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05/07/2004 | LUXEMBOURG | N°17792

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 juillet 2004, 17792


Tribunal administratif N° 17792 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 mars 2004 Audience publique du 5 juillet 2004 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17792 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2003 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, né le …(Russie), de nationalité russe, demeurant actuellement à L-…, ten

dant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 10 f...

Tribunal administratif N° 17792 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 mars 2004 Audience publique du 5 juillet 2004 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17792 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2003 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, né le …(Russie), de nationalité russe, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 10 février 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 mai 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Joëlle NEIS, en remplacement de Maître François MOYSE et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 28 juin 2004.

Madame … introduisit en date du 6 octobre 2003 une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Elle fut entendue le 5 février 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre de la Justice informa Madame … par décision du 10 février 2004, lui envoyée par courrier recommandé en date du 18 février 2004, de ce que sa demande a été refusée comme non fondée au motif que les problèmes qu’elle invoque seraient d’un ordre purement privé et que les créanciers de son ex-mari, à sa poursuite, ne pourraient pas être assimilés à des agents de persécution au sens de la Convention de Genève.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2004, Madame … a fait déposer un recours en réformation sinon en annulation à l’encontre de la décision de refus du 10 février 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.

En premier lieu, Madame … reproche au ministre de la Justice que la décision prise à son encontre manquerait de motivation.

En ce qui concerne le défaut de motivation soulevé par la demanderesse, force est de constater que ce moyen manque de pertinence. En effet, la décision du ministre de la Justice du 10 février 2004 est suffisamment motivée. Les faits tels que résumés dans la décision correspondent aux faits sous-jacents à la demande d’asile et les motifs de refus y sont énumérés. Le ministre a partant indiqué de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels il s’est fondé pour justifier son refus et les motifs ont ainsi été portés à suffisance de droit à la connaissance de la demanderesse.

Le premier moyen fondé sur le défaut de motivation de la décision ministérielle soumise au tribunal n’est donc pas fondé.

Ensuite, elle fait valoir qu’on lui aurait posé, au cours de son audition, des questions vagues sans demander des précisions relatives aux événements ayant eu lieu.

Ce moyen manque également de pertinence, dans la mesure où le rapport d’audition renseigne un nombre important de questions posées à la demanderesse. Plus spécifiquement la partie « Crainte de persécution » fait état de 9 questions précises posées à la demanderesse, aux quelles celle-ci a répondu de façon très brève. En effet il était loisible à la demanderesse de répondre à ces questions avec la précision qu’elle a jugé nécessaire d’y apporter afin d’éclairer le ministre sur les motifs sous-jacents à sa demande d’asile, de sorte que celle-ci est malvenue à reprocher au ministre un défaut de précision des questions, d’autant plus que celui-ci ignore totalement les motifs pour lesquels la demanderesse a quitté son pays.

Quant au fond elle fait valoir que, dès juin 2003, elle aurait été menacée et agressée par des ennemis de son ex-mari qui aurait eu des problèmes avec des financiers de son entreprise de micro-ordinateurs auxquels celui-ci devait de l’argent. Elle ajoute que même après la disparition de son ex-mari, elle aurait continué à recevoir des menaces anonymes, de sorte qu’elle aurait décidé de se mettre à l’abri.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte qu’il serait à débouter de son recours.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2 de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par la demanderesse lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse, amène le tribunal à conclure que la demanderesse reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, Madame … fait seulement état de problèmes avec des personnes à la recherche de son ex-mari qui l’auraient menacée parce que son mari devait rembourser à une personne une importante somme d’argent. En plus à la question « Que voulez-vous de la part des autorités luxembourgeoises ? », elle répond « Je demande un permis de séjour temporaire en raison de mes problèmes, je ne compte pas rester ici définitivement ».

Or les problèmes mis en avant par la demanderesse sont des problèmes d’ordre strictement privé ayant pour origine des difficultés financières de l’entreprise de son ex-

mari, et les menaces, à les supposer établies, relèvent d’infractions de droit commun, de sorte qu’ils ne sauraient fonder une crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

Il en résulte que le recours sous analyse est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, déclare le recours en annulation irrecevable, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juillet 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

Schmit Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17792
Date de la décision : 05/07/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-07-05;17792 ?

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