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05/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18227C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 octobre 2004, 18227C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18227 C Inscrit le 14 juin 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 5 OCTOBRE 2004 Recours formé par …, Tarchamps contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 12 mai 2004, no 17292 du rôle)

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Vu l’acte d’app

el déposé au greffe de la Cour administrative le 14 juin 2004 par Maître Louis Tinti, avoca...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18227 C Inscrit le 14 juin 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 5 OCTOBRE 2004 Recours formé par …, Tarchamps contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 12 mai 2004, no 17292 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 14 juin 2004 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom d’…, né le …. à … (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique le par tribunal administratif à la date du 12 mai 2004, à la requête de l’actuel appelant contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 25 juin 2004 par la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbrück.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 17292 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 décembre 2003 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, …, né le …à … (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 12 août 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre datant du 28 octobre 2003 intervenue sur recours gracieux.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 12 mai 2004, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté. Il a déclaré le recours en annulation irrecevable.

Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 14 juin 2004.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause alors qu’ils auraient à tort considéré qu’il n’aurait pas subi de faits personnels d’une gravité à établir un risque de persécution au point que sa vie serait intolérable dans son pays d’origine.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 25 juin 2004 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à juste titre que le tribunal administratif est arrivé à la conclusion, après examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures contentieuse et gracieuse et les pièces produites en cause, que l’appelant reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En ce qui concerne la situation au Kosovo, région dont le demandeur est originaire, il convient de relever qu’en la présente matière, saisie d’un recours en réformation, la juridiction administrative est appelée à examiner le bien-fondé et l’opportunité des décisions querellées à la lumière de la situation telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance du demandeur d’asile et non pas uniquement eu égard à la situation telle qu’elle existait à l’époque de son départ.

Il est constant en cause que, suite au départ de l’armée fédérale yougoslave et des forces de police dépendant des autorités serbes du Kosovo, une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée sur ce territoire, de même qu’une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, y a été mise en place.

S’il est vrai, comme l’ont souligné les premiers juges, que la situation générale des membres de minorités ethniques au Kosovo, en l’espèce celle des Bochniaques, reste difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à des discriminations, elle n’est cependant pas telle que tout membre d’une minorité ethnique serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève. Une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considérés individuellement et concrètement, les demandeurs d’asile risquent de subir des persécutions.

Or, force est de constater avec le tribunal administratif que l’existence de pareils éléments ne se dégage pas des éléments d’appréciation soumis alors que les faits personnels allégués par le demandeur en rapport principalement avec sa scolarité ne dénotent non seulement pas une gravité telle qu’ils établissent à l’heure actuelle un risque de persécution dans le chef du demandeur au point que sa vie lui serait intolérable dans son pays d’origine, mais encore et surtout, il convient de constater que ces actes ne s’analysent pas en une persécution émanant de l’Etat, mais d’un groupe de la population et ne sauraient dès lors être reconnus comme motif d’octroi du statut de réfugié que si la personne en cause ne bénéficie pas de la protection des autorités de son pays d’origine pour l’une des cinq causes visées à l’article 1er de la Convention de Genève et que le demandeur n’établit pas à suffisance de droit l’incapacité actuelle des autorités compétentes de lui fournir une protection adéquate.

Par ailleurs, même à admettre qu’à l’heure actuelle, il est toujours difficile pour un membre de la communauté bochniaque du Kosovo de s’y réinstaller au vu du risque subsistant de nouveaux conflits ethniques, le demandeur ne soumet aucun élément permettant d’établir des raisons pour lesquelles il ne serait pas en mesure de trouver refuge, à l’heure actuelle, dans une autre partie de son pays d’origine, et notamment au Monténégro, étant entendu que la Convention de Genève vise le pays d’origine ou de nationalité du demandeur d’asile sans restriction territoriale et que le défaut d’établir les raisons suffisantes pour lesquelles un demandeur d’asile ne serait pas en mesure de s’installer dans une autre région de son pays d’origine et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne devant être pris en compte pour refuser la reconnaissance du statut de réfugié.

Il suit de ce qui précède que l’appelant n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef de sorte que l’appel est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 14 juin 2004, le dit non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement du 12 mai 2004, condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18227C
Date de la décision : 05/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-05;18227c ?

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