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15/11/2004 | LUXEMBOURG | N°18280

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 novembre 2004, 18280


Tribunal administratif N° 18280 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 juin 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18280 du rôle, déposée le 24 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Deidre DU BOIS, avocat à la Cour, assistée de Maître Aurore GIGOT, inscrites toutes les deux au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Al

banie), et de son épouse, Madame …, née le … (Albanie), tous les deux de nationalité albana...

Tribunal administratif N° 18280 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 juin 2004 Audience publique du 15 novembre 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18280 du rôle, déposée le 24 juin 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Deidre DU BOIS, avocat à la Cour, assistée de Maître Aurore GIGOT, inscrites toutes les deux au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Albanie), et de son épouse, Madame …, née le … (Albanie), tous les deux de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-

…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 24 mai 2004 et confirmant une décision antérieure du même ministre du 23 mars 2004 portant rejet de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 21 septembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en ses plaidoiries à l’audience publique du 8 novembre 2004.

Le 7 février 2003, Monsieur … et son épouse Madame … introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le 4 mars 2003, les époux …-… furent entendu, chacun séparément, par un agent du ministère de la Justice sur la situation et sur les motifs à la base de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 23 mars 2004, envoyée par lettre recommandée le 25 mars 2004, le ministre de la Justice informa les époux …-… de ce que leur demande avait été refusée comme non fondée au motif que leur demande ne répond à aucun des critères de fond prévus par la Convention de Genève et constitue un recours abusif aux procédures d’asile.

Par courrier de leur mandataire du 20 avril 2004, les époux …-… firent introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision de refus.

Par décision du 24 mai 2004, le ministre de la Justice confirma sa décision de refus antérieure.

Le 24 juin 2004, les époux …-… ont fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation contre la décision ministérielle du 24 mai 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de leur recours, les demandeurs font valoir qu’ils auraient dû quitter leur pays d’origine pour fuir la mère de Madame … qui tenterait enlever cette dernière pour la faire rentrer dans un réseau de prostitution. Ils versent un certain nombre de pièces censées établir l’exactitude des tentatives d’enlèvement entreprises par la mère de la demanderesse.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et que leur recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié est surtout conditionnée par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne en raison d’un des motifs prévus par la Convention de Genève.

L’examen des déclarations faites par les époux …-… lors de leurs auditions respectives, ensemble les arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet les seules craintes dont se prévalent les demandeurs sont des craintes provoquées par la mère de la demanderesse qui, afin de faire du mal à son ex-mari à cause de leur divorce et à sa fille, tenterait de l’enlever pour la faire travailler comme prostituée. En effet Madame … répond à la question « Avez-vous une idée pourquoi votre mère veut faire ça » : « Je ne sais pas, elle ne s’est jamais occupée de moi. C’est pour faire du mal à mon père et à moi aussi. Elle veut nous séparer ». Monsieur …, quant à lui, précise qu’il n’a pas personnellement reçu de menaces. Ensuite il répond à la question « De qui et de quoi avez-vous peur ? » : « De la mère de ma femme » et à la question « Cette peur est-elle liée à vos opinions politiques, religieuses ou à votre groupe social ou national », il répond « Rien de tout ça ».

Or des considérations strictement personnelles, d’ordre familial, ne constituent pas à elles seules un motif d’obtention du statut de réfugié, étant donné que les demandeurs ne soumettent au tribunal aucun autre élément permettant de retenir dans leur chef un risque éventuel de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il suit de ce qui précède que les demandeurs n’ont pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, de sorte que c’est bon droit que le ministre de la Justice a retenu que leur demande ne correspond à aucun critère de fond prévu par ladite Convention. Partant, le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 novembre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15.11.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18280
Date de la décision : 15/11/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-11-15;18280 ?

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