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13/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18366

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 décembre 2004, 18366


Tribunal administratif N° 18366 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 juillet 2004 Audience publique du 13 décembre 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18366 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004 par Maître Mike ERNIQUIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-â

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Tribunal administratif N° 18366 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 juillet 2004 Audience publique du 13 décembre 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18366 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004 par Maître Mike ERNIQUIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement du 6 avril 2004 maintenant sur recours gracieux sa décision initiale du 18 février 2004 portant refus de l’autorisation d’établissement par lui sollicitée pour l’exercice de la profession d’expert-comptable;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 octobre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Guillaume DEFLANDRE, en remplacement de Maître Mike ERNIQUIN et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 novembre 2004.

En date du 24 septembre 2003, Monsieur … sollicita auprès du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement, ci-après désigné par « le ministre », l’octroi d’une autorisation de commerce pour l’exercice de la profession d’expert-comptable.

Le ministre transmit le dossier de Monsieur … en date du 4 avril 2004 au ministre de la Justice « avec prière d’avis quant à la responsabilité de Monsieur … dans la faillite de la société … Sàrl, prononcée le 15 décembre 1995 ».

Par courrier du 28 janvier 2004, le parquet du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, section économique et financière, transmit le rapport du curateur de la faillite … Sàrl., établi en date du 16 août 1996 au procureur général d’Etat avec l’avis suivant :

« Il appert dudit rapport que Monsieur … était le gérant de cette société.

Le parquet ne peut qu’émettre ses réserves dans la mesure où, suivant les renseignements fournis par le curateur, la faillie n’a pas tenu des livres de commerce, ce qui constitue un cas de banqueroute simple (article 574-6 du code de commerce et article 489 du code pénal).

Le parquet en conclut que Monsieur … a fait preuve de négligence et d’insouciance et est septique quant à ses nouveaux projets ».

Par décision datant du 18 février 2004, le ministre refusa de faire droit à la demande de Monsieur … dans les termes suivants :

« Par la présente, j’ai l’honneur de me référer à votre demande sous rubrique qui a fait entre-temps l’objet de l’instruction administrative prévue à l’article 2 de la loi d’établissement du 28 décembre 1998, modifiée le 4 novembre 1997.

Le résultat m’amène à vous informer que selon l’avis de la commission y prévue, vous ne présentez plus la garantie nécessaire d’honorabilité professionnelle en raison de vos agissements dans la faillite de la société … Sàrl, notamment par l’absence de comptabilité et par des dettes fiscales et sociales élevées. Par ailleurs, vous nous avez fait parvenir une déclaration de non-faillite faite sous serment devant un notaire qui est mensongère.

Comme je me rallie à la prise de position de cet organe de consultation, je suis au regret de ne pouvoir faire droit à votre requête dans l’état actuel du dossier en me basant sur l’article 2 et 3 de la loi susmentionnée ».

Par courrier de son mandataire datant du 17 mars 2004, Monsieur … a fait introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 18 février 2004 en relevant qu’il avait cédé en date du 24 août 1995 l’intégralité de ses parts sociales dans la société … Sàrl à Monsieur … et que ce dernier lui avait encore accordé décharge pour l’exercice de son mandat, tout en ayant repris à sa charge, en tant que liquidateur, l’apurement de tout le passif connu ou inconnu de la société … Sàrl. Dans la mesure où Monsieur … était ainsi devenu l’unique associé et responsable de cette société, il a fait valoir que lors de la faillite prononcée quelque 5 mois plus tard, ledit Monsieur … aurait été l’unique responsable, tout en relevant que ni le curateur de la faillite, ni le procureur d’Etat n’ont critiqué, après le prononcé de la faillite, l’acte notarié du 24 août 1995 ayant acté la décharge lui accordée.

Dans ce même recours gracieux, Monsieur … a encore fait relever que neuf années se sont écoulées depuis l’unique fait lui reproché.

Par courrier du 6 avril 2004, le ministre a confirmé sa décision initiale du 18 février 2004 en l’absence de tout élément probant nouveau en retenant, à toutes fins utiles, « que le désengagement de façade de Monsieur … effectué très peu de temps avant la déclaration en faillite de la société … Sàrl, ne saurait faire disparaître les graves manquements constatés lorsqu’il assurait la gérance de cette dernière (absence de comptabilité, dettes fiscales et sociales élevées) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation des décisions ministérielles prévisées des 18 février et 6 avril 2004.

Le délégué du Gouvernement conclut d’abord à l’incompétence du tribunal pour connaître du recours principal en réformation en faisant valoir qu’aucun recours de pleine juridiction ne serait prévu contre les décisions ministérielles concernant l’octroi, le refus ou la révocation des autorisations d’établissement.

Le demandeur se réfère de son côté à l’article 15 de la loi modifiée du 21 juillet 1999 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif pour soutenir que le tribunal aurait compétence pour statuer en tant que juge du fond en l’espèce, étant donné que la décision litigieuse serait une décision administrative à caractère réglementaire.

L’article 2, alinéa 6 de la loi modifiée du 28 décembre 1988, réglementant l’accès aux professions d’artisans, de commerçants, d’industriels, ainsi qu’à certains professions libérales, tel que modifié notamment par la loi du 4 novembre 1997, ci-après désignée par « la loi d’établissement » prévoit expressément qu’en matière d’octroi, de refus ou de révocation d’autorisation d’établissement seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives. Il s’ensuit que le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal. Cette conclusion ne saurait en effet être énervée par les développements du demandeur basés sur l’article 15 de la loi modifiée du 21 juillet 1999 précitée, étant donné d’abord que même en matière de recours contre les actes à caractère réglementaire, seul un recours en annulation est prévu et que de surcroît les décisions litigieuses constituent des décisions administratives individuelles et non pas des actes administratifs à caractère réglementaire au sens dudit article.

Le recours en annulation introduit à titre subsidiaire à l’encontre des décisions litigieuses est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que les griefs invoqués à son encontre, à savoir l’absence de comptabilité et l’existence de dettes fiscales et sociales élevées laisseraient d’être établis. Il relève à cet égard que si, pour des raisons de tardiveté du dépôt des déclarations afférentes dues à la survenance de la faillite et des pourparlers engagés entre lui-même et le curateur, l’administration des contributions a certes refusé de prendre en compte lesdites déclarations, il resterait cependant constant que malgré le fait de sa démission de la société … en date du 24 août 1995, il ne se serait nullement désintéressé de la situation financière de celle-ci avant la faillite et qu’il aurait, dans cet esprit, offert sa collaboration franche et active au curateur, afin que le passif de la faillite soit réduit dans la mesure du possible. Il fait état à cet égard d’arrangements avec les autorités fiscales françaises pour obtenir finalement le remboursement d’un montant important de la TVA, la société en faillite ayant été créditrice de TVA pour un montant estimé à 2.526.709.- LUF par la fiduciaire xxx sàrl. Le demandeur fait ensuite état de copies des grands livres comptables pour les années dont question (1993, 1994, 1995) en faisant valoir que ces documents comptables auraient été conservés par la société au moment de la cession des parts sociales et remis au curateur, pour soutenir que ce serait à tort que le ministre a fondé sa décision notamment sur l’absence de comptabilité. Il fait valoir ensuite que c’était encore de concert avec le curateur qu’il aurait opposé en date du 2 août 1997 à la Direction Générale des Impôts les taxations d’office auxquelles elle avait procédé et relève qu’il aurait lui-même racheté à la faillite, après négociation avec le curateur et à un prix de marché, des appareils, ordinateurs et divers meubles. De surcroît, il signale avoir remis le 4 juillet 1996 au curateur une somme de 25.000.-francs français dont ni la destination, ni l’imputation n’étaient autrement spécifiées, pour déduire de l’ensemble de ces éléments ainsi avancés qu’il aurait effectivement contribué au travail du curateur et que son désengagement effectué par acte notarié le 24 avril 1995 n’aurait partant pas été « de façade ». Il relève par ailleurs que le désengagement lui reproché tombait dans la période suspecte, de sorte que tant le curateur que le procureur d’Etat auraient pu demander l’annulation de l’acte notarié en question s’ils avaient eu le moindre soupçon quant à sa régularité, mais que force serait de constater qu’aucune action n’a été intentée ni dans ce sens, ni par ailleurs afin de voir sa responsabilité pénale engagée sur base de manœuvres frauduleuses ayant conduit à la faillite invoquée.

Concernant enfin le reproche de fausses déclarations lui adressé, le demandeur fait valoir que c’est à bon droit qu’il a signé le 11 juillet 2003 devant le notaire Z. la prestation de serment sur l’honneur qu’il n’a pas été déclaré en faillite ou en déconfiture, étant donné que son désengagement par la cession de ses parts et l’abandon de ses fonctions dirigeantes remonteraient avant la déclaration de faillite.

Le demander insiste enfin que huit années se sont écoulées depuis les faits lui reprochés et l’introduction de sa demande en autorisation d’établissement à la base du litige sous examen et que depuis lors il n’aurait pas commis la moindre infraction, ni dans le domaine économique et financier, ni de façon générale.

Le délégué du Gouvernement rétorque que le rapport du curateur de faillite de la société … Sàrl fait apparaître diverses négligences, manquements, anomalies et agissements dans le chef du demandeur qui en était le gérant. Il relève plus particulièrement à cet égard que le curateur a clairement indiqué dans son rapport que la société faillie ne disposait pas de livres de commerce à jour et régulièrement tenus et qu’à sa connaissance il n’y avait ni comptable interne ni comptable externe, pour estimer que de tels manquements justifieraient le refus d’octroyer une autorisation d’établissement, ce d’autant plus que la société faillie, dont le demandeur était le gérant, n’aurait pas respecté ses obligations envers les créanciers publics, le curateur renseignant à cet égard des dettes très importantes tant auprès des créanciers publics luxembourgeois que des organismes publics français, ainsi que des dettes envers des salariés.

Le représentant étatique relève ensuite que la société en faillite avait fonctionné pendant près de trois années sans disposer de l’autorisation d’établissement pourtant requise, de sorte que c’est encore au mépris des dispositions légales expresses que le gérant … a agi, ce qui serait constitutif non seulement de travail clandestin, mais encore sanctionné pénalement par la loi d’établissement. Il fait état en outre du nombre important d’assignations en paiement et de jugements divers énumérés dans le rapport du curateur pour conclure qu’une telle attitude entamerait l’honorabilité professionnelle déjà passablement compromise du demandeur.

Concernant finalement l’attestation de non-faillite qualifiée de mensongère par le ministre, le délégué du Gouvernement maintient cette prise de position en faisant valoir que la justification avancée en cause basée sur le fait que le demandeur a démissionné et vendu ses parts sociales avant la faillite et obtenu décharge pour son mandat par le prétendu repreneur liquidateur … demeurant au Congo n’emporterait pas sa conviction, étant donné qu’il serait pour le moins surprenant que subitement une personne habitant au Congo rachète pour un million de francs les parts d’une société en pleine déconfiture, ne disposant pas d’autorisation, mais de beaucoup de dettes, le tout en donnant décharge pour son mandat au gérant-associé et en s’engageant à prendre à sa charge en tant que liquidateur l’apurement de tout le passif connu et inconnu de cette société. Il en déduit que si l’attestation de non-faillite n’était pas mensongère sur un plan strictement formel et casuistique, elle le serait en substance et procéderait d’une mauvaise fois évidente du demandeur.

Le ministre relève finalement le sens de la mesure dont il aurait été fait preuve à l’égard de Monsieur … puisque ses autorisations d’établissement actuellement existantes n’ont pas encore fait l’objet d’une procédure de révocation, mais que seule sa demande pour une autorisation supplémentaire fut rejetée, étant entendu que cette dernière porte sur l’activité de fiduciaire-expert-comptable et que l’adresse d’exploitation de la société ITP S.A., dont Monsieur … est actuellement un des administrateurs-délégués, est la même que celle de la société faillie et qu’une certaine confusion des patrimoines entre celle-ci et la société faillie semblerait être établie à la lecture du rapport du curateur.

En vertu des dispositions de l’alinéa 1er de l’article 3 de la loi d’établissement « l’autorisation ne peut être accordée à une personne physique que si celle-ci présente les garanties nécessaires d’honorabilité et de qualification professionnelles ». Au vœu de l’alinéa final du même article 3 « l’honorabilité s’apprécie sur base des antécédents judiciaires du postulant et de tous les éléments fournis par l’enquête administrative ». Ainsi, toutes les circonstances révélées par l’enquête administrative et pouvant avoir une incidence sur la manière de l’exercice de la profession faisant l’objet de la demande d’autorisation, peuvent être prises en compte par le ministre pour apprécier l’honorabilité dans le chef du demandeur de l’autorisation, cette enquête pouvant valablement reposer, pour apprécier l’honorabilité professionnelle d’une personne, sur des éléments fournis par un curateur de faillite, le procureur général d’Etat et le procureur d’Etat, et ce même en l’absence de poursuites pénales (trib. adm., 22 mars 1999, n° 10716 du rôle, Pas. adm. 2004, v° autorisation d’établissement, n° 111, p.87, et autres références y citées).

En effet, si le seul fait d’avoir été impliqué dans une faillite n’entraîne pas nécessairement et péremptoirement le défaut d’honorabilité professionnelle dans le chef de la personne concernée, il appartient néanmoins au tribunal de vérifier si, au-delà de l’existence légale et matérielle de la faillite, il existe des éléments permettant de conclure dans le chef du gérant d’une société à l’existence d’actes personnels portant atteinte à l’honorabilité professionnelle, éléments qui peuvent le cas échéant constituer des indices suffisants pour justifier le refus de l’autorisation sollicitée ( voir trib. adm., 5 mars 1997, n° 9196 du rôle, Pas. adm. 2004, v° autorisations d’établissement, n° 105, p.86 et autres références y citées).

Ainsi, l’incapacité de mener à bien la gestion d’une entreprise, ainsi que le non-respect de ses obligations professionnelles par le non-paiement des charges sociales et fiscales obligatoires sont des éléments qui, globalement considérés, sont susceptibles de justifier une décision ministérielle de refus (trib. adm. 18 novembre 2002, n° 15025 du rôle, op. cit., n° 107, p.87, et autre référence y citée).

Il y a lieu de rappeler à ce sujet que la finalité de la procédure d’autorisation préalable, ainsi que la possibilité de refuser l’autorisation pour défaut d’honorabilité professionnelle consistent à assurer la sécurité de la profession concernée et tendent à éviter l’échec de futures activités, tout en étant destinées parallèlement à assurer la protection de futurs clients ou cocontractants (trib. adm. 18 juin 2001, n° 12859 du rôle, Pas. adm. 2004, v° autorisation d’établissement, n° 103, p.85, et autre référence y citée). Ainsi, le fait pour un dirigeant de société de méconnaître son obligation de surveiller le bon déroulement des affaires de la société constitue une raison suffisante pour conclure au défaut des garanties requises d’honorabilité professionnelle dans son chef en vue de remplir à nouveau les fonctions de gestion ou de direction d’une entreprise (trib. adm., 27 octobre 1999, n° 11327 du rôle, op. cit, n° 112, p.88).

S’il est certes patent en l’espèce qu’au jour du prononcé de la faillite de la société … sàrl, le demandeur n’était ni associé, ni revêtu de fonctions dirigeantes au sein de cette dernière pour avoir cédé ses parts sociales et reçu décharge pour l’exercice de ses fonctions dirigeantes par le nouvel associé unique lors de l’assemblée générale extraordinaire qui s’est tenue par devant Maître S., notaire de résidence à Luxembourg, en date du 25 août 1995, il n’en demeure cependant pas moins qu’à cette même date et par le même acte, la société … fut dissoute, de sorte que la situation de fait à la base de la faillite prononcée quelques mois plus tard seulement fut conditionnée nécessairement à l’époque où cette société n’avait pas encore cessé d’exister, soit à une époque où elle a fonctionné, de manière non-contestée en cause, sous la gérance du demandeur ….

Il s’ensuit que si le demandeur n’était certes plus formellement impliqué dans cette société au moment où elle fut déclarée en faillite et que partant le reproche lui adressé d’avoir effectué une déclaration de non-faillite mensongère laisse d’être formellement vérifié, il n’en demeure cependant pas moins que dans le cadre de l’instruction de la demande d’autorisation à la base du litige sous examen, le ministre a valablement pu s’intéresser de plus près à la manière dont Monsieur … a exercé la gérance de la société faillie, étant donné que c’est sous sa gérance que les dettes de la société se sont accumulées et que c’est à cette même époque que se réfèrent les différents reproches quant aux manquements à des obligations professionnelles, dont notamment l’absence d’une comptabilité régulière, soulevés par le curateur.

Dans ce contexte le tribunal constate d’abord que le demandeur n’a pas utilement contesté le fait relevé par le délégué du Gouvernement que la société … Sàrl ne disposait pas des autorisations administratives requises pour exercer son activité. Il se dégage ensuite des pièces versées au dossier et plus particulièrement du rapport du curateur de la faillite de la société … qu’au cours de sa brève durée de vie -la société … ayant été constituée en mai 1992 seulement- un nombre important de dettes se sont accumulées, le curateur faisant état d’un actif estimé de 2.745.977,- Flux pour un passif total de 10.285.289,- Flux, ainsi que, tel que relevé par le délégué du Gouvernement, de toute une série d’assignations en paiement et de jugements se situant pour la plupart clairement avant la cessation des fonctions de gérant de Monsieur ….

En l’absence de toute explication satisfaisante fournie en cause susceptible de renverser la présomption de mauvaise gestion se dégageant nécessairement de la situation financière de la société … sàrl au moment de sa dissolution, le ministre a, en l’espèce, valablement pu refuser de faire droit à la demande lui adressée par Monsieur …, alors que l’honorabilité professionnelle de ce dernier se trouve ébranlée par le fait même du résultat de la gestion de la société … sàrl.

Cette conclusion ne saurait être énervée par la considération que Monsieur … a exercé par la suite des fonctions dirigeantes dans le cadre de la société yyy S.A. ayant repris l’ancien local de la société faillie pour y établir son siège social ou encore par le versement, à l’appui du recours, de copies des grands livres comptables de la société faillie pour les années 1993, 1994 et 1995. Concernant ce dernier volet il se dégage en effet clairement du rapport du curateur que les livres de commerce, dussent-ils exister de fait, n’avaient pas pour autant été mis à disposition du curateur qui, dans l’exercice de ses fonctions a clairement nié la tenue régulière de livres de commerce et affirmé ne pas en avoir disposé.

Pour le surplus, il y a lieu de relever que si le fait d’avoir été impliqué dans la survenance d’une faillite dont les caractéristiques et circonstances spécifiques portent atteinte à l’honorabilité professionnelle de son dirigeant ne saurait a priori justifier indéfiniment le maintien du refus d’autorisation, force est de constater que le demandeur persiste en l’espèce à vouloir nier son implication au niveau de survenance de la faillite de la société … Sàrl et reste en défaut de produire des éléments concrets, susceptibles de supporter la thèse d’une quelconque volonté d’amendement dans son chef par rapport à sa manière d’aborder la gestion d’une société.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours en annulation laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

laisse les frais à charges du demandeur .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 13 décembre 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14.12.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18366
Date de la décision : 13/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-13;18366 ?

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