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15/11/2004 | LUXEMBOURG | N°18290

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 novembre 2004, 18290


Numéro 18290 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 juin 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par Monsieur … contre un arrêté du ministre de la Justice en matière d’expulsion

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18290 du rôle, déposée le 28 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à

Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Ajuda (Cap Vert), de nationalité portugaise, ...

Numéro 18290 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 juin 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par Monsieur … contre un arrêté du ministre de la Justice en matière d’expulsion

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18290 du rôle, déposée le 28 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Ajuda (Cap Vert), de nationalité portugaise, tendant à l’annulation d’un arrêté du ministre de la Justice du 18 mai 2004 ordonnant son expulsion du Grand-Duché de Luxembourg;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2004;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’arrêté attaqué;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Daniel BAULISCH, en remplacement de Maître Sandra VION, et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 octobre 2004.

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Ayant résidé au Luxembourg depuis le mois d’août 2001 sans avoir déclaré sa résidence, Monsieur …, préqualifié, fit l’objet d’un arrêté du ministre de la Justice, ci-après désigné par le « ministre », du 27 mai 2003 lui refusant l’entrée et le séjour et lui enjoignant de quitter le pays dans un délai de 15 jours après notification dudit arrêté.

Suite à une demande du ministre du 30 juin 2003 de signaler Monsieur … aux fins de découvrir sa résidence, la police grand-ducale indiqua, par rapports des 12 novembre et 6 décembre 2003, les résidences successives de Monsieur … au ministère de la Justice.

Suite à une interpellation de Monsieur … du fait de sa situation irrégulière le 13 mai 2004, le ministre ordonna, par arrêté du même jour, son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une durée maximum d'un mois à partir de la notification de ladite décision dans l'attente de son éloignement du territoire luxembourgeois.

Par arrêté du 18 mai 2004, le ministre ordonna l’expulsion de Monsieur … et lui enjoignit de quitter le pays dès la notification de cet arrêté. Cet arrêté est fondé sur les motifs suivants :

« Vu mon arrêté de refus d’entrée et de séjour du 27 mai 2003 lui notifié en date du 5 juin 2003 ;

Vu le procès-verbal n° 580/03 du 6 décembre 2003 établi par la police grand-ducale ;

Vu le rapport n° 3-360 du 18 avril 2003 établi par le service de police judiciaire ;

Attendu que l’intéressé continue à séjourner au Luxembourg malgré mon arrêté de refus d’entrée et de séjour ;

Attendu que l’intéressé est susceptible de compromettre l’ordre public ».

L’expulsion de Monsieur … fut exécutée le 11 juin 2004.

Par requête déposée le 28 juin 2004, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de l’arrêté ministériel du 18 mai 2004 ordonnant son expulsion.

Aucune disposition légale n’instaurant un recours au fond en matière d’expulsion, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur s’empare du principe de libre circulation des ressortissants communautaires et argue que l’exception en faveur des Etats membres de refuser à un ressortissant communautaire le séjour pour des raisons d’ordre public serait nécessairement d’interprétation restrictive, la seule existence d’une condamnation pénale ne pouvant notamment pas constituer une motivation suffisante d’une mesure d’éloignement fondée sur une atteinte à l’ordre public. Ainsi, d’après le demandeur, l’autorité compétente de l’Etat membre concerné devrait constater dans chaque cas d’espèce que l’individu constitue une menace réelle, grave et actuelle pour l’ordre public, de manière que l’arrêté ministériel attaqué, en indiquant uniquement qu’il serait susceptible de compromettre l’ordre public sans préciser les faits à la base de cette affirmation, serait dépourvu d’une motivation valable et devrait en conséquence encourir l’annulation.

Le délégué du gouvernement entend justifier l’arrêté déféré du 18 mai 2004 en renvoyant d’abord à l’arrêté de refus d’entrée et de séjour du 27 mai 2003, décision coulée en force de chose décidée, et que le demandeur pourrait dès lors être expulsé sur base de l’article 9 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1° l’entrée et le séjour des étrangers ; 2° le contrôle médical des étrangers ; 3° l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, prévoyant que ceux qui continuent à séjourner dans le pays après qu’ils auront été dûment avertis que l’entrée et le séjour leur ont été refusés, hypothèse qui se trouverait vérifiée en l’espèce. Le représentant étatique se réfère pour le surplus, concernant le risque pour l’ordre public dans le chef du demandeur, « au rapport éloquent du 18 avril 2003 ».

Il échet de rappeler d’emblée que par mesure d’expulsion, il y a lieu d’entendre une mesure de police administrative ayant pour objet d’enjoindre à un étranger de quitter le territoire et elle tend à le reconduire à l’une des frontières nationales. En outre, force est de constater que le principe du refus de la reconnaissance par l’Etat luxembourgeois d’un droit pour le demandeur de séjourner sur le territoire national a été décidé à travers l’arrêté de refus d’entrée et de séjour du 27 mai 2003, décision coulée en force de chose décidée à l’heure actuelle, et que l’arrêté d’expulsion attaqué se fonde expressément sur le premier arrêté du 27 mai 2003.

Il s’ensuit que les moyens du demandeur tendant à contester en son principe le refus d’un droit de séjour dans son chef et à se voir reconnaître ce droit sur base de dispositions de droit communautaire ne sont pas pertinents en l’espèce, étant donné que cette question ne fait plus l’objet de l’arrêté d’expulsion litigieux du 18 mai 2004, mais a été définitivement tranchée par l’arrêté prévisé du 27 mai 2003 non autrement contesté.

Conformément à l’article 9 de la loi prévisée du 28 mars 1972, « peuvent être expulsés du Grand-Duché, même s’ils ont été autorisés à s’y établir, tant que leur extradition n’est pas demandée : (..) 2) ceux qui continuent à séjourner dans le pays après qu’ils auront été dûment avertis que l’entrée et le séjour ou l’établissement dans le Grand-Duché leur ont été refusés ou après qu’une décision de refus de renouvellement ou de retrait de la carte d’identité leur a été notifiée ».

En présence de l’arrêté de refus d’entrée et de séjour du 27 mai 2003 et du fait non autrement contesté d’une continuation de son séjour au Luxembourg, le demandeur doit être considéré comme rentrant dans les prévisions de cette disposition, de manière qu’à défaut par le demandeur de soumettre des moyens pertinents pour justifier la non-applicabilité de cette disposition, le ministre a valablement pu décider l’expulsion du demandeur sur cette base, de manière que le recours sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondé.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, M. SPIELMANN, juge, et lu à l’audience publique du 15 novembre 2004 par le vice-président en présence de M. LEGILLE, greffier.

LEGILLE CAMPILL 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18290
Date de la décision : 15/11/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-11-15;18290 ?

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