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26/04/2004 | LUXEMBOURG | N°17107

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 avril 2004, 17107


Tribunal administratif N° 17107 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 octobre 2003 Audience publique du 26 avril 2004 Recours formé par la société à responsabilité limitée X s.à r.l, …, contre une décision du ministre des Travaux Publics en matière de marchés publics

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17107 du rôle et déposée le 30 octobre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc KERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée X s.

à r.l, établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annul...

Tribunal administratif N° 17107 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 octobre 2003 Audience publique du 26 avril 2004 Recours formé par la société à responsabilité limitée X s.à r.l, …, contre une décision du ministre des Travaux Publics en matière de marchés publics

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17107 du rôle et déposée le 30 octobre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc KERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée X s.à r.l, établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du 19 septembre 2003 du ministre des Travaux Publics l’informant que son offre faite dans le cadre de la soumission publique du 10 juin 2003 concernant des travaux de curage de fosses à exécuter le long de la voirie étatique pour le compte de l’Administration des Ponts et Chaussées a été refusée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé en date du 26 janvier 2003 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 février 2004 par Maître Marc KERGER au nom de la requérante ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé en date du 19 mars 2004 ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc KERGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 19 avril 2004.

Par dossier daté du 5 juin 2003, la société à responsabilité limitée X s.à r.l, préqualifiée, ci-après désignée par « la société X », participa à la soumission publique de l’administration des Ponts et Chaussées pour des travaux de curage de fossés à exécuter le long de la voirie de l’Etat.

Par arrêté du 27 août 2003, le ministre des Travaux publics attribua le marché relatif aux travaux de curage de fossés à exécuter le long de la voirie de l’Etat à la société Y s.a.

Par courrier du 28 août 2003, la société X s’adressa au président de la Commission des soumissions auprès du ministère des Travaux Publics pour s’opposer à l’attribution du marché à l’un de ses concurrents tant qu’elle n’aura pas pu effectuer les essais exigés par l’administration des Ponts et Chaussés.

Par courrier du 19 septembre 2003, la société X relança le président de la Commission des soumissions auprès du ministère des Travaux Publics et exigea une prise de position dans les plus brefs délais.

Par courrier daté du même jour, notifié à la société X le 30 septembre 2003, l’administrateur général du ministère des Travaux Publics prit position par rapport aux courriers de la requérante et l’informa au nom du ministre des Travaux Publics que l’offre qu’elle avait remise dans le cadre de la soumission publique relative au susdit marché avait été écartée. Ce courrier s’énonce comme suit :

« La soumission a été ouverte le 5 juin 2003.

-

En théorie et conformément à l’ancienne (et à la nouvelle législation) le marché aurait dû être adjugé dans les deux mois après l’ouverture.

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Comme l’administration avait eu des doutes quant à votre équipement à mettre en œuvre pour l’exécution elle a entamé le 11 juillet 2003 des pourparlers avec votre firme. Normalement la date de l’ouverture des offres aurait dû être la date-clé pour la preuve de justification de votre capacité technique.

-

Je constate donc que contrairement aux pratiques et contrairement au principe de l’équité de traitement à un même pied d’égalité, un certain délai vous a été accordé pour rapporter la preuve de la disponibilité de l’engin en cause (possibilité de location).

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Le dossier de la proposition d’adjudication en faveur du 2e classé a été présenté le 5 août 2003 par la filière administrative et est parvenu ultérieurement à mes services.

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C’est seulement le 26 août 2003 que vous avez pris contact avec l’administration des Ponts et Chaussées pour présenter l’engin.

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L’adjudication s’est faite le 27 août 2003 au profit de votre concurrent et a été visée favorablement par le Contrôle Financier.

-

Je saisirai la Commission des Soumissions dont la nomination des membres se fera en date d’aujourd’hui par le Conseil de Gouvernement sur base de la loi du 30 juin 2003, sur les marchés publics, mise en vigueur le 1er septembre 2003, de votre réclamation. Il appartient à ladite Commission de s’exprimer, par voie d’avis sur le bien-fondé du refus de votre offre. (…) ».

Par courrier daté du 7 octobre 2003, l’ingénieur-chef de division de la division des services régionaux de la voirie – Luxembourg, de l’administration des Ponts et Chaussées, a encore informé la société X des motifs justifiant le rejet de son offre.

Par requête déposée le 30 octobre 2003, la société X a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision de refus datée du 19 septembre 2003.

Elle critique les motifs avancés par le ministère des Travaux Publics pour écarter son offre et conteste le fait qu’elle aurait complété son dossier après dépôt de celui-ci, le dossier tel que déposé ayant été complet « à la lumière du cahier spécial de charge et de l’offre économiquement la plus avantageuse ». Elle estime par ailleurs que son offre aurait répondu à toutes les prescriptions du cahier spécial des charges, ce qui aurait d’ailleurs été confirmé par les tests exigés en violation de la loi par l’administration des Ponts et Chaussées.

Elle relève à ce sujet que l’issue de ces tests, imposés de manière illégale, ne saurait justifier le rejet de son offre.

Elle conteste encore tout dépassement du délai d’adjudication et estime qu’en tout état de cause un éventuel dépassement de ce délai, prescrit en faveur des soumissionnaires, ne saurait justifier le rejet de son offre.

Le délégué du Gouvernement pour sa part soulève l’irrecevabilité du recours en réformation formulé à titre principal.

En ce qui concerne le fond de l’affaire, il estime que le ministre aurait non seulement fait une saine application de la loi, mais relève encore que l’offre écartée n’était pas conforme aux exigences du cahier spécial des charges, de sorte que la requérante serait à débouter de son recours.

Avant de procéder à l’analyse plus en avant de l’affaire, le tribunal est appelé à examiner le moyen soulevé à l’audience par le délégué du Gouvernement et relatif à la nécessité de mettre en intervention la société Y s.a. en tant que tiers intéressé.

La société X conteste une telle nécessité, en faisant plaider que l’annulation éventuelle de l’attribution du marché à la société Y s.a. ne saurait avoir de conséquences effectives pour cette dernière, les travaux attribués à Y s.a. ayant tous été effectués. Elle expose que dans le cas d’espèce la seule conséquence d’une éventuelle annulation résiderait dans la possibilité lui ouverte de réclamer, en tant que soumissionnaire écarté à tort, des dommages et intérêts devant les juridictions civiles, sans pour autant cependant pouvoir remettre en cause les travaux d’ores et déjà réalisés par Y s.a., de sorte que la mise en intervention de celle-ci ne s’imposerait pas.

Force est de constater que la requérante, en querellant le courrier du ministère des Travaux Publics l’informant du rejet de son offre, recherche en fait l’annulation de la décision ayant attribué le marché à la société Y s.a., décision qui a implicitement mais nécessairement écarté X de ce même marché. Or la décision attribuant le marché à Y ne s’est pas matérialisée autrement à l’égard de la requérante que par la lettre attaquée du 19 septembre 2003. En effet, c’est par ce biais que la requérante, qui ne reçut pas notification de l’arrêté ministériel d’adjudication du 27 août 2003, a été informée de la décision de rejet de son offre.

Par conséquent, en attaquant la lettre du 19 septembre 2003, révélatrice de l’existence de la décision d’adjudication valant rejet implicite de son offre, la requérante a nécessairement visé la décision ministérielle du 27 août 2003.

Au-delà du fait que l’intérêt à intervenir de la société Y s.a., qui a obtenu l’attribution du marché litigieux, ne saurait être limité au seul cas de figure où la réalisation effective des travaux lui confiés risquerait de lui échapper, alors que la société Y s.a. peut avoir intérêt à défendre sa position et le marché lui attribué, ne serait-ce que pour des raisons d’image commerciale, force est encore de constater que le dossier de soumission indique que le début des travaux dont question « compte à partir du jour de la notification à l’adjudicataire de l’approbation de son offre » et que « le délai d’exécution est de dix-huit mois ».

Il en résulte qu’il n’est pas établi en l’état actuel du dossier que les travaux confiés à la société Y s.a., d’une durée de dix-huit mois, qui ont au plus tôt pu débuter le 27 août 2003, date de l’arrêté d’adjudication, étaient achevés à la date des plaidoiries.

Il en résulte que la société Y s.a. a un intérêt certain à intervenir dans la présente instance.

Aux termes de l’article 4 alinéa 4 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, lorsque le demandeur a omis de signifier son recours à un tiers intéressé, le tribunal dispose de la faculté d’ordonner leur mise en intervention, notamment eu égard au fait que le tribunal peut estimer qu’une partie est intéressée et doit figurer dans l’instance (cf. Proposition de loi n° 4326 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, Travaux parlementaires, session ordinaire 1996-1997, p.14).

Il y a dès lors lieu d’ordonner avant tout autre progrès en cause et sous réserve de tous droits et moyens des parties la mise en intervention de la société Y s.a. à la présente instance.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, avant tout autre progrès en cause, tous droits et moyens des parties étant réservés, ordonne à la requérante de mettre en intervention la société Y s.a.;

réserve les frais ;

refixe l’affaire à l’audience du 12 juillet 2004 pour fixation ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 avril 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17107
Date de la décision : 26/04/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-04-26;17107 ?

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