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15/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17020

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 mars 2004, 17020


Tribunal administratif N° 17020 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er octobre 2003 Audience publique du 15 mars 2004

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Recours formé par Monsieur … contre deux décisions de l’Administration de l’Emploi en matière de contrat de travail

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Vu la requête inscrite sous le numéro 17020 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 1er octobre 2003 par Maître Mathias PONCIN, avocat à la Co

ur, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, ouvrier,...

Tribunal administratif N° 17020 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er octobre 2003 Audience publique du 15 mars 2004

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Recours formé par Monsieur … contre deux décisions de l’Administration de l’Emploi en matière de contrat de travail

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Vu la requête inscrite sous le numéro 17020 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 1er octobre 2003 par Maître Mathias PONCIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, ouvrier, demeurant à L-…, tendant à l’annulation sinon à la réformation d’une décision de l’Administration de l’Emploi du 26 mars 2003 ainsi que de la décision confirmative de la directrice de l’Administration de l’Emploi du 9 septembre 2003 rendue sur recours gracieux, refusant de l’admettre au bénéfice de la garantie des créances salariales par lui invoquées dans le cadre de la faillite de son employeur pour le montant de 3.096,48 euros représentant deux mois de salaires ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 décembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Mathias PONCIN et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Monsieur …, préqualifié, fut engagé en qualité de chauffeur par la société anonyme …., ayant été établie à L-…, à partir du 11 janvier 1999.

Par jugement du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, deuxième section, siégeant en matière commerciale, du 24 octobre 2001, la société anonyme ….

fut déclarée en état de faillite.

En date du 16 mai 2002, Monsieur … déposa une déclaration de créance pour demander son admission au passif superprivilégié de la prédite faillite à concurrence de 3.096,48 euros du chef de salaires des mois de novembre et décembre 2001 à raison de chaque fois 1.548,24 euros.

Suivant procès-verbal de vérification des créances du 22 novembre 2002, le demandeur fut admis au passif de la faillite …. à titre privilégié pour le montant ci-avant déclaré de 3.096,48 euros.

Par courrier du 19 mars 2003 adressé à l’Administration de l’Emploi, le curateur, Maître Bob PIRON, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, demanda le règlement de la garantie salariale légale conformément aux dispositions de l’article 46 (2) de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail pour le montant déclaré de 3.096,48 euros.

L’Administration de l’Emploi, agissant pour compte du fonds pour l’emploi, suivant décompte du 26 mars 2003, déclara liquider en faveur de Monsieur … le salaire du mois de novembre 2001, mois subséquent à la faillite, pour son montant brut de 1.548,24 euros engendrant un montant net de 1.335,49 euros.

Le recours gracieux, introduit en date du 9 juillet 2003 par le mandataire de Monsieur … à l’encontre du décompte du 26 mars 2003 en ce qu’il n’a pas accepté le montant total de la déclaration de créance, s’est soldé par une décision confirmative du 9 septembre 2003 de la directrice de l’Administration de l’Emploi.

Par requête déposée en date du 1er octobre 2003, Monsieur … a introduit un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision de l’Administration de l’Emploi du 26 mars 2003 précitée, ainsi que de la décision confirmative prise par la directrice de l’Administration de l’Emploi sur recours gracieux en date du 9 septembre 2003.

Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation contre les décisions litigieuses. En effet, comme l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif dispose qu’un recours en annulation n’est recevable qu’à l’égard des décisions non susceptibles d’un autre recours d’après les lois et règlements, l’existence d’une possibilité d’un recours en réformation rend irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

Etant donné que ni la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail ni une autre disposition légale ne prévoit un recours de pleine juridiction contre une décision concernant l’étendue de la garantie des créances salariales dans le cadre de la faillite de l’employeur, le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que la décision de l’Administration de l’Emploi déférée telle que confirmée par sa directrice méconnaîtrait l’article 30 de la susdite loi du 24 mai 1989. Il soutient plus particulièrement qu’il aurait droit à une indemnisation à concurrence de trois mois de salaire en vertu de l’article 30 (1) de la loi du 24 mai 1989 qui dispose que le salarié a droit en cas de faillite de l’employeur au salaire du mois de la survenance de la faillite, au salaire du mois subséquent ainsi qu’à la moitié du préavis légal. Le salaire du mois de la survenance de la faillite ayant déjà été payé par l’employeur, il n’aurait droit qu’à deux mois de salaire correspondant au salaire du mois subséquent à la faillite ainsi qu’à 50% du préavis légal qui serait dans son cas de deux mois. En prenant en compte la limite prévue par le même article 30 (1) in fine qui dispose que l’indemnité à allouer au salarié ne pourra pas excéder le montant des indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en cas de licenciement avec préavis, le demandeur soutient qu’il aurait également eu droit en cas de licenciement avec préavis au salaire du mois d’octobre ainsi qu’aux salaires du préavis légal qui serait de deux mois. Il en conclut qu’il aurait droit sans que le plafond de l’article 30 (1) in fine soit dépassé à trois mois de salaires.

Or, comme le premier mois avait déjà été payé par l’employeur, il n’aurait droit qu’à deux mois de salaires.

Le délégué du gouvernement fait valoir qu’il résulterait des dispositions de l’article 30 (1) de la loi du 24 mai 1989 que le demandeur aurait droit à une indemnité de rupture de deux mois de salaire, dont l’un avait été réglé par l’employeur et l’autre par le fonds pour l’emploi.

Selon l’article 30 (1) de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail, le salarié a droit, sauf en cas de continuation des affaires par le curateur :

« 1. au maintien des salaires ou traitements se rapportant au mois de la survenance de l’événement et au mois subséquent et 2. à l’attribution d’une indemnité égale à 50% des mensualités se rapportant au délai de préavis auquel le salarié aurait pu prétendre conformément aux dispositions de l’article 20 de la présente loi.

Les rémunérations et indemnités allouées au salarié conformément à l’alinéa qui précède ne peuvent toutefois excéder le montant des rémunérations et indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en cas de licenciement avec préavis. » En l’espèce, il est constant que le salaire du mois d’octobre, mois de la survenance de la faillite, a été payé par l’employeur. En vertu de l’article 30 (1) de loi du 24 mai 1989, le demandeur a encore droit au salaire du mois de novembre, le mois subséquent à la faillite, et au salaire du mois de décembre, 50% du préavis légal qui, vu son ancienneté de mois de cinq ans, est de deux mois.

Toutefois, le même article 30 (1) in fine prévoit que le montant des rémunérations auxquelles le salarié peut prétendre ne peut « (…) excéder le montant des rémunérations et indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en cas de licenciement avec préavis ». Vu son ancienneté de services qui est inférieure à cinq ans, le demandeur aurait pu prétendre en cas de licenciement avec préavis à deux mois de préavis.

La déclaration de créance du demandeur, laquelle porte sur les salaires des mois de novembre et décembre 2001, ne dépasse donc pas le plafond imposé par l’article 30 (1) in fine qui est, en l’espèce, de deux mois de salaires.

C’est donc à tort que l’Administration de l’Emploi n’a pas pris en compte le salaire du mois de décembre correspondant à la moitié du préavis légal.

Il suit de ce qui précède que les décisions déférées n’ayant pas pris en compte le montant réclamé de 1.548,24 euros (brut) du chef du salaire pour le mois de décembre 2001 encourent l’annulation pour violation de la loi.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule les décisions de l’Administration de l’Emploi et renvoie l’affaire devant l’Administration de l’Emploi ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président M. Spielmann, juge Mme Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 15 mars 2004 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17020
Date de la décision : 15/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-03-15;17020 ?

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