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29/11/2004 | LUXEMBOURG | N°18500

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 novembre 2004, 18500


Tribunal administratif N° 18500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 août 2004 Audience publique du 29 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2004 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo/ Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serb

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Tribunal administratif N° 18500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 août 2004 Audience publique du 29 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2004 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo/ Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-… , tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 5 juillet 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 octobre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 12 novembre 2004 par Maître François MOYSE au nom de Monsieur … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Virginie VERDANET, en remplacement de Maître François MOYSE, et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 novembre 2004.

Monsieur … introduisit en date du 11 mai 2004 une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut entendu le 2 juin 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Monsieur … par décision du 5 juillet 2004, lui envoyée par courrier recommandé en date du 8 juillet 2004, de ce que sa demande en obtention du statut de réfugié a été refusée comme non fondée au motif qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2004, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation sinon en annulation à l’encontre de la décision ministérielle de refus du 5 juillet 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.

Le demandeur reproche d’abord au ministre un défaut de motivation de la décision.

En ce qui concerne le défaut de motivation soulevé par le demandeur, force est de constater que ce moyen manque de pertinence. En effet, la décision du ministre de la Justice du 15 juillet 2004 est suffisamment motivée. Les faits tels que résumés dans la décision correspondent aux faits sous-jacents à la demande d’asile du demandeur et les motifs de refus y sont énumérés. Le ministre a partant indiqué de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels il s’est fondé pour justifier son refus.

Quant au fond, Monsieur … estime qu’il aurait subi un certain nombre de persécutions de la part des Serbes en raison notamment de ses activités politiques, étant donné que sa famille aurait été active au sein du parti politique SDA. Enfin il se réfère encore à l’instabilité générale au Kosovo et surtout aux récents événements ayant eu lieu en mars 2004 pour faire valoir qu’il lui serait impossible de retourner au Kosovo.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de retenir que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Le demandeur fait état de problèmes vagues non autrement circonstanciés provenant soit des Serbes ou des Albanais trouvant leur origine alléguée dans le fait que sa famille aurait adhéré au parti politique LDK. Il y a lieu de souligner que lui-même relate qu’il n’est actuellement plus membre du LDK et à la question « L’origine des problèmes de votre père n’est alors pas liée au fait qu’il a été membre du LDK ? », il répond : « Je n’avais pas encore fini mon histoire. On ne sait pas encore si les problèmes ont eu comme origine notre adhésion familiale au LDK ou si tout cela a été causé par le fait qu’on a été à Trnavac pendant la guerre ». Le seul événement concret dont le demandeur fait état est un enlèvement ayant eu lieu apparemment en 2001, c’est-à-dire trois ans avant son départ du pays. Or, le demandeur reste en défaut de soumettre au tribunal un élément quelconque permettant de retenir que cet enlèvement aurait été lié à sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un certain groupe social ou à ses opinions politiques, pourtant seuls envisagés par la Convention de Genève comme motifs de persécution susceptibles de valoir l’octroi du statut de réfugié.

De tout ce qui précède, il résulte que les craintes dont le demandeur fait état ne sauraient fonder une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève.

Cette conclusion n’est pas énervée par les moyens développés par le mandataire du demandeur relatifs à la flambée de violence qu’a connu tout récemment le Kosovo. En effet, cette violence trouvant apparemment son origine dans un incident isolé, opposant les Albanais aux Serbes, n’est pas de nature à justifier l’existence d’une persécution ou une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, étant donné que ces troubles ne constituent pas un danger direct pour la personne et la situation spécifique du demandeur qui pour le surplus n’habite pas à Mitrovica.

Il en est de même des considérations avancées ayant trait à l’instabilité générale régnant au Kosovo, étant donné que le demandeur est en défaut de préciser en quoi cette instabilité générale lui serait personnellement préjudiciable.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 novembre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29.11.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18500
Date de la décision : 29/11/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-11-29;18500 ?

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