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14/07/2004 | LUXEMBOURG | N°17755

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juillet 2004, 17755


Tribunal administratif N° 17755 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 mars 2004 Audience publique du 14 juillet 2004

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Recours formé par Monsieur …, Differdange contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17755 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2004 par Maître Stéphanie GUERISSE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de M. …, né le … à Lvov (Russie), de nationalité ukrainienne, demeurant actuellement à L-…, tend...

Tribunal administratif N° 17755 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 mars 2004 Audience publique du 14 juillet 2004

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Recours formé par Monsieur …, Differdange contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17755 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2004 par Maître Stéphanie GUERISSE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Lvov (Russie), de nationalité ukrainienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice intervenue le 28 janvier 2004, notifiée le 17 février 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 mai 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en sa plaidoirie.

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En date du 18 novembre 2003, M. … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, M. … fut entendu par un agent de la police grand-ducale sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.

Il fut convoqué pour le 15 janvier 2004 pour être entendu par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Ne s’étant pas présenté le 15 janvier 2004, le ministre de la Justice, par décision du 28 janvier 2004, l’informa que sa demande avait été rejetée. La décision afférente est libellée comme suit :

« (…) Vous avez été convoqué au Bureau d’accueil pour les demandeurs d’asile pour une audition concernant les motifs de votre demande d’asile. L’audition était prévue le 15 janvier 2004 à 14 heures. Vous avez personnellement reçu la convocation en mains propres en date du 2 décembre 2003. Vous ne vous êtes pas présenté à la date du 15 janvier 2004.

L’audition par un agent du Ministère s’est donc avérée impossible.

Je vous informe que l’article 6 f) du Règlement Grand Ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile dispose comme suit : « Une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle repose clairement sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile. Tel est le cas notamment lorsque le demandeur a omis de manière flagrante de s’acquitter d’obligations importantes imposées par les dispositions régissant les procédures d’asile. ».

Le fait de ne pas vous présenter au Ministère de la Justice au rendez-vous fixé pour votre audition constitue une des omissions prévues par l’article 6 précité.

Je constate que vous n’alléguez aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de vous rendre la vie intolérable dans votre pays. Ainsi une crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un groupe social n’est pas établie. Dès lors, votre demande ne correspond à aucun des critères de fond prévus par la Convention de Genève.

Une demande d’asile qui peut être déclarée manifestement infondée peut, a fortiori, être déclarée non fondée pour les mêmes motifs.

Il résulte de ce qui précède que votre demande en obtention du statut de réfugié est refusée comme non fondée au sens de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne sauriez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève (…) ».

Par requête déposée le 17 mars 2004, M. … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision prévisée du ministre de la Justice du 28 janvier 2004.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile; 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre la décision ministérielle critiquée. – Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation est irrecevable.

Le recours principal en réformation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond, le demandeur expose qu’il n’aurait pas pu se rendre à l’audition fixée au 15 janvier 2004 au motif qu’il aurait été souffrant. Il précise encore qu’il aurait été hospitalisé du 21 janvier au 17 février 2004 et qu’il aurait été dans l’impossibilité de prévenir les autorités administratives de cet état des choses.

Sur ce, il soutient qu’au lieu de rejeter purement et simplement sa demande d’asile, le ministre de la Justice aurait dû le reconvoquer afin de lui permettre de s’expliquer sur les raisons qui l’ont poussé à quitter son pays d’origine. Dans ce contexte, il expose être journaliste en Ukraine et que suite à un reportage sur les relations entre les forces de l’ordre et les milieux criminels, il aurait fait l’objet de « diverses menaces et autres persécutions ».

Le représentant étatique soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisserait d’être fondé. Il soutient plus précisément que le défaut de se présenter à l’audition fixée au 15 janvier 2004 constituerait un manquement aux obligations de collaboration du demandeur que ce dernier ne saurait justifier par son hospitalisation à partir du 21 janvier 2004, étant relevé que l’intéressé « a été arrêté pour vol à l’étalage le 19 janvier 2004. On peut donc en déduire, sans trop de risque d’erreur qu’avant le 21 janvier 2004 et, plus particulièrement entre le 15 janvier et le 21 janvier, le requérant était dans un état de santé satisfaisant et donc à même de se déplacer jusqu’au Ministère de la Justice pour l’audition fixée ».

En l’espèce, étant donné qu’il est constant en cause que dès le 2 décembre 2003, le demandeur avait reçu en mains propres la convocation pour l’audition fixée au 15 janvier 2004, et que malgré cette information en bonne et due forme et en temps utile, il ne s’est ni présenté à ladite date ni fait excuser, c’est à juste titre que le ministre a pu déduire du comportement du demandeur un refus de ce dernier de collaborer activement à l’instruction de sa demande d’asile, c’est-à-dire un refus de s’acquitter d’une obligation importante dans le cadre de l’instruction de sa demande d’asile. Cette conclusion n’est pas ébranlée par le fait de l’hospitalisation de l’intéressé postérieurement à la date fixée pour son audition, étant donné que même abstraction faite de l’arrestation de Monsieur … en date du 19 janvier 2004, cet état des choses à lui seul ne fait dégager ni une impossibilité de se présenter en date du 15 janvier 2004 ni une impossibilité de s’excuser et de solliciter le report de l’audition à une date ultérieure.

Comme par ailleurs le demandeur, dans le cadre du recours contentieux, s’est contenté de faire état de façon vague et nullement circonstanciée des prétendus problèmes qu’il aurait rencontré en Ukraine en raison de sa profession de journaliste, force est de conclure que le ministre de la Justice a valablement pu rejeter la demande d’asile du demandeur comme étant non fondée, de manière que le recours sous analyse est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 14 juillet 2004, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17755
Date de la décision : 14/07/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-07-14;17755 ?

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