La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/2004 | LUXEMBOURG | N°17303

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 septembre 2004, 17303


Tribunal administratif N° 17303 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 décembre 2003 Audience publique du 30 septembre 2004

================================

Recours formé par les époux … et …, … contre une décision émanant du conseil communal de la Ville d’X. et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement

---------------


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17303 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 décembre 2003 par Maître Patrick KINSCH, a

vocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, fonctionnaire, e...

Tribunal administratif N° 17303 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 décembre 2003 Audience publique du 30 septembre 2004

================================

Recours formé par les époux … et …, … contre une décision émanant du conseil communal de la Ville d’X. et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement

---------------

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17303 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 décembre 2003 par Maître Patrick KINSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, fonctionnaire, et de son épouse, Madame …, employée privée, les deux demeurant ensemble à L-…, tendant à l’annulation 1) d’une résolution du conseil communal d’X. du 20 mars 2002 procédant au vote définitif d’un projet d’aménagement particulier « … et … » présenté par l’établissement public Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, anciennement dénommé « Fonds pour le logement à coût modéré » et 2) la décision du ministre de l’Intérieur du 11 juin 2003 portant approbation de la délibération précitée du conseil communal d’X. du 20 mars 2002 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Georges NICKTS, demeurant à Luxembourg, du 17 décembre 2003 portant signification de ce recours à l’administration communale d’X. en son hôtel communal sis à X., ainsi qu’au Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, établi au siège du ministère des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement, à Luxembourg, 6, avenue Emile Reuter ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 1er mars 2004 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 12 mars 2004 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en nom et pour compte du Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, lequel mémoire a été notifié le même jour au mandataire constitué pour les demandeurs ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alec MEYER, demeurant à X., du 12 mars 2004 portant signification de ce mémoire en réponse à l’administration communale d’X. en son hôtel communal sis à X. ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 avril 2004 en nom et pour compte des demandeurs, lequel mémoire a été notifié le même jour au mandataire constitué pour le Fonds pour le développement du logement et de l’habitat ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 avril 2004 en nom et pour compte du Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, lequel mémoire a été notifié le même jour au mandataire constitué pour les demandeurs ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alec MEYER, demeurant à X., du 20 avril 2004 portant signification de ce mémoire en duplique à l’administration communale d’X. en son hôtel communal sis à X. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maîtres Patrick KINSCH et Albert RODESCH ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 19 mai 2004 fixée pour les plaidoiries ;

Vu le mémoire additionnel déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juin 2004 en nom et pour compte du Fonds pour le développement du logement et de l’habitat en réponse à une question posée par le tribunal lors de l’audience publique du 19 mai 2004 ;

Ouï Maîtres Patrick KINSCH et Pascale PETOUD, en remplacement de Maître Albert RODESCH, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 juin 2004 fixée pour la continuation des débats ;

Vu le résultat de la visite des lieux à laquelle le tribunal a procédé le 2 juillet 2004 ;

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

En complément d’un projet de modification du plan d’aménagement général de la Ville d’X. relativement à des fonds sis à X. « … » », favorablement avisé le 25 juillet 2001 par la commission d’aménagement instituée auprès du ministre de l’Intérieur, prévue par l’article 6 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, ci-après désignée par la « commission d’aménagement », l’établissement public Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, anciennement dénommé Fonds pour le logement à coût modéré, ci-après désigné par le « Fonds », introduisit le 19 septembre 2001 auprès des instances compétentes, un projet de plan d’aménagement particulier … à X.. Le projet du Fonds consiste à « développer un projet de logements sociaux sur les terrains situés le long de la … et de la … » et comprend la restauration ou la transformation dans une architecture en front de rue, le long de la …, de trois maisons de style 1900 situés aux numéros 23, 25 et 27, la construction d’un parking souterrain, la construction d’un immeuble à appartements … sur le susdit parking souterrain et l’extension de l’école dite « ancien lycée de jeunes filles », à travers un volume sur trois niveaux en prolongation de l’immeuble à appartements prévisé, l’ensemble immobilier à transformer et à construire comprenant 22 appartements, 4 locaux commerciaux ou bureaux et 26 parkings en sous-sol, ci-après dénommé le « PAP ».

Suite à l’avis en substance favorable émis le 26 septembre 2001 par la commission d’aménagement, le conseil communal de la Ville d’X., par délibération du 14 novembre 2001 et statuant à l’unanimité des voix émises, approuva provisoirement le PAP.

Par lettre de leur mandataire du 24 décembre 2001, Monsieur … et son épouse, Madame …, demeurant ensemble à L-4120 X., 20, rue du Faubourg, soumirent aux autorités leurs objections à l’encontre du PAP.

Le 20 mars 2002, le conseil communal de la Ville d’X., statuant à l’unanimité des voix émises, adopta définitivement le PAP.

Par lettre du 26 avril 2002, les époux …-…, par le biais de leur mandataire, agissant dans le cadre des dispositions de l’article 9, alinéa 5 de la loi précitée du 12 juin 1937, adressèrent une réclamation au ministre de l’Intérieur.

Ladite réclamation fut motivée comme suit :

« Les objections de mes mandants se dirigent non pas contre la transformation de trois immeubles situés …, transformation qui respectera le caractère du quartier et les intérêts des voisins, mais contre la construction d’un immeuble aux dimensions particulièrement importantes, à la fois par sa hauteur et sa longueur, dans l’espace libre qui prolonge le jardin de mes mandants vers la rue ….

1. Contrairement à ce qu’avait affirmé la Commission d’aménagement dans son avis, étonnamment favorable, sur ce projet, le fait d’entreprendre des constructions qui ne sont pas desservies par la voirie publique et qui remplissent les - trop rares - espaces libres à l’intérieur du périmètre de construction de la Ville d’X., est, du point de vue urbanistique, hautement inopportun.

Il convient de noter que les projets initiaux prévoyaient une construction à deux niveaux (R+1), le long de la partie basse de la …. Le projet d’aménagement particulier substitue à ce projet-là une construction d’un immeuble démesuré compte tenu du caractère rapproché des immeubles voisins et du fait que l’immeuble n’est même pas desservi par la voirie publique. Il n’y a pas d’objections à la construction d’immeubles de ce type, à condition qu’un espace libre suffisant existe autour d’eux pour qu’ils ne constituent pas un facteur de nuisance grave pour le voisinage. Cet espace libre n’existe pas en l’espèce.

En autorisant, par son vote, désormais définitif, l’implantation d’un immeuble de ce type au beau milieu d’autres maisons, le conseil communal a commis une erreur manifeste d’appréciation.

2. Par lettre du 5 février 2002 (…), Madame le ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a notifié aux époux …-… qu’en raison de son intérêt architectural, historique et esthétique, leur maison serait inscrite à l’inventaire supplémentaire des sites et monuments nationaux, et que « le tilleul monumental à petites feuilles d’une hauteur approximative de 25 mètres sis sur la parcelle cadastrale prédéfinie est expressément compris dans la prédite mesure de protection ».

L’approbation, par l’administration communale d’X., du projet de construction d’un immeuble démesuré est en contradiction avec la mesure de protection qui émane du ministère de la Culture.

3. Lors de l’instruction du dossier en vue du vote définitif du conseil communal, le collège échevinal avait demandé au Fonds pour le logement de faire installer un gabarit bâché sur les lieux qui permettrait de visualiser l’importance de la nouvelle construction. Le 20 mars 2002, le deuxième vote du conseil communal a été effectué. A cette occasion, la consultation des journaux avait permis aux réclamants d’entretenir des espoirs sur le fait qu’une solution acceptable tant pour eux que pour le constructeur ait été trouvée. Monsieur … fit parvenir, le 25 mars 2002 la lettre suivante à l’échevin chargé des constructions :

« Je viens d’apprendre par voie de presse (Tageblatt resp. Luxemburger Wort du jeudi 21 mars 2002) qu’il y a eu accord entre les parties opposées dans le PAP … et …. Vous m’en voyez satisfait et je voudrais vous exprimer ma reconnaissance.

Cependant n’ayant à ce jour reçu aucun texte définissant les clauses exactes, je voudrais rappeler les 3 conditions que j’avais énumérées lors de votre dernière visite des lieux, vendredi le 15 mars 2002 en compagnie de Monsieur … :

1.

que le volume bâti visible ait les mêmes dimensions que le gabarit actuellement installé (approximativement largeur 13 mètres, hauteur 11 mètres et profondeur 8 mètres), dimensions que vous avez fait relever par votre géomètre, 2.

que le volume bâti visible soit déplacé vers l’avant en alignement avec l’actuelle maison qui se trouve le long de la …, 3.

que les propositions émises par le Fonds de Logement dans sa lettre du 24 septembre 2001 soient réalisées ».

Il est d’autant plus surprenant, et décevant pour les réclamants, qu’en fait le projet voté définitivement soit absolument identique au projet voté provisoirement : pas une virgule du projet n’a été changée.

Pour l’ensemble de ces raisons, les réclamants vous demandent, Monsieur le ministre, de désapprouver le vote définitif du conseil communal d’X.. (…) ».

Par courrier du 9 septembre 2002 à l’adresse du ministre de l’Intérieur, le mandataire des époux …-… ajouta ce qui suit :

« Complémentairement à ma lettre à vous-même du 26 avril 2002, j’ai l’honneur de vous adresser la communication suivante :

1. J’entends redresser, pour le compte de mes mandants, une erreur qui s’était glissée dans la lettre de Monsieur … du 25 mars 2002 citée à la fin de ma réclamation. Il fallait lire, au point 3, « que les propositions émises par le Fonds de Logement dans sa lettre du 22 octobre 2001 soient réalisées ».

Vous trouverez en annexe copie de cette lettre du 22 octobre 2001.

Entretemps, un événement d’une importance considérable s’est produit, puisque le président du Fonds de Logement vient de faire parvenir, le 18 juillet 2002, à Monsieur … une lettre par laquelle il révoque ses propositions antérieures et demande à Monsieur … de considérer son courrier du 22 octobre 2001 comme nul et non avenu. Cette lettre ajoute :

« Dans ces conditions, je vous informe encore que le Fonds pour le logement à coût modéré exploitera au maximum les potentialités arrêtées par le conseil communal de la Ville d’X. ».

L’importance de cette décision du président du Fonds du Logement devient apparente, lorsqu’on lit la troisième annexe à la présente. Il s’agit d’un extrait du compte-rendu analytique des séances du conseil communal d’X. ayant trait au vote définitif du projet d’aménagement particulier. A cette occasion, Monsieur l’échevin chargé des constructions avait motivé, entre autres, ainsi le vote positif qu’il proposait au conseil communal d’exprimer : « Der Besitzer des Hauses … [Monsieur …] besitzt ein Schriftstück des Direktors des Fonds du Logement in dem jener ihm zusichert, auf Kosten des Fonds ein Geländer auf die Mauer des Besitzes zu bauen, Bäume dorthin zu pflanzen und einen Zugang zum Parkplatz zu gewährleisten ».

Il faut présumer que c’est sur la base de cette déclaration de Monsieur l’échevin que le conseil communal a pris sa décision. C’était le 20 mars 2002 ; le 18 juillet 2002, le président du Fonds du Logement a révoqué son accord.

Ceci démontre à nouveau l’erreur manifeste d’appréciation du conseil communal : il aurait fallu, non pas se contenter d’une déclaration d’accord de la part du Fonds du Logement, mais modifier le projet de manière à ce que le projet définitivement voté soit pleinement acceptable. En l’occurrence, mes mandants peuvent considérer légitiment qu’ils ont été trompés, et persistent dès lors au plus fort dans leur réclamation.

2. Accessoirement, mes mandants tiennent à souligner qu’une autre remarque faite par Monsieur l’échevin en charge des constructions devant le conseil communal (« Die Projekte des Fonds du Logement haben jedenfalls auch schon damals [au moment de l’acquisition, par mes mandants, de leur maison] bestanden, so dass der Besitzer hätte Einsicht in die Pläne nehmen müssen ») repose sur un malentendu. Au moment de l’acquisition de leur immeuble, en 1998, seul existait le projet qui avait fait l’objet d’un premier vote de la part du conseil communal le 6 mai 1995. Monsieur … était effectivement allé voir, à la commune, la teneur de ce projet. Je vous joins en annexe quatre, une photocopie de la partie graphique du projet tel qu’il existait au moment de l’acquisition de la maison de mes mandants. Vous verrez qu’à ce moment, il n’était nullement prévu de faire construire des immeubles à quelques mètres seulement du terrain de mes mandants. Mes mandants étaient d’accord au moment de l’acquisition de leur immeuble, avec la réalisation du projet tel qu’il existait à ce moment-là ; et ils seraient toujours d’accord avec la réalisation d’un projet de ce type (…) ».

Par décision du 11 juin 2003, notifiée le 11 septembre 2003, le ministre de l’Intérieur rejeta la réclamation des époux …-… et approuva, sur base de l’article 9 de la loi précitée du 12 juin 1937, la délibération prévisée du 20 mars 2002 du conseil communal d’X..

Les motifs sous-tendant le rejet de la réclamation des époux …-… sont les suivants :

« Le réclamant n’invoque que des arguments urbanistiques peu pertinents dans la mesure où la profondeur respectivement la hauteur des nouvelles constructions ne dépassent ni celles des maisons existantes à proximité immédiate ni les maximes définies par la partie écrite du Projet d’Aménagement Général pour le secteur concerné. En effet, l’article 66 fixe la hauteur totale maximale du bâtiment à 16,5 mètres et l’article 24 autorise une profondeur de construction de 15 mètres.

Il y a, en outre, lieu de constater que la distance entre le volume de construction litigieux et les maisons d’habitation longeant … est de 30 mètres, distance largement suffisante afin de pouvoir garantir leur ensoleillement et intimité.

L’argument invoqué ayant trait aux contradictions éventuelles avec les mesures de protection émanant du Ministère de la Culture est également à rejeter, alors que les interventions du Ministre de l’Intérieur, des autorités communales et du Ministre de la Culture se font dans des sphères de compétences propres et des bases légales bien indépendantes.

Le point 3 de la réclamation présenté échappe à mon appréciation, alors que lors du vote définitif du projet par le conseil communal, celui-ci a agit et statué en conformité avec le sus-dit article 9 de la loi du 12 juin 1937 leur confirmant le vote provisoire et maintenant le projet dans sa forme initiale.

L’avenant à cette réclamation, daté au 24 avril 2002, est irrecevable, alors qu’il m’a été présenté après le délai légal de forclusion qui est de 30 jours dès la notification de la délibération litigieuse, c’est-à-dire, en l’espèce, en date du 9 septembre 2002 seulement, ce qui est partant contraire à l’article 9 de la prédite loi du 12 juin 1937. (…) ».

Par requête introduite auprès du tribunal administratif le 12 décembre 2003, les époux …-… ont introduit un recours contentieux tendant à l’annulation 1) de l’approbation définitive du PAP par le conseil communal d’X. en date du 20 mars 2002 et 2) de l’approbation ministérielle du 11 juin 2003 de ladite délibération du conseil communal d’X..

Le recours est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Les demandeurs concluent en premier lieu à l’annulation de l’approbation définitive du PAP par le conseil communal d’X. en date du 20 mars 2002 soutenant que :

- le PAP violerait l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937, au motif que le PAP ne comprendrait aucune pièce renseignant sur la distribution d’eau potable, d’éclairage ou encore les canalisations pour l’évacuation des eaux pluviales et résiduaires, de sorte que la procédure d’élaboration du PAP serait viciée et que la décision définitive du conseil communal encourrait l’annulation ;

- qu’il se dégagerait des éléments de la cause que les conseillers communaux n’ont pas pris leur décision en connaissance de cause, respectivement qu’ils auraient été induits en erreur par des considérations elles-mêmes erronées contenues dans le rapport de l’échevin chargé des constructions en ce qui concerne 1) l’existence d’un prétendu arrangement entre les demandeurs et le Fonds, qui n’aurait pas existé, une proposition d’arrangement ayant été retirée par le président du Fonds, 2) la concordance du projet soumis au vote à un projet ayant existé en 1998, connu par les demandeurs, au moment où ils ont acheté leur immeuble, alors que ce projet antérieur aurait été fondamentalement différent, 3) une référence au modèle érigé par le Fonds pour présenter le projet aux consorts …, que ces derniers auraient en substance accepté quant à son gabarit, alors que ce modèle aurait eu une largeur largement inférieure à celle de la construction projetée ;

- le PAP serait en contradiction avec la nécessité de protection de l’immeuble des demandeurs et de leur tilleul à petites feuilles de 25 mètres, reconnue par leur inscription à l’inventaire supplémentaire des sites et monuments nationaux ;

- que le projet de construction d’un immeuble aux dimensions particulièrement importantes, à la fois par sa hauteur et sa longueur, dans l’espace libre qui prolonge le jardin des demandeurs vers la …, serait démesuré compte tenu du caractère rapproché des immeubles voisins et du fait qu’il n’est pas desservi par la voirie publique.

Dans un second ordre de considérations, les demandeurs concluent à l’annulation de la décision ministérielle d’approbation du vote définitif du conseil communal d’X., aux motifs que :

- l’illégalité de l’acte approuvé devrait ipso facto entraîner l’annulation de l’approbation par l’autorité tutélaire ;

- comme le ministre n’aurait pas tenu compte des éléments de fait par eux relevés dans l’avenant du 9 septembre 2002 des demandeurs à leur réclamation du 24 avril 2002, il aurait négligé de prendre en compte tous les intérêts en présence ;

- le ministre aurait tort d’avoir considéré leurs arguments comme des considérations urbanistiques peu pertinentes, la hauteur de la nouvelle construction étant manifestement disproportionnée, par rapport à l’article 66) point d) du plan d’aménagement général, à prendre en considération en l’occurrence, limitant la hauteur des constructions à 11 mètres et la distance entre la nouvelle construction et leur maison d’habitation ne serait pas de 30 mètres, mais seulement de 20 mètres.

En ce qui concerne le premier moyen d’annulation soulevé par les demandeurs, basé sur l’illégalité du PAP litigieux en raison du non-respect des dispositions de l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937, le délégué du gouvernement rétorque que ledit article 2) point c) de la loi de 1937 serait inapplicable en l’espèce, au motif qu’il ne concernerait que les projets d’aménagement général « et en aucune façon les plans d’aménagement particuliers ».

En ordre subsidiaire, le délégué ajoute que « si les plans litigieux ne donnent effectivement aucune précision en ce qui concerne les infrastructures prévues dans l’article 2c de la loi du 12 juin 1937, c’est parce que lesdites infrastructures existent déjà et il ne reste plus aucune infrastructure à prévoir pour la réalisation du plan d’aménagement litigieux d’autant plus qu’à la place où est prévu l’immeuble en question, il existe d’ores et déjà un autre immeuble ».

Le Fonds se rapporte à prudence de justice quant à l’applicabilité en l’espèce de l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 et en cas d’applicabilité, il soutient qu’il y aurait été satisfait, au motif que « dans le projet de PAP déposé auprès de la Commission d’aménagement le 19 juin 2001, le FONDS a expressément précisé que « outre les gabarits définis dans nos plans, le présent PAP ne définit pas de règles d’urbanisme autres que celles définies au règlement général des bâtisses pour le quartier … » et qu’un plan topographique joint au projet ferait mention de tous les luminaires, regards des conduites d’eau usée et d’eau pluviale, ainsi que des points d’eau et de gaz.

Le Fonds ajoute que la ville d’X. serait une agglomération disposant d’un plan d’aménagement général contenant un plan incluant un programme d’extension déterminant les servitudes hygiéniques, archéologiques et esthétiques, de même que l’écartement des constructions entre elles et leur hauteur, ainsi que les distributions d’eau potable, d’éclairage et les canalisations pour l’évacuation des eaux pluviales et résiduaires, de sorte que « dans la mesure où le PAP présenté concerne une zone déjà urbanisée et n’engendre aucune modification quant aux servitudes ci-dessus mentionnées, il convient de se référer aux dispositions pertinentes du PAG alors que la jurisprudence a admis que « les dispositions du PAG continuent à s’appliquer pour toutes les questions qui n’ont pas été spécialement réglées par le PAP ».

Dans son mémoire en réplique, le Fonds soutient encore que les demandeurs n’auraient pas précisé le moindre intérêt en tant que voisin, la localisation des égouts, des conduites de gaz et autres infrastructures sur le terrain du Fonds ne pouvant préjudicier les voisins.

Admettant que le plan topographique joint au projet soumis à la commission d’aménagement ne contient pas de légende, le Fonds estime que ce manque ne saurait être assimilé à une absence de renseignements quant aux servitudes énumérées à l’article 2) point c) de la loi du 12 juin 1937, précité.

Suite à la question posée par le tribunal relativement au contenu du dossier administratif de la commune d’X., notamment en ce qui concerne le plan topographique invoqué par le Fonds, les demandeurs ayant contesté lors des débats que pareil plan aurait figuré audit dossier lorsqu’ils en ont pris inspection, le Fonds expose dans son mémoire additionnel que la ville d’X. lui aurait communiqué le dossier administratif et qu’il serait apparu qu’effectivement le plan topographique n’en ferait pas partie, tout en estimant que « ce manque pourrait s’expliquer par le fait que la commission d’aménagement ne l’a pas joint aux pièces du dossier qu’elle a visé, et ce malgré la circonstance qu’un tel plan lui a été transmis par le FONDS dans son courrier du 19 juin 2001 lui soumettant aux fins d’approbation la 1ère phase du PAP » et que par ailleurs ce courrier aurait été transmis en copie au bourgmestre d’X..

Sur ce, admettant que le plan topographique n’a pas été intégré au dossier administratif, le Fonds soutient que « le renvoi exprès du projet de PAP au PAG, présenté dans une zone déjà urbanisée et n’entraînant aucune modification des servitudes existantes, et l’absence de réserve de la Commission d’aménagement à l’égard des servitudes et infrastructures font présumer l’absence de contravention du PAP à l’article 2c de la loi du 12 juin 1937 » et qu’ainsi, une violation de l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 ne serait pas établie.

L’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 dispose notamment que les projets d’aménagement doivent inclure « (…) un plan avec un programme d’extension, déterminant les servitudes hygiéniques, archéologiques et esthétiques que comportent les différents quartiers. Les plans et programme fixent l’écartement des constructions entre elles, de même que leur hauteur, et prévoient les distributions d’eau potable, d’éclairage, ainsi que les canalisations pour l’évacuation des eaux pluviales et résiduaires ».

C’est à juste titre que les demandeurs soutiennent que l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 vise indistinctement les plans d’aménagement généraux et particuliers, le tribunal ne pouvant suivre l’argumentation développée par le délégué du gouvernement consistant à voire restreindre sa portée aux seuls plans d’aménagement généraux, étant donné que les indications exigées ont pour but de garantir la faisabilité des projets et de fixer la communauté quant aux incidences qu’ils engendrent. – Dans ce contexte, il convient de relever qu’en présence d’un projet d’aménagement particulier, le défaut d’un plan d’infrastructure conformément à l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 viole l’obligation élémentaire de transparence et d’information inscrite au prédit article (cf.

Cour adm. 17 octobre 2000, n° 11904C du rôle).

Il est par ailleurs incontestable dans ce contexte que, sous peine de verser dans un formalisme stérile, la susdite disposition doit être examinée au regard de la finalité recherchée, c’est-à-dire qu’il convient d’analyser son respect au regard des données concrètes de chaque cas d’espèce.

Ainsi, si, en l’espèce, en présence d’un projet d’aménagement particulier qui ne concerne pas un secteur nouveau, mais un secteur d’ores et déjà urbanisé, le projet s’entendant essentiellement comme une modification ponctuelle de la réglementation existante, le projet précisant expressément qu’« outre les gabarits définis dans nos plans, le présent PAP ne définit pas de règles d’urbanisme autres que celles définies au règlement général des bâtisses pour le quartier … », il ne saurait être question de reprocher aux promoteurs d’avoir manqué d’élaborer un « programme d’extension, déterminant les servitudes hygiéniques, archéologiques et esthétiques que comportent les différents quartiers », il n’en reste pas moins que les exigences de transparence et de faisabilité du projet requièrent, en application de l’article 2) point c) de la loi précitée du 12 juin 1937 l’existence d’un plan indiquant l’écartement des constructions, de même que les différentes infrastructures relativement à la distribution d’eau potable, d’éclairage, ainsi que les canalisations pour l’évacuation des eaux pluviales et résiduaires, ces indications intéressant l’ensemble des propriétaires et riverains actuels au regard des avantages ou inconvénients éventuellement engendrés par le projet.

Or, force est de constater que sur base des éléments d’information réunis en l’espèce, il appert que - pour une raison ou une autre - un plan topographique indiquant les infrastructures relativement à la distribution d’eau potable, d’éclairage, ainsi que les canalisations pour l’évacuation des eaux pluviales et résiduaires - qui semble avoir été introduit devant la commission d’aménagement - n’a jamais été continué aux autorités communales, de sorte que, même s’il est apparent que l’intérêt des demandeurs quant à ce moyen est des plus réduits, il incombe au tribunal de conclure que par l’effet de ce manquement, ni les riverains, ni les autorités communales n’ont été mis en mesure d’apprécier le projet litigieux et de se prononcer en pleine connaissance de cause sur d’éventuelles incidences qu’il pouurait engendrer. – Cette conclusion n’est pas affectée par l’affirmation péremptoire de ce que le PAP s’insérerait dans un tissu urbain existant sans entraîner de modification des servitudes existantes, étant donné que s’il y a une infrastructure existante, il n’est pas sûr que cette dernière soit conçue pour suffire aux exigences accrues générées par les nouvelles constructions projetées et c’est justement pour pouvoir apprécier la faisabilité du projet et son insertion dans le tissu existant que l’article 2) point c) énonce différentes exigences protectrices notamment des droits des riverains concernés.

Il résulte des développements qui précèdent que tant la décision du conseil communal d’X. du 20 mars 2002 portant approbation définitive du PAP que la décision du ministre de l’Intérieur du 11 juin 2003 portant approbation dudit vote définitif par le conseil communal sont basées sur une procédure d’adoption viciée, de sorte qu’elles doivent encourir l’annulation, sans qu’il y ait encore lieu d’examiner le bien-fondé des autres moyens d’annulation soulevés par les demandeurs et les prises de positions des parties défenderesse et tierce-intéressée y afférentes, cette analyse devenant surabondante.

La demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un import de 1.000.- euros à chacun des demandeurs est cependant à rejeter comme n’étant pas fondée, étant donné que les conditions légales ne sont pas remplies en l’espèce. Il en est de même de la demande en allocation de pareille indemnité, par ailleurs non chiffrée, telle que formulée par le Fonds.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit également justifié ;

partant, annule la décision du conseil communal d’X. du 20 mars 2002 procédant au vote définitif d’un projet d’aménagement particulier « … et … » présenté par l’établissement public Fonds pour le développement du logement et de l’habitat, ainsi que la décision du ministre de l’Intérieur du 11 juin 2003 portant approbation de ladite délibération du conseil communal d’X. du 20 mars 2002 et renvoie le dossier devant ledit ministre en prosécution de cause ;

rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure ;

fait masse des frais et les met pour moitié à charge de la Ville d’X. et pour l’autre moitié à charge de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 30 septembre 2004, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 11


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17303
Date de la décision : 30/09/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-09-30;17303 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award