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22/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17164

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 mars 2004, 17164


Tribunal administratif N° 17164 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 novembre 2003 Audience publique du 22 mars 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17164 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 novembre 2003 par Maître Laurent BACKES, avocat à la Cour, assisté de Maître Clara MARHUENDA, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … Ã

  Prizren (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeu...

Tribunal administratif N° 17164 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 novembre 2003 Audience publique du 22 mars 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17164 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 novembre 2003 par Maître Laurent BACKES, avocat à la Cour, assisté de Maître Clara MARHUENDA, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Prizren (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 21 août 2003, notifiée par lettre recommandé du 26 août 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du 27 octobre 2003 prise par ledit ministre suite à un recours gracieux introduit par le demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 février 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er mars 2004 par Maître Laurent BACKES pour compte du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Clara MARHUENDA et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

Le 21 mai 2003, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 18 juin 2003, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 21 août 2003, lui notifiée par courrier recommandé le 26 août 2003, le ministre de la Justice l’informa que sa demande avait été refusée. Cette décision est libellée comme suit :

« Il résulte de vos déclarations que vous auriez quitté le Kosovo en 1994 pour éviter d’être appelé à l’armée yougoslave et pour devoir ainsi participer à la guerre en Bosnie. Vous vous seriez rendu tout seul en Allemagne où vous auriez déposé une demande d’asile. Vous ajoutez également avoir eu en 2001 une convocation pour joindre l’armée yougoslave, mais que par la suite vous n’auriez plus rien eu. Vous seriez resté jusqu’en août 2000 à Berlin, votre Duldung ayant expiré en mai 2000 et vous seriez retourné au Kosovo.

En août 2000, vous ne seriez resté que 24 heures au Kosovo, parce que vous auriez eu des menaces des personnes occupant entre temps votre maison parentale, vos parents ayant quitté le Kosovo pour venir au Luxembourg. Ces occupants et d’autres personnes vous auraient injurié et vous auraient menacé de quitter le Kosovo. Vous leur auriez parlé en serbe et on vous aurait accusé d’être un collaborateur des serbes et d’avoir tué des albanais durant le conflit du Kosovo. Vous auriez immédiatement pris la fuite et vous vous seriez rendu à Rozaje au Monténégro où vous seriez resté pendant 2 mois.

Vous auriez quitté le Monténégro en octobre 2000, parce que vous y seriez sans travail. Vous vous seriez alors rendu à Sarajevo dans l’espoir de retourner en Allemagne, mais vous y seriez resté pendant 2 ans et demi. Vous dites y avoir été logé et nourri en échange de votre travail au noir. Vous précisez que votre carte d’identité aurait été volée à Sarajevo et que vous ne vous seriez jamais déclaré auprès des autorités bosniennes. Vous auriez quitté Sarajevo en mai 2003 parce que vous ne voudriez plus vivre seul, vous seriez venu rejoindre votre famille au Luxemburg. Vous n’auriez plus supporté votre vie très dure à Sarajevo. Vous dites également ne pas pouvoir retourner au Kosovo parce que vous y seriez sans liberté et sans droits, les minorités n’y seraient pas la bienvenue (sic).

Enfin, vous admettez ne pas être membre d’un parti politique.

En ce qui concerne votre situation au Kosovo et plus particulièrement celle des musulmans slaves, je souligne que la reconnaissance du statut de réfugié politique n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile, qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu’elle laisse supposer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il ne résulte pas de vos allégations que vous risquiez ou risquez d’être persécuté dans votre pays d’origine pour un des motifs énumérés par l’article 1er, A., §2 de la Convention de Genève. Le fait d’avoir été insulté et menacé est certes condamnable, mais ne saurait suffire et n’est pas d’une gravité telle pour fonder à lui seul une demande en obtention du statut de réfugié politique. Votre demande traduit plutôt l’expression d’un sentiment général d’insécurité. Or, un sentiment général d’insécurité ne constitue pas une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève. Le fait que votre maison serait occupée par d’autres personnes ne pourra fonder une demande en obtention du statut de réfugié, car il ne rentre pas dans le cadre d’un motif de persécution prévu par la Convention de Genève de 1951. A cela s’ajoute que des personnes privées ne sauraient être considérées comme agents de persécution au sens de la prédite Convention.

Vous auriez quitté le Kosovo en 1994 pour éviter de joindre l’armée yougoslave et vous dites y avoir été convoqué en 2001. Or, l’insoumission, même à la supposer établie dans votre cas, car vous ne fournissez aucune preuve, est insuffisante pour constituer une crainte justifiée de persécution au sens de l’article 1er, A., §2 de la Convention de Genève de 1951. De même, la seule crainte de peines du chef d’insoumission ne constitue pas un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié puisqu’elle ne saurait, à elle seule, fonder une crainte de persécution au sens de la prédite Convention. En outre, il n’est pas établi que l’appartenance à l’armée yougoslave imposerait à l’heure actuelle la participation à des opérations militaires que des raisons de conscience valables justifieraient de refuser. Vous ajoutez vous même que les autorités yougoslaves auraient laissé tomber « l’affaire » parce qu’elle auraient entendu que vous seriez en Allemagne.

Enfin, il faut souligner qu’une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, est installée au Kosovo pour assurer la coexistence pacifique entre les différentes communautés et une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, a été mise en place. La situation des minorités ethniques du Kosovo s’est améliorée par rapport à l’année 1999. Les élections municipales du 28 octobre 2000 se sont conclues avec la victoire des partis modérés et une défaite des partis extrémistes. A cela s’ajoute qu’à la suite des élections parlementaires du 17 novembre 2001 les minorités nationales du Kosovo, à savoir les Roms, les Bosniaques, les Turcs et autres se sont vues attribuer quelques sièges leur assurant une représentation au sein du parlement du Kosovo. Ainsi une persécution systématique de minorités ethniques est actuellement à exclure.

Concernant la situation plus précise des bosniaques il ressort qu’actuellement ceux-ci ont, non seulement le droit à la participation et à la représentation politique, mais encore accès à l’enseignement, aux soins de santé et aux avantages sociaux, ce qui fait qu’une discrimination à leur égard ne saurait pas être retenue pour fonder une persécution au sens de la Convention de Genève. A cela s’ajoute qu’il ressort du rapport de l’UNHCR de janvier 2003 sur la situation des minorités au Kosovo qu’en règle générale les bosniaques ne doivent plus craindre des attaques directes contre leur sécurité. Ledit rapport souligne que la situation actuelle des bochniaques de Prizren s’est nettement améliorée depuis 1999 et 2000 et que depuis mars 2002 aucun incident à leur encontre n’a été enregistré. Les bochniaques n’y expriment pas d’inquiétude quant à leur sécurité physique et la crainte d’attaques liées à leur ethnie a largement disparu. L’usage de la langue bosniaque y est considéré comme normal et ne pose pas de problème dans les relations interethniques.

Il faut également souligner que vous avez pu bénéficier en août 2000 de la possibilité de fuite interne au Monténégro.

En ce qui concerne votre situation à Sarajevo, vous n’y faites pas état de persécution. Le fait que vous y auriez vécu tout seul, sans être déclaré auprès des autorités bosniaques et avoir dû y travailler très dur ne saura fonder une demande en obtention du statut de réfugié politique parce qu’il ne rentre pas dans le cadre d’un motif de persécution prévu par la Convention de Genève de 1951.

Par conséquent vous n’alléguez aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Ainsi une crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un groupe social n’est pas établie.

Votre demande en obtention du statut de réfugié est dès lors refusée comme non fondée au sens de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève. » Suite à un recours gracieux formulé par le mandataire de Monsieur … suivant courrier du 15 septembre 2003 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre de la Justice confirma le 27 octobre 2003 sa décision initiale du 21 août 2003.

Le 14 novembre 2003, Monsieur … a introduit un recours en réformation contre les décisions précitées des 21 août et 27 octobre 2003.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le recours en réformation, ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’il serait originaire de la ville de Prizren au Kosovo et qu’il aurait séjourné entre 1994 et 2000 en Allemagne, époque à laquelle il aurait reçu une convocation pour l’armée, de sorte qu’il serait à considérer comme insoumis. A son retour au Kosovo, il aurait dû constater que la maison de ses parents avait été « confisquée » par des Albanais pendant la guerre du Kosovo qui l’occuperaient toujours à l’heure actuelle. Pour le surplus, il se serait trouvé confronté à des personnes armées qui l’auraient insulté et menacé en raison de son appartenance à la minorité des Bochniaques. Le demandeur expose encore que les forces installées au Kosovo en vue de garantir la sécurité publique ne seraient pas en mesure de le protéger, de sorte qu’il se serait résigné à quitter le Kosovo dans une première phase pour Rozaje au Monténégro et ensuite pour Sarajevo en Bosnie-Herzégovine, ville qu’il aurait quittée au courant du mois de mai 2003 pour rejoindre des membres de sa famille vivant au Luxembourg. Dans ce contexte, le demandeur estime que « l’unité de la famille » et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme devraient être pris en compte pour la reconnaissance du statut de réfugié, étant donné qu’il n’aurait plus aucune famille à laquelle se rattacher ni au Kosovo, ni en Bosnie, ni au Monténégro.

En substance, il reproche au ministre de la Justice d’avoir fait une mauvaise application de la Convention de Genève et d’avoir méconnu la gravité des motifs de persécution qu’il a mis en avant pour justifier la reconnaissance du statut de réfugié.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte qu’il serait à débouter de son recours.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition le 18 juin 2003, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, en ce qui concerne la situation du demandeur en tant que membre de la minorité « bochniaque » du Kosovo, il échet de relever que s’il est vrai que la situation générale des membres de cette minorité est difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à subir des insultes, voire d’autres discriminations ou agressions par des groupements d’Albanais, elle n’est cependant pas telle que tout membre de la minorité ethnique visée serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève, étant entendu qu’une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur d’asile risque de subir des persécutions.

Or, en l’espèce, les faits allégués par le demandeur relativement à des agressions et des menaces de mort qu’il aurait dû subir, à les supposer vrais, constituent certainement des pratiques condamnables, mais en l’espèce, ne dénotent pas une gravité telle qu’ils établissent à l’heure actuelle un risque de persécution dans le chef du demandeur au point que sa vie lui serait intolérable dans son pays d’origine.

Dans ce contexte, il convient de rappeler qu’en la présente matière, le tribunal est appelé, dans le cadre d’un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l’opportunité des décisions querellées en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

En ce qui concerne cette situation actuelle, il est constant en cause qu’une force armée internationale agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée sur ce territoire, de même qu’une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, y a été mise en place.

A cet égard, il y a lieu de constater que suivant un rapport datant de janvier 2003 de l’UNHCR sur la situation des minorités au Kosovo, la situation de sécurité générale des « Bochniaques » du Kosovo est restée stable et n’a pas été marquée par des incidents d’une violence sérieuse (« the general security situation of Kosovo Bosniaques remains stable with no incidents of serious violence»), de même qu’il est relevé dans ledit rapport que dans la période entre avril et octobre 2002, la situation des minorités au Kosovo au regard de leur sécurité a continué à s’améliorer, certes non pas de manière uniforme sur tout le territoire du Kosovo, mais de manière plus ou moins accélérée suivant les différentes régions passées sous revue, de sorte que les considérations avancées dans ledit rapport au sujet de l’organisation de retours forcés au Kosovo ne permettent pas pour autant de conclure que la situation générale des « Bochniaques » au Kosovo serait à l’heure actuelle grave au point que la seule appartenance à ladite minorité justifierait l’octroi du statut de réfugié dans leur chef (cf. trib. adm. 25 septembre 2003, n°16090 du rôle).

D’autre part, les actes concrets de persécution de la part de groupements d’Albanais invoqués par le demandeur s’analysent en une persécution émanant non pas de l’Etat, mais d’un groupe de la population et ne sauraient dès lors être reconnus comme motif d’octroi du statut de réfugié que si la personne en cause ne bénéficie pas de la protection des autorités de son pays d’origine pour l’une des cinq causes visées à l’article 1er de la Convention de Genève. S’y ajoute que, s’agissant d’actes émanant de certains groupements de la population, force est de relever que la notion de protection de la part du pays d’origine de ses habitants contre des agissements de groupes de la population n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission matérielle d’un acte criminel. En effet, il y a lieu de prendre en compte une persécution commise par des tiers uniquement en cas de défaut de protection dont l’existence doit être mise suffisamment en évidence par le demandeur d’asile (cf. Jean-Yves Carlier : Qu’est ce qu’un réfugié ?, Bruylant, 1998, p.113 nos 73-s).

Si le demandeur tend en l’espèce certes à décrire une situation d’insécurité et de conflit généralisé dans son pays d’origine, il n’a soumis aucun indice concret relativement à l’incapacité actuelle des autorités compétentes de lui fournir une protection adéquate, voire allégué une démarche concrète en vue d’obtenir la protection de la part des autorités en place. Il en résulte que le demandeur reste en défaut d’établir l’incapacité des autorités en place de lui assurer une protection adéquate.

Il y a encore lieu de préciser que les risques allégués par le demandeur se cristallisent essentiellement autour de la situation au Kosovo et que le demandeur reste en défaut d’établir qu’il ne peut pas trouver refuge, à l’heure actuelle, dans une autre partie de son pays d’origine, notamment au Monténégro, où il a séjourné suite à son départ du Kosovo, étant entendu que la Convention de Genève vise le pays d’origine ou de nationalité du demandeur d’asile sans restriction territoriale et que le défaut d’établir les raisons suffisantes pour lesquelles un demandeur d’asile ne serait pas en mesure de s’installer dans une autre région de son pays d’origine et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne devant être pris en compte pour refuser la reconnaissance du statut de réfugié (cf. trib. adm. 10 janvier 2001, n° 12240 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Etrangers, n° 45 et autres références y citées).

Pour le surplus, il convient d’ajouter que les prétendus risques de persécution de la part des autorités serbes en raison de l’insoumission de Monsieur … manquent de fondement dans la mesure où il se dégage des considérations qui précèdent qu’actuellement, le Kosovo ne se trouve pas sous leur autorité, mais sous l’autorité d’une force armée internationale et d’une administration civile, agissant sous l’égide des Nations Unies.

Il résulte de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état, mis à part des problèmes économiques qui ne sauraient à eux seuls justifier la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève, d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Finalement, l’invocation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas pertinente en l’espèce, étant donné que les décisions entreprises ne contiennent pas une mesure d’éloignement du territoire national à l’égard du demandeur.

Pour le surplus, le simple fait de tomber dans le champ d’application de cet instrument juridique international n’autorise pas une personne à se voir reconnaître le statut de réfugié. L’examen du statut de réfugié fait l’objet d’une appréciation au cas par cas à la lumière des normes juridiques existantes régissant les conditions d’octroi du droit d’asile, à savoir la Convention de Genève.

Il résulte des développements qui précèdent que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

donne acte au demandeur qu’il bénéficie de l’assistance judiciaire ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur au frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 22 mars 2004 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17164
Date de la décision : 22/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-22;17164 ?

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