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29/03/2004 | LUXEMBOURG | N°16977

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 mars 2004, 16977


Numéro 16977 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 septembre 2003 Audience publique du 29 mars 2004 Recours formé par Madame …, … contre un bulletin d’impôt sur le revenu et un bulletin de calcul de la contribution dépendance émis par le bureau d'imposition Luxembourg 3 en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16977 du rôle, déposée le 16 septembre 2003 au gref

fe du tribunal administratif par Maître Jacques WOLTER, avocat à la Cour, inscrit au table...

Numéro 16977 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 septembre 2003 Audience publique du 29 mars 2004 Recours formé par Madame …, … contre un bulletin d’impôt sur le revenu et un bulletin de calcul de la contribution dépendance émis par le bureau d'imposition Luxembourg 3 en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 16977 du rôle, déposée le 16 septembre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Jacques WOLTER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2000 et d’un bulletin de calcul de la contribution dépendance pour ladite année 2000, tous les deux émis à son égard le 7 novembre 2002 par le bureau d'imposition Luxembourg 3;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 décembre 2003;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Jacques WOLTER en sa plaidoirie à l’audience publique du 18 février 2004.

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Par acte notarié du 20 juin 2000, Madame …, préqualifiée, son frère P. … et sa sœur M.-A. … cédèrent deux parcelles sises dans la commune de X., section C de X., au lieu-dit « … » :

 une parcelle n° … d’une contenance de 15,1 ares constituant la propriété indivise de Madame … ensemble avec sa sœur et son frère suite au décès de leur mère,  une parcelle n° … d’une contenance de 14,4 ares constituant la propriété individuelle de Madame … pour l’avoir reçue par voie de donation de la part de ses parents.

Le dit acte notarié renseigna un prix de vente global de 12.100.000 LUF pour ces deux parcelles, mais n’indiqua aucune ventilation de ce prix entre les deux parcelles et les parties venderesses.

En date du 7 novembre 2002, le bureau d'imposition Luxembourg 3 de la section des personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes émit à l’égard de Madame … un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2000 à travers lequel il imputa à cette dernière un revenu net divers à hauteur de 3.834.441 LUF provenant de la vente de la parcelle de 14,4 ares constituant sa propriété individuelle. Le bureau d'imposition détermina ce revenu divers en se fondant sur la propriété de Madame … de 14,40 ares sur une surface vendue totale de 29,50 ares et un prix de réalisation global de 12.100.000 LUF, de manière à retenir dans son chef, sur base d’une ventilation en fonction de la surface, un prix de réalisation de (14,4/29,5 x 12.100.000 =) 5.906.441 LUF correspondant, après déduction d’un prix d’acquisition forfaitaire de 72.000 LUF et d’un abattement de 2.000.000 LUF, à un revenu net divers de 3.834.441 LUF. Le bulletin de calcul de la contribution dépendance pour la même année 2000 et émis par le dit bureau d'imposition à la même date a été basé sur cette détermination du revenu imposable.

Madame … formula à l’encontre de ces bulletins en date du 9 décembre 2002 une réclamation orale qu’elle réitéra par courrier du 8 janvier 2003 au préposé du bureau d'imposition Luxembourg 3.

A défaut de réponse face à cette réclamation, Madame … a fait introduire, par requête déposée le 16 septembre 2003, un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des dits bulletins de l’impôt sur le revenu et de calcul de la contribution dépendance émis le 7 novembre 2002.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8 (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre un bulletin de l’impôt sur le revenu en l’absence d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre ce même bulletin. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours principal en réformation en ce qu’il entend déférer au tribunal le bulletin de l’impôt sur le revenu prévisé du 7 novembre 2002. Etant donné que l’article 378 alinéa 6 du code des assurances sociales dispose que « les voies de recours en matière d'impôts directs s'appliquent à l'encontre des bases d'imposition des bulletins d'impôt servant au calcul de la contribution dépendance au sens du présent article », le tribunal est également compétent pour connaître du recours en réformation dans la mesure où il est dirigé contre le bulletin de calcul de la contribution dépendance du 7 novembre 2002. Le recours en réformation à l’encontre de ces deux bulletins est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi. Le recours subsidiaire en annulation est en conséquence irrecevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse estime que l’évaluation opérée par le bureau d'imposition serait surfaite et qu’elle n’aurait touché du chef de la vente du terrain en question que le montant de 550.000 LUF.

Elle expose avoir reçu le terrain de 14,4 ares lui ayant appartenu par voie de donation de ses parents le 30 janvier 1990 et que ce terrain serait adjaçant à un terrain de 15,1 ares, dont elle-même aurait été propriétaire indivis ensemble avec sa sœur et son frère suite au décès de leur mère. En l’an 2000, ils auraient décidé de vendre le terrain en indivision ensemble avec son terrain propre de 14,4 ares « afin d’optimiser le prix de vente » et un acte notarié de vente unique aurait été signé le 20 juin 2000 pour acter la vente des deux terrains pour un prix total de 12.100.000 LUF non autrement ventilé par rapport aux dits terrains. La demanderesse ajoute que la volonté des parties relative à la répartition du prix de vente résulterait des instructions données le 18 juin 2000 par elle ensemble avec ses frère et sœur au notaire instrumentant d’après lesquelles chacun d’eux toucherait le montant de 3.850.000 LUF du chef de sa part indivise dans le terrain de 15,1 ares, de manière que le prix total de ce terrain s’élèverait à (3 x 3.850.000 =) 11.550.000 LUF et que le prix attribué au terrain propre de la demanderesse serait de (12.100.000 – 11.550.000 =) 550.000 LUF. Elle conclut que le produit total par elle perçu du chef de la vente des deux terrains reviendrait à 4.400.000 LUF.

La demanderesse est d’avis que l’estimation du bureau d'imposition en fonction de la surface de chacun des terrains ne saurait être retenue dès lors qu’elle serait en opposition avec la volonté exprimée à travers les instructions susvisées du 18 juin 2000 et qu’elle ne tiendrait pas compte des différences de valeur entre les dits terrains dues à leur situation spécifique. Elle affirme que le prix de vente modeste de son terrain de 14,4 ares serait approprié, étant donné qu’il serait très long et relativement étroit, de manière à être inconstructible individuellement, et qu’il aurait déjà été évalué lors du partage du ménage avec son ex-époux en 1998 à une valeur de 200.000 LUF pour les besoins du partage.

Le délégué du gouvernement rétorque que le bureau d'imposition aurait fait une juste application de la législation applicable à la situation de la demanderesse et que le fait que les deux parcelles aient été vendues en bloc et une différence de valeur entre elles ne saurait influer sur la plus-value prise en compte par le bulletin d’impôt litigieux. Le délégué du gouvernement soulève encore la question de savoir pourquoi, en admettant la réalité des affirmations de la demanderesse, le notaire instrumentaire n’a pas procédé à une vente séparée des deux parcelles, sinon n’a pas retenu des prix différents pour chacune des deux parcelles. Il conclut que « les arguments de la requérante en vue de retenir une plus-value moindre ne sont pas compréhensibles et en tout état de cause non pertinents ».

Il est constant en cause que la demanderesse n’avait pas indiqué le produit par elle perçu du chef de la vente des parcelles en cause dans le cadre de sa déclaration d’impôt pour l’année 2000 soumise au bureau d'imposition le 27 décembre 2001 et qu’elle n’avait pas non plus soumis au bureau d'imposition l’instruction du 18 juin 2000 à l’adresse du notaire ayant acté la vente du 20 juin 2000 concernant la répartition du prix de vente desdites parcelles.

A défaut donc d’éléments spécifiques mis à sa disposition par la demanderesse, le bureau d'imposition pouvait valablement procéder à une ventilation du prix global de vente renseigné dans l’acte notarié du 20 juin 2000 selon la méthode usuelle de répartition d’après les surfaces respectives des parcelles cédées et dégager dans le chef de la demanderesse une plus-value taxée au montant résultant de cette ventilation tel que renseigné par le bulletin d’impôt déféré du 7 novembre 2002.

Ceci étant, il n’en reste pas moins, tel qu’il se dégage des éléments du dossier soumis au tribunal, que par la suite, dans le cadre de sa réclamation du 8 janvier 2003 et de son recours contentieux sous analyse la demanderesse a fait état de pièces censées documenter la répartition réelle du prix de vente des parcelles en cause. Elle a ainsi déposé l’instruction du 18 juin 2000 au notaire instrumentant signée par elle-même et ses frère et sœur et indiquant au notaire que ces derniers devraient se voir virer respectivement le montant de 3.850.000 LUF sur leurs comptes bancaires et que la demanderesse devrait percevoir le montant de 4.400.000 LUF. Un décompte dressé le 9 juillet 2003 par le notaire instrumentaire et une copie d’un extrait bancaire confirment cette répartition du produit de la vente des deux parcelles en cause et la réception de la somme de 4.400.000 LUF par la demanderesse du chef de cette vente.

Il ne ressort d’aucun élément du dossier et le délégué du gouvernement ne soutient pas que la demanderesse aurait perçu d’autres recettes du chef de la cession de son terrain ou que la répartition des valeurs et prix de cessions entre les deux parcelles en cause serait fictive ou abusive. En outre, un contribuable est en principe libre de céder ses biens au prix qu’il entend fixer.

Le tribunal est partant amené à constater, sur base des éléments de fait lui soumis, que la demanderesse a perçu du chef de la vente de la parcelle de 14,4 ares lui appartenant un prix effectif de 550.000 LUF.

L’article 103 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR) définit le revenu net d’une catégorie de revenu comme étant « l’excédent des recettes sur les frais d’obtention » et l’article 104 (1) LIR définit comme recettes « tous les biens et avantages, tant en espèces qu’en nature, mis à la disposition du contribuable dans le cadre de l’une des catégories de revenus nets mentionnées aux numéros 4 à 8 de l’article 10 ».

Au bénéfice des éléments de fait ci-dessus dégagés, le tribunal se doit de conclure que le montant de 550.000 LUF viré sur le compte bancaire de la demanderesse constitue la seule recette mise à sa disposition en relation avec la vente de la parcelle de 14,4 ares et que c’est partant à tort que le bureau d'imposition lui a imputé de ce même chef un produit de cession de 5.906.441 LUF, entraînant que le bulletin d’impôt sur le revenu et à sa suite le bulletin de calcul de la contribution dépendance déférés encourent la réformation dans cette mesure.

Force est néanmoins de préciser que cette conclusion reste sans incidence sur l’imposabilité de la part à hauteur de 3.850.000 LUF perçue, d’après les éléments dégagés en cause, par la demanderesse en raison de la vente de sa part indivise de la parcelle voisine de 15,1 ares.

Il découle de l’ensemble des développements ci-avant que les bulletins de l’impôt sur le revenu et de calcul de la contribution dépendance encourent la réformation en ce sens que le prix de réalisation de la parcelle n° 41/2340 en cause s’élève à 550.000 LUF et non pas à 5.906.441 LUF.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, reçoit le recours principal en réformation en la forme, au fond, le dit justifié, partant, par réformation des bulletins de l’impôt sur le revenu et de calcul de la contribution dépendance, dit que le prix de réalisation de la parcelle n° 41/2340 en cause s’élève à 550.000 LUF et non pas à 5.906.441 LUF, renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes en vue de sa transmission au bureau d'imposition compétent en prosécution de cause, condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, M. SPIELMANN, juge, et lu à l’audience publique du 29 mars 2004 par le vice-président en présence de M.

LEGILLE, greffier.

LEGILLE CAMPILL 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 16977
Date de la décision : 29/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-29;16977 ?

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