La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17448C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 mars 2004, 17448C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17448 C inscrit le 12 janvier 2004

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

-----------

Audience publique du 18 mars 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 10 décembre 2003, n° 16736 du rôle)

-----------------------------------------------------------------------------------------------------

------------

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 12 janvier ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17448 C inscrit le 12 janvier 2004

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

-----------

Audience publique du 18 mars 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 10 décembre 2003, n° 16736 du rôle)

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 12 janvier 2004 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom d’…, né le … à …(Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 10 décembre 2003 en matière de statut de réfugié politique, à la requête de l’actuel appelant contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 janvier 2004 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Louis Tinti, en remplacement de Maître Ardavan Fatholahzadeh, ainsi que la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbrück en leurs observations orales.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Par requête inscrite sous le numéro 16736 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 juillet 2003 par Maître Ardavan Fatholahazdeh avocat à la Cour, …, né le … (Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 16 avril 2003, notifiée par lettre recommandée le 22 avril 2003, par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative du 10 juin 2003, rendue par le même ministre suite à un recours gracieux introduit par le demandeur.Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 10 décembre 2003, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 12 janvier 2004.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause, alors que son départ aurait été motivé par la volonté de chercher à éviter d’être confronté à de graves problèmes résultant notamment de la circonstance que certains individus cherchaient à le venger et le kidnapper en représailles de l’attitude de son oncle, ancien commandant de police au Kosovo.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 21 janvier 2004 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

Ils ont notamment souligné à juste titre que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition du 25 février 2003, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, concernant les persécutions commises par des tiers et non par les autorités étatiques, celles-ci ne sauraient être retenues que si les autorités étatiques tolèrent ces actes ou si elles sont incapables d’offrir une protection suffisante contre ces actes. Ce défaut de protection doit être mis suffisamment en évidence par le demandeur d’asile.

Par ailleurs, le demandeur fait état de sa crainte de subir des persécutions de la part d’Albanais du Kosovo en raison de son appartenance à la minorité des « goranais ».

Force est de constater à cet égard avec le tribunal administratif que s’il est vrai que la situation générale des membres de minorités ethniques au Kosovo, en l’espèce celle des « goranais », est difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à des discriminations, elle n’est cependant pas telle que tout membre de cette minorité ethnique serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève. Une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur d’asile risque de subir des persécutions.

Les premiers juges ont rappelé à juste raison qu’en la présente matière, saisie d’un recours en réformation, la juridiction administrative est appelée à examiner le bien-fondé et l’opportunité des décisions querellées à la lumière de la situation telle qu’elle se présente à l’heure actuelle 2 dans le pays de provenance du demandeur d’asile et non pas uniquement eu égard à la situation telle qu’elle existait à l’époque de son départ.

En ce qui concerne cette situation actuelle en l’espèce, il est constant en cause que, suite au départ de l’armée fédérale yougoslave et des forces de police dépendant des autorités serbes du Kosovo, une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée sur ce territoire, de même qu’une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, y a été mise en place.

A cet égard, il y a lieu de constater en plus que suivant un rapport récent de l’UNHCR sur la situation des minorités au Kosovo datant de janvier 2003, à l’exception de certaines zones de tension locales, la situation de sécurité générale des « goranais » du Kosovo est restée stable et n’a pas été marquée par des incidents d’une violence sérieuse, ceci spécialement dans les alentours du village de provenance du demandeur, situé dans la commune de Dragas (« Concerning the Goranis, with the exception of Gjilan/Gnjilane region, in particular Ferizaj/Urosevac, their security situation can likewise [par référence à la situation générale des bochniaques] be considered relatively stable particularly in the rural communities of Dragash municipality which has a high concentration of Gorani »), de même qu’il est relevé dans ledit rapport que dans la période entre avril et octobre 2002 la situation des minorités au Kosovo au regard de leur sécurité a continué à s’améliorer, certes non pas de manière uniforme sur tout le territoire du Kosovo, mais de manière plus ou moins accélérée suivant les différentes régions passées sous revue, de sorte que les considérations avancées dans ledit rapport au sujet de l’organisation de retours forcés au Kosovo ne permettent pas pour autant de conclure que la situation générale des « goranais » au Kosovo serait à l’heure actuelle grave au point que la seule appartenance à la dite minorité justifierait l’octroi du statut de réfugié dans leur chef.

C’est à juste titre que les premiers juges ont constaté que les craintes exprimées par l’appelant actuel s’analysent en substance en un sentiment général de peur, insuffisant à établir une crainte légitime de persécution au sens de la Convention de Genève, étant donné que le demandeur n’a pas démontré que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics en place ne soient pas capables de lui assurer un niveau de protection suffisant, étant entendu qu’il n’a pas fait état de l’un quelconque fait concret qui serait de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part des autorités en place.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef de sorte que le jugement du 10 décembre 2003 est à confirmer.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 12 janvier 2004, le dit non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement du 10 décembre 2003, 3 condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17448C
Date de la décision : 18/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-18;17448c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award