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22/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18160

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 décembre 2004, 18160


Tribunal administratif N° 18160 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juin 2004 Audience publique du 22 décembre 2004

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Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière de résiliation du contrat de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 18160 et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juin 2004 par Maître Fabienne MONDOT, avocat à la Cour, inscrite au tabl

eau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à la réformati...

Tribunal administratif N° 18160 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juin 2004 Audience publique du 22 décembre 2004

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Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière de résiliation du contrat de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 18160 et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juin 2004 par Maître Fabienne MONDOT, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 26 mars 2004 portant résiliation de son contrat d’engagement avec effet au 1er juin 2004 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 août 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 septembre 2004 par Maître Fabienne MONDOT au nom de Madame … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 octobre 2004 ;

Vu la lettre du 29 octobre 2004 de Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, informant le tribunal qu’il a repris le mandat de Maître Fabienne MONDOT ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Pierre MEDINGER, en remplacement de Maître Georges PIERRET, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Par contrat d’engagement du 1er mars 2001, Madame … a été engagée à partir de la même date pour une période indéterminée et à tâche complète comme employée de bureau auprès du ministère de la Famille, de la Solidarité sociale et de la Jeunesse – Fonds National de Solidarité - avec reconnaissance de la qualité d’employée de l’Etat.

Par lettre du 16 mars 2004, le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, ci-après dénommé « le ministre », informa Madame … de ce qui suit:

« Aux termes de l’article 7.3. de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat, le ministre compétent est en droit de résilier le contrat de travail en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raisons de santé de l’employé qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat. Cette résiliation pourra toutefois être prononcée seulement après que la Caisse de Pension des Employés Privés se sera prononcée sur l’invalidité professionnelle de l’employé au sens des dispositions de l’assurance-pension des employés privés.

Suite à vos absences répétées pour raisons de santé qui m’ont été communiquées par Monsieur le Président du Fonds National de Solidarité, vous avez été convoquée au Contrôle Médical de la Sécurité Sociale en date du 5 février 2004.

Or, par lettre du 3 mars 2004, la Caisse de Pension des Employés Privés m’a informé que vous n’êtes pas à considérer comme invalide au sens de l’alinéa 1 de l’article 187 du Code des Assurances sociales.

Au regard des considérations qui précèdent et des dispositions légales précitées, je vous invite à vous présenter à un entretien préalable au licenciement le 24 mars 2004 à 9.00 heures au Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative, 63, Avenue de la Liberté, Luxembourg-Gare. A toutes fins utiles, je me permets de vous signaler qu’aux termes de la loi vous avez le droit de vous faire assister par un représentant d’une organisation syndicale représentée au sein de l’association de employés ou par un avocat de votre choix ».

Après avoir procédé, le 24 mars 2004, à un entretien préalable avec Madame …, le ministre notifia à celle-ci la résiliation de son contrat de travail par une lettre recommandée du 26 mars 2004, libellée comme suit:

« Vous avez été engagée à partir du 1er mars 2001 par contrat à durée indéterminée en tant qu’employée de l’Etat (travailleur handicapé) auprès de l’Administration gouvernementale et vous avez été affectée auprès du Fonds National de Solidarité.

Or, depuis la date de votre engagement vos absences pour raisons de santé se sont accumulées, à savoir 63 jours de congé de maladie en 2001, 57 jours en 2002 et 229 jours en 2003. Au vu de ces absences répétées et conformément à l’article 7.3. de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat, qui prévoit que le ministre compétent est en droit de résilier le contrat de travail en cas d’absence répétée ou prolongée pour raisons de santé de l’employé qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat, j’avais saisi la Caisse de Pension des Employés Privés afin de se prononcer sur votre invalidité professionnelle. Or en vertu de l’avis émis en date du 3 mars 2004, vous n’êtes pas à considérer comme invalide au sens des dispositions de l’article 187 du Code des Assurances Sociales.

Au vu des considérations qui précèdent, je me vois dans l’obligation de faire application de l’article 35, paragraphes 3 et 5 de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail qui stipule que l’employeur peut résilier le contrat de travail après l’expiration d’une période de douze mois d’incapacités de travail successives, entrecoupées par des périodes de reprise du travail. En vertu de la disposition précitée et suite à l’entretien préalable au licenciement en date du 24 mars 2004, votre contrat de travail est donc résilié avec effet au 1er juin 2004 » (…).

Par requête déposée le 2 juin 2004, Madame … a fait déposer un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision ministérielle précitée du 26 mars 2004.

L'article 11 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l'Etat, ci-après dénommée « la loi de 1972 », attribue compétence au juge administratif, statuant comme juge du fond, pour connaître des contestations résultant du contrat d'emploi, de la rémunération et des sanctions et mesures disciplinaires concernant les employés de l'Etat. Le licenciement de l'employé constituant une contestation résultant du contrat d'emploi, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation dirigé contre une telle mesure.

Le recours en réformation introduit à titre principal par Madame …, ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Par conséquent, le recours en annulation, introduit à titre subsidiaire, est irrecevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse fait valoir en premier lieu que la décision déférée violerait l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, lequel serait applicable en l’espèce, au motif que les dispositions de l’article 22 (1) et (2) de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travail, ci-après dénommée « la loi de 1989 », seraient moins protectrices des droits de l’employé de l’Etat que celles prévues par le règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité.

Dans ce contexte, elle soutient que la décision déférée ne serait pas motivée en droit, puisque sa base légale serait erronée ce qui équivaudrait à une absence de motivation en droit, au motif que les textes légaux sur lesquels le ministre se serait basé, à savoir l’article 7.3. de la loi de 1972 et l’article 35, paragraphes 3 et 5 de la loi de 1989, ne seraient pas applicables en l’espèce. Elle reproche également à la décision déférée de ne pas être suffisamment motivée en fait, le ministre s’étant contenté de justifier la résiliation du contrat d’engagement par le nombre des journées d’absence.

Elle en conclut qu’elle n’aurait pas eu une connaissance effective des motifs à la base de la décision de résiliation.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement entend réfuter le moyen tiré d’une violation des exigences de la procédure administrative non contentieuse, en soutenant que les exigences découlant tant de l’article 6 que de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, auraient été respectées.

Il convient d’examiner en premier lieu le moyen tiré d’un défaut d’indication des motifs à la base de la décision déférée, qui est préalable, l’examen de la régularité formelle devant précéder celui du bien-fondé de la décision litigieuse. En revanche, le moyen de la demanderesse tiré du défaut de motivation légale, en ce que le ministre se serait basé sur des motifs erronés en droit, a trait à la validité des motifs à la base de la décision de résiliation et sera analysé dans le cadre de l’examen du bien-fondé du licenciement.

Un employé de l’Etat, dans ses relations avec l’administration, est un administré au sens du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, de sorte qu’en principe, les dispositions dudit règlement lui sont applicables dans la mesure où les règles spécifiques régissant son statut ne présentent pas pour lui des garanties équivalentes (cf. trib. adm. 10 juillet 1997, n° 9703 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Fonction Publique n° 241).

En vertu de l’article 6 dudit règlement grand-ducal du 8 juin 1979, toute décision administrative doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle révoque ou modifie une décision antérieure.

En l’espèce, le tribunal constate que la décision déférée du 26 mars 2004 répond aux exigences posées par l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, étant donné qu’elle indique expressément les textes légaux sur lesquels elle se fonde, à savoir l’article 7.3. de la loi de 1972 et l’article 35, paragraphes 3 et 5 de la loi de 1989, et que la formulation retenue dans cette décision est claire et précise en retenant comme motif de résiliation du contrat de travail les absences répétées accumulées par la demanderesse pour raison de santé.

S’y ajoute que la demanderesse a été convoquée pour le 24 mars 2004 à un « entretien préalable au licenciement » par une lettre du 16 mars 2004, lors duquel elle a été informée sur les intentions de licenciement de son employeur et sur les motifs y afférents. L’Etat a ainsi satisfait aux exigences de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, qui oblige l'autorité qui se propose de prendre une décision en dehors d'une initiative de la partie concernée, d'informer celle-ci de son intention en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l'amènent à agir.

Madame … soutient ensuite que l’article 7.3. de la loi de 1972 et l’article 35, paragraphes 3 et 5, de la loi de 1989, invoqués à l’appui de la décision litigieuse, ne trouveraient pas application en l’espèce.

Elle fait valoir que les dispositions de l’article 7 de la loi de 1972 ne s’appliqueraient qu’aux employés de l’Etat bénéficiant d’un contrat d’engagement en vigueur depuis plus de dix ans et âgés de trente-cinq ans au moins. Or, comme son contrat d’engagement ne serait en vigueur que depuis trois ans, elle ne rentrerait pas dans le champ d’application de l’article 7.3. de la loi de 1972.

Elle reproche également au ministre de s’être basé sur l’article 35, paragraphes 3 et 5 de la loi de 1989, au motif que lesdites dispositions n’autoriseraient pas l’employeur de résilier le contrat de travail, ni après l’expiration d’une période de douze mois d’incapacités de travail successives entrecoupées par des périodes de reprise du travail, ni en raison de la seule expiration d’une période d’incapacité continue de 26 semaines.

Le délégué du gouvernement y rétorque que l’article 7.3. de la loi de 1972 ferait la distinction entre les employés qui bénéficient du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat et ceux qui n’en bénéficient pas, ces derniers pouvant être licenciés par le ministre compétent en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raison de santé, ledit paragraphe ne distinguant pas non plus, si l’on se trouvait en présence d’un contrat résiliable ou non tel que prévu par l’article 7.1., de sorte que l’article 7.3. serait applicable dans la présente affaire.

La demanderesse conteste ensuite que ses absences pour raison de santé puissent constituer « une cause réelle et sérieuse » de son licenciement, au motif que la maladie qui aurait causé ses absences serait en partie directement liée à son travail.

Elle fait valoir plus particulièrement que la qualité de travailleur handicapé lui aurait été reconnue depuis le 1er avril 1999, puisqu’elle souffrirait depuis une douzaine d’années d’une « épilepsie Grand Mal traitée par Gardenel, avec grande fatigue ».

Or, malgré un certificat du 18 juillet 2002 du docteur M. S. qui aurait attesté qu’« un travail bien réglé avec heures de repos s’imposerait impérativement pour une durée indéterminée », elle aurait dû assumer une surcharge de travail ce qui aurait entraîné une dépression chronique, de sorte que le même médecin lui aurait prescrit le 13 décembre 2002 un mi-temps thérapeutique pour la période allant du 1er janvier 2003 au 30 juin 2003. Elle précise qu’elle souffrirait également d’un problème de la thyroïde et que la recherche d’un traitement compatible avec son épilepsie aurait entraîné une grande fatigue aggravant encore son état dépressif, dont l’une des causes serait d’après le certificat médical du docteur M. D. du 8 décembre 2003 une surcharge de travail due à l’absence d’une collègue au début de son mi-temps thérapeutique, au point que sur recommandation de son médecin, elle aurait sollicité un changement de poste à son retour du congé de maladie, demande qui serait restée sans suite.

La demanderesse conteste encore le licenciement, au motif qu’il serait intervenu presque deux mois après la reprise de son travail, de sorte qu’il ne serait pas établi que le Fonds National de Solidarité n’ait plus pu compter sur sa collaboration suffisamment régulière pour les besoins du bon fonctionnement du service et que la perturbation du service n’aurait pas été indiquée comme motif de licenciement dans la lettre de licenciement.

Le délégué du gouvernement rétorque que l’article 7.3. de la loi de 1972 ne distinguerait pas selon que l’employé a ou non repris son travail et que la demanderesse n’aurait repris son travail que parce qu’elle aurait craint d’être licenciée après avoir été convoquée auprès du Contrôle médical de la Sécurité sociale. Le fait que le licenciement ne serait intervenu qu’au mois de mars 2004 serait dû à l’accomplissement des formalités que l’Etat aurait dû respecter avant de pouvoir procéder au licenciement.

La demanderesse conteste l’argument du délégué du gouvernement consistant à dire qu’elle aurait uniquement repris le travail suite à la convocation auprès du Contrôle médical de la Sécurité sociale, en faisant valoir qu’elle aurait déjà été informée par une lettre du 20 novembre 2003 de la Caisse de Pension des Employés Privés qu’elle devait subir un examen médical, alors qu’elle n’aurait repris son travail que le 2 février 2004.

Le délégué du gouvernement rétorque que la lettre du 20 novembre 2003 de la Caisse de Pension des Employés Privés à l’adresse de la demanderesse ne serait pas pertinente, dans la mesure où il ne s’agirait pas de la convocation auprès du Contrôle médical de la Sécurité sociale, laquelle n’aurait eu lieu qu’après accomplissement de toutes les procédures, soit après le 21 janvier 2004, mais de l’invitation de la Caisse de pension de se soumettre à un examen médical. Il en conclut que ladite lettre du 20 novembre 2003 ne mettrait pas en doute le constat de l’Etat qu’elle n’aurait repris le travail que suite à la convocation auprès du Contrôle médical de la Sécurité sociale. Il soutient que l’absence prolongée de Madame … aurait justifié à elle seule la résiliation du contrat de travail, sans qu’il soit nécessaire d’établir une perturbation du service auquel Madame … était affectée.

Concernant l’applicabilité de l’article 7.3. de la loi de 1972 et de l’article 35, paragraphes 3 et 5, de la loi de 1989, force est de constater que la demanderesse a été engagée le 1er mars 2001 comme employée au service de l’Etat. Elle rentre par conséquent dans le champ d’application des dispositions de la loi de 1972 qui régit impérativement le statut des employés de l’Etat.

Le régime des employés de l’Etat est un régime propre s’inspirant à la fois du régime légal des employés privés et de celui des fonctionnaires de l’Etat en ce sens que l’engagement est régi par contrat entre l’Etat et les intéressés, mais que ces derniers bénéficient sous des conditions nettement déterminées de certains attributs réservés, en principe, aux fonctionnaires de l’Etat (voir avis du Conseil d’Etat et rapport de la commission de la Fonction publique de la Chambre des Députés, doc.

parl. n° 1516, page 2).

La relation entre la demanderesse et l’Etat est ainsi fondée sur un contrat et la loi de 1989 régit, sur base du renvoi direct opéré par l’article 4 de la loi de 1972, la forme et les modalités de l’engagement.

Les articles 5, 6 et 7.3. de la loi de 1972, relatifs à la résiliation du contrat d’emploi, ne comportent par contre pas de renvoi aux dispositions afférentes de la loi de 1989, de sorte que la décision prise par le ministre de résilier le contrat d’engagement doit être qualifiée de décision administrative soumise d’abord au régime spécifique de la loi de 1972 et ensuite aux prescriptions générales de la réglementation de la procédure administrative non contentieuse, applicable aux employés de l’Etat.

La loi de 1989 n’a en conséquence pas vocation à s’appliquer en tant que réglementation de la résiliation du contrat d’un employé de l’Etat. Conformément à l’article 1er, alinéa 1er de la loi de 1972, elle n’est que de nature à suppléer le cas échéant, dans les limites de sa compatibilité avec les dispositions susvisées, aux lacunes des dispositions combinées de la loi de 1972 et de la réglementation de la procédure administrative non contentieuse.

Il s’ensuit que c’est à tort que le ministre s’est basé sur les dispositions de l’article 35, paragraphes 3 et 5 de la loi de 1989, loi qui n’est pas applicable en l’espèce. Ce constat n’étant pas à lui seul de nature à affecter la légalité de la décision entreprise, il y a simplement lieu de faire abstraction des références à la loi de 1989.

L’article 7.3. de la loi de 1972 dispose que « les dispositions des paragraphes 1 et 2 [en vertu desquels la résiliation du contrat de travail est impossible, sauf à titre de mesure disciplinaire, lorsqu’il est en vigueur depuis dix ans et que l’employé est âgé de trente-cinq ans au moins] ne portent pas préjudice au droit du ministre compétent de résilier le contrat en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raison de santé de l’employé qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat visé à l’article 8. Cette résiliation ne pourra être prononcée que sur avis du ministre de la Fonction publique et après que la Caisse de pension des employés privés, à la requête du ministre compétent et suivant des modalités à déterminer par règlement grand-ducal, se sera prononcée sur l’invalidité professionnelle de l’employé au sens des dispositions légales concernant l’assurance-

pension des employés privés ».

Il ressort des termes de l’article 7.3. précité que le ministre compétent peut résilier en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raison de santé le contrat d’engagement d’un employé de l’Etat qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat visé à l’article 8 de la loi de 1972, régime qui est acquis notamment après vingt années de service à compter de l’entrée en vigueur du contrat à durée indéterminée. Dès lors, un contrat d’engagement d’un employé de l’Etat, conclu depuis moins de vingt ans au moment de sa résiliation est susceptible de résiliation si l’un des motifs susvisés est établi.

Il se dégage des pièces versées que Madame … ne remplissait pas les conditions de l’article 8 de la loi de 1972, étant donné que la durée totale pendant laquelle elle a été au service de l’Etat comportait une durée inférieure à 20 ans. C’est partant à tort qu’elle querelle d’irrégularité le licenciement en ce que l’article 7.3. de la loi de 1972 ne lui aurait pas été applicable.

Il n’est pas contesté en cause que Madame … a accumulé des absences pour raison de santé, soit 63 jours en 2001, 57 jours en 2002 et 229 jours en 2003. Pendant cette période, elle a produit des certificats médicaux attestant qu’elle était incapable de travailler. Les conditions telles qu’énoncées par l’article 7.3. de la loi de 1972 sont dès lors remplies, étant donné que son absence s’analyse en une absence « prolongée » pour raison de santé.

Cette conclusion ne saurait été ébranlée par l’argumentation de la demanderesse tirée de ce que ses absences seraient dues à une surcharge de travail à laquelle elle aurait dû faire face, étant donné que cette affirmation, même ensemble les certificats médicaux, n’est pas de nature à établir à suffisance de droit une relation causale entre la maladie de Madame … et les conditions de travail auxquelles elle était exposée.

C’est encore à bon droit que le délégué du gouvernement a conclu qu’il découle de cette disposition que si un employé est absent pour des raisons de santé et que cette absence excède, soit par sa durée, soit par son caractère répété, un niveau raisonnable, le contrat de travail peut être résilié indépendamment de la question de savoir s’il y a ou non désorganisation du service public concerné. Le texte tend en effet à sanctionner les périodes de maladie excessives (cf. trib. adm. 2 février 1999, n° 11159 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Fonction Publique n° 258). Cependant, si le but en est de prévenir des abus, le texte impose néanmoins à l'administration de faire intervenir la Caisse de pension des employés privés qui doit se prononcer sur une éventuelle invalidité professionnelle de l’employé au sens des dispositions légales concernant l’assurance-pension des employés privés. En l’espèce, le médecin-conseil du Contrôle médical de la sécurité sociale, lors de l’examen médical du 5 février 2004, arrive à la conclusion que « l’intéressée n’est pas à considérer comme invalide au sens de l’alinéa 1 de l’article 187 C.A.S. ». Il conclut qu’un droit à une pension d’invalidité de la part de cette Caisse n’existe pas. Dans cette hypothèse, c’est-à-dire dans le cas où le fonctionnaire est reconnu comme étant en principe apte au service, l’article 7.3. de la loi de 1972 a pour but d’ouvrir en toute hypothèse le droit au congédiement chaque fois que son état de santé met l’employé dans l’impossibilité de reprendre son service d’une façon régulière et suivie (doc.parl. n°1516, p.12).

Le fait que Madame … n’a été licenciée que le 26 mars 2004, alors qu’elle avait repris son travail le 2 février 2004, est sans incidence quant à la légalité du licenciement, étant donné que la procédure de licenciement avait déjà été entamée par l’Etat avant qu’elle ne reprenne son travail.

Il se dégage des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a résilié le contrat d’engagement de Madame ….

Il s’ensuit que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance, reçoit le recours principal en réformation en la forme, le déclare non fondé et en déboute, déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 22 décembre 2004 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18160
Date de la décision : 22/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-22;18160 ?

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