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11/10/2004 | LUXEMBOURG | N°17992

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 octobre 2004, 17992


Tribunal administratif N° 17992 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 avril 2004 Audience publique du 11 octobre 2004 Recours formé par la société à responsabilité limitée … sàrl, … contre une décision de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en matière d’enseignes publicitaires

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17992 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 avril 2004 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxe

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Tribunal administratif N° 17992 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 avril 2004 Audience publique du 11 octobre 2004 Recours formé par la société à responsabilité limitée … sàrl, … contre une décision de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en matière d’enseignes publicitaires

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17992 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 avril 2004 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … sàrl, établie et ayant son siège social à L-…, tendant à l’annulation d’une décision de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 10 février 2004, notifiée le 12 février 2004, par laquelle, elle a refusé de faire droit à sa demande en autorisation d’installer à l’adresse … à Dudelange, un panneau non lumineux, simple face L 2200xH 820mm, placé sur le muret le long de la route, ainsi qu’une structure tubulaire placée devant la face principale, L 12.270 mm;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 août 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Rachel JASBINSEK, en remplacement de Maître Albert RODESCH, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRÜCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 4 octobre 2004.

Suivant demande du 18 septembre 2003, la société à responsabilité limitée … sàrl, ci-

après désignée par « la société … » s’adressa à la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ci-après « la ministre » pour solliciter l’autorisation d’installer à l’adresse … à Dudelange a) 1 enseigne lumineuse double face sur poteau existant L 1300xH 500 mm ;

b) 1 panneau non lumineux simple face L 2200xH 820 mm placé sur muret le long de la route ;

c) 1 structure tubulaire placée devant la face principale, L 12.270 mm.

1Par décision datant du 10 février 2004, la ministre accorda l’autorisation sollicitée sub a) et refusa celle sollicitée sub b) et c) dans les termes suivants :

« refuse l’autorisation sollicitée par dérogation aux dispositions du règlement grand-

ducal du 4 juin 1984 relatif à la publicité pour les autres publicités sub b) et c), qui sont répétitives et dépassent le cadre du bon goût et des usages ».

Par requête déposée en date du 30 avril 2004, la société … a fait introduire un recours en annulation à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 10 février 2004 dans la mesure des refus y exprimés sub b) et c) .

Ledit recours ayant été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse fait valoir que la ministre aurait commis un excès de pouvoir manifeste en refusant l’autorisation d’installer les différentes enseignes litigieuses, alors que la loi du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux n’autoriserait pas le pouvoir exécutif à subdéléguer en matière de publicité son application à un ministre. Elle relève plus particulièrement à cet égard que les articles 9 et 10 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 relatif à la publicité visée aux articles 37 et suivants de la loi du 18 juillet 1983 précitée dépasseraient le cadre des dispositions habilitantes des articles 38 et 39 de ladite loi, de sorte qu’en application de l’article 95 de la Constitution, le tribunal ne pourrait pas appliquer ledit règlement grand-ducal du 4 juin 1984 pour défaut de conformité à la loi.

Au vœu de l’article 37 de la loi précitée du 18 juillet 1983, on entend par publicité :

« tout dispositif optique établi en vue de la publicité, quels que soient l’objet de la publicité et l’emplacement du dispositif à l’exception de la publicité produisant son effet exclusivement vers l’intérieur des immeubles ».

En vertu de l’article 38 de la même loi « toute publicité, qui n’est pas conforme aux critères à définir par règlement grand-ducal est interdite ».

Il est constant que la localité de Dudelange ne figure pas parmi celles énumérées à l’article 13 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 pour lesquelles, d’après l’article 12 du même règlement, toute publicité au sens de l’article 37 précité est subordonnée à l’autorisation du ministre ayant dans ses attributions les affaires culturelles.

Ainsi, contrairement au cas des localités énumérées audit article 13 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 qui, sans exception, doivent être autorisés préalablement par le ministre ayant dans ses attributions les affaires culturelles, il est de principe pour les autres localités, non prévues audit article 13, qu’aucune autorisation ministérielle n’est requise dans la mesure où les publicités s’inscrivent dans le cadre des prescriptions des articles 1 à 8 dudit règlement grand-ducal du 4 juin 1984.

Or, les prescriptions des articles 1 à 8 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 ayant trait exclusivement aux publicités sur façade, force est de constater que les installations litigieuses n’y sont pas visées, étant donné qu’elles constituent des dispositifs publicitaires 2différents, en l’occurrence un panneau non lumineux à placer sur muret le long de la route, ainsi qu’une structure tubulaire placée non pas sur la face principale mais devant celle-ci.

S’agissant dès lors de dispositifs publicitaires ne correspondant pas aux critères fixés par les articles 1 à 8 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984, l’article 9 du même texte réglementaire, en disposant que « sur demande motivée à présenter à l’administration communale, et sur l’avis de celle-ci, le ministre ayant dans ses attributions les affaires culturelles, peut accorder, la commission des sites et monuments nationaux entendue en son avis, des dérogations aux dispositions qui précèdent », confère ainsi à la ministre le pouvoir d’accorder des dérogations en la matière.

Or, aux termes de l’article 38 de la loi du 18 juillet 1983 précitée, toute publicité non conforme aux critères à définir par règlement grand-ducal est interdite. Ledit article n’autorise partant pas le pouvoir exécutif à accorder des dérogations aux critères ainsi fixés, de sorte que l’article 9 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984, en ce qu’il prévoit que le ministre ayant dans ses attributions les affaires culturelles peut accorder des dérogations sous la forme y visée, sort du cadre de la disposition habilitante de l’article 38 précitée.

A défaut de toute autre disposition légale habilitante, le tribunal administratif est dès lors amené à refuser l’application dudit article 9, conformément à l’article 95 de la Constitution, aux termes duquel les cours et tribunaux n’appliquent les arrêtés et règlements généraux et locaux qu’autant qu’ils sont conformes aux lois (cf. C.E. 3 février 1988, office des assurances sociales, n° 7928 du rôle ; C.E. 26 avril 1988, n° 7921 du rôle, trib. adm. 16 février 1998, n° 10130 et 10131 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Sites et Monuments, n° 4, p. 494 et autres décisions y citées).

Il se dégage des éléments qui précèdent qu’en l’état actuel le ministre n’est pas habilité à statuer quant au fond par rapport à une demande en autorisation lui adressée concernant un dispositif publicitaire non conforme aux critères fixés par les articles 1 à 8 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 précité, de sorte que le motif de refus retenu en l’espèce et basé sur des considérations ayant trait au caractère répétitif et tenant au fait que l’autorisation sollicitée dépasserait le cadre du bon goût et des usages, n’a pas pu être utilement invoqué pour justifier la décision litigieuse.

Si la ministre a ainsi certes excédé ses pouvoirs en statuant quant au fond sur la demande lui adressée, il n’en demeure pas moins que la décision litigieuse reste légalement motivée dans son résultat négatif et qu’il y a lieu de retenir, par voie de substitution de motifs, que la décision de refus déférée est justifiée par application directe de l’article 38 de la loi du 18 juillet 1983 qui interdit toute publicité qui n’est pas conforme aux critères fixés par les articles 1 à 8 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 précité.

Compte tenu du fait que la non-conformité de l’article 9 du règlement grand-ducal du 4 juin 1984 à l’article 38 de la loi du 18 juillet 1983 précitée a été constatée à d’itératives reprises déjà tant au niveau des juridictions administratives qu’à l’époque par le Comité du contentieux du Conseil d’Etat, mais que malgré cette jurisprudence constante aucune initiative tendant à la clarification de cette situation n’a été prise, il serait inéquitable de laisser les frais de l’instance à charge de la partie demanderesse qui, compte tenu des textes actuellement encore en vigueur, a valablement pu croire en la possibilité d’une dérogation en la matière.

Au-delà de l’issue du litige il y a partant lieu de condamner l’Etat aux frais.

3 Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 octobre 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17992
Date de la décision : 11/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-11;17992 ?

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