La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18553

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 07 mars 2005, 18553


Tribunal administratif N° 18553 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 août 2004 Audience publique du 7 mars 2005 Recours formé par Madame …, épouse …, … contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

_________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18553 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 août 2004 par Maître François PRUM, avocat à la Cour, inscrit

au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, épouse …, « Architektin », ...

Tribunal administratif N° 18553 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 août 2004 Audience publique du 7 mars 2005 Recours formé par Madame …, épouse …, … contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

_________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18553 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 août 2004 par Maître François PRUM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, épouse …, « Architektin », demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 28 mai 2004 portant refus de lui délivrer une autorisation d’établissement en vue de l’exercice de la profession d’architecte au Luxembourg, permettant son inscription à l’Ordre des architectes et ingénieurs-conseils ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement en date du 28 octobre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en nom et pour le compte de la demanderesse en date du 23 novembre 2004 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement en date du 14 décembre 2004 ;

Vu les pièces versées au dossier et la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître François DELVAUX, en remplacement de Maître François PRUM, et Monsieur le délégué Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

___________________________________________________________________________

Madame …, épouse …, née le … à Konz, demeurant à Luxembourg, a été inscrite en date du 21 mars 1991 en tant que « Innenarchitektin » sur la « Architektenliste der Architektenkammer Rheinland-Pfalz », suivant certificat de cette dernière du 17 mai 1991, pour y être inscrite en tant que « Innenarchitektin (freischaffend) » en date du 28 août 1996 suivant certificat du 2 septembre 1996.

En date du 3 août 1999, Madame … s’est vu délivrer par le ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement, ci-après dénommé le « ministre », l’autorisation d’établissement d’exercer la profession libérale d’architecte d’intérieur.

Par décision du 3 décembre 2003 de la « Architektenkammer Rheinland-Pfalz », Madame … a été inscrite sur la « Architektenliste bei der Architektenkammer Rheinland-

Pfalz in der Fachrichtung Architektur (gem. §5 Abs.4 ArchG) als selbständig tätig (…)», suivant certificat du 16 décembre 2003.

Par courrier de son mandataire du 30 janvier 2004, Madame … a sollicité de la part du ministre, en application de la directive 85/384/CEE du Conseil du 10 juin 1985 visant à la reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres du domaine de l’architecture et comportant des mesures destinées à faciliter l’exercice effectif du droit d’établissement et de libre prestation de services, désignée ci-après par « la directive 85/384 », la délivrance d’une autorisation d’établissement permettant l’exercice à Luxembourg de la profession d’ « Architektin » en vue de son inscription à ce titre à l’Ordre des architectes et ingénieurs-

conseils, désigné ci-après par l’« OAI ».

Ladite demande en obtention d’une autorisation d’établissement a été rappelée par deux courriers du mandataire de Madame … datés des 12 mars et 12 mai 2004 à l’adresse du ministre, à travers lesquels le mandataire précisa que Madame … « n’entend pas s’inscrire à l’OAI en tant que prestataire occasionnel de services en vue de la réalisation d’un projet déterminé », mais « au contraire, en sa qualité d’« Architektin » inscrite à un ordre allemand, elle demande purement et simplement son inscription à l’OAI, alors qu’elle entend s’établir à Luxembourg sous son titre d’origine d’« Architektin » ».

Le 18 mai 2004, la commission prévue à l’article 2 de la loi du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales émit à l’unanimité des voix un avis défavorable au sujet de la qualification professionnelle de Madame …, au motif que les « conditions CE » ne seraient pas remplies et que « le diplôme universitaire dans la spécialité générale de l’architecture fait défaut, le diplôme est un diplôme d’architecture d’intérieur, qui est distinct du diplôme requis pour l’architecture générale (de la construction). Le fait que les autorités allemandes accordent une équivalence basée notamment sur l’accomplissement d’une pratique professionnelle en tant qu’architecte est inopposable au pays d’accueil en cas d’établissement. Seules des prestations de services à partir de l’Allemagne, où elle est établie, peuvent être réalisées au Grand-Duché ».

Suivant décision du 28 mai 2004, le ministre a refusé de faire droit à la demande de Madame … tendant à l’obtention d’une autorisation d’établissement aux motifs libellés comme suit :

« Par la présente, j’ai l’honneur de me référer à votre demande sous rubrique, qui a fait entre-temps l’objet de l’instruction administrative prévue à l’article 2 de la loi d’établissement du 28 décembre 1988, modifiée le 4 novembre 1997.

Le résultat m’amène à vous informer que l’exercice de la profession d’architecte est soumis à la détention d’un des titres prévus à la directive 85/384/CEE du 10 juin 1985 (architectes) et à l’article 19, (1), a) de la loi d’établissement précitée.

Or, le diplôme de Madame Maria … ne porte pas sur la spécialité et ne correspond par conséquent pas à ces exigences. Dans ces conditions, je suis au regret de ne pouvoir faire droit à votre requête pour défaut d’accomplissement des conditions de capacité professionnelle requises.

A toutes fins utiles, je vous signale que le diplôme de « Diplom-Designer (FH), Studiengang : Innenarchitektur » de la dame précitée est un diplôme spécifique portant notamment sur l’architecture d’intérieur et est distinct de celui requis pour l’architecture générale (de la construction). Le fait que les autorités allemandes accordent une équivalence avec le diplôme d’architecte, basée notamment sur l’accomplissement d’une pratique professionnelle auprès d’un architecte, est inopposable au pays d’accueil en cas d’établissement. Seules les prestations de services à partir de l’Allemagne, où elle est établie, peuvent être réalisées au Grand-Duché de Luxembourg.

Madame Maria … voudra dans ces conditions m’indiquer, dans ce dernier cas, préalablement le lieu du chantier et le maître d’ouvrage ».

Par requête déposée le 16 août 2004, Madame … a introduit un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision précitée du ministre du 28 mai 2004.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (trib. adm. 28 mai 1997, Pas. adm. 2004, V° Recours en réformation, n° 5).

Une disposition légale qui crée et organise des voies de recours contre une décision constitue une qualité inhérente à la décision elle-même et l’existence de cette voie de recours est régie, en l’absence de mesures transitoires, par la loi sous l’empire de laquelle a été rendue la décision attaquée (v. Juris-classeur de procédure civile, fasc. 61, n° 72; R.T.D.C. 1976, p.

182).

En l’espèce, le tribunal est saisi d’une affaire où l’introduction du recours contre la décision ministérielle litigieuse se situe postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 9 juillet 2004 modifiant la loi précitée du 28 décembre 1988, qui a eu lieu le 15 août 2004, alors que la prise de la décision critiquée est antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 9 juillet 2004.

Il se pose dès lors la question de l’applicabilité de la loi du 9 juillet 2004 au recours sous analyse dans la mesure où il est dirigé contre la décision du 28 mai 2004.

A défaut de mesures transitoires réglant la question, l’admissibilité du recours introduit est régi par les dispositions légales en vigueur au moment où la décision a été prise.

Etant donné que l’article 2, dernier alinéa de la loi précitée du 28 décembre 1988, telle que modifiée par la loi du 19 décembre 2002, sous l’empire de laquelle la décision ministérielle déférée a été prise, prévoit que le tribunal administratif statue comme juge d’annulation en matière d’autorisations d’établissement, le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.

Le recours en annulation, introduit en ordre subsidiaire, ayant par ailleurs été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse fait valoir que ce serait à tort que le ministre aurait refusé sur base de l’article 19. (1) a) de la loi précitée du 28 décembre 1988 et de la directive 85/384 la délivrance de l’autorisation d’établissement sollicitée, au motif que l’« Urkunde » délivrée le 3 décembre 2003 par l’« Architektenkammer Rheinland-Pfalz » constituerait un « titre » au sens de l’article 2 de la directive 85/384, auquel le Grand-Duché de Luxembourg devrait reconnaître sur son territoire le même effet qu’à un titre délivré par l’OAI.

Elle ajoute que son titre remplirait les exigences prévues aux articles 3 et 4 de la directive 85/384 en ce qui concerne la formation, ce qui aurait d’ailleurs été vérifié par les représentants de l’« Architektenkammer Rheinland-Pfalz » avant la délivrance dudit titre, tout en estimant que le contrôle et l’approbation subséquente lie en application de la directive 85/384 les autres Etats membres.

Dans ce contexte, elle soutient qu’elle remplirait les conditions de l’article 4, alinéa 2 de la directive 85/384 qui reconnaîtrait expressément comme satisfaisant à l’article 2 de ladite directive la formation des « Fachhochschulen » en République fédérale d’Allemagne en ce qu’elle aurait fait quatre années d’études universitaires et qu’elle disposerait d’une expérience professionnelle de plus de dix ans et d’un certificat délivré par l’ordre professionnel de la Rhénanie-Palatinat.

Pour le surplus, la demanderesse soutient que le ministre, en estimant que l’équivalence accordée par les autorités allemandes du diplôme d’architecte d’intérieur avec celui d’architecte est inopposable au pays d’accueil en cas d’établissement, aurait violé les principes de droit communautaire de la libre circulation des travailleurs et de la liberté d’établissement.

Le délégué du gouvernement rétorque que ce serait à bon droit que le ministre a refusé l’autorisation d’établissement sollicitée pour défaut de qualification professionnelle, au motif que la demanderesse ne remplirait pas les conditions de formation requises par l’article 19 de la loi précitée du 28 décembre 1988 et par la directive 85/384, étant donné que les « titres » de la demanderesse, à savoir le « Diplomprüfungszeugnis Studiengang Innenarchitektur » et le « Diplom-Designer (FH) », ne porteraient pas sur la spécialité de l’architecture « classique », mais seulement sur une partie de cette discipline, à savoir l’architecture d’intérieur. Or, la demande de Madame … viserait l’architecture générale de construction, laquelle serait expressément prévue par l’article 19 de la loi précitée du 28 décembre 1988 et l’article 11 a), 3ième tiret de la directive 85/384 exigerait que le diplôme porte la mention « Architektur/Hochbau », de sorte que les dispositions de la directive 85/384 et notamment celles relatives aux équivalences ne sauraient s’appliquer aux diplômes de Madame …. Il ajoute dans ce contexte que le « titre » invoqué par Madame … certifierait uniquement son inscription d’architecte en Allemagne et ne constituerait pas un titre de formation, tel qu’exigé par la directive 85/384.

Finalement, il donne à considérer que le fait pour les autorités allemandes d’accorder à Madame … une équivalence de sa formation avec le diplôme d’architecte de la construction, basée sur l’accomplissement d’une pratique professionnelle auprès d’un architecte, concernait uniquement l’Allemagne et n’engagerait aucunement le pays d’accueil.

Dans sa réplique, la demanderesse précise encore une fois qu’elle aurait été inscrite en sa qualité d’ « Architektin » à la « Architektenkammer Rheinland-Pfalz » et que ce serait à ce titre qu’elle solliciterait l’octroi d’une autorisation d’établissement et son inscription à l’OAI, de sorte que le litige sous analyse ne se résumerait pas à un problème d’équivalence, respectivement d’homologation de diplômes, mais viserait la reconnaissance d’un titre allemand, à savoir la reconnaissance de la décision du 3 décembre 2003 de la « Architektenkammer Rheinland-Pfalz », de sorte qu’il n’appartiendrait pas au ministre de vérifier les circonstances qui lui ont permises d’acquérir le titre d’« Architektin ». Elle insiste encore sur ce qu’elle ne demanderait pas l’homologation de ses diplômes allemands, mais la délivrance d’une autorisation d’établissement requise en vue de son inscription à l’OAI en sa qualité d’« Architektin ».

Elle expose que ce serait à tort que le représentant étatique soutiendrait que la décision allemande de lui accorder une équivalence de sa formation avec le diplôme d’architecte ne concernerait que l’Allemagne et ne serait pas opposable aux autorités du pays d’accueil au motif qu’il n’appartiendrait pas à ces dernières de faire la distinction entre une « Architektin » tout court et une « Architektin » par équivalence.

Enfin, elle fait noter que le ministre se contredirait lui-même en l’autorisant à exercer au Luxembourg la profession d’« Architektin » à titre de prestataire de services occasionnels à partir de l’Allemagne, mais refuserait de délivrer une autorisation d’établissement lui permettant d’exercer la profession d’« Architektin » à titre permanent.

Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement fait valoir que l’établissement et la prestation de services seraient deux notions juridiques différentes, que Madame … aurait sollicité une autorisation d’établissement afin d’exercer la profession d’architecte à partir de son établissement à Luxembourg, et non la prestation de services à partir de l’Allemagne. Il souligne que Madame … ne remplirait pas les conditions en vue d’un établissement, mais que le ministre reconnaîtrait son établissement en Allemagne ce qui lui permettrait de prester des services au Luxembourg sans autorisation conformément à l’article 20 de la loi précitée du 28 décembre 1988 sous réserve d’une déclaration préalable auprès des autorités compétentes du pays.

La demande en obtention d’une autorisation d’établissement introduite par la demanderesse tend à l’exercice de la profession d’architecte indépendant.

D’après l’article 1er (1) de la loi précitée du 28 décembre 1988, nul ne peut à titre principal ou accessoire exercer la profession d’architecte sans autorisation écrite délivrée par le ministre ayant dans ses attributions les autorisations d’établissement, à moins qu’il n’en soit disposé autrement par la loi.

L’article 3 de la loi précitée du 28 décembre 1988 dispose que l’autorisation ne peut être accordée qu’à condition de présenter les garanties nécessaires de qualification professionnelle.

A ce sujet, l’article 19. (1) a) de ladite loi prévoit que « la qualification professionnelle des architectes résulte de la possession d’un diplôme universitaire ou d’un certificat de fin d’études de niveau universitaire, délivré par un établissement d’enseignement supérieur reconnu par l’Etat du siège de l’établissement et sanctionnant l’accomplissement avec succès d’un cycle complet de quatre années d’études.

La qualification professionnelle des architectes qui sont ressortissants d’un des pays membres de la Communauté Européenne résulte de la production des diplômes, certificats et autres titres prévus par les directives du Conseil CEE dans le domaine de l’architecture (N°s 85/384, 85/614 et 86/17) conformément aux conditions y prévues.

Pour les architectes et pour les ingénieurs de la construction, les preuves de qualification susmentionnés devront être complétées par un stage auprès du professionnel de la branche ; cette pratique professionnelle d’une durée d’un an doit être effectuée postérieurement à l’obtention des diplômes, certificats et autres titres ».

La directive 85/384 prévoit dans le cadre de deux régimes distincts la reconnaissance automatique par les Etats membres de certains diplômes du domaine de l’architecture délivrés dans les autres Etats membres.

D’une part, les articles 2 à 9 de la directive 85/384 organisent un régime de reconnaissance mutuelle automatique de tous les titres obtenus par des formations qui répondent aux critères, quant au contenu et à la durée, qu’ils énoncent.

Ainsi, en vertu de l’article 2 de la directive 85/384, « chaque Etat membre reconnaît les diplômes, certificats et autres titres obtenus par une formation répondant aux exigences des articles 3 et 4 et délivrés aux ressortissants des Etats membres par les autres Etats membres ». La reconnaissance est automatique pour les diplômes concernés, c’est-à-dire ceux qui répondent aux exigences de la directive 85/384 et qui sont, conformément à l’article 7 de ladite directive, indiqués dans une liste publiée par la Commission au Journal officiel des Communautés européennes.

D’autre part, les articles 10 à 15 de la directive 85/384 établissent un régime de reconnaissance mutuelle de certains titres limitativement énumérés. Il s’agit, d’après l’article 10, des diplômes, certificats et autres titres, visés à l’article 11, délivrés par les autres Etats membres aux ressortissants des Etats membres qui sont déjà en possession de ces qualifications à la date de la notification de la directive 85/384 ou ayant commencé leurs études sanctionnées par ces diplômes, certificats et autres titres au plus tard au cours de la troisième année académique suivant ladite notification.

Il échet de prime abord de relever que la directive 85/384 vise la reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres du domaine de l’architecture obtenus par une formation dans un autre Etat membre. Le « titre » délivré par la « Architektenkammer Rheinland-Pfalz » attestant l’inscription de la demanderesse comme architecte en Allemagne n’étant pas un titre de formation, il ne saurait rentrer dans le champ d’application de la directive 85/384, de sorte que le moyen de la demanderesse tendant à faire reconnaître ce « titre » sur base de l’article 2 de la directive 85/384 est à rejeter comme non fondé.

Il convient dès lors d’examiner si le titre de formation dont la demanderesse est titulaire est susceptible d’être reconnu sur base des dispositions de la directive 85/384.

Il est constant en cause que la demanderesse est titulaire du « Diplomprüfungszeugnis Studiengang Innenarchitektur » conférant le titre de « Diplom-Designer FH » délivré par la « Fachhochschule des Landes Rheinland-Pfalz ».

Etant donné qu’il a déjà été jugé par le présent tribunal (cf. trib. adm. 3 février 1999, n° 9791 du rôle) que le prédit diplôme, délivré par la « Fachhochschule des Landes Rheinland-Pfalz » à Madame … en date du 24 juin 1985, n’est pas à comprendre parmi les diplômes, certificats et autres titres au sens des articles 10 et 11 de la directive 85/384, il n’y a pas lieu de revenir sur cette question.

Il reste à examiner si ledit diplôme rentre dans le champ d’application des articles 2 à 9 de la directive 85/384.

En ce qui concerne les formations suivies dans une « Fachhochule » en Allemagne, comme c’est le cas en l’espèce, l’article 4 paragraphe 1 de la directive 85/384 prévoit en son second alinéa une dérogation à la règle d’un minimum de quatre années d’études à plein temps dans une université telle qu’énoncée à l’alinéa premier du même article, en reconnaissant comme satisfaisant à l’article 2 « la formation des « Fachhochschulen » en république fédérale d’Allemagne dispensée en trois années, existant au moment de la notification de la présente directive, répondant aux exigences définies à l’article 3 et donnant accès aux activités visées à l’article 1er dans cet Etat membre sous le titre professionnel d’architecte, pour autant que la formation soit complétée par une période d’expérience professionnelle de quatre ans, en république fédérale d’Allemagne attestée par un certificat délivré par l’ordre professionnel au tableau duquel est inscrit l’architecte qui souhaite bénéficier des dispositions de la présente directive (…)».

S’il n’est pas contesté que la demanderesse a suivi une formation portant sur 9 semestres et qu’elle remplit partant l’exigence quant à la durée de la formation telle qu’énoncée à l’article 4 paragraphe 1, premier alinéa, et qu’elle a également suivi une pratique professionnelle, il n’en reste pas moins que le diplôme de la demanderesse ne figure pas sur la liste communautaire parmi ceux qui bénéficient de la reconnaissance automatique, laquelle liste mentionne uniquement pour les formations des « Fachhochschulen (Architektur/Hochbau) » le diplôme de « Diplom-Ingenieur » ou « Diplom-Ingenieur FH », de sorte que le diplôme délivré à Madame … n’est pas à comprendre parmi les diplômes, certificats et autres titres à reconnaître par le Grand-Duché de Luxembourg comme donnant accès aux activités du domaine de l’architecture au sens de la directive 85/384.

Il s’ensuit que la demanderesse n’a pas non plus établi la qualification professionnelle d’architecte proprement dit au sens de l’article 19. (1) a) de la loi précitée du 28 décembre 1988.

Il se dégage des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a refusé la délivrance de l’autorisation d’établissement sollicitée, la demanderesse ne remplissant pas la condition de qualification professionnelle.

Cette conclusion ne saurait être énervée par l’argumentation de la demanderesse consistant à dire que la reconnaissance par l’ « Architektenkammer Rheinland-Pfalz » de l’équivalence de son diplôme d’architecte d’intérieur avec celui d’architecte obligerait les autorités luxembourgeoises, étant donné que les autorités allemandes ont accordé cette équivalence, basée notamment sur l’accomplissement d’une pratique professionnelle d’une durée minimale de dix ans, conformément à leur droit interne, de sorte qu’elle ne saurait être opposée aux autorités luxembourgeoises dont les dispositions nationales ne prévoient pas une telle reconnaissance.

Il s’ensuit que le recours en annulation laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation recevable ;

au fond, le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 7 mars 2005 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18553
Date de la décision : 07/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-07;18553 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award