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22/11/2004 | LUXEMBOURG | N°18512

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 novembre 2004, 18512


Tribunal administratif Numéro 18512 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 août 2004 Audience publique du 22 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18512 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 août 2004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité algérienne, né le … (Algérie), demeurant actuel

lement à L-…., tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de ...

Tribunal administratif Numéro 18512 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 août 2004 Audience publique du 22 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18512 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 août 2004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité algérienne, né le … (Algérie), demeurant actuellement à L-…., tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 12 mai 2004, portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 7 juillet 2004 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en ses plaidoiries à l’audience publique du 15 novembre 2004.

Le 25 février 2004, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le 22 avril 2004, il fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 12 mai 2004, lui notifiée par courrier recommandé envoyé le 25 mai 2004, le ministre de la Justice informa Monsieur … de ce que une demande qui peut être déclarée manifestement infondée sur base de l’article 9, alinéa 1er de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire peut également être déclarée non fondée sur base de l’article 11 de la même loi, de sorte qu’il ne saurait bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève dans la mesure où sa demande ne répond à aucun critère de fond de la Convention de Genève.

Le 16 juin 2004, Monsieur … a fait introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle de refus. Par une décision du 7 juillet 2004, le ministre de la Justice confirma sa décision antérieure.

Le 6 août 2004, Monsieur … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation sinon en annulation contre les décisions ministérielles de refus des 12 mai et 7 juillet 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant été introduit, par ailleurs, dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation est dès lors irrecevable.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait valoir qu’il remplirait les conditions pour bénéficier de l’asile politique étant donné qu’il aurait refusé d’intégrer l’armée et qu’il serait considéré comme un déserteur dans son pays.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

L’examen des déclarations faites par Monsieur …, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Il résulte du rapport d’audition du 22 avril 2004 que Monsieur … n’a pas été membre d’un groupe ou parti politique et qu’il n’a pas rencontré de problèmes majeurs en Algérie. Le seul fait concret dont il fait état est son refus d’intégrer l’armée parce qu’il n’aurait pas été affecté à la section sportive de l’armée.

Force est de constater que dans les pays où le service militaire est obligatoire, le fait de se soustraire à cette obligation ou à celle d’intégrer la réserve est souvent une infraction punie par la loi. La crainte des poursuites et du châtiment pour désertion ou insoumission ne constituent pas pour autant une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Le demandeur, à défaut d’avoir démontré qu’il se verrait infliger pour l’infraction commise une peine d’une sévérité disproportionnée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Partant le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 novembre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18512
Date de la décision : 22/11/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-11-22;18512 ?

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