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17/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17102

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 mars 2004, 17102


Tribunal administratif N° 17102 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 octobre 2003 Audience publique du 17 mars 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre un bulletin d’impôt émis par le bureau d’imposition Luxembourg I de la section personnes physiques de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro du rôle 17102, déposée le 29 octobre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avoc

at inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, d...

Tribunal administratif N° 17102 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 octobre 2003 Audience publique du 17 mars 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre un bulletin d’impôt émis par le bureau d’imposition Luxembourg I de la section personnes physiques de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro du rôle 17102, déposée le 29 octobre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avocat inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’un bulletin de l'impôt sur le revenu du 11 novembre 1999 émis par le bureau d'imposition Luxembourg I de la section personnes physiques de l’administration des Contributions directes, la réclamation introduite le 14 février 2000 au nom de ce dernier étant restée sans réponse de la part du directeur de l’administration des Contributions directes;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 janvier 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin déféré;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Alain STEICHEN, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mars 2004 .

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Monsieur … déclara, dans le cadre de sa déclaration pour l'impôt sur le revenu de l’année 1992, le montant de LUF 1.138.277.- comme perte d’exploitation de l’année 1991 déductible en tant que dépense spéciale du total des revenus nets ajustés.

Par bulletin de l'impôt sur le revenu pour l’année 1992 du 8 février 1996, le bureau d'imposition Luxembourg I refusa la déduction de cette perte d’exploitation au motif que « le report de pertes ne peut pas être accordé en l’absence d’une comptabilité régulière prescrite par l’article 114 LIR y relatif ».

Par courrier de son mandataire du 6 mai 1996, Monsieur … réclama devant le directeur de l’administration des Contributions directes contre ce bulletin d’impôt du 8 février 1996.

En l’absence de décision directoriale, Monsieur … introduisit à l’encontre dudit bulletin d’impôt ainsi critiqué un recours en réformation par requête déposée le 24 septembre 1998.

Par jugement du 5 mai 1999, n° 10922 du rôle, le tribunal administratif annula le bulletin litigieux pour non-observation des dispositions du paragraphe 205 (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et renvoya l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes.

Par acte déposé au greffe de la Cour administrative le 16 juin 1999, l’Etat, par l’intermédiaire de son délégué, releva appel à l’encontre du jugement précité du 5 mai 1999.

Le 11 novembre 1999, le bureau d'imposition Luxembourg I émit à l’attention de Monsieur … un bulletin de l’impôt pour l’année 1992 intitulé « rectification suivant jugement du tribunal administratif ».

Par arrêt du 14 décembre 1999, n° 11334C du rôle, la Cour administrative confirma le jugement entrepris et débouta l’Etat de son appel.

Monsieur … formula par l’intermédiaire de son mandataire une réclamation contre ce bulletin de l’impôt sur le revenu par lettre du 14 février 2000. A travers cette réclamation il contesta principalement la compétence du bureau d’imposition, dessaisi par l’effet de l’appel interjeté par l’Etat contre le jugement du 5 mai 1999.

A défaut de réaction lui parvenue de la part du directeur de l’Administration des Contributions directes, Monsieur … fit introduire le 29 octobre 2003 un recours en annulation sinon en réformation à l’encontre du bulletin de l’impôt sur le revenu au titre de l’année d’imposition 1992 émis le 11 novembre 1999.

Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision ( trib. adm. 4 décembre 1997, n° 10404 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Recours en réformation, n° 2, p.589, et autres références y citées ).

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 paragraphe 3, point 1, de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre une décision du directeur ayant tranché les mérites d’une réclamation contre un bulletin d’imposition.

Aux termes du prédit l’article 8 paragraphe 3, point 3, lorsqu’une réclamation au sens du § 228 AO a été introduite et qu’aucune décision définitive n’est intervenue dans le délai de six mois à partir de la demande, le réclamant peut considérer la réclamation comme rejetée et il peut interjeter recours devant le tribunal administratif contre la décision qui fait l’objet de la réclamation; dans ce cas le délai de recours de trois mois ne court pas.

Le tribunal administratif est dès lors compétent pour connaître du recours en réformation ; ce recours est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Il s’ensuit que le recours en annulation formulé à titre principal est irrecevable.

Le demandeur soulève l’incompétence du bureau d’imposition au vu de la saisine du tribunal administratif et ultérieurement de la Cour administrative du fait de la procédure de recours pré-contentieux et contentieux engagée : il fait plaider qu’au vu du changement d’organe appelé à statuer sur la question litigieuse, résultant du recours contentieux, le bureau d’imposition aurait été complètement dessaisi et par conséquent incompétent pour émettre le bulletin litigieux du 11 novembre 1999.

Le délégué du Gouvernement rejoint le demandeur en ce qu’il étaye son argumentation sur base de l’article 45 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et conclut également à l’incompétence du bureau d’imposition pour émettre le bulletin litigieux.

Aux termes de l’article article 45 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée « (…) pendant le délai et l’instance d’appel, il est sursis à l’exécution des jugements ayant annulé ou réformé des décisions attaquées ».

Il est constant en cause qu’à la date de l’émission du bulletin pris en exécution du jugement du 5 mai 1999, à savoir le 11 novembre 1999, l’appel n’avait pas encore été vidé, et la Cour administrative était encore saisie du litige, de sorte que le bureau d’imposition n’a pas valablement pu émettre un bulletin sur base d’un jugement faisant l’objet d’un recours devant la Cour.

Le tribunal administratif, encore qu'il soit saisi d'un recours en réformation, doit se borner à annuler une décision et à renvoyer l'affaire devant l'autorité administrative compétente si la décision afférente a été prise par une autorité incompétente ( trib. adm.

14 janvier 2002, n° 13483 du rôle, confirmé par Cour adm. 28 mai 2002, n° 14586C du rôle, Pas. adm. 2003V° Recours en réformation, n° 9, p.591).

En application des développements qui précèdent, il y a en conséquence lieu de renvoyer l’affaire au directeur de l’administration des Contributions directes en prosécution de cause.

Le demandeur réclame en outre l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500.- €, motivée d’une part par les délais lui imposés par l’attitude de l’administration, délais qui l’exposeraient à un préjudice matériel, et d’autre part par le fait que l’attitude de l’administration lui a également imposé de se pourvoir en justice sous l’assistance d’un avocat.

Le délégué du Gouvernement, compte tenu des circonstances spécifiques au présent litige, ne s’oppose pas au principe d’une indemnité de procédure, mais conteste le montant réclamé.

Le tribunal entend de prime abord relever que l’indemnité de procédure n’a pas pour objet de réparer un éventuel préjudice matériel subi par le demandeur, la question d’une telle réparation relevant par ailleurs exclusivement de la compétence des juridictions civiles.

Aux termes de l’article 30 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, « lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ».

Il est constant en cause que c’est l’attitude de la partie publique, en ne réagissant pas à la réclamation lui adressée par le demandeur, qui a amené ce dernier à introduire un recours contentieux.

S’il est vrai qu’aux termes de l’article 57 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, le demandeur aurait pu se pourvoir en justice sans l’assistance d’un avocat, cette faculté réservée aux administrés d'agir eux-mêmes devant le tribunal administratif ne constitue pas un empêchement à l'octroi d'une indemnité de procédure au cas où ceux-ci profitent de la faculté leur offerte par la loi de se faire représenter soit par un avocat, soit par un expert comptable ou un réviseur d'entreprises ( trib. adm. 23 septembre 1999, n° 10963 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Procédure contentieuse, XI Frais, n° 393, p. 576), d’autant plus lorsque, comme en l’espèce, l’assistance d’un avocat se justifie au vu de la nature purement juridique de la question procédurale, certes isolée, faisant l’objet principal du litige.

Par conséquent, au vu des circonstances particulières du présent litige, le tribunal est amené à considérer qu’il serait inéquitable de laisser à charge du demandeur l’intégralité des frais et honoraires non compris dans les dépens.

Compte tenu des éléments d’appréciation en possession du tribunal, des devoirs et du degré de difficulté de l’affaire, notamment au vu des moyens du délégué du Gouvernement rencontrant ceux du demandeur, ainsi que du montant réclamé, et au vu de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il y a lieu d’évaluer ex æquo et bono l’indemnité à allouer au demandeur à un montant de 500.- €.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme;

au fond le dit justifié;

partant annule le bulletin d’imposition déféré et renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes en vue de sa transmission au bureau d’imposition compétent en prosécution de cause ;

condamne l’Etat à payer au demandeur une indemnité de procédure d’un montant de 500.- € ;

le condamne également aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 mars 2004 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17102
Date de la décision : 17/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-17;17102 ?

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