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15/11/2004 | LUXEMBOURG | N°18364

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 novembre 2004, 18364


Tribunal administratif N° 18364 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 juillet 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18364 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le ….

(Monténégro/Etat de Serbie et Monténégro) de

nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…., tendant à la réformation d’une dé...

Tribunal administratif N° 18364 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 juillet 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18364 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le ….

(Monténégro/Etat de Serbie et Monténégro) de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…., tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 9 avril 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 27 mai 2004 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 septembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, et Maître Virginie ADLOFF, en remplacement de Maître Edmond DAUPHIN, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 8 novembre 2004.

Monsieur … introduisit en date du 22 octobre 2003 une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux de la police grand-ducale sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et sur son identité.

Il fut entendu le 28 novembre 2003 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Monsieur … par décision du 9 avril 2004, lui envoyée par courrier recommandé en date du 15 avril 2004, de ce que sa demande a été refusée au motif qu’elle ne correspondrait à aucun critère de fond défini par la Convention de Genève.

Le 1 mai 2004, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Le ministre de la Justice confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 27 mai 2004.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juillet 2004, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation à l’encontre des deux décisions ministérielles de refus des 9 avril et 27 mai 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait valoir que le Monténégro resterait un pays où les exactions resteraient permanentes. Il estime que sa situation particulière l’exposerait à des usuriers qui ne lésineraient sur aucun moyen pour parvenir à leurs fins, de sorte qu’il devrait craindre à tout moment d’être agressé, tué ou enlevé. Il ajoute que cet avilissement des mœurs constituerait une suite directe de la guerre dont il aurait été victime et qu’il aurait usé de tous les moyens existant sur place pour essayer de se sauver mais que néanmoins il aurait continué de faire l’objet de menaces dirigées à son encontre.

Il termine que les forces de sécurité internationales ne seraient pas en mesure de protéger efficacement la population en raison de leurs effectifs réduits.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de retenir que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Monsieur …, ancien dirigeant de deux entreprises d’export et d’import, n’appartenant à aucun parti politique, fait seulement état de problèmes économiques et financiers résultant de la fermeture de ses deux entreprises. En effet il a fait l’objet de menaces, qu’il qualifie lui-même de « menaces indirectes » de la part de ses créanciers auxquels il a emprunté de l’argent pour sauver ses entreprises et qu’il n’a pas réussi à rembourser dans la suite. A la question « En résumé, vous avez fui votre pays par peur des suites parce que vous ne pouvez pas rembourser les dettes auprès de personnes physiques », il répond par affirmation et précise qu’il n’a pas eu d’autres problèmes dans son pays.

Or des considérations strictement personnelles, d’ordre matériel et financier ne constituent pas à elles seules un motif d’obtention du statut de réfugié.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Partant, le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 novembre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15.11.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18364
Date de la décision : 15/11/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-11-15;18364 ?

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