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28/04/2004 | LUXEMBOURG | N°s12040,16985

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 avril 2004, s12040,16985


Tribunal administratif N°s 12040 et 16985 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 8 juin 2000 et 23 septembre 2003 Audience publique du 28 avril 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre des délibérations du conseil communal de Weiler-la-Tour et des décisions du ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations

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JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 12040 du rôle et

déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juin 2000 par Maître Roland ASSA, avocat à la Cou...

Tribunal administratif N°s 12040 et 16985 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits respectivement les 8 juin 2000 et 23 septembre 2003 Audience publique du 28 avril 2004 Recours formé par les époux … et …, … contre des délibérations du conseil communal de Weiler-la-Tour et des décisions du ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations

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JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 12040 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juin 2000 par Maître Roland ASSA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux …, agriculteur, et …, agricultrice, demeurant ensemble à L- … , tendant à l’annulation 1. de la décision d’approbation définitive par le conseil communal de la commune de Weiler-la-Tour d’un plan directeur concernant le projet d’aménagement particulier des lieux-dits « Peckebierg » et « Beim Haupertskreuz », prise en date du 3 novembre 1999 et affichée dans la maison communale de Weiler-la-Tour en date du 26 novembre 1999, ainsi que 2. de la décision implicite de refus de la part du ministre de l’Intérieur de faire droit à la réclamation par eux introduite par courrier du 8 décembre 1999 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Roland FUNK, demeurant à Luxembourg, du 15 juin 2000 portant signification de ce recours à l’administration communale de Weiler-la-

Tour ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2000 par Maître Guy LUDOVISSY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’administration communale de Weiler-la-Tour ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 7 novembre 2000 par Maître Roland ASSA au nom des époux …… ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Marc GRASER, demeurant à Luxembourg, du 7 novembre 2000 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de Weiler-la-Tour ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 7 décembre 2000 par Maître Guy LUDOVISSY pour compte de l’administration communale de Weiler-

la-Tour ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 5 décembre 2000 portant signification de ce mémoire en duplique aux époux …… ;

Vu l’ordonnance rendue en date du 25 novembre 2002 par le vice-président du tribunal administratif ayant invité les parties à déposer un mémoire supplémentaire ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 20 décembre 2002 par Maître Roland ASSA pour compte des époux …… ;

Vu la notification de ce mémoire supplémentaire intervenue par voie de télécopie adressée le 20 décembre 2002 à Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, ayant repris le mandant de Maître LUDOVISSY pour représenter les intérêts de la commune de Weiler-la-Tour ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2003 par Maître Roger NOTHAR pour compte de l’administration communale de Weiler-la-

Tour ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 9 janvier 2003 portant signification de ce mémoire supplémentaire aux époux …… ;

Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement la décision communale attaquée ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 16985 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 septembre 2003 par Maître Roland ASSA au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, préqualifiés, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1. de la décision d’adoption définitive par le conseil communal de la commune de Weiler-la-Tour du plan d’aménagement particulier des terrains sis au lieu-dit « Beim Haupertskreuz » et « Peckebierg » à Weiler-la-Tour en date du 5 septembre 2002 ; 2. de la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur de ladite délibération du 5 septembre 2002 du conseil communal de Weiler-la-Tour, prise en date du 3 juin 2003 ; 3. de la décision du ministre de l’Intérieur datée du 16 juin 2003 rejetant la réclamation par eux introduite à l’encontre de la décision prévisée du 5 septembre 2002 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 22 octobre 2003 portant signification de ce recours à l’administration communale de Weiler-

la-Tour ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 4 novembre 2003 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2004 par Maître Roger NOTHAR pour compte de l’administration communale de Weiler-la-

Tour ;

Vu la notification de ce mémoire en réponse par voie de télécopie adressée au mandataire des époux …… en date du 13 janvier 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 13 février 2004 par Maître Roland ASSA pour compte des époux …… ;

Vu la notification de ce mémoire en réplique par voie de télécopie adressée au mandataire de l’administration communale de Weiler-la-Tour en date du 13 février 2004 ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 mars 2004 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 12 mars 2004 par Maître Roger NOTHAR pour compte de l’administration communale de Weiler-la-

Tour ;

Vu la notification de ce mémoire en duplique intervenue par voie de télécopie adressée au mandataire des époux …… en date du 12 mars 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement les décisions critiquées ;

I. & II.

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nathalie PRUM-CARRE, en remplacement de Maître Roland ASSA, Steve HELMINGER, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 mars 2004.

Le conseil communal de Weiler-la-Tour adopta provisoirement en date du 28 juillet 1999 le plan directeur concernant un projet d’aménagement particulier aux lieux-dits « Peckebierg » et « Haupertskreuz » à Weiler-la-Tour, présenté par la société de droit allemand … GmbH, tout en proposant de faire compléter le dossier par des indications relatives à l’exécution de l’ensemble en plusieurs phases de réalisation distinctes, ainsi qu’à l’application du système de circulation publique à l’intérieur du futur lotissement. Lors de sa séance publique du 3 novembre 1999, le même conseil communal rejeta comme non fondée l’objection présentée contre ledit projet par les époux .….. et procéda à l’adoption définitive du plan directeur prévisé. Les époux …… ont introduit une réclamation à l’encontre de cette délibération auprès du ministre de l’Intérieur par courrier du 8 décembre 1999.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 juin 2000, et inscrite sous le numéro 12040 du rôle, les époux …… ont fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision prévisée du conseil communal du 3 novembre 1999, ainsi que de la décision implicite de refus de la part du ministre de l’Intérieur de faire droit à leur réclamation introduite par courrier du 8 décembre 1999.

Par décision du 19 juin 2000, le ministre de l’Intérieur a explicitement rejeté la réclamation des époux …… comme étant non fondée et approuvé pour le surplus la délibération prévisée du conseil communal de Weiler-la-Tour du 3 novembre 1999 portant adoption définitive du plan directeur du projet d’aménagement particulier concerné.

Concernant partie des mêmes terrains situés aux lieux-dits « Haupertskreuz » et « Peckebierg », le bureau d’architectes xxx, pour le compte de l’association momentanée… et … présenta un plan d’aménagement particulier détaillé à la commune, lequel fut adopté provisoirement par le conseil communal lors de sa séance du 18 juillet 2002.

Par courrier de leur mandataire datant du 19 août 2002, les époux …… ont introduit une réclamation à l’encontre de cette délibération. Le conseil communal décida cependant lors de sa séance du 5 septembre 2002 d’adopter définitivement le PAP en question sans autre modification.

Les époux …… ont alors porté leurs doléances devant le ministre de l’Intérieur par courrier de leur mandataire datant du 1er octobre 2002. Celui-ci, par décision datant du 3 juin 2003, a approuvé sur base de l’article 9 de la loi modifiée du 12 mai 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes la délibération du conseil communal du 5 septembre 2002 portant adoption définitive du PAP concerné, tout en rejetant comme étant non fondée la réclamation présentée par les époux …….

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 septembre 2003 et inscrit sous le numéro 16985 du rôle, les époux …… ont alors fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision d’adoption définitive par le conseil communal du PAP datant du 5 septembre 2002, de la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur ci-avant visée du 3 juin 2003, ainsi que de la décision du même ministre rejetant la réclamation par eux portée devant lui.

Les griefs formulés par les demandeurs dans le cadre de ces deux recours inscrits sous les numéros du rôle respectifs 12040 et 16985 étant à chaque fois entrevus à partir de leur exploitation agricole sise à Weiler-la-Tour, au lieu-dit « In der Leffelsgasse » portant les numéros cadastraux 102/1136, 103, 104, 493/1978, 495/1979, 496/1980, 497/1981, 498/1982, 499/1983 et 500/1984, ainsi qu’en leur qualité de propriétaires de terrains voisins de ceux concernés par les actes respectivement déférés, lesquels poursuivent par ailleurs une finalité urbanistique s’inscrivant dans un seul et même cadre, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de joindre les deux recours et d’y statuer par un seul jugement.

Il y a lieu de constater liminairement que le plan directeur concernant le PAP des lieux-dits « Peckebierg » et « Beim Haupertskreuz » faisant l’objet du recours inscrit sous le numéro 12040 du rôle a eu pour finalité, tel que son nom l’indique, d’arrêter des lignes directrices destinées à guider l’établissement détaillé ultérieur d’un projet d’aménagement particulier proprement dit, en ce sens que ce plan directeur traduit la vision urbanistique préconisée par les autorités communales par rapport à la partie du territoire concerné, sans pour autant revêtir directement la nature juridique d’un plan d’aménagement particulier. En effet, tel que concrètement illustré en l’espèce, le plan d’aménagement particulier proprement dit concernant les terrains couverts par le plan directeur litigieux, n’a juridiquement pris corps qu’à partir de la présentation d’un projet d’aménagement particulier détaillé présenté en conformité avec l’article 2 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée.

Dans la mesure où le conseil communal a en l’espèce procédé à l’approbation d’un PAP détaillé pris en exécution du plan directeur déféré à travers le recours inscrit sous le numéro 12040 du rôle, lequel se trouve également déféré au tribunal à travers le recours inscrit sous le numéro 16895 du rôle, il y a dès lors lieu de considérer le recours inscrit sous le numéro 12040 du rôle comme étant devenu sans objet, sans qu’il y ait lieu d’examiner plus en avant la question du principe même de la compétence du tribunal pour connaître des actes déférés à travers ledit recours entrevu à partir de leur nature juridique spécifique, ni a fortiori celle de sa recevabilité sous d’autres aspects vu notamment l’absence de décision ministérielle à l’époque de son introduction.

Quant au recours inscrit sous le numéro 16985 du rôle, les demandeurs font valoir ce qui suit :

1. Ils rappellent d’abord que le Fonds du logement prévoirait la construction d’un lotissement de logements à caractère social sur le lieu dit « Auf den Maessen », jouxtant le côté droit de leur exploitation, tandis que le PAP litigieux proposerait sur le côté gauche 105 terrains à bâtir, sur lesquels devraient être édifiées 37 maison isolées, 36 maisons jumelées et 32 maisons en bande, de sorte qu’il en résulterait un encadrement total de leur propriété rendant impossible toute possibilité d’extension et de développement de leur exploitation agricole.

2. Ils relèvent à cet égard qu’en tant qu’agriculteurs ils vivent des revenus de leur exploitation, qu’ils ont procédé à d’importants investissements notamment en matière de production laitière afin que leur entreprise soit viable et rentable à l’avenir et afin que sa continuité soit assurée. Ils font état à cet égard de leur crainte de voir leur exploitation confinée dans un espace « urbanisé », de manière à devoir faire face à des problèmes d’exploitation, telles que des difficultés d’accès et de passage avec les machines agricoles et que compte tenu de la conception du lotissement en question et de la proximité des habitations projetées, il serait d’ores et déjà prévisible que leurs futurs occupants ne tarderaient pas à se plaindre des nuisances sonores, olfactives et autres engendrées par une exploitation agricole qui se trouvera du fait du projet litigieux en pleine agglomération. Ils font valoir en outre que s’ils devaient par voie de conséquence en arriver à devoir abandonner leur exploitation pour les raisons ci-avant exposées, la vente de leurs terrains serait d’autant plus difficile en raison de leur enclavement.

3. Les demandeurs font valoir ensuite que la réalisation des constructions prévues par le PAP litigieux aurait des conséquences désastreuses sur l’urbanisation de l’agglomération de Weiler-la-Tour, notamment en ce qui concerne la régulation de la circulation, étant donné que contrairement à ce que l’on pourrait attendre d’un plan directeur, suivi d’un PAP, cette question n’aurait pas été traitée convenablement et n’aurait surtout pas bénéficié d’une étude d’ensemble. Ils signalent plus particulièrement à cet égard qu’il serait d’ores et déjà annoncé que les voies d’accès prévues ne permettraient pas une évacuation fluide et sécurisée du traffic routier en cas de lotissement ultérieur des terrains se situant au sud de la propriété.

4. Les demandeurs poursuivent en expliquant que le ministre de l’Intérieur aurait parfaitement compris le problème, étant donné que par courrier du 19 juin 2000, lors de l’approbation du plan directeur adopté préalablement au PAP litigieux, il a énoncé qu’« en vue d’une urbanisation convenable, le cas échéant des terrains litigieux, il importe néanmoins de garantir d’ores et déjà un accès vers le fonds …. Par conséquent, une emprise de quelques 10 mètres pour l’aménagement dudit accès carrossable devrait être réservée à l’extrémité sud-est du projet. » Ils reprochent ainsi au ministre de l’Intérieur d’avoir changé d’avis sur ce point ainsi qu’aux autorités communales de ne pas en avoir tenu compte, étant donné qu’un examen des plans au bout de la rue n° 7 révélerait uniquement un espace réservé pour une rue vers un éventuel lotissement et qu’il conviendrait de souligner que la rue n° 7 ainsi désignée présente une largeur de 4,5 mètres seulement. Estimant qu’un plan d’aménagement particulier devrait résoudre en lui-même toutes les difficultés que sa réalisation pose et qu’il ne pourrait laisser des difficultés irrésolues, ils arrivent à la conclusion que le PAP litigieux ne serait pas satisfaisant en l’état, étant donné qu’il ne proposerait pas d’issue concrète aux problèmes par eux soulevés et entrevus préalablement par le ministre lui-même.

5. Les demandeurs font valoir finalement que les plans déposés à l’appui du PAP litigieux ne seraient pas complets et ne comporteraient pas tous les renseignements requis par la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, de sorte que les décisions déférées devraient encore encourir l’annulation de ce chef.

Le délégué du Gouvernement rétorque que les risques invoqués par les demandeurs à l’appui de leur recours seraient purement hypothétiques, voire invraisemblables. Il relève que l’exploitation agricole des époux …… ne serait pas la seule en activité à Weiler-la-Tour et que les autres exploitations seraient situées en plein centre du tissu villageois, à proximité immédiate d’habitations, sans qu’il ne soit établi qu’elles soient de quelque manière entravées ou gênées dans leurs activités par des réclamations de la part de leurs voisins.

Quant aux considérations relatives à une future urbanisation des terrains situés au sud de l’exploitation des demandeurs, le représentant étatique estime qu’elles seraient purement spéculatives, étant donné que ces terrains sont classés en zone agricole, impropres à toute urbanisation, et que ces mêmes terrains, appartenant aux demandeurs, se prêteraient en revanche parfaitement à une extension de leur exploitation agricole, de sorte que leur crainte exprimée dans ce cadre serait dépourvue de toute pertinence.

Il relève ensuite que contrairement à ce qui est énoncé dans la requête, il n’existerait aucune décision du ministre de l’Intérieur portant la date du 16 juin 2003 rejetant leur réclamation à l’encontre de la décision du conseil communal également déférée du 5 septembre 2002 et que la seule pièce portant cette date et émanant du ministre de l’Intérieur serait un courrier transmettant aux demandeurs copie de la décision ministérielle du 3 juin 2003 relative au projet actuellement critiqué. S’agissant d’un simple courrier d’information, il estime qu’il ne serait pas susceptible de faire l’objet d’un recours.

Quant aux critiques des demandeurs basées sur ce que le projet de lotissement entraverait et enclaverait leur exploitation agricole, le délégué du Gouvernement fait valoir que les demandeurs omettraient de préciser leur moyen au regard des 5 catégories d’ouverture d’un recours en annulation prévues en matière d’actes à caractère réglementaire, à savoir l’incompétence, l’excès et le détournement de pouvoir ou la violation de la loi ou la violation des formes destinées à protéger les intérêts privés. Il soulève à ce titre l’exceptio obscuri libelli pour conclure à l’annulation de la requête introductive d’instance.

A titre subsidiaire, le délégué du Gouvernement conclut au rejet de l’argumentation proposée par les demandeurs en faisant valoir que leur exploitation actuelle est située immédiatement en bordure du CR 132 et qu’ils possèdent sur les côtés sud et sud-est d’importants terrains classés en zone agricole susceptibles d’accueillir une hypothétique extension de leur exploitation, de sorte que la mise en péril d’un éventuel développement de leur exploitation agricole alléguée dans le cadre du recours sous examen laisserait d’être établie. Quant à des éventuels risques de trouble de voisinage, il estime qu’ils relèveraient des juridictions civiles et ne sauraient justifier un refus d’approbation par l’autorité de tutelle.

Concernant ensuite le moyen fondé sur les conséquences sur l’urbanisation de l’agglomération de Weiler-la-Tour et les problèmes de circulation qu’engendrerait le projet litigieux, le représentant étatique estime qu’il s’agirait de considérations, d’ailleurs non autrement justifiées, totalement étrangères aux causes d’ouverture d’un recours contre des actes réglementaires et que les demandeurs n’auraient par ailleurs aucun intérêt personnel spécifique, distinct de celui de l’ensemble des habitants de Weiler-la-Tour, de se préoccuper de ces problèmes, si ce n’étaient, une fois de plus, les craintes exprimées concernant un lotissement hypothétique ultérieur de leur terrain.

Quant à la décision du ministre de l’Intérieur datée du 19 juin 2000 invoquée par les demandeurs pour conclure à l’existence d’un droit dans leur chef de se voir accorder un accès suffisant d’une emprise ne pouvant être inférieure à 10 mètres à leur terrain actuellement sis en zone agricole, le délégué du Gouvernement relève que l’acte en question a pour objet un plan directeur, lequel constituerait un document de planification non prévu par la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée et qui, en tant que tel, n’entraînerait pas de contrainte légale, mais constituerait un document purement politique retenant les choix urbanistiques des autorités communales compétentes en la matière sans que ce choix ne puisse pour autant faire l’objet de mesures coercitives. Il signale en outre que d’un point de vue strictement juridique, la soumission du plan directeur à la procédure prévue par la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée et à l’approbation ministérielle serait superfétatoire, un tel plan directeur pouvant se contenter d’une délibération et d’un vote purement politique du conseil communal. Il en déduit que ledit plan directeur, per se, ne saurait générer un quelconque droit, étant donné qu’il devrait nécessairement et impérativement être complété par un plan d’aménagement particulier pris sur base de ladite loi de 1937.

Il estime pour le surplus que le ministre de l’Intérieur ne saurait, sans outre-passer ses compétences en tant qu’autorité de tutelle, imposer par voie de décision ministérielle une largeur déterminée à une voie définie, que ce soit dans le cadre d’un plan directeur ou dans celui d’un plan d’aménagement particulier, de sorte que les demandeurs ne sauraient en tout état de cause se prévaloir d’un avis afférent du ministre, émis dans un cadre juridique différent, pour réclamer actuellement l’annulation des actes litigieux.

Il relève enfin que le PAP litigieux aurait tenu compte de la recommandation invoquée en prévoyant un accès direct vers les fonds des demandeurs par le biais d’un espace réservé permettant une chaussée de 4,75 mètres de largeur, pour signaler que le seul point litigieux serait dès lors celui de la largeur affectée à l’accès à un hypothétique futur lotissement, susceptible par ailleurs d’être desservi par d’autres accès.

Il signale ensuite que le ministre a approuvé purement et simplement le PAP litigieux en son intégralité et rejeté les réclamations présentées notamment par les époux …… comme étant non fondées, tout en ayant indiqué certaines solutions aux problèmes d’accès soulevés par ces derniers au titre de la motivation de sa décision de rejet de leur réclamation et non, tel qu’allégué en cause, en tant que solution conditionnant son approbation.

Il conclut finalement au rejet de l’affirmation, non autrement précisée et justifiée, des demandeurs que les plans déposés à l’appui du PAP litigieux ne seraient pas complets et ne comporteraient pas tous les renseignements requis par la loi en la matière.

La commune de Weiler-la-Tour se rallie en substance aux développements du délégué du Gouvernement et conclut au rejet du recours comme étant non fondé.

Il y a lieu de relever liminairement qu’il se dégage clairement du contenu de la requête introductive d’instance ainsi que du mémoire en réplique fourni en cause que les demandeurs, en déférant au tribunal le courrier du ministre de l’Intérieur du 16 juin 2003, ont entendu soumettre au contrôle contentieux la décision proprement dite du ministre de l’Intérieur ainsi portée à leur connaissance et portant la date du 3 juin 2003, ceci à la fois quant à son volet relatif à l’approbation de la délibération du conseil communal du 5 septembre 2002 et quant à son volet relatif au rejet de la réclamation par eux introduite à l’encontre de cette délibération du 5 septembre 2002.

La décision du conseil communal portant adoption définitive du projet d’aménagement particulier litigieux ainsi que la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur ainsi que celle rejetant la réclamation introduite par les époux …… dans le cadre de la procédure prévue par l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937, en ce que ces actes s’inscrivent dans le cadre de la procédure d’adoption des plans d’aménagement, participent au caractère réglementaire de ladite procédure et sont, en tant que telles susceptibles d’un recours en annulation devant le juge administratif sur base de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif.

Aucun recours au fond n’étant prévu en matière réglementaire, le tribunal n’est dès lors pas compétent pour connaître du recours principal en réformation. Les demandeurs justifiant d’un intérêt à agir suffisant en l’espèce eu égard à la proximité directe du lotissement projeté par rapport à leur propriété, le recours en annulation, introduit à titre subsidiaire, est recevable pour avoir été par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond, il y a lieu de relever en outre que le recours exercé contre un acte administratif à caractère réglementaire soumet au juge administratif le seul contrôle des aspects de légalité tirés de l’incompétence, de la violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés ou encore de l’excès ou du détournement de pouvoir, à l’exclusion des considérations de l’opportunité de la mesure réglementaire prise par les autorités politiques compétentes, de sorte que le juge administratif ne saurait se livrer à une appréciation du bien-fondé de la pondération relative que le pouvoir réglementaire attribue aux considérations d’intérêt général par rapport aux intérêts des particuliers qui nécessairement sont susceptibles d’être atteints par une mesure d’ordre réglementaire. (cf.

Cour adm. 29.11.2001, n° 13357C du rôle, Pas. adm. 2003, V° Actes réglementaires, n° 13 et 14, p. 32) Le premier moyen des demandeurs consiste à soutenir en substance que la réalisation du lotissement faisant l’objet du PAP litigieux compromettrait l’avenir de leur exploitation agricole sous différents points de vue, dont notamment celui spécialement mis en évidence en termes de plaidoiries basé sur une insuffisance d’accès pour desservir utilement leurs terrains agricoles.

Force est de constater à cet égard qu’il se dégage des pièces versées au dossier et des explications fournies en cause qu’à l’heure actuelle les pâtures faisant partie de l’exploitation agricole des demandeurs est accessible moyennant un chemin rural existant, longeant l’église à partir de la rue de Hassel, accusant une largeur approximative de 4 mètres, sans pour autant être desservie par une voie de dégagement directe à partir de l’exploitation même.

Dans la mesure où la situation actuelle au niveau de l’accessibilité de ces terrains n’est pas autrement compromise par l’effet du PAP litigieux et que celui-ci a de surcroît réservé un espace pour une rue vers un éventuel futur lotissement du côté de la propriété ……, il y a lieu de constater que le PAP litigieux, entrevu à partir de la situation de fait ayant prévalu à la date de la prise des actes litigieux, ne saurait encourir un reproche afférent qui s’inscrirait dans le cadre de l’un des cas d’ouverture prévus par la loi en matière de contentieux administratif relatif à des actes administratifs à caractère réglementaire.

Cette conclusion ne saurait être énervée par les considérations d’ordre purement hypothétique avancées en cause par les demandeurs relatives à la mise en place éventuelle de logements à caractère social sur les terrains jouxtant leur exploitation agricole de l’autre côté que le PAP litigieux faute de concrétisation suffisante, voire encore d’incidence directe sur leur situation actuelle. La même conclusion s’impose relativement à d’éventuels projets d’extension de l’exploitation agricole existante, lesquels, faute d’accuser à l’heure actuelle le moindre début de concrétisation, ne sauraient être utilement pris en considération pour mettre en question la légalité des actes déférés.

Concernant ensuite les éventuels problèmes de voisinage qui pourraient, le cas échéant, se poser à l’avenir, force est encore de constater que ces problèmes hypothétiques, dussent-ils se réaliser, ne sont par pour autant de nature à énerver de façon actuelle la légalité des actes déférés.

Il se dégage des considérations qui précèdent que globalement considéré, le moyen sous examen, s’il ne doit certes pas être écarté pour cause de libellé obscur, laisse néanmoins d’être fondé dans l’ensemble de ses aspects passés sous revue.

Les demandeurs font état ensuite de considérations tenant aux conséquences que le PAP litigieux aurait sur l’urbanisation de l’agglomération de Weiler-la-Tour, notamment en ce qui concerne la régulation de la circulation. Ils critiquent plus particulièrement à cet égard l’absence d’établissement d’une étude afférente d’ensemble.

Force est de constater que ces considérations d’ordre général, non autrement appuyées sur des pièces justificatives ou autres éléments concrets, au-delà de l’intérêt personnel et direct des demandeurs, manquent encore de la précision requise pour énerver utilement la régularité des actes déférés.

Quant au moyen basé sur la considération que le ministre de l’Intérieur, dans le cadre de l’approbation du plan directeur à la base du PAP litigieux, avait entrevu la nécessité de garantir un accès vers leur fonds en suggérant une emprise de quelques 10 mètres pour l’aménagement dudit accès carrossable à l’extrémité sud-est du projet, force est encore de constater que s’agissant d’une simple proposition non retenue dans les mêmes termes au niveau du PAP définitif actuellement litigieux, aucun droit ne saurait en être dégagé dans le chef des demandeurs. Par ailleurs, tel que dégagé ci-avant, l’accessibilité actuelle de l’exploitation agricole des demandeurs ne se trouve pas compromise par l’effet du PAP litigieux, de sorte qu’aucune difficulté nouvellement créée qui demanderait résolution n’est posée par les actes litigieux, lesquels ne sauraient partant encourir utilement de reproche à cet égard dans le cadre du pouvoir juridictionnel de vérification propre à la matière. Au contraire, ledit PAP, en prévoyant une voie desservante de quelque 4,5 mètres de largeur longée d’une bande de verdure accusant également une largeur de 4 mètres, revêtant une configuration identique à celle des autres voies du lotissement concerné, vient plutôt améliorer la question de l’accessibilité actuelle des terrains faisant partie de l’exploitation des demandeurs.

Les demandeurs reprochent enfin aux plans déposés à l’appui du PAP litigieux de ne pas être complets et de ne pas comporter tous les renseignements requis par la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée.

Force est de constater que ces critiques non autrement spécifiées manquent de la précision requise pour permettre au tribunal de vérifier utilement leur bien-fondé. En effet, tant le délégué du Gouvernement que le mandataire de la commune ayant précisé dans leur mémoires en duplique que c’est seulement pour des raisons pratiques que le dossier administratif intégral n’a pas été versé au dossier contentieux, il aurait appartenu aux demandeurs, dans le cadre de l’instruction du dossier, voire préalablement à l’introduction du recours, de prendre inspection de ces plans et de formuler le cas échéant des critiques concrètes afférentes avec une précision suffisante pour permettre au tribunal d’en apprécier la portée, étant entendu qu’ils n’ont fait état à aucun moment d’un éventuel refus de se voir communiquer les plans faisant partie du dossier administratif.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous examen laisse d’être fondé, sans qu’il y ait lieu d’ordonner la production de l’ensemble des plans déposés à l’appui du PAP litigieux.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

prononce la jonction des recours inscrits sous les numéros du rôle respectifs 12040 et 16985 ;

déclare le recours inscrit sous le numéro 12040 sans objet ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation inscrit sous le numéro 16985 ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation inscrit sous le numéro 16985 du rôle en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 avril 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 12


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : s12040,16985
Date de la décision : 28/04/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-04-28;s12040.16985 ?

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