La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/07/2004 | LUXEMBOURG | N°17421

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juillet 2004, 17421


Tribunal administratif N° 17421 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 janvier 2004 Audience publique du 14 juillet 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de Sanem en présence de Monsieur …, et de son épouse, Madame …, … en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17421 du rôle et déposée le 8 janvier 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc THEWES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur â

€¦, professeur, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une déc...

Tribunal administratif N° 17421 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 janvier 2004 Audience publique du 14 juillet 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de Sanem en présence de Monsieur …, et de son épouse, Madame …, … en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17421 du rôle et déposée le 8 janvier 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc THEWES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, professeur, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du 30 avril 2003 du bourgmestre de la commune de Sanem autorisant Monsieur …, fonctionnaire, et son épouse, Madame …, sans état connu, les deux demeurant à L-…. , à agrandir leur maison et à procéder à l’aménagement des alentours avec la précision que le recours englobe les dispositions d’une autorisation initiale délivrée le 5 février 2003 par ledit bourgmestre ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, du 12 janvier 2004 portant signification de la prédite requête à l’administration communale de Sanem, établie à la maison communale à L-4401 Belvaux, 60, rue de la Poste, ainsi qu’aux époux …-…, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 13 avril 2004 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Sanem ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 13 mai 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc THEWES en nom du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maîtres Filipe RODRIGUES, en remplacement de Maître Marc THEWES, et Marc ELVINGER en leurs plaidoiries respectives.

Le 26 mars 1992, le bourgmestre de la commune de Sanem, ci-après dénommé le « bourgmestre », délivra à Monsieur … et à son épouse, Madame … un permis de construire un bungalow à Sanem …, suivant plans de l’architecte G. S. du 12 février 1992.

Fait partie de ladite autorisation de construire un plan séparé à l’échelle 1/100, intitulé « coupe A-A B-B sur terrain », documentant le remblai du terrain sur lequel a été construit le bungalow litigieux.

En date du 10 octobre 1996, Monsieur … formula une demande d’autorisation pour la construction d’un mur de soutènement au fond de son terrain, autorisation qui lui fut accordée en date du 18 novembre 1996.

En date du 1er avril 1997, l’architecte G.S. sollicita pour compte des époux …-… une autorisation pour la construction d’une chambre au-dessus du garage accolé à la maison. Ladite construction fut autorisée par le bourgmestre en date du 28 avril 1997.

En date du 5 avril 2002, l’architecte G.S. sollicita auprès de la commune de Sanem l’autorisation pour l’extension du garage de la maison des époux …-….

En date du 5 février 2003, le bourgmestre délivra l’autorisation sollicitée pour l’agrandissement de la maison et l’aménagement des alentours, sous respect d’un certain nombre de conditions.

Suite au dépôt de plans modifiés en date du 30 avril 2003, le bourgmestre de la commune de Sanem délivra une nouvelle autorisation aux époux …-… pour l’agrandissement de leur maison et l’aménagement des alentours suivant lesdits plans modifiés et sous réserve de tous droits généralement quelconques de tiers et sous les conditions déterminées par l’autorisation du 5 février 2003.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 janvier 2004, Monsieur …, en sa qualité de propriétaire du terrain adjacent au terrain des époux …-…, a introduit un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’autorisation de construire du 30 avril 2003, ensemble l’autorisation initiale du 5 février 2003.

La loi ne prévoyant pas un recours au fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours en annulation, non autrement contesté, est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur estime que le remblai réalisé par les époux …-…, suite à l’autorisation de construire initiale du 26 mars 1992, a créé une différence de niveau de plus de 3,50 mètres avec son terrain, resté à l’état de terrain naturel, et que du fait de l’existence de ce dénivelé son terrain serait fortement dévalorisé.

Sur ce, il soutient en premier lieu que l’autorisation accordée violerait l’article 4.7. du règlement sur les bâtisses de la commune de Sanem, ci-après dénommé le « règlement sur les bâtisses », d’après lequel pour les constructions en pente les hauteurs à la corniche et à la faîtière, à mesurer par rapport au sol naturel, ne peuvent dépasser le gabarit établi suivant la pente du terrain. Or, comme les autorités communales auraient effectué les mesures du dénivelé du terrain à partir de la situation existante, c’est-à-dire en considération d’un remblai de plus de 3,50 mètres effectué en 1992, et non à partir du terrain naturel, la hauteur des corniches et des faîtières, suite à la réalisation des travaux d’agrandissement autorisés, dépasserait les limites tracées par le règlement sur les bâtisses.

En deuxième lieu, le demandeur estime que l’autorisation accordée viole l’article 5.4. du règlement sur les bâtisses visant les travaux de déblai et de remblai, d’après lequel l’exécution de pareils travaux ne peut être autorisée que dans la limite de 1,50 mètres au-

dessus ou en-dessous du niveau du terrain naturel et que lorsque pareils travaux sont exécutés un retrait latéral de 1 mètre doit être respecté. Comme les époux …-… projetteraient d’autres remblais à l’heure actuelle, cette situation ne saurait être tolérée, d’autant plus qu’ils n’auraient pas respecté l’autorisation initiale du 26 mars 1992 en relation avec les travaux de terrassement, qui aurait indiqué que les niveaux de la construction seraient à adapter au niveau de terrain avoisinant et que la terrasse postérieure serait à construire sur piliers.

Finalement, le demandeur soutient que le mur de soutènement aurait été autorisé en violation de l’article 5.5., alinéa 3 du règlement sur les bâtisses, d’après lequel des murs de soutènement peuvent être autorisés exceptionnellement et sans dépasser une hauteur de 1 mètre par rapport au terrain naturel respectivement remanié, étant donné que ledit mur aurait été autorisé sans aucune motivation et sans aucune explication concernant les circonstances exceptionnelles de nature à justifier son érection, d’autant plus que l’autorisation n’aurait pas été accompagnée de prescriptions destinées à assurer l’intégration du mur au paysage et à le « doter d’une certaine esthétique ».

Dans leur mémoire en réponse, les époux …-… insistent sur le fait qu’au moment de la délivrance de l’autorisation de construire du 28 avril 1997, visant la chambre au-

dessus du garage accolé à leur maison, le demandeur n’aurait présenté aucune objection et qu’il se serait désintéressé du projet de construction initié suivant demande du 5 avril 2002 et ayant abouti à l’autorisation critiquée. Ce ne serait que suite à la délivrance de l’autorisation du 5 février 2003 que Monsieur … aurait réagi, ce qui les aurait incité à introduire un plan modifié concernant le remblai et le mur de soutènement à construire, de sorte que l’autorisation du 5 février 2003 aurait ainsi été remplacée par celle du 30 avril 2003. Or, il ressortirait clairement de ladite autorisation du 30 avril 2003 qu’il ne serait nullement question de travaux de remblai supplémentaires.

Concernant la prétendue violation de l’article 4.7. du règlement sur les bâtisses, les époux …-… soutiennent que les travaux d’agrandissement de leur maison modifieront la corniche du côté de la propriété de Monsieur … de manière à ce qu’elle sera descendue de 4,40 mètres à la hauteur de 3,12 mètres. Ces travaux seraient conformes à l’article 2.2.4., alinéas 4 et 5 du plan d’aménagement général de la commune de Sanem d’après lequel « toute construction, reconstruction ou transformation faisant partie d’un bloc de maisons existant ou projeté, doit se raccorder à la hauteur de la corniche et de la faîtière de l’ensemble du bloc. Exceptionnellement, le nombre des niveaux des constructions accolées existantes peut être exigé.

Afin de réaliser un raccord esthétiquement valable avec les immeubles adjacents ayant une plus grande ou plus petite hauteur, des hauteurs à la corniche et à la faîtière plus petites ou plus grandes peuvent être imposées pour garantir les transitions nécessaires et pour éviter l’émergence de pignons nus trop élevés ».

Comme l’agrandissement autorisé se raccorderait à la hauteur de la corniche et de la faîtière de l’ensemble du bloc existant, la commune devrait partir de la situation existante et il serait inconcevable d’autoriser un agrandissement d’une maison en partant d’un niveau plus bas que le niveau de référence servant à la construction du bâtiment principal.

En relation avec les travaux de terrassements critiqués, les époux …-… soutiennent que l’autorisation du 30 avril 2003 ne leur accorderait en aucun point un quelconque droit de procéder à des travaux de remblai supplémentaires. Bien au contraire, la hauteur du mur de soutènement prévu ainsi que l’aménagement d’une porte feraient en sorte que le remblai devrait être réduit à un niveau nettement plus bas.

Concernant finalement la construction du mur de soutènement et la prétendue violation de l’article 5.5., alinéa 3 du règlement sur les bâtisses, les défendeurs soutiennent que l’autorisation critiquée leur accorderait le droit de construire un mur de soutènement avec différents niveaux adaptés à la situation du terrain en pente. Ledit mur de soutènement serait accolé à un mur existant déjà depuis 1996 et il respecterait pratiquement sur toute sa longueur, une hauteur moyenne de 1 mètre et ne dépasserait que de peu cette limite sur une longueur de 4,50 mètres. Or, comme l’alinéa 3 de l’article 5.5. du règlement des bâtisses prévoit expressément en sa deuxième phrase que pour des raisons de topographie, un tel dépassement peut être autorisé, la violation alléguée dudit article 5.5. ne serait pas donnée en l’espèce.

Il convient de relever en premier lieu que les deux premiers moyens d’annulation soulevés par le demandeur en présence de l’autorisation de construire litigieuse, et tirés de la violation des articles 4.7. et 5.4. du règlement sur les bâtisses, visent le remblai effectué au moment de la construction du bungalow litigieux autorisé suivant permis de construire du 26 mars 1992.

Sans vouloir remettre en cause les droits acquis par les époux …-… en relation avec les diverses autorisations de construire obtenues en dates respectives des 26 mars 1992, 18 novembre 1996 et 28 avril 1997, autorisations qui n’ont jamais été critiquées voire attaquées par Monsieur …, le tribunal a pu se rendre compte sur base du plan faisant partie de l’autorisation de construire initiale du 26 mars 1992, intitulé « coupe A-A B-B sur terrain », que le niveau du terrain naturel a été remblayé au moment de la construction du bungalow du côté du terrain du demandeur de plus de 4 mètres, le niveau du rez-de-chaussée du bungalow litigieux se trouvant à une cote de + 0,10 cm et le niveau du terrain naturel du côté de la propriété … à une cote de - 4,62 cm.

Le tribunal est appelé à examiner, au regard du constat qui précède, si l’agrandissement à la construction actuellement projeté est conforme aux prédits articles 4.7. et 5.4. du règlement sur les bâtisses.

Dans ce contexte, force est de constater que les travaux actuellement projetés sont à considérer, au vu de leur envergure ressortant des plans de construction versés, comme une modification extérieure de la construction existante par la construction d’un mur de soutènement et l’agrandissement de l’immeuble existant au niveau du sous-sol et du rez-

de-chaussée sur une surface de plus de 50 m2, de sorte qu’ils ne peuvent être considérées comme étant de faible envergure mais doivent être assimilés à un nouveau projet de construction. Partant, lesdits travaux de construction doivent être compatibles avec les prescriptions du règlement sur les bâtisses applicables le jour de l’octroi de l’autorisation de construire, toute solution contraire étant de nature à donner ouverture à toutes sortes d’abus contraires aux règles communales d’urbanisme applicables à ce jour.

Aux termes de l’article 4.7. du règlement des bâtisses visant les constructions en pente « les hauteurs à la corniche et à la faîtière, à mesurer par rapport au sol naturel, ne peuvent dépasser le gabarit établi suivant la pente du terrain.

La figure suivante définit un gabarit théorique dans lequel chaque construction ou partie de construction doit s’intégrer et aucune partie, ni faîtage, ni corniche, ne pourra dépasser ces lignes fictives ».

Or, au vu du remblai effectué de plus de 4 mètres du côté de la propriété …, la construction actuellement projetée ne peut pas respecter les prescriptions de l’article 4.7.

du règlement des bâtisses, telle qu’explicitée par la figure, qui exige qu’une construction à réaliser doit suivre la pente tracée par le terrain naturel.

Pour le surplus, l’article 5.4. du règlement sur les bâtisses ne permet qu’un remblai de 1,50 mètre avec un recul d’au moins 1,00 mètre sur la limite latérale, prescriptions qui ne sont pas non plus respectées par la nouvelle autorisation. En effet, les travaux d’agrandissement et de construction du mur de soutènement entraînent nécessairement des travaux de remblai respectivement de déblai modifiant la situation existante, sans respecter les limites imposées par ledit article 5.4. par rapport au niveau du terrain naturel et au recul à observer sur la limite latérale, même s’il n’est pas établi que les travaux en question vont augmenter le volume total du remblai se trouvant sur le terrain des époux …-….

L’argumentation des époux …-…, tirée de la conformité des travaux de construction projetés avec l’article 2.2.4., alinéas 4 et 5 du plan d’aménagement général de la commune de Sanem n’est pas de nature à mettre en échec les dispositions précitées du règlement sur les bâtisses, étant donné que cette disposition vise à l’évidence les raccords de corniche et de faîtière en présence d’un bloc de maisons respectivement d’immeubles adjacents et non pas un immeuble isolé comme en l’espèce.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’autorisation de construire du 30 avril 2003 encourt l’annulation pour violation des articles 4.7. et 5.4. du règlement sur les bâtisses de la commune de Sanem, l’examen de la prétendue violation de l’article 5.5., alinéa 3 devenant surabondant.

La demande en allocation d’une indemnité de procédure de 1000 € formulée par le demandeur est à rejeter, les conditions légales n’étant pas remplies en l’espèce.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié ;

partant annule la décision déférée du bourgmestre de la commune de Sanem du 30 avril 2003 ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’administration communale de Sanem aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 14 juillet 2004, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 7


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17421
Date de la décision : 14/07/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-07-14;17421 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award