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06/05/2004 | LUXEMBOURG | N°17118

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 mai 2004, 17118


Tribunal administratif N° 17118 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 31 octobre 2003 Audience publique du 6 mai 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en matière de permis de construire

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Vu la requête inscrite sous le numéro 17118 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 31 octobre 2003 par Maître Rhett SINNER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à

Luxembourg, au nom de Monsieur …, agriculteur, demeurant à L-…, tendant à la réforma...

Tribunal administratif N° 17118 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 31 octobre 2003 Audience publique du 6 mai 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en matière de permis de construire

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Vu la requête inscrite sous le numéro 17118 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 31 octobre 2003 par Maître Rhett SINNER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, agriculteur, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de X. du 28 septembre 2003, refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de construire pour une porcherie d’engraissement d’une capacité de 1200 porcelets au lieu-dit « … » à … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Claude STEFFEN, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 24 octobre 2003, portant signification de ce recours à l’administration communale de X.;

Vu la lettre de Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif le 1er décembre 2003 informant le tribunal de ce qu’il a mandat d’occuper pour l’administration communale de X.;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2004 par Maître Georges PIERRET, au nom de l’administration communale de X.;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 13 janvier 2004 par lequel ledit mémoire en réponse a été notifié au mandataire du demandeur ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 février 2004 par Maître Rhett SINNER pour compte du demandeur ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Claude STEFFEN, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 12 février 2004, par lequel ce mémoire en réplique a été signifié à l’administration communale de X.en son domicile élu ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2004 par Maître Georges PIERRET au nom de l’administration communale de X.;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 2 mars 2004 par lequel ledit mémoire en duplique a été notifié au mandataire du demandeur par télécopieur ;

Vu le mémoire en triplique intitulé « mémoire en duplique » déposé le 22 mars 2004 par Maître Rhett SINNER au nom de Monsieur … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Claude STEFFEN, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 17 mars 2004, par lequel ledit mémoire en triplique a été signifié à l’administration communale de X. en son domicile élu ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Rhett SINNER et Gabrielle EYNARD, en remplacement de Maître Georges PIERRET, en leurs plaidoiries respectives.

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Par lettre datée du 16 mars 2001, Monsieur …, préqualifié, introduisit auprès du bourgmestre de la commune de …, ci-après dénommée la « Commune », une demande en autorisation pour la construction d’une porcherie d’engraissement d’une capacité de 1200 porcelets sur son terrain sis au lieu-dit « … » à … et concernant les parcelles portant les numéros cadastraux 610, 611, 608/2819 et 606/2818.

Par courrier du 26 septembre 2003, le bourgmestre de la Commune refusa l’autorisation sollicitée au motif que le projet soumis ne serait pas conforme au règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites de la Commune et notamment à l’article 3.17 point d).

C’est contre cette décision de refus que Monsieur … a fait introduire, par requête déposée le 31 octobre 2003, un recours en réformation, sinon en annulation.

QUANT A L’ADMISSIBILITE DES MEMOIRES DEPOSES Le tribunal est appelé liminairement à examiner le moyen soulevé d’office par lui lors des plaidoiries relativement à la recevabilité du mémoire en réplique au regard des délais légaux de son dépôt au greffe du tribunal. – Dans ce contexte, il convient de relever que l’article 5 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives dispose en effet que la question de la communication des mémoires dans les délais prévus par la loi est à considérer comme étant d’ordre public pour toucher à l’organisation juridictionnelle, le législateur ayant prévu les délais émargés sous peine de forclusion.

Le mandataire du demandeur s’est rapporté à prudence de justice quant à cette question.

L’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 prévoit en ses paragraphes (5) et (6) que « (5) le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse, la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois.

(6) Les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus à peine de forclusion.

Ils ne sont pas susceptibles d’augmentation en raison de la distance. Ils sont suspendus entre le l6 juillet et le 15 septembre ».

Il convient encore de noter qu’aucune prorogation de délai n’a été demandée au président du tribunal conformément à l’article 5, paragraphe (7) de la loi précitée du 21 juin 1999 ni, par la force des choses, accordée par ce dernier.

Par ailleurs, au vœu de l’article 5 précité, la fourniture du mémoire en réplique dans le délai d’un mois de la communication du mémoire en réponse inclut l’obligation de le déposer au greffe du tribunal et de le communiquer à la partie, voire aux parties défenderesses dans ledit délai d’un mois.

Dans la mesure où le mémoire en réponse de la partie défenderesse a été déposé le 14 janvier 2004 et notifié au mandataire du demandeur le 13 janvier 2004, tel que cela a été confirmé par ledit mandataire lors des plaidoiries, le dépôt et la communication du mémoire en réplique auraient dû intervenir pour le 14 février 2004 au plus tard. Or, si le mémoire en réplique a bien été notifié au mandataire de la partie défenderesse le 12 février 2004, c’est-à-dire dans ledit délai, il convient de constater que son dépôt au greffe du tribunal n’a été fait qu’en date du 20 février 2004, c’est-à-

dire qu’il n’est pas intervenu dans le prédit délai. Par conséquent, à défaut d’avoir été déposé et communiqué dans le délai d’un mois légalement prévu à peine de forclusion, le tribunal est dans l’obligation d’écarter le mémoire en réplique des débats.

Le mémoire en réplique ayant été écarté, le même sort frappe le mémoire en duplique de la partie défenderesse, lequel ne constitue qu’une réponse à la réplique fournie.

Il y a encore lieu de relever que le mémoire remis à l’audience du 22 mars 2004 par Maître Rhett SINNER et intitulé « Mémoire en duplique », indépendamment du constat qu’il ne constitue qu’une réponse au mémoire en duplique précédemment écarté, est le troisième mémoire formulé au nom du demandeur et dépasse ainsi le nombre maximal admis par l’article 7, alinéa 1er de la loi précitée du 21 juin 1999, applicable en l’espèce, chaque partie n’étant autorisée à déposer que deux mémoires, y compris la requête introductive d’instance. Le mémoire en duplique du 22 mars 2004 constituant un mémoire en triplique, il n’est partant pas non plus à prendre en considération.

QUANT A LA RECEVABILITE DU RECOURS La Commune conclut principalement à l’irrecevabilité du recours en réformation en faisant valoir qu’un tel recours ne serait pas prévu en la matière.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (cf. trib. adm. 28 mai 1997, n° 9667 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Recours en réformation, n° 4, et autres références y citées).

En l’espèce, aucune disposition légale ne prévoyant de recours de pleine juridiction en matière de permis de construire, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision litigieuse.

Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans le délai et les formes de la loi, il est recevable.

QUANT AU FOND A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’il aurait sollicité une autorisation en vue de la construction d’une porcherie d’engraissement d’une capacité de 1200 porcelets au lieu-dit « … » à …, étant précisé que cette nouvelle porcherie viendrait s’ajouter à trois autres porcheries et un hangar agricole qui se trouvent déjà implantés sur le même site.

En droit, il soutient que ce serait à tort que le bourgmestre de la Commune se serait basé sur l’article 3.17 point d) du règlement sur les bâtisses de la Commune pour refuser l’autorisation de construire sollicitée, au motif que ce serait l’article 3.17 point a) qui serait applicable à son projet de construction. En effet, l’article 3.17 point d) traiterait de la construction de nouvelles exploitations agricoles alors que son projet ne consisterait pas en la construction d’une nouvelle exploitation, mais en l’agrandissement de constructions agricoles existantes, lequel cas de figure serait justement réglementé par l’article 3.17 point a) dudit règlement qui prévoit que les constructions agricoles existantes peuvent être agrandies ou transformées si les besoins de l’exploitation l’exigent et à condition de ne pas nuire au bon aspect du lieu et de ne pas causer une gêne objectivement appréciable pour le voisinage.

Il signale que l’agrandissement serait nécessaire afin de rendre son exploitation plus rentable à long terme, d’autant que son fils entendrait reprendre celle-ci, que la nouvelle construction ne nuirait pas au bon aspect du lieu et qu’elle ne causerait pas une gêne objectivement appréciable pour le voisinage du point de vue bruit, fumée, odeur ou circulation induite, au motif qu’au même endroit se trouveraient déjà implantées trois autres porcheries.

Enfin, le demandeur donne encore à considérer que la porcherie projetée serait implantée à l’extérieur du périmètre d’agglomération à une distance d’au moins 500 mètres de la plus proche habitation, de sorte que la disposition de l’article 3.17 point d) du règlement sur les bâtisses serait de toute façon respectée.

Pour autant que de besoin, il offre de prouver par une descente sur les lieux les faits et moyens exposés dans son recours.

Dans son mémoire en réponse, la Commune rétorque que ce serait à bon droit que le bourgmestre aurait refusé l’autorisation de construire sollicitée sur la base de l’article 3.17 point d) du règlement sur les bâtisses, lequel exigerait en son alinéa deux que les porcheries industrielles doivent être implantées à l’extérieur du périmètre à au moins 500 mètres de la plus proche habitation. Or, il résulterait d’un rapport du cadastre versé en cause que la distance prescrite entre la porcherie projetée et la plus proche habitation ne serait pas respectée.

Elle soutient en outre que ce serait à tort que le demandeur se réfèrerait à l’article 3.17 point a) du règlement sur les bâtisses, alors que celui-ci serait applicable « aux modifications des exploitations existantes à l’intérieur du périmètre d’agglomération ».

Enfin, la Commune conteste que le projet de construction envisagé par le demandeur puisse valoir comme une transformation ou un agrandissement d’une porcherie existante et soutient que le fait de vouloir construire une quatrième porcherie à côté des trois porcheries déjà existantes correspondrait à une « installation nouvelle » telle que prévue par l’article 3.17 point d) alinéa 2 du règlement sur les bâtisses.

Il échet tout d’abord de relever qu’il est constant en cause que le terrain, sis au lieu-dit « … » à …, sur lequel est projeté la construction litigieuse, est situé à l’extérieur du périmètre d’agglomération et que le demandeur exploite déjà sur le même site trois porcheries et un hangar agricole.

Il y a lieu en premier lieu d’analyser la nature du projet de construction soumis. Contrairement aux conclusions du demandeur, force est de constater que la construction d’une quatrième porcherie en tant qu’édifice indépendant sur un terrain où sont déjà implantés trois autres porcheries et un hangar agricole ne saurait être qualifiée d’agrandissement d’une construction agricole existante, mais comme une construction nouvelle.

Or, l’article 3.17 point a) dispose que « les constructions agricoles existantes peuvent être maintenues. Elles peuvent être transformées ou agrandies si les besoins de l’exploitation l’exigent, et si pour autant que ces extensions ne soient pas de nature à nuire au bon aspect du lieu et que le requérant établisse que l’exploitation ne causera aucune gêne, objectivement appréciable pour le voisinage au point de vue bruit, fumée, odeur, et circulation induite ».

C’est donc à tort que le demandeur fait valoir que sa demande de permis de construire devrait être accueillie sur base de l’article 3.17 point a). En effet, cette disposition traite des constructions agricoles existantes, lesquelles peuvent être transformées ou agrandies si les besoins de l’exploitation l’exigent. Toutefois, il résulte sans ambiguïté du libellé de l’article 3.17 point a) que celui-ci ne saurait trouver application en l’espèce, étant donné qu’il vise les constructions agricoles existantes. Or, le projet de construction soumis par le demandeur n’étant pas un agrandissement d’une construction existante, mais une construction nouvelle, il ne tombe pas dans le champ d’application de l’article 3.17 point a).

Quant à l’article 3.17 point d) du règlement sur les bâtisses, qui prévoit que « la construction de nouvelles exploitations agricoles est interdite à l’intérieur des périmètres d’agglomération. Les fermes avicoles, porcheries industrielles, les installations servant à l’élevage ou à l’hébergement de chiens et autres animaux domestiques, ainsi que toutes les autres installations nouvelles dégageant des nuisances importantes devront être implantées à l’extérieur du périmètre à au moins 500 m de la plus proche habitation (…) », force est de constater que, bien que l’article 3.17 point d) parle « d’exploitations agricoles », tandis que l’article 3.17 point a) parle de « constructions agricoles », eu égard à l’agencement général de ce texte, il faut considérer que l’expression « exploitations agricoles », telle qu’employée par l’article 3.17 point d), englobe nécessairement les constructions agricoles nouvelles.

Admettre le contraire serait accepter qu’une nouvelle exploitation, c’est-à-dire un ensemble de nouvelles constructions, puisse être érigée à l’extérieur du périmètre d’agglomération, mais qu’une nouvelle construction agricole - visant à compléter une exploitation existante - ne le puisse pas.

L’article 3.17 point d) subordonne la réalisation de pareilles constructions à l’implantation à l’extérieur du périmètre d’agglomération à au moins 500 mètres de la plus proche habitation. Or, s’il est vrai que l’implantation de la construction est projetée par Monsieur … à l’extérieur du périmètre d’agglomération, il n’en reste pas moins qu’il se dégage du rapport du cadastre du 19 octobre 2001 versé en cause que « le Berghaff tout entier, la maison du no cad. 664/828 et la maison du no cad.

105/2937 sont incluses dans le périmètre de 500 m à partir du coin du projet le plus proche de … », de sorte que la condition de l’implantation à 500 mètres n’est pas respectée.

C’est donc à bon droit que le bourgmestre de la Commune a refusé l’autorisation de construire sollicitée par Monsieur …, étant donné que la distance, telle que prescrite par l’article 3.17 point d), n’est pas respectée en l’espèce.

Il découle des considérations qui précèdent que le refus du bourgmestre de la Commune est justifié sur la base de l’article 3.17 point d) et que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

écarte le mémoire en réplique, le mémoire en duplique ainsi que le mémoire en triplique et met respectivement laisse les frais afférents à charge de la partie demanderesse ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 6 mai 2004 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 7


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17118
Date de la décision : 06/05/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-05-06;17118 ?

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