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15/12/2004 | LUXEMBOURG | N°17705

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 décembre 2004, 17705


Tribunal administratif N° 17705 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 mars 2004 Audience publique du 15 décembre 2004

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Recours formé par la société anonyme E. et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme C. S.A., Luxembourg en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17705 du rôle, déposée le 8 mars 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Roger N

OTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de :

1. la soci...

Tribunal administratif N° 17705 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 mars 2004 Audience publique du 15 décembre 2004

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Recours formé par la société anonyme E. et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme C. S.A., Luxembourg en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 17705 du rôle, déposée le 8 mars 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de :

1. la société anonyme E. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 2. la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 3. la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 4. la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 5. la société civile immobilière …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg, représentée par son gérant actuellement en fonction, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Environnement du 4 décembre 2003 (arrêté n° 1/03/0198) faisant droit à une demande du 25 avril 2003, présentée par la société anonyme L. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., établie et ayant son siège social à L- :.., en obtention d’une autorisation de transformer à L-…, sur un fond inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HaA de Hamm, sous le numéro 420/4573, un hall de stockage existant et d’y exploiter une salle de spectacle modulaire (dancing) pouvant accueillir au maximum 1.835 personnes et les éléments accessoires et connexes (parking de 90 emplacements, locaux et installations sanitaires, techniques et utilitaires, etc) ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 9 mars 2004, par lequel cette requête a été signifiée à la société anonyme L. S.A. et à la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiées ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 8 juin 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 juillet 2004 en nom et pour compte des parties demanderesses ;

Vu la requête en intervention volontaire avec mémoire en réponse, intitulé « mémoire en réplique », déposée au greffe du tribunal administratif le 22 juillet 2004 par Maître Lex THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme C. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg, sous le n° B …, représentée par son administrateur délégué actuellement en fonctions ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 août 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision litigieuse ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maîtres Steve HELMINGER, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, Isabelle WELSCHEN, en remplacement de Maître Lex THIELEN, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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Faisant suite à une demande introduite le 25 avril 2003 par la société anonyme L. S.A., préqualifiée, agissant en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l., préqualifiée, tendant à l’obtention d’une autorisation de transformer à L-… sur un fond inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HaA de Hamm, sous le numéro 420/4573, un hall de stockage existant et d’y exploiter une salle de spectacle modulaire (dancing) pouvant accueillir au maximum 1.835 personnes et les éléments accessoires et connexes (parking de 90 emplacements, locaux et installations sanitaires, techniques et utilitaires, etc.), le ministre de l’Environnement, par arrêté n° 1/03/0198 du 4 décembre 2003, délivra l’autorisation requise dans le cadre de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, cette autorisation étant assortie d’un certain nombre de conditions générales et particulières, y plus amplement spécifiées.

Par requête, inscrite sous le numéro 17705 du rôle, déposée le 8 mars 2004, la société anonyme E. S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme … S.A., la société anonyme … S.A. et la société civile immobilière … SCI, préqualifiées, ont introduit un recours contentieux tendant à la réformation du susdit arrêté ministériel du 4 décembre 2003.

L’article 19 de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés ouvrant un recours au fond devant le juge administratif pour statuer en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à l’encontre de la décision ministérielle litigieuse, aucune contestation y relative n’ayant par ailleurs été élevée.

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours au motif que les sociétés demanderesses ne feraient pas valoir un intérêt suffisant pour agir à l’encontre de l’acte querellé. Dans ce contexte, il relève le fait que les demanderesses sont des personnes morales de droit privé qui par principe ne se verraient pas incommodées comme des personnes physiques et qui ne sauraient « jamais établir une affectation des intérêts protégés par la législation sur les établissements classés en ce qui concerne le volet « compétence du ministre de l’environnement ».

Le délégué ajoute encore que les demanderesses omettraient également de prouver en quoi l’autorisation litigieuse compromettrait la réalisation de leurs objectifs sociaux individuels ou porterait atteinte à l’ensemble des associés et il soutient que la seule qualité de propriétaire de terrains voisins à l’établissement serait insuffisante pour justifier l’existence d’un intérêt pour agir.

Enfin, il conteste une proximité suffisante entre les terrains des demandeurs et l’exploitation litigieuse, qui n’aurait pas une envergure telle qu’elle engendrerait des nuisances importantes, d’autant plus que l’exploitation litigieuse fonctionnerait en dehors des heures normales de travail.

La société anonyme C. S.A., partie tierce intéressée pour avoir pris en location de la part de la société à responsabilité limitée I. S. à r.l. l’immeuble sis à L-…, …, et qui se propose d’y exploiter le dancing faisant l’objet de l’arrêté litigieux, dénie également l’existence d’un intérêt suffisant dans le chef des parties demanderesses, réitérant en substance les arguments développés par le représentant étatique, tout en ajoutant que les craintes que les demanderesses feraient valoir n’auraient trait qu’à des inconvénients purement hypothétiques et comme tels insuffisants pour priver le propriétaire de l’immeuble devant implanter le dancing, de même que son exploitant, de leur droit légitime de réaliser leur projet « dans le strict respect de la législation ».

S’il est vrai que les parties demanderesses ne sauraient se plaindre concrètement de grand nombre de nuisances que la réglementation relative aux établissements classés tend à prévenir, étant donné que l’exploitation de l’établissement projeté a effectivement lieu en dehors des heures normales de bureau et partant des heures de fonctionnement des exploitations voisines, il n’en reste pas moins que c’est à juste titre que les parties demanderesses soutiennent qu’en tant que propriétaires de parcelles situées dans les proches alentours de l’établissement projeté ou exploitants implantés sur pareilles parcelles, ils ont un intérêt personnel direct suffisant notamment à faire contrôler le respect de la compatibilité de l’établissement projeté avec sa zone d’implantation par le seul fait des craintes légitimes de dégradation de la valeur de leurs propriétés ou exploitations, étant relevé que même un fonctionnement normal de l’établissement projeté, en l’occurrence une discothèque d’une capacité de plus de 1.800 personnes, est susceptible de générer des nuisances médiates indéniables.

Il s’ensuit que le recours, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

Au fond, les demanderesses soulèvent en premier lieu et principalement la violation de l’article 17.2 de la loi précitée du 10 juin 1999 en querellant le fait que l’exploitation d’une discothèque a été considérée compatible avec la zone d’implantation, en l’occurrence une zone classée « zone d’activité 1 », définie et circonscrite par l’article D.1.1 du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, ci-après dénommé le « PAG », et réservée aux établissements à caractère artisanal. Dans ce contexte, ils estiment qu’une discothèque ne constitue ni une entreprise artisanale ni de service, ni une quelconque autre entreprise rentrant dans les prévisions de l’article D.1.1 du PAG, mais qu’en tant qu’« installation de récréation », une discothèque devrait être implantée dans une zone classée « zone de récréation et de loisirs » par le PAG.

Elles soutiennent encore qu’en tout état de cause, l’établissement projeté dégagerait inévitablement, soit directement, soit indirectement par le va-et-vient des clients et des voitures, des bruits excessifs, à savoir des bruits tonitruants incommodant de façon intolérable les voisins.

Dans leur réplique, elles font encore ajouter que dès lors que les zones d’activités 1 seraient « exclusivement réservées » aux établissements à caractère artisanal, les entreprises de services visées par l’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg constitueraient une exception et ne viseraient que les entreprises de service ayant « un lien direct avec ces établissements à caractère artisanal », tel n’étant pas le cas d’un dancing ou discothèque.

Au vœu de l’article 17.2 de la loi précitée du 10 juin 1999, en présence d’un établissement projeté « dans des immeubles existants et dont la construction a été dûment autorisée », les autorisations requises en vertu de cette loi ne pourront être délivrées que lorsque l’établissement projeté se situe dans une zone prévue à ces fins en conformité, notamment avec la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes.

Il s’ensuit qu’en ce qui concerne notamment le ministre de l’Environnement, il est appelé de vérifier au préalable la concordance de la zone territoriale visée par rapport à l’établissement projeté en conformité avec la loi précitée du 12 juin 1937.

En l’espèce, il est constant que l’immeuble dans lequel l’exploitation du dancing litigieux est projetée est situé dans une zone classée par le PAG de la Ville de Luxembourg « zone d’activités 1 » et, plus particulièrement, une zone marquée dans la partie graphique par la lettre A.

L’article D.0.1 du PAG de la Ville de Luxembourg précise pour l’ensemble des zones d’activités qu’« y sont interdites les constructions à usage d’hôtellerie et d’habitation, à l’exception d’un logement destiné au personnel dont la présence permanente est nécessaire pour assurer la direction ou la surveillance des bâtiments » et « sont encore interdites, sauf pour les terrains marqués par une hachuration rouge orangé et déterminés dans la partie graphique par la lettre A, les bâtiments administratifs qui ne relèvent pas de l’entreprise », une surface égale à au moins un dixième de la superficie des parcelles devant être aménagée sous forme de verdure et entretenue comme telle.

Il est encore constant en cause que l’exploitation litigieuse ne tombe pas sous une des interdictions de principe ci-avant relevées.

L’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg définit et circonscrit plus précisément les zones d’activités 1 comme « destinées aux entreprises artisanales et de service, établissements techniques, garages de réparation et de service, laboratoires, ateliers, entrepôts, ne dégageant ni émanations polluantes, ni bruits excessifs.

Dans les zones marquées dans la partie graphique par la lettre A sont admis des bâtiments de bureaux et d’administrations. (…) ».

Les nature et caractère non artisanal d’un dancing ou discothèque n’étant pas discutable, le tribunal est appelé à apprécier si pareil établissement est néanmoins compatible avec la zone d’activités 1, telle qu’elle est légalement définie et circonscrite par les dispositions susénoncées.

Force est de constater que l’article D.1.1 du PAG de la Ville de Luxembourg vise tant les entreprises artisanales que les entreprises de service et même une interprétation stricte ne fait pas dégager que les entreprises de service doivent être nécessairement et directement liées à une activité artisanale.

Ainsi, s’il est vrai que l’article D.0.1 dudit PAG fait une distinction entre les « zones d’activités 1, réservées aux établissements à caractère artisanal » et les « zones d’activités 2, réservées aux établissements à caractère industriel », il serait erroné de vouloir en dégager une vocation exclusivement artisanale des zones d’activité 1, étant donné que l’intention des rédacteurs de ladite disposition apparaît avoir simplement été de marquer la différence entre zones à vocation industrielle, d’un côté, et zones à vocation non industrielle, qualifiées globalement d’artisanale, d’un autre côté, sans l’intention de vouloir en exclure les entreprises commerciales. - Admettre le contraire serait vider le premier alinéa dudit article D.0.1 de sa substance. En effet, cet alinéa dispose que « les zones d’activités [1 et 2] sont constituées par les parties du territoire de la ville destinées à grouper les établissements de caractère commercial, artisanal ou industriel qui, de par leurs dimensions ou leur caractère, ne sont pas compatibles avec les zones d’habitation ou mixtes » et suivre l’argumentation des parties demanderesses impliquerait que la vocation des zones d’activités clairement affichée de recevoir des entreprises à caractère commercial serait balayée, dès lors que si l’on affirme l’incompatibilité des entreprises commerciales avec la vocation artisanale des zones 1, il faut a fortiori reconnaître leur incompatibilité avec les zones 2 à vocation industrielle.

Partant, la notion d’« établissement de service » telle que figurant à l’article D.1.1 n’apparaît être que la transposition de l’idée d’activité commerciale de l’article D.0.1 pour les cas où pareille activité par sa dimension ou son caractère n’est plus compatible avec les zones d’habitation ou mixtes.

Ainsi, force est de constater que la définition des zones d’activités 1 loin de prohiber l’installation d’un dancing ou discothèque, vise pareil établissement au titre des « entreprises de service », étant relevé que pareil établissement a manifestement une vocation commerciale et d’entreprise de service, l’incompatibilité du dancing projeté tant par son caractère que par sa dimension avec les zones d’habitation ou mixtes étant par ailleurs patente.

Cette analyse est au demeurant confirmée par la position adoptée par la Ville de Luxembourg dans le cadre de la procédure d’enquête ayant abouti à l’arrêté litigieux, étant relevé que si l’administration communale de la Ville de Luxembourg a émis un avis défavorable, il n’en reste pas moins que ladite administration communale n’a fait état que de considérations relativement aux conditions d’exploitations tendant à protéger les voisins de nuisances acoustiques, d’une part, et de réticences relativement à la capacité maximale jugée trop importante de façon à générer trop de nuisances par l’effet d’une augmentation sensible du trafic, d’autre part, l’avis ne mentionnant cependant aucune incompatibilité de principe de la zone d’implantation avec l’exploitation projetée.

Etant donné qu’il n’est par ailleurs pas établi par les demanderesses que le dancing risque d’émettre des bruits excessifs ne pouvant être endigués au mieux des intérêts du voisinage par des conditions d’exploitation conformes aux dispositions légales applicables en la matière, il s’ensuit au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appréciation faite par le ministre de l’Environnement en ce qu’il n’a pas conclu à l’existence d’une incompatibilité de la discothèque projetée, de par sa nature et son objet, avec la destination de la zone territoriale d’implantation, n’est pas critiquable et les critique et moyen d’annulation afférents sont à écarter.

Dans un second ordre d’idées, les demanderesses font soutenir que la décision ministérielle serait illégale au motif que la zone devant accueillir la « construction » [sic] projetée ne serait pas couverte par les autorisations ministérielles requises dans le cadre de la loi précitée du 10 juin 1999. Dans ce contexte, elles font soutenir que non seulement les établissements devraient individuellement être autorisés, mais que « la création et l’aménagement » des zones d’implantation d’établissements commerciaux et industriels devraient également et préalablement être autorisées par les autorités compétentes en matière d’établissements classés.

Il est vrai qu’au vœu de la loi précitée du 10 juin 1999, la « création / aménagement » de nouvelles zones d’activités commerciales, artisanales et industrielles (n° 363 de la nomenclature des établissements du règlement grand-ducal du 16 juillet 1999 portant nomenclature et classification des établissements classés) est soumise à la procédure d’autorisation classe 1, les travaux d’infrastructures desdites zones d’activités étant soumises à la procédure d’autorisation classe 3.

En l’espèce, il convient cependant de constater que l’établissement litigieux n’est pas projeté dans une zone qui serait à créer ou à aménager, mais dans une zone existante classée par le PAG de la Ville de Luxembourg, de sorte qu’à défaut de précision et de concrétisation de l’argumentation afférente, il n’appert pas en l’état, en quoi cette disposition respectivement une quelconque autre disposition de la loi précitée du 10 juin 1999 et de ses règlements d’exécution exigerait qu’une zone existante et aménagée au moment de l’entrée en vigueur de ladite réglementation serait également visée et serait soumise post festum et en dehors d’un projet de réaménagement d’ensemble à la procédure d’autorisation prévue par ladite réglementation.

Il s’ensuit que le moyen afférent laisse d’être fondé.

Dans un dernier ordre d’idées, les demandeurs, en se référant à l’avis défavorable du collège échevinal de la Ville de Luxembourg, reprochent à l’autorisation ministérielle de ne pas fixer des conditions d’aménagement et d’exploitation suffisantes pour garantir la protection des intérêts des riverains, en ce qui concerne :

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le défaut critiqué d’un conseiller en acoustique « ayant mission de veiller à ce que les normes en matière de bruit applicables au Grand-Duché de Luxembourg soient respectées » ;

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l’absence de mesures appropriées garantissant que les entrées et sorties de la salle de spectacle se fassent de manière à éviter des « nuisances excessives pour le voisinage » ;

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le caractère disproportionné de la capacité maximale de l’établissement par rapport « aux impératifs en matière de circulation » et, plus particulièrement, en ce qui concerne l’aménagement d’un parking limité à 90 emplacements de stationnement.

Le moyen laisse d’être fondé en ses deux premières branches, étant donné que les demanderesses ne précisent nullement en quoi les conditions d’aménagement et d’exploitation fixées par le ministre de l’Environnement dans l’autorisation litigieuse seraient concrètement insuffisantes pour concilier les différents intérêts en concours et garantir les objectifs visés par la législation sur les établissements classés et que la mission de police, impliquant le contrôle du respect des dispositions légales applicables, de même que le respect des conditions d’aménagement et d’exploitation fixées, réside entre les mains des autorités ministérielles et non pas dans celles de l’exploitant de l’établissement, d’une part, et que force est de constater que la deuxième objection formulée par l’autorité communale, par la suite reprise par les demanderesses, a été rencontrée de façon satisfaisante, à défaut de contestation concrète et concluante sur ce point, par le fait que le permis ministériel exige expressément entre autres que l’entrée/sortie principale des clients de l’établissement doit être aménagée sous forme de sas acoustique, d’autre part.

En ce qui concerne la troisième branche du dernier moyen de réformation soulevé, il convient de distinguer entre les volets « circulation » proprement dite et « parking ».

Quant au premier volet, il convient de suivre le délégué du gouvernement en ce qu’il soutient que le ministre de l’Environnement n’est pas compétent en matière de circulation sur les voies publiques, des considérations afférentes pouvant lui rester indifférentes aussi longtemps que les nuisances afférentes ne se rapportent pas à l’établissement classé pour émaner d’une manière ou d’une autre de son exploitation et ne constituent qu’une simple répercussion normale, non spécifique au type de l’établissement classé concerné et commun à tous genres d’activités engendrant des déplacements du public et de conclure qu’en l’espèce, le volet circulation dans la zone d’implantation au regard de la spécificité de son exploitation en dehors des heures normales d’ouverture des autres établissements y implantés n’est pas sujet à requérir des exigences spécifiques de la part du ministre concerné.

La conclusion à tirer en ce qui concerne le second volet ayant trait à la nécessité d’un parking suffisant au regard des exigences de l’établissement, compte tenu de sa zone d’implantation spécifique et des possibilités de stationnement alternatives y existantes, de même que moyens et facilités de moyens transports alternatifs, requiert une réponse différente.

Dans ce contexte, il y a lieu de relever que les attributions de police spéciale en la matière requièrent que le ministre de l’Environnement prenne les mesures appropriées pour réduire les difficultés de stationnement entraînées de façon prévisible par l’activité concernée.

En effet, l’autorité ministérielle doit prendre en considération les nuisances indirectes prévisibles d’un établissement classé de par son activité, tant en ce qui concerne la desserte des installations que l’implantation d’une aire de stationnement suffisante pour garantir dans la mesure du possible et du prévisible les troubles anormaux résultant de son fonctionnement.

Or, en l’espèce, force est de constater que l’établissement litigieux est de par son envergure, étant rappelé sa capacité maximale de plus de 1800 clients, de nature à entraîner des troubles anormaux de voisinage du fait même de son fonctionnement qui est susceptible d’engendre des difficultés de stationnement sinon certaines alors suffisamment prévisibles, dès lors qu’il appert des éléments d’appréciation soumis au tribunal qu’existera un besoin de places de stationnement que les facilités offertes sur le site même et les emplacements publics environnants n’arriveront pas à satisfaire, la conséquence inévitable étant que les clients du dancing chercheront à compenser le manque existant en recourant aux rues, quartiers et parkings privés avoisinants. - En présence d’emplacements privés pouvant facilement être usurpés, sauf aux propriétaires voisins de les clôturer moyennant des débours supplémentaires, l’argumentation consistant à rétorquer que les clients devront recourir aux moyens de transport en commun n’est pas de nature à justifier un défaut d’exigence d’emplacements de stationnement suffisant.

En l’espèce, au regard de l’ensemble des éléments d’information mis à disposition du tribunal et, plus particulièrement, de la spécificité tant de l’établissement litigieux que de son activité, ensemble les spécificités de la zone d’implantation, avec ses disponibilités d’emplacements publics de parkings, le tribunal arrive à la conclusion que le parking privé aérien comprenant 90 emplacements est manifestement insuffisant pour prévenir des problèmes de stationnement et des troubles anormaux y liés et, par réformation, ordonne que l’autorisation sollicitée n’est accordée qu’à la condition que l’exploitant se ménage la garantie d’une disponibilité totale de 200 emplacements privés de parking pour ses clients, soit in situ, le cas échéant moyennant un parking souterrain ou couvert, à autoriser complémentairement ou séparément, le tout sans préjudice des autres dispositions légales applicables, soit, via un parc de stationnement - à aménager, à louer ou autrement - à l’intérieur de la zone d’implantation et à une distance suffisamment proche de l’établissement.

Eu égard à la solution du litige, il y a lieu de faire masse des frais et de les imputer pour moitié à l’Etat et pour l’autre moitié aux demanderesses.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties , reçoit le recours en réformation en la forme , au fond, le déclare partiellement justifié , partant, par voie de réformation, ordonne que l’autorisation sollicitée n’est accordée qu’à la condition que l’exploitant se ménage la garantie d’une disponibilité totale de 200 emplacements privés de parking pour ses clients, soit in situ, le cas échéant moyennant un parking souterrain ou couvert, à autoriser complémentairement ou séparément, le tout sans préjudice des autres dispositions légales applicables, soit, via un parc de stationnement - à aménager, à louer ou autrement - à l’intérieur de la zone d’implantation et à une distance suffisamment proche de l’établissement , renvoie l’affaire dans cette mesure devant le ministre de l’Environnement en prosécution de cause , déclare le recours non fondé pour le surplus , fait masse des frais et les impute pour moitié à l’Etat et pour l’autre moitié aux demanderesses.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 15 décembre 2004, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17705
Date de la décision : 15/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-15;17705 ?

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