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06/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18579

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 décembre 2004, 18579


Tribunal administratif N° 18579 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 août 2004 Audience publique du 6 décembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18579 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 août 2004 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au n

om de Monsieur …, né le … (Kosovo, Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténé...

Tribunal administratif N° 18579 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 août 2004 Audience publique du 6 décembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18579 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 août 2004 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo, Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 13 juillet 2004, notifiée le 26 juillet 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 octobre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 29 novembre 2004, en présence de Maître Virginie VERDANET, en remplacement de Maître François MOYSE, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRÜCK, qui se sont rapportées aux écrits respectifs de leurs parties.

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Le 27 janvier 2004, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-

après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, il fut entendu par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.

Le 16 avril 2004, il fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 13 juillet 2004, notifiée par lettre recommandée le 23 juillet 2004, le ministre de la Justice l’informa de ce que sa demande avait été rejetée au motif qu’elle peut être considérée comme manifestement infondée et, a fortiori, également comme non fondée sur base de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire.

Le 20 août 2004, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation contre la décision ministérielle de refus du 13 juillet 2004.

Le délégué du Gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation au motif que seul un recours au fond est prévu par la loi en la matière.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, une demande en réformation a pu valablement être dirigée contre la décision ministérielle entreprise.

Le recours en réformation ayant été introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le recours en annulation, formulé à titre subsidiaire, est dès lors irrecevable.

Quant au fond, le demandeur fait exposer qu’il aurait quitté son pays parce qu’il y aurait subi des menaces et des persécutions. Il expose avoir été obligé de fuir son village d’origine étant donné que la population locale, d’origine albanaise, aurait accusé son père d’avoir collaboré avec les Serbes.

Le demandeur fait encore valoir qu’un éventuel retour au Kosovo ne saurait être envisagé sans risques sérieux, étant donné qu’il règnerait toujours une réelle instabilité politique et sociale, et renvoie de manière non autrement circonstanciée à des évènements ayant eu lieu en 2004.

Le délégué du Gouvernement estime pour sa part que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte que celui-ci serait à débouter de son recours. Il relève en particulier que le demandeur a bénéficié d’une possibilité de fuite interne en se réfugiant à Pristina, où il a passé plusieurs années sans y subir de persécutions.

Il y a lieu de relever liminairement que la décision ministérielle litigieuse est basée sur le constat que le demandeur a vécu plusieurs années à Pristina, où il n’a connu aucun problème, avant de se rendre au Luxembourg, et que les problèmes vécus antérieurement dans son village d’origine ne sont plus pertinents, puisqu’il n’y habitait plus depuis 1998 ou 1999, de sorte que les motifs de persécution invoqués par le demandeur ne sauraient pas, de par leur défaut d’actualité, être utilement retenus pour justifier une demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève.

Or, concernant les motifs de refus ci-avant évoqués, force est de constater que le requérant n’a pas fourni la moindre explication justifiant néanmoins l’octroi du statut de réfugié, de sorte que le tribunal, au vu de ses déclarations explicites selon lesquelles « à Pristina on n’a pas eu de problèmes » et des conséquences qu’en a tirées le ministre, ne peut que constater que lesdits motifs de refus n’ont pas été utilement combattus, le demandeur n’ayant tout simplement pas pris position y relativement, mais s’étant contenté, outre de décrire d’une manière vague la situation générale au Kosovo, de reprendre sommairement la situation ayant existé dans son village natal, village qu’il a cependant quitté définitivement en 1998 ou 1999, de manière à ne pas avoir mis le tribunal en mesure d’engager utilement un quelconque débat afférent.

En effet, si le tribunal est certes investi du pouvoir de statuer en tant que juge du fond en la présente matière, il n’en demeure pas moins que saisi d’un recours contentieux portant contre un acte déterminé, l’examen auquel il doit se livrer ne peut s’effectuer que dans le cadre des moyens invoqués par le demandeur pour contrer les motifs de refus spécifiques à l’acte déféré, son rôle ne consistant en effet pas à procéder indépendamment des motifs de refus ministériels à un réexamen général et global de la situation du requérant. Il ne suffit dès lors pas de contester la conclusion d’une décision administrative donnée, en renvoyant en substance le juge administratif au contenu du dossier administratif, mais il appartient au requérant d’établir que la décision critiquée est non fondée ou illégale pour l’un des motifs énumérés à l’article 2, alinéa 1er de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif tant en ce qui concerne sa conclusion que sa motivation.

Il se dégage dès lors de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’en l’état actuel du dossier, le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision litigieuse dans la mesure où celle-ci est motivée, par référence aux propres déclarations du demandeur, par l’absence de craintes de persécutions au sens de la Convention de Genève en application de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 précitée.

Il s’ensuit que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs ;

le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, déclare le recours non justifié et en déboute, déclare le recours en annulation irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 6 décembre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6.12.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18579
Date de la décision : 06/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-06;18579 ?

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