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02/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18623

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 mars 2005, 18623


Tribunal administratif N° 18623 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er septembre 2004 Audience publique du 2 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du Gouvernement en conseil en matière de statut général des fonctionnaires

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18623 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1er septembre 2004 par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats Ã

  Luxembourg, au nom de Monsieur …, … , demeurant à L-…, tendant à la réformation et subsi...

Tribunal administratif N° 18623 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er septembre 2004 Audience publique du 2 mars 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du Gouvernement en conseil en matière de statut général des fonctionnaires

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18623 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1er septembre 2004 par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, … , demeurant à L-…, tendant à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du Gouvernement en conseil du 30 avril 2004, rejetant sa demande en vue de l’annulation de la constatation d’incompétence du 5 janvier 2004 émanant du secrétaire d’Etat à la Fonction publique et à la Réforme administrative, ainsi que sa demande en vue de l’annulation de la transmission de la réclamation au ministre de la Coopération, de l’Action humanitaire et de la Défense ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 décembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en ses plaidoiries à l’audience publique du 21 février 2005, Maître Renaud LE SQUEREN, en remplacement de Maître Lex THIELEN, s’étant rapporté au recours introduit pour compte de sa partie.

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Monsieur …, fonctionnaire de l’Etat, affecté au ministère des Affaires Etrangères, du Commerce Extérieur, de la Coopération et de la Défense, ci-après appelé le « ministère des Affaires étrangères », se vit adresser en date du 5 novembre 2003 une note rédigée à son attention, émanant de Monsieur …, directeur de la Défense auprès du ministère des Affaires étrangères, portant comme objet les absences non motivées de Monsieur…, le temps de présence de ce dernier au bureau et le retard affectant la réalisation de certaines tâches lui imparties, l’auteur de cette note ayant retenu en guise de conclusion « ces faits constituent des manquements graves à vos devoirs de fonctionnaire tels qu’énumérés par la loi modifiée du 16 avril 1974 fixant 1 le statut général des fonctionnaires de l’Etat et je me réserve tous droits quant aux suites à y donner. La présente note sera ajoutée à votre dossier personnel ».

Monsieur… adressa au ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative une réclamation datée du 21 novembre 2003 contre cette note, ainsi que contre son incorporation dans son dossier personnel sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après appelé « le statut général ».

Par courrier du 5 janvier 2004, le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, sous la signature du secrétaire d’Etat au même ministère, adressa à Monsieur… une décision d’incompétence libellée comme suit :

« Monsieur le Conseiller de direction, J'ai l'honneur de me référer à votre réclamation du 21 novembre 2003 relative à la décision de Monsieur …, directeur de la défense, d'insérer une note du 5 novembre 2003 dans votre dossier personne1.

L'article 33, paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de 1’Etat dispose :

« La réclamation est adressée par écrit au supérieur hiérarchique. Si elle met en cause le supérieur direct du fonctionnaire, elle est adressée au chef d'administration. Si ce dernier est visé, la réclamation est envoyée au ministre du ressort ».

Je considère que je suis incompétent pour intervenir dans la présente affaire sur la base du texte précité. En conséquence, j'ai transmis votre réclamation à Monsieur le Ministre de la Coopération, de l'Action Humanitaire et de la Défense pour prise de position.

Veuillez agréer, Monsieur le Conseiller de direction, l'expression de ma considération distinguée ».

Monsieur… introduisit alors, suivant lettre datée du 7 février 2004, un recours auprès du Gouvernement en conseil, aux fins de voir notamment annuler la prédite décision d’incompétence prise en date du 5 janvier 2004 par le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, ainsi que la transmission de sa réclamation au ministre de la Coopération, de l’Action humanitaire et de la Défense, recours qui a été rejeté par le Conseil de gouvernement dans sa séance du 30 avril 2004.

Cette décision du Conseil de Gouvernement ainsi que les motifs à la base de celle-ci, furent notifiés à Monsieur… par lettre recommandée datée du 24 mai 2004 et expédiée en date du 28 mai 2004, signée conjointement par le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, la secrétaire d’Etat au même ministère ainsi que par le ministre de la Coopération, de l’Action humanitaire et de la Défense.

2 C’est à l’encontre de cette décision que Monsieur…, par requête déposée en date du 1er septembre 2004, a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à sa réformation et subsidiairement à son annulation.

Le délégué du Gouvernement conclut d’une manière générale à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté, ainsi qu’à l’irrecevabilité du recours en réformation, au motif que la loi ne prévoirait aucun recours au fond en la matière.

Le statut général ne prévoit aucun recours au fond en la présente matière, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

Quant au recours en annulation, force est de constater que celui-ci a été déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er septembre 2004, et a pour objet une décision expédiée au demandeur par courrier recommandé en date du 28 mai 2004. L’affirmation du demandeur comme quoi il se serait vu notifier la décision en date du 1er juin 2004 n’étant pas utilement énervée par la partie étatique, le recours est à considérer comme recevable ratione temporis pour avoir été déposé dans le délai de 3 mois prévu à l’article 13, alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

A l’appui de son recours, basé « principalement sur l’article 11 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, et subsidiairement sur l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif », le demandeur renvoie « quant aux faits gisant à la base des recours introduits et quant aux moyens de nullité avancés à l’encontre des décisions administratives entreprises à sa réclamation du 7 février 2004 après du Gouvernement en conseil contre la décision précitée du Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative du 5 janvier 2004 ; cette réclamation étant annexée au présent mémoire introductif d’instance pour en faire partie intégrante », la réclamation en question étant libellée comme suit :

« Monsieur le Premier Ministre, Mesdames, Messieurs les Ministres, Par la présente, je me permets d'introduire une réclamation contre une décision du Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative violant les règles de compétence, datée du 5 janvier 2004, portant la référence pl/mfpra-4S73/2003 et réceptionnée le 12 janvier 2004 à mon domicile.

En effet, dans la décision portant la référence pl/mfpra-4S73/2003 précitée, jointe en annexe, le Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative s'est déclaré incompétent et a refusé de statuer sur ma réclamation du 21 novembre 2003 sur base de l'article 33, paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat et relative à la décision de Monsieur …, conseiller de direction 1ère classe, d'insérer une note du 5 novembre 2003 dans mon dossier personnel.

Or l’article 33, paragraphe 2 de la loi du 16 avril 1979 susmentionnée dispose clairement: « La réclamation est adressée par écrit au supérieur hiérarchique. Si elle met en 3 cause le supérieur direct du fonctionnaire, elle est adressée au chef d'administration. » Toutefois, vu que d'une part, j'exerce la fonction de conseiller de direction à l'administration gouvernementale et que d'autre part la réclamation met en cause mon supérieur hiérarchique, à savoir Monsieur le Conseiller de direction 1ère classe à l'administration gouvernementale …, il s'ensuit que ma réclamation du 21 novembre 2003 a été adressée conformément à l'article 33, paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée à l'autorité administrative compétente, à savoir au chef d'administration.

Effectivement, Madame Lydie POLFER, Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative exerce la fonction de chef de l'administration gouvernementale en vertu de la combinaison de l'article 1er de l'arrêté grand-ducal du 7 août 1999 portant attribution des compétences ministérielles aux Membres du Gouvernement et de l'article 1er, paragraphe 11., alinéa 4 de l'arrêté grand-ducal du 11 août 1999 portant constitution des Ministères.

La responsabilité de chef de l'administration gouvernementale mentionnée ci-dessus a été confirmée par le Premier Ministre, Ministre d'Etat dans une lettre du 13 décembre 2000 (réf: 80.01.00) relative à une affaire de même nature dans les termes suivants :

« En sa double qualité de Ministre responsable du personnel de l'administration gouvernementale, de même que des affaires relatives au statut des fonctionnaires de l'Etat, le Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative se chargera de la coordination du dossier… ».

C'est donc à tort que le Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative s'est déclaré incompétent et a refusé de statuer, alors que les arrêtés grand-ducaux susmentionnés lui attribuent compétence et responsabilité.

Je vous demande partant par la présente d'ordonner que la décision du Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative de se considérer comme incompétent pour intervenir dans le cadre de ma réclamation du 21 novembre 2003, ainsi que sa décision subséquente de transmettre ma réclamation à Monsieur le Ministre de la Coopération, de l'Action humanitaire et de la Défense soient annulées pour violation des règles de compétence.

La présente vaut également prise de position et devra de ce fait être jointe à mon dossier personnel en vertu de l'article 34 alinéa 2 du statut général des fonctionnaires de l'Etat.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Premier Ministre, Mesdames, Messieurs les Ministres, l'expression de mes sentiments très distingués. » S’il se dégage de cette réclamation que le demandeur reproche au ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative de s’être déclaré incompétent, et se prévaut à ce sujet d’une interprétation de la notion de « chef d’administration » sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après appelé « le statut général », il ne ressort cependant ni de cette réclamation, censée faire partie intégrante de 4 la requête introductive d’instance, ni de la requête elle-même, en quoi consisterait la violation alléguée de l’article 11, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et de l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, l’article 11 précité ayant en effet pour objet la question de la communication du dossier administratif à l’administré concerné, et le cas échéant le retrait de toute pièce préjudiciable étrangère au dossier, tandis que l’article 2 précité a pour objet les cas d’ouverture des recours en matière administrative devant le tribunal administratif, objets a priori étrangers à la problématique soulevée dans la réclamation citée ci-avant.

Or, conformément aux dispositions de l'article 1er de la loi du 21 juin 1999, précitée, la requête introductive d'un recours devant le tribunal administratif doit contenir notamment l'exposé sommaire des faits et des moyens invoqués, ainsi que l'objet de la demande, ceci afin de mettre le tribunal en mesure de cerner le débat juridique que le demandeur entend voir engager pour énerver la légalité de la décision litigieuse.

En l’espèce, le débat juridique tel que tracé par la requête introductive d’instance est basé sur l’article 11, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, et à titre subsidiaire sur l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 précitée, sans qu’un quelconque lien ne soit décelable entre ces dispositions - censées éclairer l’illégalité alléguée de la décision déférée - et la problématique décrite par la réclamation annexée au recours et reposant sur l’article 33 du statut général.

Force est dès lors de constater que la seule affirmation non autrement précisée et circonstanciée que la demande reposerait sur les bases légales citées ci-avant, sans précision quelconque quant à l’applicabilité de ces dispositions légales et réglementaires à la problématique sous-jacente à l’acte déféré, laisse manifestement de rencontrer les exigences relativement à la précision de l'exposé des moyens. S'il suffit en effet que cet exposé soit simplement sommaire pour satisfaire aux exigences légales afférentes, il ne saurait pour autant se réduire à la simple indication d’une base légale, surtout lorsque celle-ci ne présente a priori aucun lien décelable avec la situation particulière querellée par le demandeur.

La carence ainsi constatée au niveau de la requête introductive d'instance n'a pas non plus été utilement comblée par des explications supplémentaires orales du mandataire du demandeur, de sorte que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour cause de libellé obscur, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner plus en avant les moyens d’irrecevabilité soulevés par la partie publique.

La partie demanderesse réclame enfin l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.500 € « sur base de l’article de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de la procédure devant les juridictions administratives, tel que cet article a été modifié par l’article V de la loi du 28 juillet 2000 », demande qui, outre le fait que la base légale d’une telle demande se situerait dans l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de la procédure devant les juridictions administratives, est à rejeter au vu de l’issue du litige.

Par ces motifs, 5 le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 2 mars 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Gillardin, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18623
Date de la décision : 02/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-02;18623 ?

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