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22/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18036

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 décembre 2004, 18036


Tribunal administratif N° 18036 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 mai 2004 Audience publique du 22 décembre 2004 Requête de Monsieur …, … en présence du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines ainsi que du ministre des Finances en matière de désignation d’un commissaire spécial (exécution du jugement du 12 février 2003, n° 15238 du rôle)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18036 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 mai 2004 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la

Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, conse...

Tribunal administratif N° 18036 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 mai 2004 Audience publique du 22 décembre 2004 Requête de Monsieur …, … en présence du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines ainsi que du ministre des Finances en matière de désignation d’un commissaire spécial (exécution du jugement du 12 février 2003, n° 15238 du rôle)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18036 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 mai 2004 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, conseiller de direction adjoint auprès de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, demeurant à L-…, tendant à la désignation d’un commissaire spécial en vue de l’exécution du jugement inscrit sous le numéro 15238 du rôle, rendu par le tribunal administratif en date du 12 février 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont l’exécution fait l’objet de la requête introductive d’instance ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nadia JANAKOVIC en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, en ses plaidoiries à l’audience publique du 10 novembre 2004.

Considérant que par décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, ci-après désigné par « le directeur », matérialisée par deux courriers datant respectivement des 3 octobre et 15 décembre 2000, Monsieur … fut changé d’affectation à travers sa mutation à partir de la direction de l’Enregistrement au service du contrôle extérieur de l’administration, le service ainsi désigné étant suivant son intitulé exact le « service d’imposition et de contrôle de l’impôt sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, section du contrôle des redevables des mêmes impôts » ;

Considérant que le recours contentieux introduit par Monsieur … à l’encontre de ladite décision par requête déposée en date du 7 février 2001 s’est soldé par un jugement du tribunal administratif inscrit sous le numéro 12873a du rôle datant du 21 janvier 2002, aux termes duquel la décision litigieuse du directeur, concrétisée par ses dits courriers des 3 octobre et 15 décembre 2000, fut annulée pour violation de la loi ;

Que ledit jugement n’ayant pas été frappé d’appel, Monsieur …, par l’intermédiaire de son mandataire, sollicita par courrier du 29 janvier 2002 sa réintégration dans son ancien bureau et dans ses fonctions antérieurement exercées ;

Considérant qu’en date du 6 février 2002, le directeur refusa de faire droit à cette demande dans les termes suivants :

« Etant donné que vous n’étiez pas d’accord avec ma décision de travailler au sein du Service Anti-Fraude, j’ai le regret de vous informer que vous ne déménagerez provisoirement pas dans le nouveau bâtiment « Omega » dans lequel seront regroupés une partie des services de l’administration. Vous resterez dans votre bureau actuel.

Mis à part les attributions de « contractual manager » qui resteront dans le Service Anti-Fraude c’est-à-dire aux mains de Monsieur …, vous êtes réhabilité dans toutes les attributions que j’ai dû déléguer à d’autres fonctionnaires au cours de votre maladie » ;

Que par courrier datant du 19 février 2002 Monsieur Roland RICHARD s’adressa au ministre des Finances pour lui soumettre, conformément aux dispositions de l’article 33 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désignée par « le statut général », une réclamation contre la décision précitée du directeur du 6 février 2002 ;

Considérant que faute de prise de position du ministre dans les trois mois par rapport à cette réclamation, Monsieur … a fait introduire en date du 14 août 2002 un recours contentieux inscrit sous le numéro 15238 du rôle et tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) de la décision du directeur précitée du 6 février 2002, ainsi que 2) de la décision implicite de refus du ministre se dégageant de son silence pendant plus de trois mois à partir de la réclamation prévisée du 19 février 2002.

Considérant que par jugement du 12 février 2003 le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation, a reçu le recours en annulation en la forme et, au fond l’a dit justifié pour annuler la décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines du 6 février 2002 en ses deux volets et renvoyer devant lui le dossier aux fins d’exécution, ainsi que pour annuler la décision ministérielle déférée portant rejet implicite de la réclamation de Monsieur … contre la décision directoriale ci-avant annulée, tout en condamnant l’Etat aux frais ;

Que de ce jugement appel a été interjeté le 24 mars 2003 pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg suivant requête déposée au greffe de la Cour administrative en date du 24 mars 2003, inscrite sous le numéro 16173C du rôle ;

Que par arrêt du 4 novembre 2003 la Cour administrative a reçu l’acte d’appel du 24 mars 2003, l’a dit non fondé et en a débouté pour confirmer le jugement entrepris du 12 février 2003 et condamner la partie appelante aux dépens de l’instance ;

Considérant que par requête déposée en date du 10 mai 2004 et inscrite sous le numéro 18036 du rôle, Monsieur … a fait introduire une demande en application de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif afin de voir désigner un commissaire spécial pour prendre en lieu et place du directeur les mesures nécessaires à l’exécution « du jugement rendu par le tribunal administratif le 12 février 2003 (pièce 1) et confirmé par la Cour administrative le 4 novembre 2003 (pièce 2) » ;

Considérant que si le demandeur verse en tant que pièce 1 le jugement du 12 février 2003 portant le numéro 15237 du rôle et concernant la désignation d’un commissaire spécial en exécution du jugement prédit du 21 janvier 2002, il n’en reste pas moins à travers les explications complémentaires du demandeur et les pièces versées au dossier que le jugement effectivement visé est celui du même jour portant le numéro 15238 du rôle, confirmé par la Cour administrative en date du 4 novembre 2003 suivant son arrêt portant le numéro 16173C du rôle ;

Qu’il n’a dès lors pu y avoir méprise dans le chef ni du tribunal, ni d’autrui concernant le jugement ainsi visé suivant une référence erronée par la requête en nomination d’un commissaire spécial ;

Considérant que l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg n’ayant point fait déposer de mémoire, le tribunal est néanmoins amené à statuer à l’égard de toutes les parties conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives suivant un jugement ayant les effets d’une décision juridictionnelle contradictoire ;

Considérant qu’à travers sa requête le demandeur sollicite de la part du tribunal la désignation d’un commissaire spécial « aux fins de prendre en lieu et place du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines les mesures nécessaires de la réintégration de Monsieur … dans son bureau d’origine, alors que Monsieur … a omis de prendre les mesures nécessaires pour se conformer au jugement intervenu le 12 février 2003 et confirmé par la Cour administrative le 4 novembre 2003 » ;

Que suivant le demandeur, les difficultés d’exécution devraient être appréciées par les juridictions ayant statué en premier ressort, de sorte que le tribunal administratif serait compétent pour connaître de la demande en nomination d’un commissaire spécial ainsi formulée ;

Considérant qu’à l’appui de sa demande en désignation d’un commissaire spécial Monsieur … de faire valoir que ce serait sous de vains prétextes que le directeur, à travers une décision du 4 décembre 2003, aurait entendu justifier son maintien dans le bureau rue du Plébiscite par les intérêts du service y émargés, étant donné que parallèlement le même directeur se serait exprimé sans détour en ce sens qu’il n’aurait aucune intention de se soumettre aux décisions de la justice et plus particulièrement aux jugement et arrêt précités datant respectivement des 12 février et 4 novembre 2003 ;

Que cette intention résulterait clairement de l’écrit directorial du 5 novembre 2003 adressé au demandeur, ainsi que des déclarations directoriales faites dans la presse le même mois ;

Que si dès lors une nouvelle décision avait été prise le 4 décembre 2003 concernant non seulement le maintien du demandeur dans son bureau rue du Plébiscite, mais encore sa réinvestiture du moins partielle dans ses attributions antérieures, pareille décision ne suffirait pas à un contrôle sérieux de légalité, de sorte que l’on se trouverait dans une situation où, de fait, le directeur, de par son intention exprimée, aurait omis de prendre une décision, fait rendant nécessaire la nomination d’un commissaire spécial ;

Conformément aux dispositions de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée « lorsqu’en cas d’annulation ou de réformation, coulée en force de chose jugée, d’une décision administrative qui n’est pas réservée par la Constitution à un organe déterminé, la juridiction ayant annulé ou réformé la décision a renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l’arrêt, la partie intéressée peut, à l’expiration d’un délai de trois mois à partir du prononcé de l’arrêt ou du jugement, saisir la juridiction qui a renvoyé l’affaire en vue de charger un commissaire spécial de prendre la décision aux lieu et place de l’autorité compétente et aux frais de celle-ci ».

Considérant qu’il se dégage du libellé de la disposition légale prérelatée que l’intervention d’un commissaire spécial n’est prévue que dans l’hypothèse particulière où l’autorité compétente à laquelle l’affaire fut renvoyée à la suite d’une annulation ou d’une réformation est appelée tout d’abord à émettre une nouvelle décision afin de se conformer au jugement ou à l’arrêt en question, cette hypothèse se confondant en pratique le plus souvent avec le cas d’une décision annulée ou réformée qui a toisé une demande adressée à l’administration, hypothèse vérifiée en l’espèce (cf. trib. adm. 12 février 2003, n° 15237 du rôle, précité) ;

Qu’ensuite le texte de l’article 84 en question, en son libellé clair et précis ne prévoit le cas d’ouverture de la nomination utile d’un commissaire spécial que dans l’hypothèse y visée précisément où l’autorité compétente « omet de prendre une décision » ;

Considérant qu’il est constant en cause qu’au moment de l’introduction de la demande en désignation d’un commissaire spécial, l’autorité administrative avait déjà statué en exécution desdits jugement et arrêt des 12 février et 4 novembre 2003 ;

Considérant qu’au-delà de toute appréciation de l’intention manifestée par l’autorité compétente concernant sa volonté d’exécuter les jugement et arrêt dont il s’agit, la demande en nomination d’un commissaire spécial, basée sur les dispositions claires et précises de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, est irrecevable, étant entendu que l’analyse de la question de savoir si cette décision est conforme en tous points aux dits jugement et arrêt est appelée à être effectuée dans le cadre du recours dont le tribunal est également saisi par requête inscrite sous le numéro 18038 du rôle et toisée par jugement parallèle de ce jour (cf. trib. adm. 17 décembre 2001, confirmé par Cour adm. 11 juillet 2002, n° 14497C du rôle, Pas. adm. 2004, V° Procédure contentieuse, n° 477, page 649) ;

Que cette irrecevabilité du recours est encourue abstraction faite de celle le cas échéant vérifiée concernant la question de savoir si la demande en nomination d’un commissaire spécial était en l’occurrence à apporter devant le tribunal ou devant la Cour, compte tenu de l’arrêt confirmatif intervenu ;

Considérant que la partie demanderesse sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure de l’ordre de 1.000,- € ;

Considérant qu’eu égard à l’issue de la requête en nomination d’un commissaire spécial, la demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare la requête irrecevable ;

condamne la partie demanderesse aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 décembre 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18036
Date de la décision : 22/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-22;18036 ?

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