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15/12/2004 | LUXEMBOURG | N°17867

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 décembre 2004, 17867


Tribunal administratif N° 17867 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 avril 2004 Audience publique du 15 décembre 2004

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Recours formé par la société anonyme E. et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en présence de la société anonyme C. S.A., Luxembourg, et de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l.

en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17867 du rôle, dé

posée le 7 avril 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au ta...

Tribunal administratif N° 17867 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 avril 2004 Audience publique du 15 décembre 2004

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Recours formé par la société anonyme E. et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en présence de la société anonyme C. S.A., Luxembourg, et de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l.

en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17867 du rôle, déposée le 7 avril 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de :

1. la société anonyme E. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 2. la société anonyme …., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 3. la société anonyme …., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 4. la société anonyme ,,,., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 5. la société à responsabilité limitée …., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par ses gérants actuellement en fonctions, 6. la société anonyme :…, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 7. la société à responsabilité limitée …, établie et ayant son siège social à L-… inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son ou ses gérants actuellement en fonctions, 8. la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 9. la société anonyme …., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 10. la société civile immobilière …, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par ses gérants actuellement en fonctions, tendant à la réformation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 20 février 2004 (arrêté n° 1/2003/0198/57037/117 (125)) faisant droit à une demande du 25 avril 2003, présentée par la société anonyme L. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, en obtention d’une autorisation pour l’exploitation à L-…, d’un dancing, dénommé « A. » pouvant accueillir au maximum 1.835 personnes et les éléments accessoires et connexes (locaux et installations sanitaires, techniques et utilitaires, etc) ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Roland FUNK, demeurant à Luxembourg, du 13 avril 2004, par lequel cette requête a été signifiée à la société anonyme L. S.A. et à la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiées ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 juin 2004 ;

Vu le mémoire en réponse déposée le 8 juillet 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiée ;

Vu la requête en intervention volontaire avec mémoire en « réplique », déposée au greffe du tribunal administratif le 22 juillet 2004 par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme C.

S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg, sous le n° B …, représentée par son administrateur délégué actuellement en fonctions ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 7 octobre 2004 en nom et pour compte des parties demanderesses ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 novembre 2004 en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision litigieuse ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maîtres Steve HELMINGER, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, Georges KRIEGER et Isabelle WELSCHEN, en remplacement de Maître Lex THIELEN, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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Faisant suite à une demande introduite le 25 avril 2003 par la société anonyme L. S.A., préqualifiée, agissant en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiée, tendant à l’obtention d’une autorisation pour l’exploitation à L-…, d’un dancing, dénommé « A. » pouvant accueillir au maximum 1.835 personnes et les éléments accessoires et connexes (locaux et installations sanitaires, techniques et utilitaires, etc), le ministre du Travail et de l’Emploi, par arrêté n° 1/2003/0198/57037/117 (125) du 20 février 2004, délivra l’autorisation requise dans le cadre de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, cette autorisation étant assortie d’un certain nombre de conditions générales et particulières, y plus amplement spécifiées.

Par requête inscrite sous le numéro 17867 du rôle, déposée le 7 avril 2004, la société anonyme E. S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme …S.A., la société à responsabilité limitée … S. à r.l., la société anonyme … S.A., la société à responsabilité limitée …, la société anonyme …., la société anonyme … et la société civile immobilière … SCI, préqualifiées, ont introduit un recours contentieux tendant à la réformation du susdit arrêté ministériel du 20 février 2004.

L’article 19 de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés ouvrant un recours au fond devant le juge administratif pour statuer en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à l’encontre de la décision ministérielle litigieuse, aucune contestation y relative n’ayant par ailleurs été élevée.

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours au motif que les sociétés demanderesses ne feraient pas valoir un intérêt suffisant pour agir à l’encontre de l’acte querellé. Dans ce contexte, il relève le fait que les demanderesses sont des personnes morales dont les locaux ne seraient occupés que pendant les heures normales de travail de 8 heures du matin à 18 heures du soir, tandis que l’exploitation du dancing n’aurait lieu que de 22 heures du soir à 6 heures du matin, de sorte qu’aucun inconvénient ne serait à craindre.

Le délégué ajoute encore que les demanderesses omettraient également de prouver en quoi l’autorisation litigieuse compromettrait la réalisation de leurs objectifs sociaux individuels ou porterait atteinte à l’ensemble des associés et il soutient que la seule qualité de propriétaire de terrains voisins à l’établissement serait insuffisante pour justifier l’existence d’un intérêt pour agir.

Enfin, il conteste une proximité suffisante entre les terrains des demandeurs et l’exploitation litigieuse, qui n’aurait pas une envergure telle qu’elle engendrerait des nuisances importantes, d’autant plus que l’exploitation litigieuse fonctionnerait en dehors des heures normales de travail.

La société à responsabilité limitée I. S. à r.l. et la société anonyme C. S.A., parties tierces intéressées, la seconde pour avoir pris en location de la part de la société à responsabilité limitée I. S. à R.L. l’immeuble sis à L-…, et qui se propose d’y exploiter le dancing faisant l’objet de l’arrêté litigieux, dénient également l’existence d’un intérêt suffisant dans le chef des parties demanderesses, réitérant en substance les arguments développés par le représentant étatique, tout en ajoutant que les craintes que les demanderesses feraient valoir n’auraient trait qu’à des inconvénients purement hypothétiques et comme tels insuffisants pour priver le propriétaire de l’immeuble devant implanter le dancing, de même que son exploitant, de leur droit légitime de réaliser leur projet « dans le strict respect de la législation ».

S’il est vrai que les parties demanderesses ne sauraient se plaindre concrètement de grand nombre de nuisances que la réglementation relative aux établissements classés tend à prévenir, étant donné que l’exploitation de l’établissement projeté a effectivement lieu en dehors des heures normales de bureau et partant des heures de fonctionnement des exploitations voisines, il n’en reste pas moins que c’est à juste titre que les parties demanderesses soutiennent qu’en tant que propriétaires de parcelles situées dans les proches alentours de l’établissement projeté ou exploitants implantés sur pareilles parcelles, ils ont un intérêt personnel direct suffisant notamment à faire contrôler le respect de la compatibilité de l’établissement projeté avec sa zone d’implantation par le seul fait des craintes légitimes de dégradation de la valeur de leurs propriétés ou exploitations, étant relevé que même un fonctionnement normal de l’établissement projeté, en l’occurrence une discothèque d’une capacité de plus de 1.800 personnes, est susceptible de générer des nuisances médiates indéniables.

Il s’ensuit que le recours, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

La société à responsabilité limitée I. S. à r.l. sollicite encore la jonction de l’affaire sous examen avec une affaire inscrite sous le numéro 17705 du rôle, déposée le 8 mars 2004 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme E. S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme … S.A. et la société civile immobilière … SCI tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Environnement du 4 décembre 2003 autorisant la transformation à L-…, sur un fond inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HaA de Hamm, sous le numéro 420/4573, d’un hall de stockage existant et d’y exploiter le dancing faisant également l’objet de la décision du ministre du Travail et de l’Emploi, estimant que les deux affaires seraient liées et qu’il conviendrait de les instruire et de les juger ensemble.

Il n’y a cependant pas lieu de faire droit à cette demande de jonction, étant donné que s’il est vrai que les deux autorisations ministérielles ont trait à un même établissement projeté et que certains des moyens de réformation ou d’annulation soulevés sont identiques, il n’en reste pas moins que les deux décisions ont été prises par des autorités ministérielles distinctes agissant dans des sphères de compétence différentes, que les demandeurs aux deux instances ne sont pas les mêmes et que la partie I. S. à r.l. n’est même pas intervenue dans le cadre de l’affaire mettant en cause la décision du ministre de l’Environnement, de sorte qu’il n’appert pas en quoi il serait de l’intérêt d’une bonne administration de la justice de joindre les deux affaires et d’y statuer par un seul et même jugement, la jonction, loin de faciliter l’instruction, impliquant essentiellement des complications et sources de confusions inutiles. Enfin, il est évident que la jonction ne saurait servir pour faire intervenir une partie par la tangente dans une affaire qu’elle a omis d’instruire dans les délais légaux.

Au fond, les demanderesses soulèvent en premier lieu et principalement la violation de l’article 17.2 de la loi précitée du 10 juin 1999 en querellant le fait que l’exploitation d’une discothèque a été considérée compatible avec la zone d’implantation, en l’occurrence une zone classée « zone d’activité 1 », définie et circonscrite par l’article D.1.1 du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, ci-après dénommé le « PAG », et réservée aux établissements à caractère artisanal. Dans ce contexte, ils estiment qu’une discothèque ne constitue ni une entreprise artisanale ni de service, ni une quelconque autre entreprise rentrant dans les prévisions de l’article D.1.1 du PAG, mais qu’en tant qu’« installation de récréation », une discothèque devrait être implantée dans une zone classée « zone de récréation et de loisirs » par le PAG.

Elles soutiennent encore qu’en tout état de cause, l’établissement projeté dégagerait inévitablement, soit directement, soit indirectement par le va-et-vient des clients et des voitures, des bruits excessifs, à savoir des bruits tonitruants incommodant de façon intolérable les voisins.

Dans leur réplique, elles font encore ajouter que dès lors que les zones d’activités 1 seraient « exclusivement réservées » aux établissements à caractère artisanal, les entreprises de services visées par l’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg constitueraient une exception et ne viseraient que les entreprises de service ayant « un lien direct avec ces établissements à caractère artisanal », tel n’étant pas le cas d’un dancing ou discothèque.

Au vœu de l’article 17.2 de la loi précitée du 10 juin 1999, en présence d’un établissement projeté « dans des immeubles existants et dont la construction a été dûment autorisée », les autorisations requises en vertu de cette loi ne pourront être délivrées que lorsque l’établissement projeté se situe dans une zone prévue à ces fins en conformité notamment avec la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes.

Il s’ensuit qu’en ce qui concerne notamment le ministre du Travail et de l’Emploi, il est appelé à vérifier au préalable la concordance de la zone territoriale visée par rapport à l’établissement projeté en conformité avec la loi précitée du 12 juin 1937.

En l’espèce, il est constant que l’immeuble dans lequel l’exploitation du dancing litigieux est projetée est situé dans une zone classée par le PAG de la Ville de Luxembourg « zone d’activités 1 » et, plus particulièrement, une zone marquée dans la partie graphique par la lettre A.

L’article D.0.1 du PAG de la Ville de Luxembourg précise pour l’ensemble des zones d’activités qu’« y sont interdites les constructions à usage d’hôtellerie et d’habitation, à l’exception d’un logement destiné au personnel dont la présence permanente est nécessaire pour assurer la direction ou la surveillance des bâtiments » et « sont encore interdites, sauf pour les terrains marqués par une hachuration rouge orangé et déterminés dans la partie graphique par la lettre A, les bâtiments administratifs qui ne relèvent pas de l’entreprise », une surface égale à au moins un dixième de la superficie des parcelles devant être aménagée sous forme de verdure et entretenue comme telle.

Il est encore constant en cause que l’exploitation litigieuse ne tombe pas sous une des interdictions de principe ci-avant relevées.

L’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg définit et circonscrit plus précisément les zones d’activités 1 comme « destinées aux entreprises artisanales et de service, établissements techniques, garages de réparation et de service, laboratoires, ateliers, entrepôts, ne dégageant ni émanations polluantes, ni bruits excessifs.

Dans les zones marquées dans la partie graphique par la lettre A sont admis des bâtiments de bureaux et d’administrations. (…) ».

Les nature et caractère non artisanal d’un dancing ou discothèque n’étant pas discutable, le tribunal est appelé à apprécier si pareil établissement est néanmoins compatible avec la zone d’activités 1, telle qu’elle est légalement définie et circonscrite par les dispositions susénoncées.

Force est de constater que l’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg vise tant les entreprises artisanales que les entreprises de service et même une interprétation stricte ne fait pas dégager que les entreprises de service doivent être nécessairement et directement liées à une activité artisanale.

Ainsi, s’il est vrai que l’article D.0.1 dudit PAG fait une distinction entre les « zones d’activités 1, réservées aux établissements à caractère artisanal » et les « zones d’activités 2, réservées aux établissements à caractère industriel », il serait erroné de vouloir en dégager une vocation exclusivement artisanale des zones d’activité 1, étant donné que l’intention des rédacteurs de ladite disposition apparaît avoir simplement été de marquer la différence entre zones à vocation industrielle, d’un côté, et zones à vocation non industrielle, qualifiées globalement d’artisanale, d’un autre côté, sans l’intention de vouloir en exclure les entreprises commerciales. - Admettre le contraire serait vider le premier alinéa dudit article D.0.1 de sa substance. En effet, cet alinéa dispose que « les zones d’activités [1 et 2] sont constituées par les parties du territoire de la ville destinées à grouper les établissements de caractère commercial, artisanal ou industriel qui, de par leurs dimensions ou leur caractère, ne sont pas compatibles avec les zones d’habitation ou mixtes » et suivre l’argumentation des parties demanderesses impliquerait que la vocation des zones d’activités clairement affichée de recevoir des entreprises à caractère commercial serait balayée, dès lors que si l’on affirme l’incompatibilité des entreprises commerciales avec la vocation artisanale des zones 1, il faut a fortiori reconnaître leur incompatibilité avec les zones 2 à vocation industrielle.

Partant, la notion d’« établissement de service » telle que figurant à l’article D.1.1 n’apparaît être que la transposition de l’idée d’activité commerciale de l’article D.0.1 pour les cas où pareille activité par sa dimension ou son caractère n’est plus compatible avec les zones d’habitation ou mixtes.

Ainsi, force est de constater que la définition des zones d’activités 1 loin de prohiber l’installation d’un dancing ou discothèque, vise pareil établissement au titre des « entreprises de service », étant relevé que pareil établissement a manifestement une vocation commerciale et d’entreprise de service, l’incompatibilité du dancing projeté tant par son caractère que par sa dimension avec les zones d’habitation ou mixtes étant par ailleurs patente.

Cette analyse est au demeurant confirmée par la position adoptée par la Ville de Luxembourg dans le cadre de la procédure d’enquête ayant abouti à l’arrêté litigieux, étant relevé que si l’administration communale de la Ville de Luxembourg a émis un avis défavorable, il n’en reste pas moins que ladite administration communale n’a fait état que de considérations relativement aux conditions d’exploitations tendant à protéger les voisins de nuisances acoustiques, d’une part, et de réticences relativement à la capacité maximale jugée trop importante de façon à générer trop de nuisances par l’effet d’une augmentation sensible du trafic, d’autre part, l’avis ne mentionnant cependant aucune incompatibilité de principe de la zone d’implantation avec l’exploitation projetée.

Etant donné qu’il n’est par ailleurs pas établi par les demanderesses que le dancing risque d’émettre des bruits excessifs ne pouvant être endigués au mieux des intérêts du voisinage par des conditions d’exploitation conformes aux dispositions légales applicables en la matière, il s’ensuit au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appréciation faite par le ministre du Travail et de l’Emploi en ce qu’il n’a pas conclu à l’existence d’une incompatibilité de la discothèque projetée, de par sa nature et son objet, avec la destination de la zone territoriale d’implantation, n’est pas critiquable et les critique et moyen d’annulation afférents sont à écarter.

Dans un second ordre d’idées, les demanderesses font soutenir que la décision ministérielle serait illégale au motif que la zone devant accueillir la « construction » [sic] projetée ne serait pas couverte par les autorisations ministérielles requises dans le cadre de la loi précitée du 10 juin 1999. Dans ce contexte, elles font soutenir que non seulement les établissements devraient individuellement être autorisés, mais que « la création et l’aménagement » des zones d’implantation d’établissements commerciaux et industriels devraient également et préalablement être autorisées par les autorités compétentes en matière d’établissements classés.

Il est vrai qu’au vœu de la loi précitée du 10 juin 1999, la « création / aménagement » de nouvelles zones d’activités commerciales, artisanales et industrielles (n° 363 de la nomenclature des établissements du règlement grand-ducal du 16 juillet 1999 portant nomenclature et classification des établissements classés) est soumise à la procédure d’autorisation classe 1, les travaux d’infrastructures desdites zones d’activités étant soumises à la procédure d’autorisation classe 3.

En l’espèce, il convient cependant de constater que l’établissement litigieux n’est pas projeté dans une zone qui serait à créer ou à aménager, mais dans une zone existante classée par le PAG de la Ville de Luxembourg, de sorte qu’à défaut de précision et de concrétisation de l’argumentation afférente, il n’appert pas en l’état, en quoi cette disposition respectivement une quelconque autre disposition de la loi précitée du 10 juin 1999 et de ses règlements d’exécution exigerait qu’une zone existante et aménagée au moment de l’entrée en vigueur de ladite réglementation serait également visée et serait soumise post festum et en dehors d’un projet de réaménagement d’ensemble à la procédure d’autorisation prévue par ladite réglementation.

Il s’ensuit que le moyen afférent laisse d’être fondé.

Dans un dernier ordre d’idées, les demandeurs reprochent à l’autorisation ministérielle de ne pas fixer des conditions d’aménagement et d’exploitation suffisantes pour garantir la protection des intérêts du public, du voisinage et du personnel au motif que le ministre du Travail et de l’Emploi est resté en défaut de se prononcer sur l’aménagement d’un parking suffisamment grand pour satisfaire aux besoins d’un établissement d’une envergure certaine appelant un public de plus de 1800 personnes.

Il y a lieu de constater de prime abord que c’est à tort que les contradicteurs des demandeurs font soutenir que le volet relatif à l’aménagement d’un parking répondant aux besoins de l’exploitation concernée ne rentrerait pas dans les attributions du ministre du Travail et de l’Emploi, étant donné que s’il est indéniable que les considérations relativement à l’existence d’un parking adapté aux besoins de l’exploitation dont il est question concernent directement les conditions d’aménagement voire d’exploitation visant l’environnement humain, notamment au regard de la protection de l’air et de la lutte contre le bruit et rentrent partant dans les compétences et attributions du ministre de l’Environnement, il n’en reste pas moins que l’aménagement d’un parking n’est pas par principe étranger aux considérations de sécurité du public et du voisinage en général, voire, en fonction de la nature, spécialement s’il s’agit d’un parking souterrain, aux considérations de sécurité du personnel sur le lieu du travail, de sorte qu’il est susceptible de rentrer également dans les compétences et attributions du ministre du Travail et de l’Emploi.

Ceci étant, sans préjudice de ce qu’en présence d’un projet dans le cadre duquel les exploitants envisageaient un parking aérien limité à 90 emplacements, la décision ministérielle en cause a pu rester muette quant à ce volet, force est de constater que l’envergure du parking projeté a cependant été considérée par jugement en date de ce jour dans l’affaire inscrite sous le numéro 17705 du rôle dirigée contre l’arrêté précité du ministre de l’Environnement du 4 décembre 2003 « manifestement insuffisant pour prévenir des problèmes de stationnement et des troubles anormaux y liés », le tribunal ayant, par réformation, ordonné que l’autorisation sollicitée n’est accordée « qu’à la condition que l’exploitant se ménage la garantie d’une disponibilité totale de 200 emplacements privés de parking pour ses clients, soit in situ, le cas échéant moyennant un parking souterrain ou couvert, à autoriser complémentairement ou séparément, le tout sans préjudice des autres dispositions légales applicables, soit, via un parc de stationnement - à aménager, à louer ou autrement - à l’intérieur de la zone d’implantation et à une distance suffisamment proche de l’établissement », ce à quoi il convient de se tenir dans le cadre de la présente espèce, sans cependant pouvoir en tirer d’autre conséquence que celle que le dossier est en l’état actuel à renvoyer au ministre du Travail et de l’Emploi pour lui permettre de statuer dans le cadre de sa sphère de compétence spécifique par rapport à un éventuel complément de demande relativement à l’aménagement d’un parking in situ.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties , rejette la demande de jonction de la présente affaire avec celle inscrite sous le numéro 17705 du rôle , reçoit le recours en réformation en la forme , au fond, le déclare non justifié, sauf à renvoyer l’affaire devant le ministre du Travail et de l’Emploi, afin qu’il puisse statuer dans le cadre de sa sphère de compétence spécifique par rapport à un éventuel complément de demande relativement à l’aménagement d’un parking in situ , condamne les demanderesses aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 15 décembre 2004, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17867
Date de la décision : 15/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-15;17867 ?

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