La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18133

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 décembre 2004, 18133


Tribunal administratif N° 18133 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 mai 2004 Audience publique du 8 décembre 2004 Recours formé par la société anonyme … S.A. et consorts contre une décision de l’administration de l’Environnement en présence de la sàrl Xxx Secs en matière d’établissements classés (fermeture)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18133 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 mai 2004 par Maître Arsène KRONSHAGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembo

urg, au nom de 1) la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L-…. ;

2)...

Tribunal administratif N° 18133 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 mai 2004 Audience publique du 8 décembre 2004 Recours formé par la société anonyme … S.A. et consorts contre une décision de l’administration de l’Environnement en présence de la sàrl Xxx Secs en matière d’établissements classés (fermeture)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18133 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 mai 2004 par Maître Arsène KRONSHAGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L-…. ;

2) la société anonyme YYY S.A., établie et ayant son siège social à L-…;

3) la société à responsabilité limitée ZZZ sàrl, établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation de la décision de l’administration de l’Environnement du 3 mars 2004 analysée en tant que carence du ministre de l’Environnement pour prononcer la fermeture définitive de l’établissement sis à…, appartenant à la société en commandite simple « sàrl Xxx Secs » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 11 mai 2004, portant signification de ce recours à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, ainsi qu’à « la société à responsabilité limitée Xxx Secs », ainsi désignée, établie et ayant son siège social à L-… ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 juin 2004 par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la « société à responsabilité limitée XXX Sàrl & Cie Secs » ainsi désignée y indiquée comme étant établie et ayant son siège social à L-1618 Luxembourg, 2, rue des Gaulois ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 2 juillet 2004 portant notification de ce mémoire en réponse à Maître Arsène KRONSHAGEN ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 17 septembre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 22 septembre 2004 par Maître Arsène KRONSHAGEN au nom des parties demanderesses ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Fernand ENTRINGER ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 octobre 2004 par Maître Arsène KRONSHAGEN au nom des parties demanderesses ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire supplémentaire à Maître Fernand ENTRINGER ;

Vu les pièces versées au dossier ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Arsène KRONSHAGEN et Maître Florence HOLZ, en remplacement de Maître Fernand ENTRINGER, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 15 novembre 2004 ;

Considérant que la société en commandite simple « société à responsabilité limitée XXX Sàrl & Cie Secs », ci-après « la société XXX » a acquis en date du 21 décembre 1998 de la part d’une société anonyme AAA SA des éléments immobiliers situés… , anciennement exploitée en tant qu’entreprise de nettoyage à sec par une société à responsabilité limitée AAASàrl jusqu’à sa mise en faillite en l’année 1996 ;

Que la société XXX d’installer en les lieux des surfaces de bureaux, à considérer comme établissement classé au vœu du point 64A de la nomenclature des établissements classés figurant à l’annexe au règlement grand-ducal modifié du 16 juillet 1999 portant nomenclature et classification des établissements classés, étant donné que la surface utile totale des bureaux en question est occupée sur plus de 1.200 m2 ;

Considérant que partie de ces surfaces de bureaux ont été données en location par la société XXX à la société anonyme … SA, ci-après « la société … » suivant contrat de bail conclu entre parties en date du 11 mai 2001 pour une durée de trois ans s’écoulant du 1er octobre 2001 au 1er octobre 2004 ;

Qu’à son tour la société … a donné en sous-location parties des locaux en question aux sociétés anonymes YYY SA, ci-après « la société YYY », ainsi qu’à la société à responsabilité limitée ZZZ, société fiduciaire sàrl, ci-après « la société ZZZ» ;

Que d’après les pièces versées, du moins depuis l’année 2003 des pollutions d’ordre divers, émanant pour le moins en partie de l’entreprise de nettoyage à sec antérieure, ont été détectées, suite aux plaintes essentiellement de salariés qui travaillaient dans les bureaux sur les lieux ;

Que par courrier du 16 septembre 2003, Monsieur … , pour compte de la société XXX, a résilié le bail principal suivant préavis légal d’une année face à la société … avec effet au 1er octobre 2004 ;

Qu’il résulte des pièces versées au dossier que depuis janvier 2004, les locataires et sous-locataires ont de fait quitté les lieux, des litiges restant pendants entre parties devant les juridictions judiciaires siégeant en matière de bail à loyer ;

Que sur courriers de la société … des 13 janvier et 1er mars 2004, requérant de la part de l’administration de l’Environnement la fermeture du site selon elle gravement pollué, l’administration de l’Environnement a pris position suivant courrier du 3 mars 2004 libellé comme suit :

« Concerne : votre courrier du 1er mars 2004 Mesdames, Messieurs, La présente pour faire suite à votre courrier du 1er mars 2004 pour préciser certains points et redresser certains errements de votre part :

1. Vous n’êtes pas sans ignorer que vous avez coexploité sans autorisation « commodo », i.e. de manière parfaitement illégale, un établissement classé.

L’introduction d’un dossier « commodo » dans les délais prévus par la loi aurait fourni un diagnostic de l’état de l’environnement dans les locaux que vous avez occupés irrégulièrement et aurait pu empêcher toute exploitation ! Est-ce que vous qualifiez l’illégalité, pénalement sanctionnable, pour laquelle vous êtes responsable comme « non assistance à personne en danger » ? 2. Les relations contractuelles concernant le bail que vous avez conclu avec le propriétaire de l’immeuble n’intéressent pas le département de l’Environnement et ne lui sont point opposables.

3. Relativement à vos interrogations concernant les responsabilités nous vous prions de consulter vos conseils juridiques dans la mesure où il ne s’agit pas d’informations relatives à l’environnement. Nous avons d’ailleurs accueilli votre conseil en date du 11 décembre 2003 pour répondre à toutes ses questions.

4. La compétence du département de l’Environnement n’est pas illimitée ! Les questions relatives à la Santé relèvent principalement des autorités compétentes en matière de Santé.

5. Vos préjugés tendancieux relativement aux suites du dossier ne sont pas justifiés alors que le dossier est loin d’être clôturé ! A toutes fins utiles et pour pouvoir intervenir, si nécessaire, en temps utile nous vous enjoignons à nous transmettre dans la huitaine à compter de la réception de la présente une copie de l’autorisation « commodo » de l’établissement que vous venez d’occuper.

En vous demandant à vous abstenir de formuler à l’avenir des accusations fallacieuses à l’égard du département de l’Environnement nous vous prions d’agréer, Mesdames, Messieurs, l’expression de notre considération distinguée » ;

Considérant qu’en se plaçant par rapport à ce courrier du 3 mars 2004, les sociétés …, YYY et ZZZ ont fait introduire suivant requête déposée en date du 28 mai 2004 un « recours en carence » tendant à voir établir la carence du ministre de l’Environnement à voir prononcer la fermeture définitive de l’établissement concerné au regard des dispositions de l’article 27.2 de la loi modifiée du 10 juin 1999 sur les établissements classés et à voir prononcer ladite fermeture par le tribunal administratif dans le cadre du recours en réformation introduit ;

Quant à l’admissibilité du mémoire supplémentaire Considérant que d’après l’article 7 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il ne pourra y avoir plus de deux mémoires de la part de chaque partie y compris la requête introductive, sauf les exceptions prévues aux dit article en ses alinéas 2 et 3 ;

Considérant qu’aucune de ces exceptions n’étant vérifiée, à défaut de jugement avant dire droit ou d’une mesure d’instruction instaurée, ainsi qu’à défaut d’autorisation présidentielle conférée, le mémoire supplémentaire des parties demanderesses s’analysant en troisième mémoire est à écarter pour être en surnombre et ne point avoir été autorisé au titre de l’article 7 alinéa 3 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée ;

Quant à la compétence du tribunal Considérant que tant l’Etat que la société XXX critiquent la façon de procéder des parties demanderesses et mettent en cause la nature juridique du recours intenté, lequel ne correspondrait point, selon les parties défenderesse et tierce intéressée à un recours en réformation s’inscrivant dans le cadre des dispositions de l’article 27.2 de ladite loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés ;

Considérant que ledit article 27.2 dispose que « tout intéressé peut demander l’application des mesures visées au point 1 », étant entendu que suivant ledit point 1 peut être requise notamment la fermeture de l’établissement en tout ou en partie pour absence constatée d’autorisation d’établissement afférente sinon non vérification de l’exécution des conditions d’exploitation prévues dans le cadre d’une autorisation délivrée ;

Considérant que les parties demanderesses s’étant placées dans le cadre des dispositions de l’article 27.2 de la loi modifiée du 10 juin1999 précitée, le tribunal est amené à ce stade, sans autre vérification plus en profondeur de la consistance exacte du recours intenté au regard desdites dispositions légales, à se déclarer compétent pour en connaître en tant que recours en réformation tel que prévu par ledit article 27 pris en combinaison avec l’article 19 de la même loi ;

Quant à la recevabilité du recours Considérant que tant la partie publique que la partie tierce intéressée soulèvent l’irrecevabilité du recours à des titres multiples ;

Que plus spécifiquement la partie tierce intéressée, rejointe par la partie publique, de conclure à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs, vu qu’au moment d’introduire le recours, le bail commercial conclu était résilié, que les parties actuellement demanderesses avaient quitté de fait les lieux et qu’actuellement le bail est venu à terme ;

Considérant que les demanderesses estiment garder un intérêt à agir suffisant, ce dernier s’analysant au moment de l’introduction de l’affaire, abstraction faite du caractère justifié de l’affaire au fond ;

Qu’ils avancent ainsi avoir un intérêt pour le moins moral à agir alors qu’en tant qu’employeurs ces sociétés répondraient de la santé et de l’intégrité corporelle de leurs employés sur le plan pénal ainsi que sur le plan civil ;

Que la société … de déclarer agir comme locataire principal, les autres sociétés déclarant agir comme sous-locataires, ayant toutes les trois un intérêt pécuniaire à l’issue du litige, vu l’existence d’un tissu de relations juridiques contractuelles entre parties pour le moins, partiellement contentieuses ;

Qu’enfin la société … aurait intérêt à obtenir la fermeture définitive du site pour violation dans le chef du propriétaire et exploitant de dispositions de la loi modifiée du 10 juin 1999 précitée ;

Considérant que si stricto sensu l’intérêt à agir est à apprécier au moment de l’introduction du recours, il n’en reste pas moins que dans le cadre d’un recours au fond, où le tribunal est amené à cristalliser son analyse au jour où il statue, le maintien de cet intérêt à agir doit être vérifié au jour du jugement sous peine de vider ce dernier de tout effet utile, ainsi que de toute base d’appui concrète concernant les mesures à arrêter le cas échéant par le tribunal dans le cadre de la plénitude de juridiction lui conférée par la loi, compte tenu d’un recours au fond formulé ;

Considérant qu’il résulte des pièces versées au dossier et ne résiste à aucune contestation que le bail conclu entre la société XXX et la société … a été résilié avec effet au 1er octobre 2004, de sorte qu’actuellement la société … n’a plus aucun droit d’être dans les lieux rue … , de même que de fait depuis janvier 2004 elle n’y a plus été ;

Qu’aucune partie ne pouvant transmettre plus de droits qu’elle n’en a elle-même, la même analyse s’impose pour les sous-locataires, les sociétés YYY et ZZZ;

Considérant que si théoriquement au jour de l’introduction du recours, malgré l’absence de fait dans les lieux des sociétés demanderesses, un infime esprit de retour juridique ait pu exister, dans leur chef - les sociétés ayant par ailleurs cessé de payer tous loyers en contre partie de l’absence de jouissance des lieux depuis le début de l’année 2004 -, il est patent qu’au moment où le tribunal est amené à statuer, aucun droit d’être dans les lieux n’existe plus dans le chef des sociétés demanderesses ;

Considérant que si au-delà d’un point de vue de droits non politiques entrevus sur les plans pénal et civil considérés en toile de fond, les demanderesses peuvent, le cas échéant, notamment en tant qu’employeur de salariés ayant travaillé sur les lieux, disposer d’un début d’intérêt moral à voir respecter la législation sur les établissements classés concernant les exploitations successives sur les lieux, comprenant les incidences anciennes résultant du nettoyage à sec y effectué et nouvelles concernant les locaux de bureaux sur place au regard des exigences découlant des autorisations délivrées ou de leur absence concernant les établissements classés respectifs, il n’en reste pas moins que cet intérêt moral, dans la mesure où il existe, se confondrait avec l’intérêt général et ne saurait donner lieu à ouverture d’un recours tel celui intenté par les parties demanderesses ;

Considérant que l’intérêt pécuniaire invoqué ne saurait non plus aboutir, étant donné qu’il se rapporterait nécessairement à un contentieux ayant trait à des droits civils et échappant à la compétence des juridictions administratives sur pied des dispositions combinées des articles 84 et 95bis de la Constitution ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent qu’à défaut d’intérêt à agir maintenu au jour où le tribunal est amené à statuer, le recours encourt l’irrecevabilité sous tous ses volets ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare compétent pour connaître du recours ;

déclare le recours irrecevable ;

condamne les parties demanderesses aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 décembre 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18133
Date de la décision : 08/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-08;18133 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award