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21/07/2004 | LUXEMBOURG | N°18305

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 juillet 2004, 18305


Tribunal administratif N° 18305 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 juin 2004 Audience publique du 21 juillet 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18305 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 juin 2004 par Maître Gilbert REUTER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Di

ekirch, au nom de Monsieur …, né le … (Moldavie), demeurant actuellement à L-…, tendant à l'annulation...

Tribunal administratif N° 18305 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 juin 2004 Audience publique du 21 juillet 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18305 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 juin 2004 par Maître Gilbert REUTER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, né le … (Moldavie), demeurant actuellement à L-…, tendant à l'annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 6 avril 2004, confirmée sur recours gracieux par une décision du même ministre du 11 juin 2004, par laquelle sa demande en obtention du statut de réfugié a été déclarée manifestement infondée;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 juillet 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER entendu en sa plaidoirie.

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Le 10 février 2004, Monsieur …, de nationalité moldave, présenta au bureau d'accueil pour demandeurs d'asile une demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg, ainsi qu’en date du 4 mars 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 6 avril 2004, notifiée le 22 avril suivant, le ministre de la Justice rejeta sa demande comme manifestement non fondée au motif qu'il n'alléguait aucune crainte de persécution en raison de ses opinions politiques, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un groupe social qui soit susceptible de lui rendre la vie intolérable dans son pays d'origine, de sorte que sa demande ne répondait à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève. Un recours gracieux introduit le 26 mai 2004 contre cette décision fut rejeté le 11 juin 2004.

Par requête déposée le 28 juin 2004, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à l'annulation, et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle du 6 avril 2004, telle que confirmée sur recours gracieux.

Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l'obligation d'examiner en premier lieu la possibilité d'exercer un recours en réformation, l'existence d'une telle possibilité rendant irrecevable l'exercice d'un recours en annulation contre la même décision. Etant donné, cependant, que l’article 10 (3) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2) d’un régime de protection temporaire, dispose qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire, de sorte que le recours en annulation, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait expliquer qu'il avait quitté la Moldavie pour les Pays-Bas et qu'à son retour vers son pays d'origine, il y a été battu par les policiers pour avoir illégalement franchi la frontière moldave. Ayant à nouveau quitté son pays pour rechercher du travail en Russie, les policiers moldaves l'auraient arrêté et il aurait essuyé une condamnation de trois ans d'emprisonnement. Il aurait actuellement peur d'être tué en cas de retour forcé dans son pays d'origine alors qu'il aurait été battu par un policier en 2002 et qu'il n'aurait eu que des difficultés par après.

Il se dégagerait de ce qui précède qu'il aurait été contraint de quitter son pays, qu'il n'y serait plus en sécurité et qu'il éprouverait un danger de mort s'il devait y retourner.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre de la Justice a fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisse d’être fondé.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New-York, si la crainte du demande d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement (…) ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

Le tribunal doit partant examiner, sur base de l’ensemble des pièces du dossier et des renseignements qui lui ont été fournis, si la crainte invoquée peut être qualifiée de manifestement dénuée de fondement.

En l’espèce, l’examen des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande d’asile amène le tribunal à conclure qu’il n’a manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles suffisamment précises de nature à établir dans son chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance, à savoir la Moldavie.

En effet, il se dégage de ses déclarations que ses craintes sont d'une part d'ordre économique, dès lors qu'il se plaint de ce qu'il serait difficile de trouver un emploi en Moldavie et que si, d'autre part, il a un problème avec la police, il s'agit cependant d'un problème relevant du droit commun, étant donné que s'il a peur de la police, il a également déclaré avoir ce problème depuis qu'il a porté des coups à un policier. - De plus, son récit est incohérent. Il a déclaré avoir peur de retourner dans son pays parce qu'il lui serait reproché d'avoir, dans le passé, quitté illégalement la Moldavie, mais il a simultanément déclaré avoir voyagé beaucoup, surtout vers le Cuba, et que les autorités moldaves l'y auraient même envoyé mais qu'il n'aurait cependant pas eu la possibilité d'y rester. Les craintes invoquées sont sans rapport avec la race, la religion, la nationalité, l’appartenance à un groupe social ou encore les opinions politiques du demandeur pourtant seules envisagées par la Convention de Genève comme motifs de persécution susceptible de valoir l’octroi du statut de réfugié.

Il se dégage des considérations qui précèdent que Monsieur … reste en défaut de faire état d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance, de sorte que le ministre de la Justice a valablement pu retenir que sa demande d’asile ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le ministre de la Justice a déclaré sa demande d’asile comme étant manifestement infondée, de sorte que son recours est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, reçoit le recours en annulation dans la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 21 juillet 2004 par:

M. Ravarani, président, M. Campill, vice-président, Mme Lenert, premier juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani 4


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 18305
Date de la décision : 21/07/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-07-21;18305 ?

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