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28/07/2004 | LUXEMBOURG | N°18432

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juillet 2004, 18432


Tribunal administratif Numéro 18432 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2004 Audience publique du 28 juillet 2004 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18432 du rôle, déposée le 20 juillet 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de lâ€

™Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …86, de nationalité libér...

Tribunal administratif Numéro 18432 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2004 Audience publique du 28 juillet 2004 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 18432 du rôle, déposée le 20 juillet 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …86, de nationalité libérienne, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 2 juillet 2004 instituant à son égard une mesure de placement pour la durée maximum d’un mois audit Centre de séjour provisoire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, en remplacement de Maître Louis TINTI et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Le 2 juillet 2004, le ministre de la Justice ordonna à l’encontre de Monsieur … une mesure de placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de la décision en question, en attendant son éloignement du territoire luxembourgeois. La décision de placement est fondée sur les considérations et motifs suivants :

« Vu le rapport N°15/1872/04/AR du 2 juillet 2004 établi par le Service de Police Judiciaire, section Police des Etrangers et des Jeux ;

Considérant que l’intéressé n’est pas en possession d’un document de voyage valable ;

- qu'il ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant que l’intéressé a déposé une demande d’asile au Luxembourg en date du 2 juillet 2004 ;

- qu’il est signalé au système EURODAC comme ayant déposé une demande d’asile en Espagne en date du 29 septembre 2003 ;

- qu’une demande de reprise en charge en vertu du règlement (CE) n°343/2003 du Conseil du 18 février 2003 sera adressée aux autorités espagnoles dans les meilleurs délais ;

- qu’en attendant l’accord de reprise un éloignement immédiat n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2004, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle précitée du 20 juillet 2004.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision litigieuse. Le recours est également recevable pour avoir été déposé dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur soutient que les conditions légales pour prononcer une mesure de placement ne seraient pas remplies. Dans ce contexte, il estime que les autorités luxembourgeoises n'auraient pas entrepris tous les efforts en vue d'assurer que la mesure d'éloignement vers l’Espagne puisse être exécutée sans retard, dans les délais les plus brefs. Il relève que la reprise n’aurait été sollicitée auprès des autorités espagnoles que 5 jours après son placement et que suite à l’acceptation tacite des autorités espagnoles, qui aurait été acquise 15 jours après la prise de la décision de rétention, aucun empêchement légal ne s’opposerait à son éloignement immédiat.

En second lieu, le demandeur soutient que la mesure critiquée serait disproportionnée par rapport au but poursuivi par l'autorité administrative et qu’il n’aurait pas été placé dans un établissement approprié.

Le délégué du gouvernement explique que Monsieur … a déposé une demande d’asile le 2 juillet 2004, qu’à cette occasion, il aurait exposé avoir quitté la Côte d’Ivoire le 20 juin 2004 pour débarquer dans un port belge le 29 juin 2004, mais qu’une recherche sur le système EURODAC aurait fait apparaître qu’en date du 29 septembre 2003, Monsieur … avait déjà déposé une demande d’asile en Espagne, ce pourquoi une mesure de rétention aurait été prise à son encontre en attendant son éloignement vers l’Espagne.

Le délégué du gouvernement estime que les démarches en vue de l'éloignement du demandeur auraient été entreprises avec diligence, la police judiciaire ayant pris contact avec les autorités espagnoles dès le 7 juillet 2004, soit 3 jours ouvrables après le placement de l’intéressé. Il soutient encore qu’il serait faux de soutenir que 15 jours après la mesure de rétention, aucun empêchement à l’éloignement n’existerait plus, au motif que le délai de 15 jours ne courrait pas à partir du placement de l’intéressé, mais seulement à partir de la demande de reprise, de sorte que l’accord tacite de reprise n’a pu être retenu qu’en date du 21 juillet 2004. – Finalement, la mesure critiquée ne serait pas disproportionnée par rapport au but poursuivi et en l’espèce, le Centre de séjour pour étrangers en séjour irrégulier constituerait un établissement approprié.

Le tribunal constate que le demandeur ne conteste pas les conditions de fond de la mesure de rétention déférée, mais se limite à soulever un défaut de diligences en vue de limiter la mesure au strict nécessaire, d’une part, et le caractère inapproprié de son placement, d’autre part.

En ce qui concerne le moyen tiré d’un défaut de diligences requises de la part des autorités luxembourgeoises pour écourter au maximum la restriction des libertés de l’intéressé, force est de constater qu’il appert des éléments d’appréciation soumis au tribunal que l’impossibilité d’un éloignement immédiat de l’intéressé était patente au jour de la prise de la décision litigieuse. En effet, face à un étranger sans papiers de légitimation et, en apparence, demandeur d’asile dans un autre pays, des mesures de vérification de son identité et de concertation avec les autorités étrangères étaient indispensables, avant que l’éloignement - dans un pays tiers sûr, le cas échéant, responsable du traitement de sa demande d’asile - n’ait pu être exécuté. Cette impossibilité persiste encore actuellement, étant donné que les autorités espagnoles ont été contactées trois jours ouvrables après la prise de la mesure de rétention et que si suite au silence des autorités espagnoles pendant quinze jours suite à la demande de prise en charge du 7 juillet 2004, leur accord tacite a pu être retenu depuis le 21 juillet 2004, il n’en reste pas moins que le transfert effectif et la remise aux autorités espagnoles doivent encore être organisés matériellement, ceci impliquant entre autres la coordination des autorités de police judiciaire avec leurs homologues étrangers, pareilles mesures requérant un certain temps, et qu’en l’espèce, les démarches nécessaires et utiles afin d’assurer un éloignement de la personne intéressée ont été entamées dès le 23 juillet 2004, de sorte qu’à l’heure actuelle, on ne saurait reprocher un défaut de diligences aux autorités luxembourgeoises.

Enfin, force est de constater que le Centre de séjour provisoire est à considérer comme constituant un établissement approprié au sens de la loi précitée du 28 mars 1972, étant donné que le demandeur est en séjour irrégulier au pays, qu’il n’existe aucun élément qui permette de garantir au ministre de la Justice sa présence au moment de son éloignement et qu’il ne fait état d’aucun autre élément ou circonstance particuliers justifiant à son égard un caractère inapproprié du Centre de séjour provisoire, de sorte que le moyen afférent est également à rejeter.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé et que le demandeur doit en être débouté.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 juillet 2004 à 17.00 heures par:

M. Ravarani, président, M. Campill, vice-président, Mme Lenert, premier juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani 4


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 18432
Date de la décision : 28/07/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-07-28;18432 ?

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