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12/05/2004 | LUXEMBOURG | N°17443

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 mai 2004, 17443


Tribunal administratif N° 17443 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2004 Audience publique du 12 mai 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17443 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur

…, né le … (Sénégal), de nationalité sénégalaise, détenu au Centre de séjour provisoire p...

Tribunal administratif N° 17443 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2004 Audience publique du 12 mai 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17443 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Sénégal), de nationalité sénégalaise, détenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 13 novembre 2003, par laquelle sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée comme non fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en sa plaidoirie à l’audience publique du 10 mai 2004.

En date du 12 juin 2003, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

En date du 2 octobre 2004, il fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 13 novembre 2003, lui notifiée par voie de courrier recommandé expédié en date du 19 novembre 2003, le ministre de la Justice l’informa de ce que sa demande avait été rejetée au motif que qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays, de sorte qu’aucune crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un certain groupe social ne serait établie dans son chef.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2004, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle prévisée du 13 novembre 2003.

A l’appui de son recours le demandeur conclut d’abord à une violation de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en ce que la décision litigieuse est rédigée en langue française, partant dans une langue qui lui est inconnue ; quant au fond il estime remplir les conditions pour bénéficier du statut de réfugié.

Le délégué du Gouvernement soulève à titre principal l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté ; quant au fond, il conclut au bien-fondé de la décision litigieuse.

La procédure devant les juridictions administratives étant essentiellement écrite, le fait que l’avocat constitué pour un demandeur n’est ni présent, ni représenté à l’audience de plaidoiries, est indifférent. Comme le demandeur a pris position par écrit par le fait de déposer sa requête introductive d’instance, le jugement est réputé contradictoire entre parties.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises, de sorte que le recours en annulation, formulé à titre subsidiaire, est irrecevable.

En ce qui concerne le recours en réformation, il y a lieu de relever que le moyen soulevé par le demandeur relatif à l‘absence de traduction de la décision déférée en une langue par lui compréhensible soulève la question de l’opposabilité de cette décision au demandeur, et partant, celle du point de départ du délai de recours.

Il appartient dès lors au tribunal, afin de pouvoir trancher la question de la tardiveté éventuelle du recours, d’analyser l’opposabilité de la décision déférée au demandeur, eu égard au fait que celui-ci ne comprend pas le français.

Il échet de souligner à cet égard que le Français est l’une des trois langues officielles du Grand-Duché en matière administrative, contentieuse ou non contentieuse, ainsi qu’en matière judiciaire, et qu’il n’existe aucun texte de loi spécial obligeant le ministre de la Justice à faire traduire ses décisions dans une langue compréhensible pour le destinataire (cf. trib. adm. 12 mars 1997, n° 9679 du rôle, Pas.

adm. 2003, V° Etrangers, n° 19 et autres références y citées).

Cette conclusion ne saurait être énervée par la référence vague et non autrement explicitée à l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.

Le tribunal tient par ailleurs à souligner que la rédaction d’une décision administrative ne saurait en particulier être un motif d’annulation, lorsque le demandeur, comme en l’espèce, est secondé par un conseil juridique, dont les connaissances de la langue française ne sauraient être mises en doute, et que ledit conseil s’est vu notifier en copie la décision litigieuse, de sorte qu’il aurait dû à tout le moins être possible au conseil juridique en question de traduire la décision à son mandant.

Il en résulte que le moyen du demandeur relatif à l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme est à rejeter, de sorte que la décision doit être considérée comme opposable au demandeur.

Force est de constater que le prédit article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 précitée impose le respect d’un délai de recours d’un mois à partir de la notification de la décision litigieuse. En l’espèce, la décision déférée, datée du 13 novembre 2003, a fait l’objet d’une notification au demandeur par la voie d’un courrier recommandé expédié en date du 19 novembre 2003, de sorte que le recours déposé le 9 janvier 2004 l’a été en dehors du délai prescrit.

Il s’ensuit que le recours est irrecevable pour avoir été déposé en dehors du délai d’un mois.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en réformation irrecevable pour cause de tardiveté ;

déclare le recours en annulation formulé subsidiairement irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 12 mai 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 3


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17443
Date de la décision : 12/05/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-05-12;17443 ?

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