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31/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17480a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 31 mars 2004, 17480a


Tribunal administratif N° 17480a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 janvier 2004 Audience publique du 31 mars 2004 Recours formé par Monsieur PP, … (F) contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en présence de la société anonyme … S.A., … ainsi que de 1) … et 11 autres consorts en matière de délégations du personnel

JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 17480 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2004 par Maître Marco FRITSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de

l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur PP … , demeurant à F-… , tendant ...

Tribunal administratif N° 17480a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 janvier 2004 Audience publique du 31 mars 2004 Recours formé par Monsieur PP, … (F) contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en présence de la société anonyme … S.A., … ainsi que de 1) … et 11 autres consorts en matière de délégations du personnel

JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 17480 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2004 par Maître Marco FRITSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur PP … , demeurant à F-… , tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, du 31 décembre 2003, en ce qu’il a déclaré non fondée sa contestation soulevée dans le cadre des élections pour la désignation des délégués du personnel organisées dans la société … S.A., établie à L-… , en date du 12 novembre 2003 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alec MEYER, du 16 janvier 2004, demeurant à Esch/Alzette, 106, rue de l’Alzette, portant signification de ce recours à la société anonyme … S.A. ;

Vu le calendrier fixé pour le dépôt des mémoires en réponse, en réplique et en duplique communiqué aux parties par la voie du greffe en date du 20 janvier 2004 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2004 ;

Vu le jugement avant dire droit du 13 février 2004 ayant ordonné avant tout autre progrès en cause à la partie demanderesse de mettre en intervention dans les meilleurs délais les autres candidats à l’élection des délégués du personnel dans la société anonyme … S.A. du 12 novembre 2003 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch, du 25 février 2004 portant signification du recours à Monsieur … Vu les exploits de l’huissier de justice Alec MEYER, demeurant à Esch/Alzette du 8 mars 2004 portant signification du recours à onze autres candidats restants ;

Vu le calendrier fixé pour le dépôt des mémoires complémentaires communiqué aux parties par la voie du greffe en date du 16 mars 2004 ;

Vu le mémoire de Maître Albert MORO, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mars 2004 pour compte de la société anonyme … S.A. ;

Vu le mémoire de Maître Marco FRITSCH déposé au greffe du tribunal administratif le 26 mars 2004 pour compte de Monsieur PP ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, Maître Frédéric KRIEG, en remplacement de Maître Marco FRITSCH, et Maître Albert MORO, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 29 mars 2004.

Le 12 novembre 2003, les élections pour la désignation des délégués du personnel de la société anonyme … S.A., désignée ci-après par « société … » ont été organisées au restaurant du personnel « … ».

Le 28 novembre 2003, Monsieur PP introduisit auprès du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, en application de l’article 39 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979 concernant les opérations électorales pour la désignation des délégués du personnel, une contestation relative à la régularité des opérations électorales ayant eu lieu en date du 12 novembre 2003.

Il souleva qu’au moment de sa présentation au bureau électoral, seul un assesseur et le président auraient été présents, alors qu’aux termes de l’article 15 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979, cité ci-avant, le bureau électoral doit comprendre un président et deux assesseurs.

Par une décision du 31 décembre 2003, le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, reçut la contestation de Monsieur … en la forme, mais l’a déclarée non fondée.

Monsieur …, en suivant à la lettre l’instruction sur les voies de recours figurant sur ladite décision directoriale, a fait introduire simultanément devant le tribunal administratif (n° 17480 du rôle) et devant la Cour administrative (n° 17483C du rôle) un recours contentieux tendant à la réformation de la décision directoriale pré visée du 31 décembre 2003.

Suivant arrêt du 12 février 2004, la Cour administrative s’est déclarée incompétente pour connaître du recours sous examen au motif « que la simple référence par l’article 40 (1) [de la loi modifiée du 18 mai 1979 portant réforme des délégations du personnel] au Conseil d’Etat comité du contentieux, statuant en dernière instance et comme juge du fond ne suffit pas pour établir que le directeur, en tant qu’organe rendant des décisions administratives susceptibles d’un recours en réformation, devrait de ce seul fait être considéré comme juridiction administrative du premier degré, de sorte que sa compétence se limite en vertu du principe de la séparation des pouvoirs dont sont l’expression les articles 84 à 95ter de la Constitution, à un simple pouvoir de décision administrative. » Par jugement du 13 février 2004 le tribunal s’est déclaré compétent pour connaître du recours en réformation introduit devant lui et, avant tout autre progrès en cause, a ordonné au demandeur de mettre en intervention tous les autres candidats aux élections ayant eu lieu au sein de la société … en date du 12 novembre 2003 en leur qualité de tiers intéressés, afin de leur permettre de déposer, le cas échéant, un mémoire et de conclure plus en avant dans la présente affaire.

Les tiers intéressés, ayant été mis en intervention suivant exploits d’huissier des 25 février 2004 et 8 mars 2004, n’ont pas déposé de mémoire dans la présente affaire.

Seule la société … a déposé un mémoire en date du 22 mars 2004. Suite à ce mémoire déposé par la société …, Monsieur PP a encore fait déposer un mémoire en date du 26 mars 2004 et le tribunal a repris l’affaire en délibéré à l’audience publique du 29 mars 2004.

Bien que les tiers intéressés, candidats aux élections du 12 novembre 2003, se soient vu signifier la requête introductive d’instance, ils n’ont pas comparu, aucun mémoire n’ayant été déposé en leurs noms, de sorte que conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le tribunal est amené à statuer suivant un jugement ayant les effets d’une décision juridictionnelle contradictoire à l’égard de toutes les parties.

Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Quant au fond, Monsieur … réexpose qu’au moment de sa présentation au bureau électoral, seul un assesseur et le président auraient été présents.

En se référant à un passage de la décision directoriale déférée en ce qu’il « ressort des débats que les membres du bureau auraient un témoignage écrit, datant du 9 décembre 2003, signé par eux, attestant de leur présence ininterrompue pendant la durée du scrutin dans le bureau où avait lieu le scrutin et qu’il serait prêt à venir témoigner personnellement », il soulève que cette « attestation » n’aurait jamais été communiquée aux parties, de sorte que lui-même n’aurait pas été en mesure de vérifier si les formes et mentions requises pour une attestation auraient été respectées, ni d’en connaître le contenu.

Il fait valoir que cette « prétendue attestation sur l’honneur », non versée au débat et pourtant prise en compte par le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines dans sa décision, aurait emporté la conviction de ce dernier et ce en dépit du non-respect du principe du contradictoire. Il est d’avis que ce seul fait suffirait à remettre en cause la légitimité de la décision litigieuse.

Il ajoute qu’il serait curieux de constater que Monsieur … , directeur de la société …, aurait reconnu lors des débats devant le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, l’absence de l’un des assesseurs, élément qui n’apparaîtrait cependant pas dans la décision litigieuse.

Ensuite il cite encore une fois le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en ce qu’il a relevé que « l’absence alléguée d’un des assesseurs s’explique par le fait que l’un des assesseurs se trouvait à l’entrée du bureau de vote pour filtrer la cadence d’entrée des électeurs ». Il fait valoir que cette explication, contrairement à ce qui apparaîtrait dans la décision, aurait été formellement contestée lors des débats par son représentant. Il estime qu’on pourrait en déduire qu’outre le fait qu’il s’agirait là d’un aveu de la part de Monsieur … quant à l’absence d’un des assesseurs, on pourrait en plus relever qu’en application des dispositions de l’article 16 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979 cité ci-avant, les assesseurs n’auraient pas pu recenser fidèlement les suffrages, si on admettait que l’un des deux assesseurs se trouvait à l’entrée du bureau électoral pour filtrer la cadence d’entrée des électeurs.

Enfin, il se réfère encore à deux décisions versées en cause, rendues par le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines datées respectivement des 30 décembre 2003 et 6 janvier 2004, dans lesquelles le directeur a reconnu la violation de l’article 15, paragraphe 1 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979, cité ci-avant dans des cas parallèles à celui sous analyse.

Le délégué du Gouvernement fait valoir que les moyens invoqués laisseraient d’être fondés.

La société … insiste sur le fait que le président et les deux assesseurs auraient été présents pendant toute la durée d’ouverture du bureau électoral. A ce propos il se réfère encore au procès-verbal des élections du 12 novembre 2003, signé par le président et les deux assesseurs. Quant à l’explication de Monsieur …, il fait valoir que celui-ci n’aurait jamais déclaré qu’un des assesseurs aurait quitté le bureau électoral mais qu’il se serait tenu à l’entrée du restaurant, non muni d’une porte d’entrée, pour réguler la cadence des électeurs au moment de leur entrée au bureau électoral. Enfin, elle estime que toutes les dispositions du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979, pris notamment en ses articles 17 et 22, auraient été respectées. Pour autant que de besoin, elle offre de prouver, par voie de témoignage, la présence des trois membres du bureau électoral pendant toute la durée d’ouverture du bureau électoral.

Monsieur … revient à charge en prenant appui sur une attestation testimoniale de Monsieur xxx, de laquelle il résulterait que seules deux personnes auraient été présentes dans le local qui faisait office de bureau électoral et auraient recensé les suffrages, tandis qu’une troisième personne se serait trouvée devant l’entrée du bureau sur une chaise. Il offre également de prouver cette version des faits par le témoignage de Monsieur xxxx. Il fait valoir qu’il n’appartiendrait pas à un assesseur de filtrer la cadence des électeurs au bureau électoral et qu’il serait dès lors manifeste que la surveillance des opérations électorales n’aurait pas été garantie par le bureau électoral pendant l’intégralité du scrutin.

En l’espèce, il est constant que le bureau électoral a été constitué, en conformité avec l’article 15, paragraphe 1 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979, précité, en comprenant un président et deux assesseurs.

Quant à l’absence de communication de l’écrit précité daté du 9 décembre 2003 émanant des membres du bureau électoral, force est de constater qu’il a été versé par la partie publique au cours de la présente procédure, de sorte que le principe du contradictoire a été observé.

Cet écrit, par lequel les membres du bureau électoral, à savoir le président et les deux assesseurs, affirment n’avoir quitté leur poste à aucun moment durant les heures d’ouverture (14°° - 16°°) du bureau électoral instauré à l’occasion des élections sociales du 12 novembre 2003, vaut comme commencement de preuve de la présence permanente des membres du bureau électoral.

A cela s’ajoute qu’il résulte des éléments du dossier produits aussi bien devant le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines qu’au cours de la procédure contentieuse que l’absence alléguée d’un assesseur s’explique par le fait que l’un des assesseurs se trouvait à l’entrée du bureau électoral pour filtrer la cadence des entrées des électeurs. Cette explication, en tant que telle, n’est à l’heure actuelle plus contestée par la partie demanderesse.

Quant au moyen soulevé de la part du demandeur que la présence d’un des deux assesseurs, à l’entrée du bureau électoral, l’aurait empêché de recenser fidèlement les suffrages, il convient de situer les exigences de forme prévues en la matière. L’article 16 du règlement grand-ducal modifié du 21 septembre 1979, en visant les membres du bureau électoral, n’exige pas que les trois membres du bureau électoral doivent recenser simultanément et collectivement les électeurs, d’autant plus que les articles suivants précisent la procédure du scrutin en indiquant clairement les différentes tâches à exécuter par les différents membres du bureau électoral. Ainsi, aux termes de l’article 17, l’un des assesseurs pointe le nom de l’électeur sur les listes alphabétiques et ensuite l’électeur reçoit des mains du président un bulletin électoral. Aux termes de l’article 18, l’électeur montre de nouveau au président du bureau électoral son bulletin replié régulièrement et le dépose dans l’urne. Au moment de la procédure du scrutin, le président remplit donc la fonction capitale du bureau électoral et ce n’est qu’au moment du dépouillement du scrutin qu’une intervention active des deux assesseurs est exigée, dans la mesure où il leur appartient de faire le recensement des suffrages. Etant donné qu’il est établi qu’un des deux assesseurs se tenait près de l’entrée du bureau électoral et que le président, ensemble avec le deuxième assesseur se tenaient à l’intérieur même du bureau électoral pour assurer le bon déroulement de la procédure du scrutin, le tribunal constate qu’en l’espèce les opérations électorales se sont déroulées de façon à rencontrer les exigences de forme prévues en la matière, de sorte que le moyen afférent est à rejeter comme étant non fondé. A cela s’ajoute que Monsieur … reste en défaut de soulever un quelconque élément concret permettant au tribunal de retenir dans son chef un préjudice éventuel résultant de la présence d’un des deux assesseurs près de l’entrée du bureau électoral.

En ce qui concerne les deux décisions de référence du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines des 30 décembre 2003 et 6 janvier 2004 invoquées par la partie demanderesse, force est de constater que les faits, à la base de ces deux décisions, sont différents par rapport aux faits actuellement soumis au tribunal, pour avoir trait à l’absence effective d’un ou même des deux assesseurs ayant quitté le bureau électoral. En effet dans la première décision, le directeur retient que « le bureau de vote n’était pas tout le temps au complet durant le déroulement du scrutin alors que les deux assesseurs, agents d’exploitation étaient souvent appelés pour la gestion des camions leurs confiés dans leurs bureaux ; qu’ainsi les deux assesseurs étaient même absents des espaces de temps assez long » et dans la deuxième décision, il retient que « l’un des assesseurs … n’y était en fait que lors du dépouillement ». Il en résulte que ces décisions ne peuvent pas être utilement invoquées en l’espèce.

De tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours en réformation introduit comme étant non fondé.

La loi prévoyant un recours en réformation en la matière, le recours subsidiaire en annulation est irrecevable.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

vidant le jugement du 13 février 2004 (n° 17480 du rôle) ;

déclare le recours en réformation recevable ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 31 mars 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert,premier juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17480a
Date de la décision : 31/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-31;17480a ?

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