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05/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18251C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 octobre 2004, 18251C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18251 C Inscrit le 18 juin 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 5 OCTOBRE 2004 Recours formé par …, Differdange contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 17 mai 2004, no 17294 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 18 j...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18251 C Inscrit le 18 juin 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 5 OCTOBRE 2004 Recours formé par …, Differdange contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 17 mai 2004, no 17294 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 18 juin 2004 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de …, né en … à … (Somalie), de nationalité somalienne, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 17 mai 2004, à la requête de l’actuel appelant contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 juillet 2004 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 17294 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 décembre 2003 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, …, né en … à … (Somalie), de nationalité somalienne, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 28 août 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative prise par ledit ministre le 28 octobre 2003 suite à un recours gracieux du demandeur.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 17 mai 2004, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 18 juin 2004.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause alors qu’ils auraient à tort considéré qu’il n’aurait pas apporté la preuve que les autorités chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics actuellement en place dans son pays d’origine seraient incapables d’assurer un niveau de protection suffisant.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 13 juillet 2004 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le recours en réformation, qui a par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur expose être originaire de l’île de Chouva en Somalie et de confession musulmane, ainsi que d’avoir quitté sa région natale au courant du mois de juillet 2003 au motif notamment qu’il aurait fait l’objet d’actes de persécution de la part de personnes qui, après avoir tué sa mère, l’auraient séquestré afin de le contraindre à accepter d’être enrôlé dans une milice prête à mener le « djihad ». Il signale qu’à défaut d’avoir trouvé d’endroit en Somalie où il aurait pu trouver refuge, il aurait décidé de quitter son pays pour se diriger vers l’Europe et demander finalement l’asile politique auprès des autorités luxembourgeoises. Il reproche au ministre de ne pas avoir tiré les conséquences qui se seraient imposées du fait qu’il se serait trouvé dans une situation dans laquelle sa liberté, voire sa vie étaient gravement mises en danger sans que les autorités somaliennes n’aient été capables d’y remédier. Dans la mesure où le comportement délictueux des personnes l’ayant menacé et mis en danger ne serait pas de nature à être empêché par les autorités de son pays d’origine et que partout ailleurs en Somalie la situation serait largement instable, il estime dès lors remplir les conditions d’octroi du statut de réfugié.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte qu’il serait à débouter de son recours.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur 2 d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à juste titre que le tribunal administratif est arrivé à la conclusion, après examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures contentieuse et gracieuse et les pièces produites en cause, que l’appelant reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, au-delà des doutes émis par le ministre de la Justice quant à la crédibilité des déclarations du demandeur, force est de constater que les auteurs des actes de persécution allégués à l’appui de la demande d’asile sont des groupes de la population qui, en tant que tels, ne sauraient en principe être considérés comme des agents de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il s’y ajoute que les juridictions administratives, statuant dans le cadre d’un recours réformation, sont appelées à examiner le bien fondé du recours à la date à laquelle elles sont amenées à statuer.

Or, en l’espèce, force est de constater avec les premiers juges que le demandeur reste en défaut de démontrer concrètement que les autorités chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics actuellement en place dans son pays d’origine seraient incapables d’assurer un niveau de protection suffisant. En outre, il y a lieu de constater au vu des déclarations du demandeur telles que relatées dans le compte rendu d’audition, qu’il n’a pas autrement recherché la protection des autorités en place, de sorte que les éléments du dossier ne permettent pas de conclure à l’existence d’une attitude générale de refus de protection des autorités compétentes susceptibles de sous-tendre utilement la demande d’asile sous examen.

Pour le surplus, les risques allégués par le demandeur se limitent essentiellement à sa région d’origine et il reste en défaut d’établir qu’il ne peut pas trouver refuge, surtout à l’heure actuelle, dans une autre partie de la Somalie, étant entendu que la Convention de Genève vise le pays d’origine ou de nationalité d’un demandeur d’asile sans restriction territoriale et que les raisons d’ordre tout à fait général invoquées par le demandeur pour conclure à l’absence de possibilité de fuite interne laissent en l’espèce de convaincre la Cour.

Il suit de ce qui précède que … n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef de sorte que l’appel est à déclarer non fondé.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 18 juin 2004, 3 le dit non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement du 17 mai 2004, condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18251C
Date de la décision : 05/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-05;18251c ?

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