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28/04/2004 | LUXEMBOURG | N°17270

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 avril 2004, 17270


Tribunal administratif N° 17270 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 décembre 2003 Audience publique du 28 avril 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17270 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 décembre 2003 par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo) de nationalité serbo-monténégrine demeurant à

L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 23 septembre 2003...

Tribunal administratif N° 17270 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 décembre 2003 Audience publique du 28 avril 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17270 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 décembre 2003 par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo) de nationalité serbo-monténégrine demeurant à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 23 septembre 2003 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondé, ainsi que d’une décision confirmative du 12 décembre 2003 prise par ledit ministre suite à un recours gracieux introduit par le demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 février 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH dans sa plaidoirie à l’audience publique du 19 avril 2004.

Le 4 février 2003, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le 25 février 2003 et le 17 juin 2003, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 23 septembre 2003, lui envoyée par courrier recommandé le 26 septembre 2003, le ministre de la Justice l’informa de ce que sa demande avait été refusée comme non fondée au motif qu’il n’invoquerait aucune crainte justifiée de persécution en raison de ses opinions politiques, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social.

Suite à un recours gracieux, formulé par le mandataire de Monsieur …, suivant un courrier du 28 octobre 2003 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre de la Justice confirma le 12 novembre 2003 sa décision initiale du 23 septembre 2003.

Le 10 décembre 2003, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation contre les décisions ministérielles du 23 septembre 2003 et du 12 novembre 2003.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le recours en réformation, ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’il serait de confession musulmane, Albanais du Kosovo et d’origine serbe de par sa mère et parlant le serbo-

croate et l’albanais. Il relate qu’étant donné que leur maison familiale aurait été miraculeusement épargnée pendant la guerre, leurs voisins albanais auraient commencé à nourrir des suspicions et de la rancœur à son égard et à l’égard des membres de sa famille, d’autant plus que sa mère serait d’origine et de nationalité serbe, de sorte que toute sa famille aurait été soupçonnée de collaboration avec le pouvoir serbe. Il fait encore état de l’assassinat de son père, qui aurait eu lieu le 5 janvier 2003, à cause de son mariage avec une femme serbe. Il continue que la plainte déposée devant les autorités de l’UNMIK serait restée jusqu’à ce jour sans aucune suite et que ces mêmes autorités lui auraient conseillé de quitter le pays.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte qu’il serait à débouter de son recours.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Dans le cadre de l’évaluation de la situation personnelle du demandeur d’asile, l’examen fait par le tribunal ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il apprécie également la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.

En effet en ce qui concerne les circonstances du décès du père du demandeur il résulte d’une pièce versée par la partie publique que le père de Monsieur Illir …, à savoir, Monsieur Djevat …, est décédé le 10 mars 2002 suite à un accident de voiture qui a dérapé et qui l’a renversé lorsqu’il attendait à une station de bus. En effet ces renseignements émanent de Monsieur … , délégué du ministère des Affaires étrangères de Luxembourg au Kosovo et lequel a recueilli ces informations suite à un déplacement de son bureau au village de Lusht pour rencontrer la famille de Monsieur …. Cette information est de nature à ébranler sérieusement la véracité et la crédibilité des déclarations du demandeur notamment en ce qui concerne les circonstances du décès de son père.

Pour le surplus même à admettre la véracité des autres déclarations faites par le demandeur lors de ses auditions, il y a lieu de retenir que leur examen ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er , section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, les faits allégués par le demandeur relativement à des agressions et menaces qu’il aurait dû subir à cause du mariage mixte de ses parents, à les supposer vrais, ne dénotent pas une gravité telle qu’ils établissent à l’heure actuelle un risque de persécution dans le chef du demandeur au point que sa vie lui serait intolérable dans son pays d’origine.

Il résulte des développements qui précèdent que le demandeur reste en défaut d’établir une persécution ou un risque de persécution au sens de la Convention de Genève, de manière que le recours sous analyse est à rejeter comme n’étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 avril 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17270
Date de la décision : 28/04/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-04-28;17270 ?

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