rôle, déposée le 3 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour

, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme E., ...

Numéro 18164 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 juin 2004 Audience publique du 9 mars 2005 Recours formé par la société anonyme E., Luxembourg contre des bulletins d’impôt émis par le bureau d'imposition sociétés 2 en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18164 du rôle, déposée le 3 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme E., ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation  du bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités pour l’année 1997,  du bulletin de l’impôt commercial communal pour l’année 1997,  du bulletin d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 1998,  du bulletin de l’impôt sur la fortune pour les années 1998, 1999 et 2000, tous émis le 24 octobre 2002 par le bureau d'imposition sociétés 2;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 2004;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 décembre 2004 par Maître Pierre METZLER pour compte de la société anonyme E.;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Carolina SALMONA, en remplacement de Maître Pierre METZLER, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-

Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 janvier 2005.

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Constituée le 30 mars 1992 et ayant son siège social depuis lors à Luxembourg, la société anonyme E., préqualifiée, a pour objet social l’entremise de produits informatiques de toute sorte ainsi que le service de consultation y afférent, l’acquisition, l’administration et la réalisation de participations dans des entreprises et sociétés nationales et étrangères.

A titre des années d’imposition 1992 à 1996, la société E. fut soumise en qualité de contribuable résident au Luxembourg à l’impôt sur le revenu des collectivités, à l’impôt commercial communal et à l’impôt sur la fortune.

Suite à une enquête par lui effectué, le Finanzamt de Bergheim (République Fédérale d’Allemagne) confirma, par lettre du 16 avril 1999, à la société E. que « wie telefonisch besprochen wird hiermit zur Vorlage bei der luxemburgischen Finanzverwaltung bestätigt, dass die Firma E. S.A., …, hier als unbeschränkt steuerpflichtige Körperschaft steuerlich erfasst ist, weil sich der Sitz der Geschäftsleitung am Wohnsitz des alleinigen Gesellschafters der E. S.A., Herrn Dieter B.,…, befindet ».

Le même Finanzamt de Bergheim émit le 28 avril 1999 à l’égard de la société E. les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’impôt de l’impôt commercial communal et de l’impôt commercial communal pour l’année 1997 à travers lesquels elle fut imposée en tant que contribuable résident de la République Fédérale d’Allemagne.

Comme suite à un courrier de la société E. du 8 juin 1999 attirant l’attention sur cette positon des autorités allemandes quant à sa qualité de contribuable résident allemand, le bureau d'imposition sociétés 2 de la section sociétés du service d’imposition de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d'imposition », prit, par lettre du 28 juin 1999, position comme suit :

« Suite à votre lettre, par laquelle vous affirmez que la société sous rubrique est pleinement imposable en Allemagne, nous vous rendons attentifs au fait qu’il s’agit d’une société de droit luxembourgeois qui a comme seule activité la prise de participations.

Les créances, avoirs en banque et participations détenues, même s’il s’agit de participations dans des sociétés étrangères, représentent toujours de la fortune luxembourgeoise. D’autre part l’assiette de l’impôt sur la fortune au 1.1.1997, coulée en force de chose jugée, a été établie suivant vos indications.

L’impôt sur la fortune restera donc fixé à son montant initial et les déclarations fiscales à déposer devront renseigner tous les revenus de la société.

Veuillez agréer, … ».

La société E. ayant fait déposer ses déclarations fiscales pour l’année 1997 le 16 décembre 1999, le bureau d'imposition lui adressa le 24 septembre 2002 des copies de projets de bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de fixation des avances à partir du 4e trimestre 2002, tout en l’invitant à soumettre ses objections éventuelles avant le 15 octobre 2002.

En date du 24 octobre 2002, le bureau d'imposition émit à l’égard de la société E. les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune pour l’année 1997, ainsi que d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 1998 suivant lesquels la société E. fut qualifiée de contribuable résident luxembourgeois.

Sa réclamation du 24 janvier 2003 à l’encontre de ces bulletins étant restée sans réponse de la part du directeur de l’administration des Contributions directes, la société E. a fait introduire, par requête déposée le 3 juin 2004, un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins susvisés de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune pour l’année 1997, ainsi que d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 1998.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8 (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre un bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal, de l’impôt sur la fortune et d’établissement de la valeur unitaire en l’absence d’une décision du directeur de l’administration des Contributions direct ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre ces mêmes bulletins. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est en conséquence irrecevable.

Le recours en réformation encourt cependant l’irrecevabilité dans la mesure où il est dirigé contre le bulletin d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 1998 du 24 octobre 2002, étant donné que ce bulletin a pour seul objectif la détermination d’une base d’imposition, à savoir la valeur unitaire, sans inclure une décision quant à l’imposabilité de cette base d’imposition dans le chef du contribuable visé et sans fixer une cote d’impôt y relative. Par contre, le recours est recevable pour le surplus pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

En présence des dispositions de l’article 5 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, dont l’alinéa (1) confère au délégué du gouvernement un délai de trois mois pour fournir sa réponse à la requête introductive et dont l’alinéa (5) dispose que ce délai est prévu à peine de forclusion, le tribunal est amené à vérifier d’office si le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 8 novembre 2004 répond aux exigences de délai ainsi posées, les dispositions prévisées étant à considérer comme étant d’ordre public en tant que touchant à l’organisation juridictionnelle (cf. trib. adm. 14 février 2001, n° 11607, Pas. adm. 2004, v° Procédure contentieuse, n° 363).

La requête introductive d’instance sous analyse ayant été déposée le 3 juin 2004, le délai pour le dépôt des mémoires en réponse a expiré le 3 novembre 2004. Il s’ensuit qu’à défaut de prorogation du délai accordée par voie d’ordonnance, le mémoire en réponse susvisé du délégué du gouvernement a été déposé tardivement et doit être écarté. Dans la mesure où le mémoire en réplique déposé pour compte de la société E. ne constitue que la prise de position face au mémoire en réponse du délégué du gouvernement, il est pareillement à écarter.

A l’appui de son recours, la société E. se prévaut des dispositions de la Convention conclue entre le Grand-Duché de Luxembourg et la République Fédérale d’Allemagne tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune et en matière d’impôt commercial et d’impôt foncier, signée à Luxembourg le 23 août 1958, ci-après désignée par la « Convention », et argue qu’en application de l’article 3 paragraphes (5) et (6) de la Convention, son domicile fiscal devrait être fixé au lieu réel de la direction commerciale, à savoir à l’endroit où la personne ou le collège détenant les plus hautes fonctions dans la société exerce son activité, en l’occurrence l’endroit où se déroulent les assemblées des actionnaires et les réunions des administrateurs. Elle soutient que cette définition correspondrait à la fois à celle retenue par le commentaire de la convention-modèle de l’OCDE et celui retenu comme alternative en droit interne par l’article 159 (1) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR ». Elle ajoute que dans l’hypothèse de l’espèce d’un actionnaire majoritaire, il faudrait également prendre en considération le lieu du domicile de ce dernier lorsqu’il exerce effectivement une influence déterminante sur la gestion quotidienne de la société.

La société E. soutient qu’en transposant ces principes en l’espèce, les éléments suivants devraient être pris en considération :

 les activités de la société E. consistent en l’administration et la réalisation des participations et comptes bancaires détenus par elle ; elle détenait durant toute l’année 1997 une participation de 40% dans le capital de la société à responsabilité limitée de droit allemand ID Innovative Datenverarbeitung GmbH, ayant son siège social à Kevelaer (D), les parts restantes ayant été détenues par deux personnes physiques à raison de 30% chacune ;

 l’adminstrateur de la société E. prendrait régulièrement part aux réunions de la société ID Innovative Datenverarbeitung GmbH qui auraient lieu exclusivement en Allemagne ;

 Monsieur B., président du conseil d’administration, demeurant à Bedburg (D), aurait détenu en 1997 une participation de 98,33% (soit 59 parts sociales sur 60) dans le capital de la société E. et aurait obtenu une procuration de l’assemblée générale tenue le 1er juillet 1996 de représenter la société dans tous ses actes juridiques ;

 Monsieur B. détiendrait le pouvoir de signature individuelle sur le compte courant de la société E. ouvert auprès d’une banque luxembourgeoise et les extraits de compte afférents seraient toujours envoyés à l’adresse de Monsieur B. en Allemagne ;

 les factures à la société E. auraient toujours été envoyées à l’adresse de Monsieur B. en Allemagne ;

 toutes les assemblées générales ordinaires des actionnaires auraient été tenues en Allemagne ;

 tous les administrateurs de la société E. auraient résidé durant l’année 1997 en Allemagne et aux Etats-Unis ;

 la société E. n’aurait disposé durant l’année 1997 d’aucun établissement stable au Luxembourg où elle n’aurait été que domiciliée.

La société déduit de l’ensemble de ces éléments que sa direction commerciale aurait été exercée en Allemagne et non au Luxembourg, que son siège réel divergerait de son siège statutaire et qu’en conséquence, elle aurait dû être considérée comme contribuable résidant en Allemagne, conformément à l’article 3 de la Convention. La société E. précise encore qu’elle n’aurait pas disposé d’un établissement stable au Luxembourg à défauts d’équipements entretenus sur le territoire.

Concernant plus particulièrement l’impôt sur le revenu des collectivités, la société E.

soutient qu’elle n’aurait retiré aucun revenu de source luxembourgeoise imposable au vœu de l’article 159 LIR dans le chef des collectivités non résidentes, les intérêts perçus par les avoirs en comptes étant soumis à l’impôt allemand conformément à la Convention.

Relativement à l’impôt sur la fortune, la société E. avance qu’elle ne saurait être soumise à ce dernier que dans les limites admises par la Convention, nonobstant les dispositions nationales éventuellement contraires, et qu’aucune des prémisses à une soumission partielle à cet impôt, à savoir l’existence d’un capital stable ou d’un établissement au Luxembourg, ne se trouverait vérifiée dans son cas.

Conformément à l’article 159 (1) LIR, « sont considérés comme contribuables résidents passibles de l’impôt sur le revenu des collectivités, les organismes à caractère collectif énumérés ci-après, pour autant que leur siège statutaire ou leur principal établissement se trouve sur le territoire du Grand-Duché. A. – 1. les sociétés de capitaux.

Sont considérées comme telles les sociétés anonymes … ».

De même, le paragraphe 1er (1) de la loi modifiée du 16 octobre 1934 concernant l’impôt sur la fortune, communément désignée « Vermögenssteuergesetz » (VStG), dispose que « unbeschränkt vermögenssteuerpflichtig sind : (..) 2. die folgenden Körperschaften, Personenvereinigungen und Vermögensmassen, die ihre Geschäftsleitung oder ihren Sitz im Inland haben: a) Kapitalgesellschaften … ».

Ces deux dispositions légales instaurent deux critères alternatifs pour déterminer si un contribuable a le statut de résident pour l’application des impôts respectifs, à savoir le siège statutaire et le principal établissement, voire la « Geschäftsleitung », de sorte que, si l’un des deux critères se trouve vérifié dans le chef d’un contribuable, il est à qualifier de contribuable résident alors même qu’il ne satisfait pas à l’autre critère.

En l’espèce, étant donné qu’il résulte des éléments incontestés que la société E. a son siège statutaire au Luxembourg et, plus précisément, à Luxembourg, 119, avenue de la Faïencerie, l’un des deux critères alternatifs prévus par l’article 159 (1) LIR et le paragraphe 1er (1) VStG se trouve vérifié dans le chef de la société E. et c’est partant par une juste application du droit interne que le bureau d'imposition a qualifié la société E. de contribuable résident soumis en principe au Luxembourg à l’imposition de ses revenus et fortune mondiaux.

En ce qui concerne l’impôt commercial communal, le paragraphe 2 de la loi modifiée du 1er décembre 1936 concernant l’impôt commercial communal, communément appelée « Gewerbesteuergesetz » (GewStG), ne soumet à cet impôt que les entreprises commerciales indigènes (« jeder stehende Gewerbebetrieb, soweit er im Inland betrieben wird »). Or, au vu du siège social luxembourgeois de la société E. et de la localisation de ses avoirs auprès de banques luxembourgeoises, le bureau d'imposition a valablement pu conclure à l’existence d’une entreprise indigène dans le chef de la société E. dont les bénéfices dégagés étaient soumis à l’impôt commercial communal.

Il résulte cependant de la lettre du Finanzamt de Bergheim du 16 avril 1999 et des bulletins d’impôt émis le 28 avril 1999 par le même Finanzamt que ce dernier se fonde sur le critère du principal établissement prévu par le paragraphe 1er de la loi allemande concernant l’impôt sur le revenu des collectivités (Körperschaftssteuergesetz) pour qualifier la société E.

de contribuable résident allemand conformément au droit interne allemand.

En présence de cette double qualification de contribuable résident de la société E. tant en République Fédérale d’Allemagne et au Luxembourg et afin de résoudre le conflit de compétences en découlant, il y a lieu de se référer aux dispositions de la Convention et, plus particulièrement, à son article 3 paragraphes (5) et (6) qui disposent comme suit :

« (5) Eine juristische Person hat ihren Wohnsitz im Sinne dieses Abkommens in dem Vetragsstaat, in dem sich der Ort ihrer Leitung befindet. Hat sie in keinem der Vetragsstaaten den Ort ihrer Leitung, so ist der Ort ihres Sitzes massgebend.

(6) Ort der Leitung im Sinne dieses Abkommens ist der Ort, an dem sich der Mittelpunkt der geschäftlichen Oberleitung befindet. Befindet sich der Ort der Leitung eines Schiffahrtunternehmens an Bord eines Schiffes, so gilt als Ort der Leitung im Sinne dieses Abkommens der Ort des Heimathafens des Schiffes ».

Dans la mesure où la notion de « Mittelpunkt der geschäftlichen Oberleitung » se trouve également inscrite parallèlement dans le paragraphe 15 (1) de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, communément appelée « Steueranpassungsgesetz » (StAnpG), applicable au Luxembourg, et dans le paragraphe 10 de la loi générale des impôts allemande, il y a lieu de considérer que tant l’article 3 (6) de la Convention que ces dispositions respectives de droit interne visent en substance le siège de l’administration où se concentre l’activité de conduite des affaires sociales et qui correspond en principe à l’endroit où se tiennent les assemblées générales des actionnaires et les conseils d’administration.

Or, la société E. expose, sans être contredite à cet égard, que toutes les assemblées générales ordinaires des actionnaires auraient été tenues en Allemagne et, plus particulièrement pour l’époque en cause, au domicile du président du conseil d’administration, que tous ses administrateurs auraient résidé durant l’année 1997 en Allemagne et aux Etats-Unis et que le président du conseil d’administration, muni d’une procuration de l’assemblée générale tenue le 1er juillet 1996 de représenter la société dans tous ses actes juridiques et ayant détenu à l’époque 59 actions sur un total de 60, aurait assuré la gestion de la société E. à partir de son domicile allemand, fait dont témoigne l’envoi des extraits bancaires et des factures à son domicile allemand.

Il y a lieu de conclure à partir de ce faisceau d’indices concordants que la conduite des affaires sociales de la société E. était concentrée pour l’année d’imposition 1997 en Allemagne et non pas au Luxembourg où se trouvait établi le seul siège statutaire, de sorte qu’en application de l’article 3 de la Convention, la société E. était à considérer comme domiciliée en République Fédérale d’Allemagne pour cette même période.

En ce qui concerne la répartition du droit d’imposition du bénéfice réalisé par la société E. entre l’Allemagne et le Luxembourg, l’article 5 (1) de la Convention dispose que « bezieht eine Person mit Wohnsitz in einem der Vertragsstaaten als Unternehmer oder Mitunternehmer Einkünfte aus einem gewerblichen Unternehmen, dessen Tätigkeit sich auf das Gebiet des anderen Staates erstreckt, so hat der andere Staat das Besteuerungsrecht für diese Einkünfte nur insoweit, als sie auf eine dort befindliche Betriebsstätte des Unternehmens entfallen ».

Dans la mesure où la société E. fait valoir que son activité aurait consisté en l’administration et la réalisation des participations et comptes bancaires détenus par elle et où l’existence d’une infrastructure fixe (« feste Geschäftseinrichtung ») au sens de l’article 2 (1) 2. de la Convention, constitutive d’un établissement stable, ne se trouve établie en cause et est même contestée par la société E., il y a lieu d’admettre que le Luxembourg n’était pas en droit de soumettre le bénéfice réalisé par la société E. à un impôt visé par la Convention pour l’année 1997.

La même conclusion s’impose dans le cadre de l’imposition de la fortune de la société E., étant donné que l’article 19 (1) de la Convention confère cette compétence en ce qui concerne la fortune d’exploitation d’une entreprise commerciale à l’Etat signataire auquel incombe également le droit d’imposer les revenus dégagés par cette fortune.

Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours est fondé et que les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune du 24 octobre 2002 encourent la réformation en ce sens que la société E. était à considérer comme contribuable non résident et n’était pas soumis auxdits impôts luxembourgeois du chef de son bénéfice réalisé durant l’année 1997 et de sa fortune au 1er janvier 1998.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, déclare le recours en réformation irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre le bulletin d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 1998 du 24 octobre 2002, reçoit le recours principal en réformation en la forme pour le surplus, écarte le mémoire en réponse du délégué du gouvernement et le mémoire en réplique déposé pour compte de la société E. à sa suite, au fond, déclare le recours en réformation justifié, partant, par réformation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune du 24 octobre 2002, dit que la société E. était à considérer comme contribuable non résident durant l’année 1997 et n’était pas soumis auxdits impôts luxembourgeois du chef de son bénéfice réalisé durant l’année 1997 et de sa fortune au 1er janvier 1998, renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes en vue de sa transmission au bureau d'imposition compétent, déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable, condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, M. SPIELMANN, juge, et lu à l’audience publique du 9 mars 2005 par le vice-président en présence de M.

LEGILLE, greffier.

s. LEGILLE s. CAMPILL 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18164
Date de la décision : 09/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-09;18164 ?

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