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19/02/2004 | LUXEMBOURG | N°17310C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 février 2004, 17310C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17310 C inscrit le 15 décembre 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 19 FEVRIER 2004 Recours formé par les époux … et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris du 17 novembre 2003, no 16744C du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17310 C inscrit le 15 décembre 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 19 FEVRIER 2004 Recours formé par les époux … et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris du 17 novembre 2003, no 16744C du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 2003 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de …, né le …(Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro) et son épouse …, née le …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leur enfant mineur …, tous de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 19 novembre 2003 en matière de statut de réfugié politique, à la requête des actuels appelants contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 janvier 2004 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh et le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 16744 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 juillet 2003 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, …, né le … (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro) et son épouse …, née le …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leur enfant mineur …, tous de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, ont demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 8 avril 2003, notifiée le 14 avril 2003, par laquelle il n’a pas été fait droit à leur demande en reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative du 10 juin 2003, rendue par le même ministre suite à un recours gracieux introduit par les demandeurs.

Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 17 novembre 2003, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 15 décembre 2003 dans laquelle les appelants reprochent aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause, alors qu’en tant que minorité vulnérable dont la présence serait très mal acceptée par la majorité albanaise ils estiment que leurs vies seraient toujours menacées en cas de retour dans leur pays d’origine.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 9 janvier 2004 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

Ils ont notamment décidé à juste titre que l’examen des déclarations faites par les demandeurs lors de leurs auditions respectives du 5 février 2003, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, les persécutions commises par des tiers et non par les autorités étatiques ne sauraient être retenues que si les autorités étatiques tolèrent ces actes ou si elles sont incapables d’offrir une protection suffisante contre ces actes. Ce défaut de protection doit être mis suffisamment en évidence par les demandeurs d’asile.

En l’espèce, les appelants actuels font état de leur crainte de subir des persécutions de la part d’Albanais du Kosovo en raison de leur appartenance à la minorité des « goranais ». Force est de constater à cet égard que s’il est vrai que la situation générale des membres de minorités ethniques au Kosovo, en l’espèce celle des « goranais », est difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à des discriminations, elle n’est cependant pas telle que tout membre de cette minorité ethnique serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève. Une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considérés individuellement et concrètement, les demandeurs d’asile risquent de subir des persécutions.

Il est constant en cause que, suite au départ de l’armée fédérale yougoslave et des forces de police dépendant des autorités serbes du Kosovo, une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée sur ce territoire, de même qu’une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, y a été mise en place.

A cet égard, il y a lieu de constater en plus que suivant un rapport récent de l’UNHCR sur la situation des minorités au Kosovo datant de janvier 2003, à l’exception de certaines zones de tension locales, la situation de sécurité générale des « goranais » du Kosovo est restée stable 2 et n’a pas été marquée par des incidents d’une violence sérieuse, ceci spécialement dans les alentours de la ville de provenance des demandeurs (« Concerning the Goranis, with the exception of Gjilan/Gnjilane region, in particular Ferizaj/Urosevac, their security situation can likewise [par référence à la situation générale des bochniaques] be considered relatively stable particularly in the rural communities of Dragash municipality which has a high concentration of Gorani »), de même qu’il est relevé dans ledit rapport que dans la période entre avril et octobre 2002 la situation des minorités au Kosovo au regard de leur sécurité a continué à s’améliorer, certes non pas de manière uniforme sur tout le territoire du Kosovo, mais de manière plus ou moins accélérée suivant les différentes régions passées sous revue, de sorte que les considérations avancées dans ledit rapport au sujet de l’organisation de retours forcés au Kosovo ne permettent pas pour autant de conclure que la situation générale des « goranais » au Kosovo serait à l’heure actuelle grave au point que la seule appartenance à la dite minorité justifierait l’octroi du statut de réfugié dans leur chef.

Cette conclusion n’est pas ébranlée ni par les rapports d’Amnesty International, ni par le rapport 9896 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 9 septembre 2003, auxquels le mandataire des demandeurs s’est référé, étant donné que s’il y a bien eu pendant la guerre du Kosovo des disparitions non encore élucidées et, à l’heure actuelle, des discriminations ponctuelles et un climat de peur, d’insécurité et de manque de confiance, lesdits rapports ne décrivent cependant pas des actes de persécution susceptibles de rentrer dans le cadre de la Convention de Genève.

Force est dès lors de constater que les craintes exprimées par les appelants actuels s’analysent en substance en un sentiment général de peur, insuffisant à établir une crainte légitime de persécution au sens de la Convention de Genève, étant donné qu’ils n’ont pas démontré que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics en place ne soient pas capables de leur assurer un niveau de protection suffisant, étant entendu qu’ils n’ont pas fait état de l’un quelconque fait concret qui serait de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part des autorités en place.

L’acte d’appel n’est en l’occurrence pas fondé et le jugement entrepris est à confirmer par adoption de la motivation y amplement développée.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 15 décembre 2003, le dit non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement du 17 novembre 2003, condamne les appelants aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Christiane Diederich-Tournay, 1er conseiller 3 Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17310C
Date de la décision : 19/02/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-02-19;17310c ?

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